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21/07/2022 | FRANCE | N°18/00483

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 21 juillet 2022, 18/00483


N° RG 18/00483

N° Portalis DBVX-V-B7C-LPK6









Décision du

Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 04 décembre 2017



RG : 2014j1305





[Y]

[N]

[M]

Société FIVE AVOCATS

SELARL CELINE POMMIER AVOCAT



C/



SAS DIVEO NOM COMMERCIAL DIGITAL TELECOM

SAS OPHILIAM EQUIPEMENTS





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A

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ARRÊT DU 21 JUILLET 2022







APPELANTS :



Mme Delphine [Y], Avocat

(désistement d'appel : ordonnance de désistement partiel en date du 13 mars 2018)

[Adresse 2]

[Localité 5]



Mme [G] [N], Avocat,

[Adresse 2]

[Localité 5]



M. [W] [M], Avocat,
...

N° RG 18/00483

N° Portalis DBVX-V-B7C-LPK6

Décision du

Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 04 décembre 2017

RG : 2014j1305

[Y]

[N]

[M]

Société FIVE AVOCATS

SELARL CELINE POMMIER AVOCAT

C/

SAS DIVEO NOM COMMERCIAL DIGITAL TELECOM

SAS OPHILIAM EQUIPEMENTS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRÊT DU 21 JUILLET 2022

APPELANTS :

Mme Delphine [Y], Avocat

(désistement d'appel : ordonnance de désistement partiel en date du 13 mars 2018)

[Adresse 2]

[Localité 5]

Mme [G] [N], Avocat,

[Adresse 2]

[Localité 5]

M. [W] [M], Avocat,

[Adresse 2]

[Localité 5]

G.I.E FIVE AVOCATS

[Adresse 2]

[Localité 5]

SELARL CELINE POMMIER AVOCAT

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentés par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475

Assistés de Me Charles CROZE de la SCP DEYGAS-PERRACHON & ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON

INTIMÉES :

SAS DIVEO exerçant sous le nom commercial DIGITAL TELECOM

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Baptiste BERARD de la SELARL BERARD - CALLIES ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 428

SAS OPHILIAM EQUIPEMENTS

[Adresse 4]

[Localité 8]

Représentée par Me Laurent BERTIN de la SCP BERTIN & PETITJEAN-DOMEC ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 53

Assistée de Me Véronique LAUBIE, avocat au barreau de PARIS

INTERVENANTE :

S.E.L.A.R.L. ALLIANCE MJ représentée par Me [Z] [D], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société DIVEO

[Adresse 3]

[Localité 7]

défaillante

******

Date de clôture de l'instruction : 05 Février 2021

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 09 Juin 2022

Date de mise à disposition : 21 Juillet 2022

Audience tenue par Raphaële FAIVRE, président, et Marie CHATELAIN, vice-président placé, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,

assistés pendant les débats de Jessica LICTEVOUT, greffier

A l'audience, Marie CHATELAIN a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Catherine CLERC, conseiller faisant fonction de président

- Raphaële FAIVRE, vice-président placé

- Marie CHATELAIN, vice-président placé

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Catherine CLERC, conseiller faisant fonction de président, et par Tiffany JOUBARD, directeur des services de greffe judiciaires, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 6 juin 2013, le GIE Five Avocats a conclu avec la société Agora Finances Service un contrat de location financière portant sur du matériel de téléphonie, fourni par la SAS Diveo exerçant sous le nom commercial Digital Telecom (ci-après la société Diveo) selon bulletin de souscription et contrat de prestation de services du 13 mai 2013, moyennant le règlement de 48 loyers mensuels de 235,50 € HT (281,66 € TTC).

Le contrat de location financière a été cédé le jour même par la société Agora Finances Services à la SAS Benvenuti, devenue Ophiliam Equipements, bailleur cessionnaire.

Le 1er juillet 2013, le GIE Five Avocats a signé sans réserve le procès-verbal de réception du matériel de téléphonie fourni par la société Diveo.

Par courrier du 3 juillet 2013, le GIE Five Avocats a fait part à Diveo de nombreux dysfonctionnements qu'il constatait dans l'installation et sollicité la résolution immédiate de ceux-ci.

Les 22 et 23 janvier 2014, le GIE Five Avocats a fait constater par huissier le remplacement du matériel de Diveo par un matériel fourni par la société Orange.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 7 mars 2014, le GIE Five Avocats a mis en demeure la société Diveo de venir récupérer son matériel. Par courrier recommandé du même jour, il a adressé une copie de cette lettre à la société Benvenuti.

Par exploit d'huissier en date du 3 juin 2014, le GIE Five Avocats a assigné les sociétés Diveo et Benvenuti devant le tribunal de commerce de Lyon aux fins de résolution du contrat conclu avec la société Diveo et d'indemnisation de son préjudice.

Par jugement du 4 décembre 2017, ce tribunal a':

débouté le GIE Five Avocats et ses membres de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions à l'encontre de la société Diveo,

dit que les contrats de prestations et de location ne constituent pas un ensemble contractuel indivisible et interdépendant,

constaté la résiliation du contrat de location à la date du 21 juillet 2014,

condamné le GIE Five Avocats à payer à la société Ophiliam la somme de 18.476,02 € outre intérêts au taux légal à compter du 21 juillet 2014,

ordonné la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du code civil,

rejeté l'appel en garantie formé par le GIE Five Avocats à l'encontre de la société Diveo,

ordonné la restitution du matériel aux frais du GIE Five Avocats dans le délai d'un mois après la signification du jugement,

dit que le jugement est opposable aux membres suivants du GIE Five Avocats':

Mme [Y],

Mme [N]

M. [M],

la SELARL Céline Pommier Avocat,

condamné le GIE Five Avocats à payer à la société Diveo et à la société Benvenuti devenue Ophiliam la somme de 750 € chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

ordonné l'exécution provisoire,

et condamné le GIE Five Avocats aux entiers dépens.

Le GIE Five Avocats et ses membres Mme [Y], Mme [N], M. [M] et la SELARL Céline Pommier Avocat ont interjeté appel par acte du 19 janvier 2018.

Par conclusions du 8 mars 2018, Mme [Y] s'est désistée de son appel ce qui a été constaté par ordonnance du 13 mars 2018.

Un incident aux fins de radiation de l'appel a été soulevé par la société Ophiliam par conclusions du 29 mars 2018 au moyen de la non exécution par l'appelante de sa condamnation. Par ordonnance du conseiller de la mise en état du 16 octobre 2018 cet incident a été rejeté au vu de l'accord intervenu entre le GIE Five Avocats et la société Ophiliam, selon courriers officiels de leurs conseils des 30 mars et 6 avril 2018, pour une exécution échelonnée de la condamnation.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 3 avril 2019 et l'affaire fixée à plaider.

Par jugement du tribunal de commerce de Lyon du 17 octobre 2019, la société Diveo a été placée en liquidation judiciaire.

La clôture de la procédure a été révoquée et la Selarl Alliance MJ, représentée par Me [D] [Z], ès qualités de liquidateur de la société Diveo (le liquidateur) a été assignée le 16 octobre 2020 en intervention forcée.

Par courrier du 30 octobre 2020 le liquidateur a indiqué qu'il ne serait ni présent ni représenté et a rappelé les dispositions de l'article L.622-21 du code de commerce. Le liquidateur précise que les demandeurs ont déclaré les créances chirographaires suivantes au passif de la société Diveo :

le GIE Five Avocats : 40 148,22 €

Mme [G] [N] : 5 700 €

M. [W] [M] : 5 700 €

la société Céline Pommier Avocat : 5 700 €

Par courrier du 14 mai 2020, Me [L], conseil de la société Diveo a indiqué ne plus intervenir dans les intérêts de cette société ; toutefois, en l'absence de déconstitution par un autre conseil, celui-ci reste le conseil de la société Diveo en appel.

Par conclusions du 21 septembre 2018 fondées sur les articles 1184, 1134, 1135, 1147, 1131, 1133 et 1129 anciens du code civil, D.98-4 du code des postes et des communications électroniques, L.132-1, R.132-1 et R.132-2 anciens du code de la consommation, 15 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004, la recommandation n° 03-01 du 26 septembre 2002 et l'article 336 du code de procédure civile, le GIE Five Avocats ainsi que ses membres Mme [N], M. [M] et la SELARL Céline Pommier Avocats demandent à la cour de :

infirmer le jugement de première instance en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes,

statuant à nouveau,

juger qu'ils sont recevables et bien fondés dans leurs demandes, fins et prétentions,

juger que la société Diveo a violé ses obligations de résultat de fourniture d'un service internet et de téléphonie, son obligation de coopération contractualisée et son obligation d'assistance - garantie temps de rétablissement,

prononcer la résolution du contrat et du bon de souscription conclus entre le GIE Five Avocats et la société Diveo le 13 mai 2013,

juger que la clause limitative de responsabilité stipulée à l'article 8 des conditions de services du bon de souscription du 13 mai doit être réputée non écrite,

condamner la société Diveo à payer, au titre de leurs préjudices d'exploitation, les sommes de':

3.000 € au GIE Five Avocats,

2.500 € à Mme [N],

2.500 € à M. [M],

2.500 € à la SELARL Céline Pommier Avocat,

condamner Diveo à payer, au titre de leurs préjudices d'image, les sommes de :

5.000 € au GIE Five Avocats,

2.500 € à Mme [N],

2.500 € à M. [M],

2.500 € à la SELARL Céline Pommier Avocat,

condamner la société Diveo à payer au GIE Five Avocats la somme de 8.672,20 € au titre de son préjudice financier,

et, à titre principal,

juger que le contrat de prestation de service et le bulletin de souscription conclus entre la société Diveo et le GIE Five Avocats d'une part, et le contrat de location de matériel conclu entre le GIE Five Avocats et la société Benvenuti d'autre part, sont interdépendants,

juger que le contrat conclu entre le GIE Five Avocats et la société Benvenuti est caduc du fait de la résolution du contrat de prestation de service,

à titre subsidiaire,

condamner la société Diveo à relever et garantir le GIE Five Avocats, Mme [N], M. [M] et la SELARL Céline Pommier Avocat de toutes sommes qu'ils seraient condamnés à payer à la société Benvenuti,

en tout état de cause,

condamner la société Diveo à payer sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile':

au GIE Five Avocats la somme de 5.000 €,

à Mme [N], M. [M] et la SELARL Céline Pommier Avocat la somme de 700 € chacun,

condamner la société Benvenuti à payer au GIE Five Avocats la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner la société Diveo et Benvenuti aux entiers dépens de l'instance, distraits au bénéfice de la SCP Aguiraud Nouvellet.

Par conclusions du 13 juillet 2018 fondées sur les articles 1108 et suivants, 1134, 1153, 1154 et 1183 et suivants du code civil à l'époque applicables, la société Diveo demande à la cour de':

à titre principal,

débouter les appelants de l'ensemble de leurs demandes,

confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

à titre subsidiaire,

rejeter la demande de dommages et intérêts au titre des préjudices financiers, d'exploitation, d'image comme non fondés, non démontrés et non justifiés,

juger n'y avoir lieu à la condamner à relever et garantir le GIE Five Avocats et ses membres de toutes sommes auxquelles ils pourraient être condamnés au profit de la société Benvenuti dénommée désormais Ophiliam Equipements alors qu'il n'est pas démontré de la nécessité par le GIE Five Avocats et ses membres de mettre fin au contrat de location du matériel de téléphonie,

rejeter les demandes d'indemnisation comme non fondées, non démontrées et non justifiées,

en tout état de cause,

condamner le GIE Five Avocats et ses membres à lui payer la somme de 2.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

et en tous les dépens.

Par conclusions du 19 octobre 2018 fondées sur les articles 1134, 1153 et 1154 du code civil et les articles 64, 699 et 700 du code de procédure civile, Ophiliam Equipements demande à la cour de':

débouter les appelants de l'ensemble de leurs demandes fins et conclusions,

confirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions,

condamner enfin le GIE Five Avocats à lui payer la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

ainsi qu'aux entiers dépens,

juger que la présente décision à l'encontre du GIE Five Avocats sera opposable à ses membres Mme [Y], Mme [N], M. [M] et la SELARL Céline Pommier Avocat.

MOTIFS

A titre liminaire, est sans objet et n'appelle pas de réponse de la cour, la demande de Ophiliam Equipements tendant à voir juger que l'arrêt à intervenir sera opposable aux membre du GIE Five Avocats, alors même que ces ces derniers, à savoir Mme [Y], Mme [N], M. [M] et la SELARL Céline Pommier Avocat, ont la qualité de parties à l'instance d'appel pour être appelants.

Sur la résiliation du contrat conclu entre le GIE Five Avocat et la société Diveo

L'article L.132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige, dispose que «'dans les contrats entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat'».

Contrairement à ce que soutiennent les sociétés Diveo et Ophiliam, l'application de cet article ne peut être écartée du seul fait que le GIE Five Avocats n'est pas un consommateur mais une personne morale. Il doit en effet être relevé que l'article L. 132-1 concerne non seulement les consommateurs, qualité que l'article liminaire du code de la consommation, entré en vigueur postérieurement à la survenue du litige entre les parties, réserve désormais expressément aux personnes physiques, mais également les non-professionnels, que ce même article liminaire définit comme désignant toute personne morale qui n'agit pas à des fins professionnelles.

Le GIE Five Avocat est un cabinet d'avocats et exerce donc une activité de conseil et d'assistance juridique. Il est donc un professionnel du droit, ce qui n'est pas de nature à lui conférer la qualité de professionnel des télécommunications qui seule serait de nature à le faire considérer comme étant intervenu à titre professionnel dans le cadre du contrat de d'abonnement en téléphonie et fourniture d'accès internet litigieux. Il est en effet constant que ce domaine fait appel à des connaissances ainsi qu'à des compétences techniques spécifiques qui sont indiscutablement distinctes de celles exigées par la pratique du droit.

Il doit donc être retenu que le GIE Five Avocats est intervenu au contrat litigieux en qualité de non-professionnel, de telle sorte qu'il peut prétendre au bénéfice des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation.

En vertu de l'article D. 98-4 du code des postes et télécommunications électroniques, «'l'opérateur doit prendre les dispositions nécessaires pour assurer de manière permanente et continue l'exploitation du réseau et des services de communications électroniques et pour qu'il soit remédié aux effets de la défaillance du système dégradant la qualité du service pour l'ensemble ou une partie des clients dans les délais les plus brefs. Il prend toutes les mesures de nature à garantir un accès ininterrompu aux services d'urgence.'»

Par ailleurs, aux termes du contrat du 13 mai 2013 que la société Diveo s'est engagée à fournir un accès internet et électronique au GIE Five Avocat, mettre à disposition de celui-ci un matériel spécifique, en assurer l'installation et le paramétrage et la maintenance, et intervenir en moins de quatre heures en cas d'interruption totale du service.

Il en résulte que la société Diveo était tenue à une obligation de résultat s'agissant de l'exécution de ses obligations contractuelles.

Dès lors, l'article 8.1 des conditions générales de services annexées aux bulletin de souscription du 13 mai 2013 stipulant qu'«'il est préalablement et expressément rappelé que le fournisseur n'est soumis qu'à une obligation de moyens pour l'exécution de ses services'» constitue une clause abusive au sens de l'article R132-1, 6° du code de la consommation qui qualifie ainsi les clauses ayant «'pour effet de supprimer ou réduire le droit à réparation subi par le non professionnel ou le consommateur en cas de manquement par le professionnel à l'une quelconque de ses obligations'». C'est d'ailleurs à juste titre que le GIE Five Avocat rappelle que la Commission des clauses abusives a considéré dans sa recommandation n°03-01 du 26 septembre 2002 qu'il y avait lieu de qualifier d'abusive la clause ayant pour effet ou pour objet « de limiter les obligations du fournisseur d'accès à internet à de simples obligations de moyens ».

Il convient en conséquence de dire non écrite cette clause abusive par infirmation du jugement déféré.

Il est démontré par le GIE Five Avocat que la société Diveo n'a pas satisfait à ses obligations de fourniture, de coopération et d'assistance dès lors que d'importants dysfonctionnements ont été signalés à cette dernière dès le 3 juillet 2013, soit deux jours après la livraison et l'installation du matériel, le téléphone ne fonctionnant pas, ou de manière intermittente, le débit internet étant insuffisant alors que le contrat prévoyant l'installation d'un «'très haut'» débit, que malgré l'installation d'une ligne SDSL supplémentaire, les incidents de connexion, de fax et de téléphone ont perduré jusqu'au mois de décembre 2013. Il est en outre établi que la société Diveo ne justifie pas des diligences accomplies pour remédier à ces difficultés dont elle a systématiquement été avertie par son cocontractant, et qu'elle ne démontre pas que ces difficultés proviendraient du système informatique du GIE Five Avocat ou de France Télecom.

Il est dès lors établi que la société Diveo a failli dans l'exécution de ses obligations contractuelles, il y a donc lieu d'infirmer le jugement, de faire droit à la demande de résolution du contrat par le GIE Five Avocats, à compter du 7 mars 2014, date à laquelle ce dernier a mis en demeure la société Diveo de venir récupérer son matériel, et d'examiner sa demande de dommages et intérêts.

L'article 8.2 des conditions générales de services annexées aux bulletin de souscription du 13 mai 2013 stipule que «'dans l'hypothèse où la responsabilité du fournisseur serait établie au titre d'un contrat de service, cette responsabilité sera limitée aux dommages matériels directs, à l'exclusion de tout dommage indirect et/ou immatériel, en particulier de toute perte de chiffre d'affaires de bénéfice, de profit, d'exploitation ou de réputation, de clientèle, préjudice commercial, économie et autre perte de revenus'». Cette disposition constitue toutefois une clause abusive et doit être réputée non écrire dès lors qu'elle réduit le droit à réparation du préjudice subi par le non professionnel, en contradiction avec l'article R132-1, 6° du code de la consommation précité.

Le préjudice d'exploitation invoqué par le GIE Five Avocats est établi aussi bien pour lui que pour les avocats membres du GIE, parties à la procédure, au vu des échanges entre le GIE Five Avocats et la société Diveo, faisant état des interruptions de communications avec des clients, de l'impossibilité d'imprimer des documents ou de les transmettre aux juridictions, ainsi que des courriels de clients du cabinet faisant état de l'impossibilité de joindre les avocats par téléphone dans des situations parfois urgentes.

Compte tenu de la répétition des incidents et de l'importance pour cette profession de pouvoir être joignable et échanger rapidement par téléphonie ou par voie électronique, il est fait droit aux demandes qui correspondent à une juste indemnisation du préjudice. La société Diveo est ainsi condamnée à verser la somme de 3 000 € au GIE Five Avocat et de 2 500 € à chacun des avocats membres du GIE, à savoir Mme [N], M. [M] et la Selarl Pommiers avocats.

S'agissant du préjudice financier invoqué par le GIE Five Avocat, il est constant, au vu des pièces versées que ce dernier a exposé les frais suivants dont la société Diveo doit l'indemniser :

le forfait mensuel Diveo de juillet 2013 à décembre 2013 et les frais d'installation et de formation pour un service qui s'est avéré défectueux : 2 163 € HT

l'installation (57,69 € HT) et les frais de mise en service de deux lignes (91,66 €HT) par Orange à compter du 27 juillet 203 pour compenser les défectuosités du service proposé par Diveo, et le surcoût de l'abonnement souscrit chez Orange au regard du tarif de l'abonnement de Diveo du 27 juillet 2013 au mois de décembre 2013, soit 119, 50 € x 6 = 717 €. Il n'y a pas lieu de faire droit à cette demande au delà du mois de décembre 2013, puisqu' à compter de cette date, la société Orange est devenue le seul fournisseur en télécommunications du GIE Five Avocat qui aurait dû en tout état de cause, exposer des frais pour ce service.

Le GIE Five Avocat sera en revanche débouté de sa demande de remboursement des frais afférents à l'impression de cartes de v'ux et d'enveloppes et de ceux exposés pour établir un logotype, différents support de communication, en l'absence de pièces justifiants du lien de causalité entre les manquements contractuels de la société Diveo et ces dépenses.

La société Diveo est dès lors condamnée à verser au GIE Five Avocat la somme de 3 029,35 € au titre de son préjudice financier.

S'il peut être admis que le GIE Five Avocat a effectivement subi un préjudice d'image, son sérieux et son efficacité étant remis en cause pas les difficultés à le joindre comme en témoignent les courriels de clients, et ce dans la phase critique de sa création, pour leur part, les membres du GIE ne font pas la démonstration de l'existence d'un préjudice distinct de celui du cabinet.

Il y a donc lieu de faire droit à la demande du GIE Five Avocat au titre du préjudice d'image à hauteur de 4 000 €, somme à laquelle la société Diveo est condamnée, et de débouter Mme [N], M. [M] et la Selarl Pommiers Avocats de leurs demandes respectives à cet égard.

Sur la caducité du contrat conclu avec la société Benvenuti

Lorsque des contrats sont interdépendants, la résiliation de l'un quelconque d'entre eux entraîne la caducité, par voie de conséquence, des autres, sauf pour la partie à l'origine de l'anéantissement de cet ensemble contractuel à indemniser le préjudice causé par sa faute.

En l'espèce, le 6 juin 2013, le GIE Five Avocats a conclu avec la société Agora Finances Services un contrat de location portant sur le matériel fourni et installé par la société Diveo, contrat qui a été cédé le jour même à la société Benvenuti.

Il ne peut être sérieusement contesté que le contrat de location financière signé entre le GIE Five Avocats et la société Diveo et le contrat signé entre le GIE Five Avocats et la société Benvenuti sont interdépendants, le premier n'ayant, à lui seul, pas de cause sans la prestation prévue par le second.

L'article R132-2, 10° du code de la consommation dans sa version applicable au litige dispose que sont présumées abusives les clauses ayant pour objet ou pour effet de « supprimer ou entraver l'exercice d'actions en justice ou des voies de recours par le consommateur, notamment en obligeant le consommateur à saisir exclusivement une juridiction d'arbitrage non couverte par des dispositions légales ou à passer exclusivement par un mode alternatif de règlement des litiges ».

En l'absence de preuve contraire rapportée par la société Benvenuti, c'est donc à juste titre que le GIE Five Avocats, dont il vient d'être jugé qu'il pouvait invoquer les dispositions du droit de la consommation du fait de sa qualité de non-professionnel dans le cadre de l'opération contractuelle litigieuse, soutient que la clause 3.4 du contrat de location financière qui exclut tout droit de recours du locataire à l'encontre du bailleur constitue une clause abusive, et elle sera dès lors réputée non écrite.

Les deux contrats constituant un ensemble contractuel interdépendant, la résolution du contrat de fourniture entraîne la caducité du contrat de financement.

Toutefois, la résolution du contrat avec la société Diveo est intervenue le 7 mars 2014, date à laquelle le GIE Five Avocats a également fait part à la société Benvenuti de la mise en demeure adressée à la première. La caducité du contrat de location financière ne peut donc intervenir qu'à cette date jusqu'à laquelle les loyers sont dus par le GIE Five Avocat.

Le GIE Five Avocat ayant cessé de verser les loyers à compter du mois de novembre 2013, il convient dès lors de faire droit à la demande reconventionnelle de la société Benvenuti en paiement des loyers s'agissant des échéances de novembre 2013 à mars 2014, soit 235,50 € HT x 5 mois = 1 177,5 € HT, avec intérêts à taux légal à compter du 21 juillet 2014 lesquels seront capitalisés conformément à l'article 1154 du code civil. La société Benvenuti est en revanche déboutée du surplus de sa demande par réformation du jugement.

La demande des appelants tendant à être relevés et garantis des condamnations pouvant être mises à leur charge au profit de la société Benvenuti est sans objet, cette prétention ayant été formulée pour le cas où le contrat entre le GIE Five Avocats et la société Benvenuti n'aurait pas été déclaré caduc.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

La société Diveo doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à verser au GIE Five Avocat, et Mme [N], M. [M] et la Selarl Pommiers Avocats une indemnité globale de procédure de 5 000 € au titre de leur défense commune. La société Benvenuti est enfin déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance comme en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, dans les limites de l'appel, et par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau et ajoutant,

Dit que les articles 8.1 et 8.2 des conditions générales de services annexées au bulletin de souscription du 13 mai 2013 sont des clauses abusives et qu'elles sont réputées non écrites,

Dit que la SAS Diveo a manqué à ses obligations contractuelles,

Dit que le contrat conclu le 13 mai 2013 entre le GIE Five Avocats et la SAS Diveo est résolu au 7 mars 2014,

Condamne la SAS Diveo et la Selarl Alliance MJ représentée par Me [D] [Z], ès qualités de liquidateur à verser les sommes suivantes :

au titre du préjudice d'exploitation : 3 000 € au GIE Five Avocats et 2 500 € chacun à Mme [G] [N], M. [W] [M] et la Selarl Céline Pommiers Avocats,

au titre du préjudice financier : 3 029,35 € au GIE Five Avocats,

au titre du préjudice d'image : 4 000 € au GIE Five Avocats,

Déboute Mme [G] [N], M. [W] [M] et la Selarl Céline Pommiers Avocats de leur demande au titre du préjudice d'image,

Dit que l'article 3.4 du contrat de location financière conclu le 6 juin 2013 est une clause abusive et qu'elle est réputée non écrite,

Dit que le contrat de location financière conclu le 6 juin 2013 est caduc à compter du 7 mars 2014,

Condamne le GIE Five Avocats à verser à la SAS Ophiliam Equipements la somme de 1'177,50 € outre intérêts au taux légal à compter du 21 juillet 2014,

Ordonne la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du code civil,

Déboute la SAS Ophiliam Equipements du surplus de sa demande,

Condamne la SAS Diveo et la Selarl Alliance MJ représentée par Me [D] [Z], ès qualités de liquidateur à verser au GIE Five Avocats, à Mme [G] [N], M. [W] [M] et la Selarl Céline Pommiers Avocats une indemnité globale de procédure de 5 000 € pour la première instance et l'appel,

Déboute la SAS Ophiliam Equipements de sa demande d'indemnité de procédure pour la première instance et l'appel,

Condamne le GIE Five Avocats de sa demande d'indemnité de procédure formée à l'encontre de la SAS Ophiliam Equipements,

Condamne la SAS Diveo et la Selarl Alliance MJ représentée par Me [D] [Z], ès qualités de liquidateur aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers avec droit de recouvrement.

LE DIRECTEUR DES SERVICESLE PRÉSIDENT

DE GREFFE JUDICIAIRE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 18/00483
Date de la décision : 21/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-21;18.00483 ?
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