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21/07/2022 | FRANCE | N°19/01788

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 21 juillet 2022, 19/01788


N° RG 19/01788

N° Portalis DBVX-V-B7D-MHZZ









Décision du

Tribunal de Commerce de LYON

Au fond du 19 février 2019



RG : 2018j196









SAS MI PROM

Société SCCV LC2 - CHAMPAGNE 119



C/



[M]

SAS GROUPE VALENTIN





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRÊT DU 21 JUILLET 2022







APPELANTES

:



La société M.I.PROM, SAS

[Adresse 4]

[Localité 7]





La Société SCCV LC2 - CHAMPAGNE 119

[Adresse 4]

[Localité 7]



Représentées par Me Eric CESAR de la SELARL LEGI AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 664







INTIMÉS :



M. [I] [M]

né le 16 Février...

N° RG 19/01788

N° Portalis DBVX-V-B7D-MHZZ

Décision du

Tribunal de Commerce de LYON

Au fond du 19 février 2019

RG : 2018j196

SAS MI PROM

Société SCCV LC2 - CHAMPAGNE 119

C/

[M]

SAS GROUPE VALENTIN

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRÊT DU 21 JUILLET 2022

APPELANTES :

La société M.I.PROM, SAS

[Adresse 4]

[Localité 7]

La Société SCCV LC2 - CHAMPAGNE 119

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représentées par Me Eric CESAR de la SELARL LEGI AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 664

INTIMÉS :

M. [I] [M]

né le 16 Février 1954 à [Localité 11] (87)

[Adresse 5]

[Localité 8]

Société GROUPE VALENTIN

[Adresse 6]

[Localité 9]

Représentées par Me Valérie BERTHOZ de la SELARL VALERIE BERTHOZ, avocat au barreau de LYON, toque : 1113

******

Date de clôture de l'instruction : 18 Mai 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 01 Juin 2022

Date de mise à disposition : 21 Juillet 2022

Audience tenue par Catherine CLERC, président, et Marie CHATELAIN, vice-présidente placée, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,

assistés pendant les débats de Jessica LICTEVOUT, greffier

A l'audience, Marie CHATELAIN a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Catherine CLERC, conseiller faisant fonction de président

- Raphaële FAIVRE, vice-présidente placée

- Marie CHATELAIN, vice-présidente placée

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Catherine CLERC, conseiller faisant fonction de président, et par Tiffany JOUBARD, directrice des services de greffe judiciaires, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DU LITIGE

La SCCV Lyonnaise de Conseil et Construction (LC2), détenue à hauteur de 160 parts par la SAS Groupe Valentin et de 40 parts par M. [I] [M] a pour objet principal le conseil et de développement, la conception et la restructuration d'opérations immobilières, ainsi que la maîtrise d'ouvrage déléguée et la maîtrise d''uvre.

Par acte sous seing-privé du 22 juillet 2016, la société Groupe Valentin et M. [M] ont cédé l'intégralité des actions de la société LC2 pour le prix de 1 € à la SAS Mi Prom, la convention prévoyant des compléments de prix réglés sous condition de l'obtention par la société cédée pour les programmes immobiliers en cours d'un permis de construire purgé de tout recours, et du recouvrement par la société de deux créances déterminées. La convention prévoyait également des réductions éventuelles de ces compléments de prix en fonction de la réalisation d'évènements déterminés.

Par avenant du 17 mars 2017, la société Groupe Valentin et M. [M] ont convenu avec la société Mi Prom que les conditions du premier complément de prix étaient satisfaites et que son paiement, à hauteur de 120 000 € s'effectuerait en trois échéances, la première de 50 000 € à la signature dudit avenant, la deuxième de 40 000 € au plus tard le 31 juillet 2017 et la troisième de 30 000 € au plus tard le 30 septembre 2017.

Par mise en demeure du 19 mai 2017, la société Groupe Valentin et M. [M] ont sollicité de la société Mi Prom le règlement de la somme de 50 000 €, en application de l'avenant du 17 mars 2017.

La société Groupe Valentin et M. [M] ont saisi le juge des référés aux fins de voir condamner la société Mi Prom au paiement de la somme de 120 000 € et par ordonnance du 25 octobre 2017, cette juridiction a renvoyé les parties à se pourvoir au fond en considérant que les moyens de défense de la société Mi Prom constituaient une contestation sérieuse.

Par acte d'huissier de justice du 26 janvier 2018, la société Groupe Valentin et M. [M] ont fait assigner la société Mi Prom en paiement devant le tribunal de commerce de Lyon. La société LC2 est intervenue volontairement à l'instance.

Une tentative de médiation a été mise en 'uvre mais n'a pas abouti.

Par jugement du 19 février 2019, le tribunal de commerce de Lyon a :

pris acte de l'intervention volontaire de la société SCCV LC2 - Champagne 119,

écarté des débats les pièces n°5 à 8 de la société Groupe Valentin et de M. [M],

condamné la société Mi Prom à payer la somme de 120 000 € au titre du complément de prix prévu dans l'acte de cession, montant à repartir au prorata des parts cédées soit 96 000 € pour la société Groupe Valentin et 24 000 € pour M. [M],

jugé que le montant de 20 000 € versé à M. [M] constitue un acompte pour le dossier objet du complément de prix exigible et sera déduit de la somme de 24 000 € due par la société Mi Prom,

rejeté la demande de la société Mi Prom de réductibilité de la facture de 150 000 € HT adressée à la société Anahome le 12 décembre 2015 des compléments de prix à recevoir par la société Groupe Valentin et M. [M],

jugé qu'il est rapporté la preuve d'un passif fiscal et social d'un montant de 6 934,10 € dû par la société Groupe Valentin et M. [M] à la société Mi Prom,

en conséquence,

condamné solidairement M. [M] et la société Groupe Valentin à payer à la société Mi Prom la somme de 6 934,10 €,

ordonné à la société Mi Prom d'avoir à communiquer un exemplaire enregistré de l'avenant à l'acte de cession de parts du 22 juillet 2016 signé le 17 mars 2017 dans les 30 jours calendaires suivant la signification de la présente décision, et ce sous astreinte de 100 € par jour de retard,

condamné la société Mi Prom à verser la somme de 1 000 € à la société Groupe Valentin et la somme de 1 000 € a M. [M] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

rejeté la demande d'exécution provisoire du jugement,

dit les parties mal fondées quant au surplus de leurs demandes, fins et conclusions et les en a débouté respectivement,

condamné la société Mi Prom aux dépens de l'instance.

La société Mi Prom a interjeté appel du jugement par acte du 11 mars 2019.

Par conclusions du 6 décembre 2019, fondées sur les articles 1134 et suivants, 1162, 1382 2 du code civil dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, les sociétés Mi Prom et SSCV LC2 demandent à la cour de :

réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a condamné M. [M] et la société Groupe Valentin à leur verser la somme de 6 934,10 € au titre du passif fiscal et social

statuant à nouveau :

juger que la société Mi Prom justifie avoir avancé à la société LC2 depuis la cession, un montant total arrêté au 01 juillet 2017 à la somme de 124 942 € incluant l'avance payée à M. [M] pour la somme de 20 000 € au titre du projet 119 Avenue Lanessan,

juger que la société Groupe Valentin et M. [M] ont manqué de bonne foi de ce chef, de sorte que la société Mi Prom est fondée à leur réclamer la somme de 124 942 € à titre de dommages et intérêts,

juger que M. [M] ne saurait réclamer un complément de prix excédant la somme de 4 000 €,

juger que la facture comptabilisée par le gérant de la société LC2 dans les comptes au 31 décembre 2015 approuvés par les cédants, datée du 12 décembre 2015 mais éditée le 21 mars 2016, de 180 000 € TTC soit 150 000 € HT et tirée sur la société Anahome, ne pouvait pas être émise dès lors qu'il était contractuellement prévu que la facture de commission ne devait intervenir qu'à la date de réitération par acte authentique, événement qui ne s'est pas produit,

juger qu'il est rapporté la preuve que la société Anahome a, dès sa réception le 21 mars 2016 de cette facture, notifié une contestation de laquelle il résulte qu'elle refusait d'intégrer cette facture dans sa comptabilité en raison d'une contestation majeure,

juger qu'en application des principes comptables applicables et de la pérennité des méthodes comptables, le gérant devait en raison de la contestation notifiée, passer une provision pour créance douteuse à 100% ou encore émettre un avoir,

juger que le traitement comptable normal de la contestation notifiée par la société Anahome devait avoir pour effet de réduire d'une somme de 150 000 € les capitaux propres et le compte client certifié par les cédants, pour les ramener respectivement à 70 116 € et 150 000 € à la vue desquels la société Mi Prom n'aurait soit pas signé, soit pour des conditions minoré d'autant,

juger qu'en l'absence de traitement comptable de la facture adressée à Anahome, la société Mi Prom est en droit de se prévaloir des dispositions contractuelles de l'article 3.6 de l'acte de cession, selon lequel « tout passif non provisionné fiscal ou social, ou lié à la mise en cause de la responsabilité de la société au titre d'opérations immobilières conduites par la société antérieurement aux présentes cessions » et « toute demande d'avoir sur facture d'honoraires induisant un remboursement effectif par la société, valablement justifié, et à laquelle la société sera tenue de faire droit », viendra « en diminution des compléments de prix à payer aux cédants »,

juger que la somme de 150 000 € HT doit venir en diminution du complément de prix réclamé,

juger qu'il est rapporté la preuve du fait que la prise en charge par la société Mi Prom des nombreux frais et études supportés pour un montant de 119 032 € HT à la place de la société LC2, aurait dû conduire cette dernière société à afficher une situation déficitaire au 31 décembre 2015 si elle avait effectivement supporté ces dépenses tel que cela aurait dû être le cas,

juger que la société Groupe Valentin et M. [M] ont manqué de bonne foi de ce chef, de sorte qu'elles sont fondées à leur réclamer la somme de 119 032 € à titre de dommages et intérêts ;

en conséquence,

condamner in solidum la société Groupe Valentin et M. [M] à leur payer la somme de 273 974 € à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis,

juger qu'il n'incombe contractuellement pas à la société Mi Prom de procéder à l'enregistrement de l'avenant n°1,

juger qu'une telle formalité n'a ni intérêt ni justification, la société Groupe Valentin et M. [M] ne subissant aucun préjudice du fait de cette absence d'enregistrement de sorte qu'une astreinte n'est pas fondée,

en conséquence,

débouter la société Groupe Valentin et M. [M] de cette demande,

débouter la société Groupe Valentin et M. [M] de toutes leurs demandes fins et conclusions,

condamner in solidum la société Groupe Valentin et M. [M] à leur payer la somme de 10 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions du 9 septembre 2019, fondées sur les articles 873 alinéa 2 du code de procédure civile, 1103 du code civil, et L.131-1 du code des procédures civiles d'exécution, la société Groupe Valentin et M. [M] demandent à la cour de :

constater que l'acte de cession du 22 juillet 2016 prévoit un complément de prix en son article 3-1,

constater que l'avenant du 17 mars 2017 acte le fait que les conditions d'exigibilité du complément de prix visé à l'article 3-1 de l'acte de cession ont été réalisées,

constater que la société Mi Prom leur doit la somme de 50 000 € et ce, depuis le 17 mars 2017,

constater que l'avenant du 17 mars 2017 indiquait que lesdites sommes devaient être respectivement dues à concurrence de la fraction des parts cédées par chacun d'eux,

constater que l'acquéreur n'a pas communiqué les deux exemplaires enregistrés de l'avenant à l'acte de cession de parts du 22 juillet 2016 signés le 17 mars 2017,

en conséquence,

confirmer le jugement en toutes ses dispositions.

débouter la société Mi Prom de l'intégralité de ses moyens et prétentions comme étant irrecevables et mal fondés,

y ajoutant, condamner la société Mi Prom à leur payer à chacun la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner la société Mi Prom aux entiers dépens.

MOTIFS

A titre liminaire, il est précisé que le litige n'est pas soumis au nouveau droit des contrats issu de l'ordonnance du 10 février 2016 puisque la relation contractuelle est antérieure au 1er octobre 2016.

Aucune partie ne contestant la condamnation de la société Groupe Valentin et M. [M] à verser à la société Mi Prom la somme de 6 934,10 € au titre du passif fiscal et social, la cour ne pourra que confirmer le jugement de ce chef.

Sur les demandes de la société Mi Prom

En vertu de l'article 1134 du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

En l'espèce, la convention de cession de la société LC2 prévoyait plusieurs compléments de prix conditionnés par la réalisation d'évènements déterminés. En particulier il était stipulé, à l'article 3.1 de la convention :

«Un premier complément de prix sera réglé par le cessionnaire si la société obtient un permis de construire purgé de tout recours concernant le terrain situé au [Adresse 3] (cadastré sous la section A[Cadastre 1], parcelles n° [Cadastre 2] et [Cadastre 10]). [']

Le fait générateur de ce premier complément de prix est l'obtention par la société du permis de construire purgé de tout recours. Dans les 30 jours de la réalisation du fait générateur susvisé, le cessionnaire s'engage à régler aux cédants un complément de prix de 120.000 € (cent vingt mille euros), soit 600 € (six cents euros) par part sociale. Etant précisé que la purge du recours sera établie soit par l'absence de tout recours dans les délais légaux de contestation (y compris le délai de retrait), soit par la validation du permis de construire contesté par une juridiction aux termes d'une décision définitive insusceptible de recours)».

Aux termes de l'avenant du 17 mars 2017, la société Groupe Valentin et M. [M] ont convenu avec la société Mi Prom que les conditions de ce complément de prix de 120 000 € étaient satisfaites et se sont finalement accordés pour un paiement échelonné en trois versements.

Si la société Mi Prom admet que le permis de construire a bien été obtenu, elle fait valoir que la préparation du dossier par les cédants a été défectueuse, qu'elle ont ainsi du exposer des dépenses à hauteur de 119 032 € (traitement de l'amiante, bornage du terrain, étude du sol, abattage d'un cèdre), somme qui aurait dû se trouver dans les comptes de la société LC2, ce qui selon elle caractérise un manque de bonne foi des cédants dans l'exécution du contrat.

La société Mi Prom soutient ainsi que si elle avait eu connaissance de ces coûts, elle n'aurait pas consenti au complément de prix, et sollicite donc, avec la société LC2, des dommages et intérêts à hauteur de 119 032€ en réparation de cette man'uvre dolosive, sur le fondement de l'article 1382 du code civil, cette somme s'imputant sur le complément de prix réclamé.

Les intimées répliquent toutefois à juste titre qu'aucune réserve n'a été faite dans l'avenant du 17 mars 2017 concernant des frais payés par la société Mi Prom pour l'obtention de ce permis, que cette dernière, professionnelle de la promotion immobilière est mal fondée à soutenir que la somme n'est pas due alors qu'elle a négocié et accepté l'acte de cession prévoyant le complément de prix, ainsi que l'avenant dans lequel elle reconnaît que «cette condition étant purgée, ce premier complément est désormais acquis au cédant et exigible». Il est en outre souligné que la convention précisait en son article 3.1 que «le cessionnaire avait pu au préalable examiner l'ensemble des pièces et documents relatifs à ce projet [de permis de construire] dont une copie lui était remise», et qu'il était donc en mesure de s'assurer des opérations accomplies ou non préalablement au dépôt de la demande de permis de construire.

Il n'est pas démontré par la société Mi Prom que les démarches accomplies par elles postérieurement à l'obtention du permis de construire étaient à la charge du cédant, de sorte qu'il n'est pas rapporté la preuve d'une mauvaise foi des cédants, et encore moins de man'uvres dolosives de leur part justifiant leur condamnation à des dommages et intérêts.

En conséquence, par confirmation du jugement, cette demande de dommages et intérêts est rejetée.

Le jugement est également confirmé en ce qu'il a condamné la Mi Prom à verser le complément de prix de 20 000 €, à répartir au prorata des parts cédées, soit 96 000€ pour la société Groupe Valentin et 24 000 € pour M. [M], dont à déduire pour ce dernier l'acompte de 20 000 € versé par la société Mi Prom, établi au vu de la facture en date du 31 août 2016 et du chèque signé du 19 septembre 2016.

La société Mi Prom fait ensuite grief au tribunal d'avoir rejeté sa demande de réductibilité de la facture de 150 000 € HT, adressée à la société Anahome le 12 décembre 2015, des compléments de prix à recevoir par la société Groupe Valentin et M. [M].

Elle fait valoir que si l'acte de cession mentionnait l'existence d'une facture de 150 000€ HT présentant un risque d'irrecouvrabilité, c'est l'existence même de cette facture qu'elle conteste.

Énonçant qu'une facture ne peut être émise avant le fait générateur qui lui sert de cause, la société Mi Prom fait valoir que la facture d'honoraires émise le 12 décembre 2015 par LC2 et figurant dans les comptes clos le 31 décembre 2015, n'a été reçue par la société Anahome que le 21 mars 2016, et ajoute qu'il s'agit d'un acompte sur honoraires, ces derniers n'étant dus par la société Anahome qu'en cas de réitération d'un acte authentique relatif à la vente d'un tènement immobilier sis à [Localité 12], que la société Anahome a contesté cette facture à sa réception en mars 2016, indiquant que la condition n'étant pas encore remplie, les honoraires n'étaient pas dus.

La société Mi Prom en conclut que cette facture est dépourvue de cause et ne pouvait pas figurer dans les comptes clos à la date du 31 décembre 2015, dont le poste client a été fictivement majoré de la somme de cette facture pour rendre les comptes présentables et alors qu'elle n'a pas fait l'objet de provision pour créance douteuse lors de la clôture de l'exercice du 31 décembre 2015.

La société Groupe Valentin et M. [M] sollicitent pour leur part la confirmation du jugement ayant rejeté cette demande, en exposant que Mi Prom ne peut soutenir qu'elle découvre aujourd'hui que cette facture n'a aucune justification dès lors que le prix de la cession de la société LC2 est justifié par le risque d'irrecouvrabilité de cette facture, que la convention de cession en précise l'origine et stipule que la société Mi Prom a pu examiner l'ensemble des pièces et documents relatifs à cette convention et à cette facture. Ils ajoutent que s'agissant d'une facture à recevoir, dont le risque d'irrecouvrabilité était connu des parties, elle n'entre pas dans les conditions de l'article 3. 6 pouvant conduire à une diminution des compléments de prix prévus à l'article 3. 1. de la convention de cession.

Enfin, la société Groupe Valentin et M. [M] estiment que la facture ne constituant ni un passif non provisionné fiscal ou social, ou lié à la mise en cause de la responsabilité de la société, ni demande d'avoir avec remboursement effectif par la société, elle ne peut donc pas donner lieu à une réduction du prix.

La convention de cession précise en son article 3.6 «Ajustement du prix», que les parties conviennent que viendra en diminution des compléments de prix à payer aux cédants notamment tout passif non provisionné fiscal ou social ou lié à la mise en cause de la responsabilité de la société au titre d'opérations immobilières conduites par la société antérieurement à la cession, ainsi que toute demande d'avoir sur facture d'honoraires induisant un remboursement effectif par la société, valablement justifiée et à laquelle la société serait tenue de faire droit, dans la mesure ou ces passifs surviendraient dans un délai de 18 mois.

Il est également stipulé, en préambule de l'acte de cession qu'une créance de 180 000 € TTC figurant à l'actif du bilan présente un risque d'irrecouvrabilité, cette situation justifiant le prix de base des parts sociales à un euro symbolique.

Cette facture est également mentionnée au titre de l'article 3 «compléments de prix» puisque son règlement constitue le fait générateur d'un complément de prix de 100 000 €. Il est précisé dans ce paragraphe que cette facture a été émise le 12 décembre 2015 en vertu d'une convention du 2 mars 2015 conclue avec la société Anahome, et que «le cessionnaire a pu au préalable, examiner l'ensemble des pièces et documents relatifs à cette convention et cette facture, dont copie visée de sa part est remise ce jour par les cédants».

Dès lors, quelle que soit la régularité du traitement comptable qui a été fait de cette facture, qui certes ne peut être qualifiée de créance à recevoir, n'étant ni certaine ni liquide, la société Mi Prom était parfaitement informée du fait que bien qu'inscrite à l'actif du bilan, il s'agissait d'une commission dont le règlement était conditionné par la réitération d'une vente par acte authentique. A la date à laquelle elle a signé la convention de cession, la société Mi Prom disposait de tous les éléments sur lesquels elle fonde aujourd'hui sa demande, s'étant ainsi engagée ainsi en toute connaissance de cause quant à la nature exacte de cette facture.

L'absence de règlement de cette facture par la société Anahome, présentée comme aléatoire dans la convention, ne constitue ni un passif non provisionné fiscal ou social ou lié à la mise en cause de la responsabilité de la société, ni une demande d'avoir sur facture d'honoraires induisant un remboursement effectif, de sorte que la société Mi Prom ne peut se prévaloir de l'article 3.6 de la convention pour solliciter une diminution des compléments de prix et doit être déboutée de cette demande, le jugement étant confirmé par substitution de motifs.

La société Mi Prom sollicite enfin la condamnation des intimés à lui verser la somme de 124 942 € au titre de dommages et intérêts en faisant valoir que dans le cadre de sa gestion de la société LC2, elle a réalisé des avances financières s'élevant à 74 842 € au 31 décembre 2016, qui se sont poursuivies en 2017 pour atteindre un montant total de 124 942 €, inscrites dans son compte courant d'associé dans les livres de la société LC2. La société Mi Prom invoque la mauvaise foi de ses cocontractants pour fonder cette demande de dommages et intérêts en expliquant que l'économie de l'accord de cession reposait sur le principe de la sincérité des comptes arrêtés par les cédants au 31 décembre 2015.

Au soutien de cette demande, elle produit une attestation d'expert comptable indiquant que le compte courant de l'associé unique, la société Mi Prom, s'élève à 74 842 € au 31 décembre 2016. Cette pièce, de même que l'extrait des comptes et le grand livre des comptes généraux, est toutefois dépourvue de toute valeur probante quant à l'imputabilité de cette somme aux intimés ou à leur mauvaise foi, en l'absence de toute démonstration de ce que ces apports ont été rendus nécessaire par le défaut de sincérité des comptes arrêtés par les cédants au 31 décembre 2015, la société Mi Prom, invoquant la seule mauvaise foi, non démontrée, de ces derniers pour solliciter le remboursement de ses apports en compte courant.

Enfin, la société Mi Prom ne peut tirer argument du défaut de concrétisation de deux projets sur quatre pour démontrer la mauvaise foi des cédants alors que l'acte de cession faisait état d'un état d'avancement permettant « d'escompter une issue positive dans un terme raisonnable », compte tenu du caractère hypothétique de cette formulation, et du fait que toute l'économie de la convention, son prix, les compléments de prix éventuels, reposait sur le principe de l'aléa.

Par conséquent, la cour, ajoutant au jugement qui a omis de statuer sur cette demande, déboute la société Mi Prom de cette prétention.

Sur la demande de communication sous astreinte de l'avenant enregistré auprès du service des impôts

Les intimés sollicitent la confirmation du jugement ayant ordonné sous astreinte à la SAS Mi Prom d'avoir à communiquer un exemplaire enregistré de l'avenant à l'acte de cession de parts du 22 juillet 2016 signé le 17 mars 2017.

Toutefois, cet avenant ne prévoit pas que cette formalité soit mise à la charge du cessionnaire, et la société Groupe Valentin et M. [M] ayant tout aussi intérêt à y procéder, il n'y a pas lieu d'ordonner à la société Mi Prom d'avoir à produire un exemplaire enregistré et le jugement doit être infirmé de ce chef.

Sur les dépens et l'article 700

Succombant en l'essentiel de ses prétentions, la société Mi Prom supporte les dépens d'appel comme ceux de première instance qui sont confirmés et garde la charge de ses frais irrépétibles.

Il apparaît enfin équitable de la condamner à verser en appel une indemnité procédurale de 2 000 € à la société Groupe Valentin et de 2 000€ à M. [M], les dispositions du jugement relatives à l'article 700 du code de procédure civile étant par ailleurs confirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, dans les limites de l'appel et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il a ordonné sous astreinte à la SAS Mi Prom d'avoir à communiquer un exemplaire enregistré de l'avenant à l'acte de cession de parts du 22 juillet 2016 signé le 17 mars 2017,

Statuant à nouveau sur le chef infirmé,

Déboute la SAS Groupe Valentin et M. [I] [M] de leur demande visant à voir ordonner à la société Mi Prom de communiquer deux exemplaires enregistrés de l'avenant à l'acte de cession de parts du 22 juillet 2016 signé le 17 mars 2017 dans les 15 jours calendaires suivant la signification du jugement, sous astreinte de 100 €,

Ajoutant,

Déboute la SAS Mi Prom de sa demande de condamnation de la SAS Groupe Valentin et M. [I] [M] à lui verser la somme de 124 942 € à titre de dommages et intérêts,

Condamne la SAS Mi Prom à verser à la SAS Groupe Valentin une indemnité de procédure de 2 000 €,

Condamne la SAS Mi Prom à verser à M. [I] [M] une indemnité de procédure de 2 000 €,

Déboute la SAS Mi Prom de sa demande en appel fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SAS Mi Prom aux dépens d'appel.

LE DSGJLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 19/01788
Date de la décision : 21/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-21;19.01788 ?
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