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07/07/2022 | FRANCE | N°19/05469

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 07 juillet 2022, 19/05469


N° RG 19/05469

N° Portalis DBVX-V-B7D-MQT6









Décision du Tribunal de Commerce de SAINT ETIENNE

Au fond

du 04 juin 2019



RG : 2019j483







SAS CHEVREUSE IMMOBILIER



C/



SAS LOCAM





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRÊT DU 07 Juillet 2022







APPELANTE :



SAS CHEVREUSE IMMOBILIER INTERNATIONAL venant

aux droits de la société CHEVREUSE IMMOBILIER

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représentée par Me Hélène TOURNIAIRE, avocat au barreau de LYON, toque : 2100







INTIMEE :



SAS LOCAM

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par Me Michel TROMBETTA de la SE...

N° RG 19/05469

N° Portalis DBVX-V-B7D-MQT6

Décision du Tribunal de Commerce de SAINT ETIENNE

Au fond

du 04 juin 2019

RG : 2019j483

SAS CHEVREUSE IMMOBILIER

C/

SAS LOCAM

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRÊT DU 07 Juillet 2022

APPELANTE :

SAS CHEVREUSE IMMOBILIER INTERNATIONAL venant aux droits de la société CHEVREUSE IMMOBILIER

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Hélène TOURNIAIRE, avocat au barreau de LYON, toque : 2100

INTIMEE :

SAS LOCAM

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Michel TROMBETTA de la SELARL LEXI, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

******

Date de clôture de l'instruction : 15 Octobre 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 25 Mai 2022

Date de mise à disposition : 07 Juillet 2022

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Catherine CLERC, conseiller faisant fonction de président

- Raphaële FAIVRE, vice-présidente placée

- Marie CHATELAIN, vice-présidente placée

assistées pendant les débats de Jessica LICTEVOUT, greffier

A l'audience, Catherine CLERC a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Catherine CLERC, conseiller faisant fonction de président, et par Jessica LICTEVOUT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DU LITIGE

La SAS Chevreuse Immobilier qui exerce l'activité d'agence immobilière a conclu avec la SAS Location Automobiles Matériels (la société Locam) un contrat de location financière n° 1404590 portant sur un photocopieur Xerox C 405 fourni par la société Xeroboutique Sud, moyennant le règlement de 21 loyers trimestriels de 900€ HT (1'080€ TTC).

Le 9 mars 2018, la société Chevreuse Immobilier a signé le procès-verbal de livraison et de conformité du matériel.

Le 18 octobre 2018, la société Chevreuse Immobilier a fait l'objet d'une transmission universelle de patrimoine, mentionnée au RCS le 4 octobre 2019, au profit de l'EURL Chevreuse Immobilier International conformément à l'article L. 236-3 du code de commerce.

Par courrier recommandé avec AR du 16 janvier 2019 (pli avisé non réclamé), la société Locam a mis en demeure la société Chevreuse Immobilier de régler trois échéances impayées, lui rappelant la clause résolutoire du contrat.

Par acte du 4 mars 2019, la société Locam a fait assigner la société Chevreuse Immobilier devant le tribunal de commerce de Saint-Étienne en paiement de la somme en principal de 25'308,22€ et restitution du matériel sous astreinte.

Par jugement réputé contradictoire du 4 juin 2019, le tribunal de commerce précité a :

condamné la société Chevreuse Immobilier à payer à la société Locam la somme de 25'308,22€ y incluse la clause pénale de 10%, outre intérêts au taux légal à dater de l'assignation,

ordonné la restitution par la société Chevreuse Immobilier à la société Locam du matériel objet du contrat sous astreinte de 150€ par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification du jugement et ce, pour le cas où la restitution ne serait pas intervenue avant le prononcé du présent jugement,

condamné la société Chevreuse Immobilier à payer à la société Locam la somme de 100€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la société Chevreuse Immobilier aux dépens,

ordonné l'exécution provisoire du jugement.

La société Chevreuse Immobilier a interjeté appel par acte du 26 juillet 2019.

Par ordonnance de référé du 14 octobre 2019, la juridiction du premier président a rejeté la demande d'arrêt de l'exécution provisoire soutenue par la société Chevreuse Immobilier.

Par conclusions n° 2 du 13 avril 2020 fondées sur les articles 1231-1 et 1231-5 du code civil et sur les articles 32, 122 et 123 du code de procédure civile, la société Chevreuse Immobilier International venant aux droits de la société Chevreuse Immobilier demande à la cour d'infirmer le jugement déféré, et statuant à nouveau,

constater que la société Chevreuse Immobilier était dissoute à la date de la délivrance de l'assignation par la société Locam le 4 mars 2019,

juger que l'acte introductif d'instance de la société Locam du 4 mars 2019 était entaché d'une irrégularité de fond pour avoir été délivré à l'encontre d'une entité dépourvue de capacité d'ester en justice,

juger irrecevable l'action de la société Locam à l'encontre de la société Chevreuse Immobilier pour défaut de capacité d'ester en justice.

sur le fond,

juger qu'elle ne peut être condamnée au paiement des loyers impayés échus postérieurs au 26 janvier 2019 date de résiliation,

juger que les dispositions de l'article 12-2 des conditions générales de location s'analysent en une clause pénale,

juger que la société Locam ne démontre pas le préjudice qu'elle aurait subi du fait de la résiliation anticipée du contrat de location,

juger qu'en tout état de cause le quantum de l'indemnisation est manifestement

disproportionné au regard du préjudice réellement subi,

en conséquence,

réduire le montant de l'indemnité sollicitée au titre de la clause pénale à la somme de 1€ ou à de plus justes proportions,

en tout état de cause,

débouter la société Locam de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

lui accorder un délai de paiement en cas de condamnation lui permettant de s'en acquitter dans un délai minimum de 24 mois compte tenu de ses grandes difficultés financières, soit 23 mensualités à 200€, le solde le 24ème mois.

condamner la société Locam à lui payer la somme de 1 500€ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

et aux dépens, avec distraction au profit de Me Tourniaire.

Par conclusions du 18 septembre 2020 fondées sur les articles 123 et 126 du code de procédure civile, 1103, 1231-2, 1231-5 et 1343-5 du code civil, la société Locam demande à la cour de :

rejeter l'appel de la société Chevreuse Immobilier International venant aux droits de la société Chevreuse Immobilier,

confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf à réduire à 3'411,36€ le montant dû par la société Chevreuse Immobilier International au titre des loyers échus et impayés et à proportion la clause pénale de 10% sur ce montant,

réduire en conséquence de 25'308,22€ à 25 016,63€ la somme totale qui lui est allouée outre intérêt au taux légal à compter du 16 janvier 2019,

débouter la société Chevreuse Immobilier International de toutes ses demandes comme pour partie irrecevables et toutes non fondées,

subsidiairement,

condamner la société Chevreuse Immobilier International à lui verser la somme de 25'016,63€ à titre de dommages-intérêts pour abstention dilatoire relative à sa fin de non-recevoir,

en tout état de cause,

condamner la société Chevreuse Immobilier International à lui régler une nouvelle indemnité de 2'000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

et à payer tous les dépens d'instance comme d'appel.

MOTIFS

A titre liminaire, il est précisé que le litige est soumis au nouveau droit des contrats issu de l'ordonnance du 10 février 2016, le contrat ayant été signé après le 1er octobre 2016,

ce qui est déduit, en dépit de l'absence de date apposée sur le contrat de location financière, seul communiqué, de la date du 9 mars 2018 apposée sur le procès-verbal de livraison et de conformité.

Sur le défaut de capacité d'ester en justice de la société Chevreuse Immobilier

La société Chevreuse Immobilier International soutient que l'assignation délivrée par la société Locam le 4 mars 2019 est entachée d'une irrégularité de fond en tant qu'ayant été délivrée à la société Chevreuse Immobilier qui n'avait plus de personnalité juridique à cette date compte tenu de sa dissolution à la suite de la transmission universelle sans liquidation de patrimoine réalisée à son profit .

La société Locam oppose que la situation donnant lieu à cette fin de non-recevoir' a cessé avec l'intervention volontaire de la société Chevreuse Immobilier International à l'instance, celle-ci ayant régularisé elle-même l'appel, saisi ultérieurement la juridiction du premier président aux fins d'arrêt de l'exécution provisoire et déposé des conclusions d'appel sous sa dénomination propre'; à titre infiniment subsidiaire, elle conclut à l'irrecevabilité de cette fin de non-recevoir en application du principe de l'estoppel issu du devoir de loyauté procédural, et dans le cas contraire, elle entend se voir allouer, à tout le moins, des dommages et intérêts d'un montant équivalent à celui de la créance contractuelle par application de l'article 123 du code de procédure civile.

Il résulte des articles 32 et 126 du code de procédure civile, qu'est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir'; cette situation n'est pas susceptible d'être régularisée lorsque la prétention est émise par ou contre une personne dépourvue de personnalité juridique.'

Selon l'article L.236-3 du code de commerce «'la fusion ou la scission entraîne la dissolution sans liquidation des sociétés qui disparaissent et la transmission universelle de leur patrimoine aux sociétés bénéficiaires, dans l'état où il se trouve à la date de la réalisation définitive de l'opération'».

Si l'opération de fusion-absorption a pour conséquence d'opérer la transmission universelle du patrimoine de la société absorbée à la société absorbante, cette dernière ayant alors de plein droit qualité pour poursuivre les instances engagées par ou contre la société absorbée de par sa qualité d'ayant cause à titre universel, il en va différemment en l'espèce où la fusion absorption de la société Chevreuse Immobilier par la société Chevreuse Immobilier International s'est réalisée le 18 octobre 2018, soit près de six mois avant que la procédure ne soit engagée par la société Locam le 4 mars 2019 à l'encontre de la société absorbée, la société Chevreuse Immobilier.

Ainsi, la société Chevreuse Immobilier International n'a pas pu acquérir de plein droit, à compter de la fusion, la qualité de partie à une instance inexistante à l'époque pour n'avoir été engagée que postérieurement à l'encontre de la société Chevreuse Immobilier, et ne peut en conséquence se trouver rétroactivement aux lieu et place de celle-ci dans ladite instance.

Il en résulte que la société Locam a délivré son assignation en paiement le 4 mars 2019 à l'encontre de la société Chevreuse Immobilier qui était dépourvue du droit d'agir au sens de l'article 32 du code de procédure civile'; le fait que la société absorbante soit intervenue volontairement à l'instance d'appel, non pas en formant appel comme soutenu inexactement par la société Locam, mais en déposant des conclusions, étant en tout état de cause inopérant à écarter la fin de non-recevoir tirée de l'absence de droit à agir de la société absorbée, l'article 126 alinéa 2 du code de procédure civile n'ayant pas vocation à s'appliquer, dès lors que la fusion absorption ne s'est pas réalisée au cours de la procédure initiée à l'encontre de la société absorbée, mais bien antérieurement.

En conséquence, le défaut de capacité d'ester en justice de la société Chevreuse Immobilier qui avait été d'ores et déjà dissoute à la date de l'assignation du 4 mars 2019 est une irrégularité de fond qui ne peut être couverte par l'intervention volontaire de la société Chevreuse Immobilier International en cours d'instance et qui affecte irrémédiablement la validité de cette assignation en justice laquelle doit être déclarée nulle, cette nullité entraînant l'irrecevabilité des demandes de la société Locam'; la nullité de l'acte introductif d'instance prive l'appel de son effet dévolutif et la cour n'a pas à statuer sur le fond.

La société Locam n'est pas fondée à exciper du principe de l'estoppel pour voir «'déclarer irrecevable le moyen d'irrecevabilité'» qui lui est opposé alors même que la société Chevreuse Immobilier International n'était pas partie en première instance'; sa demande de dommages et intérêts n'est pas davantage fondée et sera rejetée dès lors que les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause et qu'aucun retard dilatoire à soulever l'irrecevabilité litigieuse ne peut être caractérisé à l'encontre de la société Chevreuse Immobilier International.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Partie succombante, la société Locam est condamnée aux entiers dépens, avec droit de recouvrement pour ceux d'appel et conserve la charge de ses frais irrépétibles'; elle est condamnée à verser à la société Chevreuse Immobilier International une indemnité de procédure. Le jugement est en conséquence infirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, et par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau et ajoutant,

Déclare la SAS Locam irrecevable en ses demandes à l'encontre de la SAS Chevreuse Immobilier ensuite de la nullité de l'assignation délivrée le 4 mars 2019 à cette société,

Dit n'y avoir à statuer sur le fond en raison de l'irrégularité de la saisine des premiers juges,

Déboute la SAS Locam de':

sa demande en paiement de dommages et intérêts à l'encontre de l'EURL Chevreuse Immobilier International,

sa demande de frais irrépétibles, y compris en appel,

Condamne la SAS Locam à verser à l'EURL Chevreuse Immobilier International une indemnité de procédure de 1500€,

Condamne la SAS Locam aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers avec droit de recouvrement.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 19/05469
Date de la décision : 07/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-07;19.05469 ?
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