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30/06/2022 | FRANCE | N°19/04432

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 30 juin 2022, 19/04432


N° RG 19/04432

N° Portalis DBVX-V-B7D-MOE3









Décision du Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 23 avril 2019



RG : 2018j322







SARL GROUPEMENT DES TRANSPORTS DUBOIS



C/



SAS ECMS FRANCE

S.A.S. FASHION PARTNER NETWORK





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRÊT DU 30 Juin 2022







APPELANTE :
>

SARL GROUPEMENT DES TRANSPORTS DUBOIS (GTD)

[Adresse 3]

[Adresse 3]



Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938 et ayant pour avocat plaidant, Me Michèle GRUGNARDI, avocat au barrea...

N° RG 19/04432

N° Portalis DBVX-V-B7D-MOE3

Décision du Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 23 avril 2019

RG : 2018j322

SARL GROUPEMENT DES TRANSPORTS DUBOIS

C/

SAS ECMS FRANCE

S.A.S. FASHION PARTNER NETWORK

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRÊT DU 30 Juin 2022

APPELANTE :

SARL GROUPEMENT DES TRANSPORTS DUBOIS (GTD)

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938 et ayant pour avocat plaidant, Me Michèle GRUGNARDI, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEES :

SAS ECMS FRANCE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Séverine LAVIE, avocat au barreau de LYON, toque : 1190

Société FASHION PARTNER venant aux droits de FASHION PARTNER NETWORK

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Gaël SOURBE de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON, toque : 1547 et ayant pour avocat plaidant, Me Xavier RODAMEL, avocat au barreau de LYON

******

Date de clôture de l'instruction : 18 Mai 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 12 Mai 2022

Date de mise à disposition : 30 Juin 2022

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Catherine CLERC, conseiller faisant fonction de président

- Raphaële FAIVRE, vice-présidente placée

- Marie CHATELAIN, vice-présidente placée

assistées pendant les débats de Jessica LICTEVOUT, greffier

A l'audience, Marie CHATELAIN a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Catherine CLERC, conseiller faisant fonction de président, et par Jessica LICTEVOUT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 14 décembre 2015, la SASU ECMS France (ci après ECMS), transporteur, a signé un contrat de sous-traitance de transport avec la SAS Fashionpartner Group, opérateur de transport, pour la livraison de vêtements sur deux tournées dénommées «'[Localité 5]'» et «'[Localité 4]».

Une procédure de redressement judiciaire de la société Fashionpartner Group a été ouverte le 15 février 2016. Par jugement du 13 mai 2016, le tribunal de commerce de Meaux a arrêté un plan de cession totale des actifs de la société Fashionpartner Group au profit de la SAS Financière Dimotrans. Celle-ci a créé la SAS Fashion Partner Network qui a repris l'activité de Fashionpartner Group.

La société Fashion Network a confié des transports de marchandises, et en particulier, les tournées «'[Localité 5]'» et «'[Localité 4]'» à la SARL Groupement des Transports Dubois (ci-après GTD), laquelle, à compter du mois de novembre 2016, a sous-traité la réalisation de ces tournées de livraison à la société à la société ECMS.

En février 2017, des désaccords sont apparus entre les sociétés ECMS et GTD, relatifs aux tarifs et au contenu des tournées.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 14 février 2017, la société GTD a mis un terme à ses relations contractuelles avec la société ECMS avec un préavis d'un mois, et par courrier du 14 mars 2017, elle a fait part de la fin immédiate de leur collaboration.

Par acte d'huissier de justice du 30 janvier 2018, la société ECMS a fait assigner les sociétés Fashion Partner Network et GTD devant le tribunal de commerce de Lyon en paiement des sommes suivantes:

16'039,88'€ au titre de sa facture du mois de février 2017,

2'347,92'€ au titre de sa facture du mois de mars 2017,

5'347,80'€ HT au titre du solde de l'indemnité de préavis.

Par jugement du 23 avril 2019, ce tribunal a :

déclaré recevable en son action la société ECMS,

constaté que le contrat de sous-traitance liant la société ECMS et la société Fashionpartner Group ne fait pas partie des contrats transférés lors du plan de cession arrêté par le tribunal de commerce de Meaux dans son jugement du 13 mai 2016 au profit de la SAS Dimotrans France qui a créé la société Fashion Partner Network,

jugé irrecevables les demandes de la société ECMS à l'encontre de la société Fashion Partner Network,

débouté en conséquence la société ECMS de l'ensemble des demandes formulées contre la société Fashion Partner Network,

débouté la société Fashion Partner Network de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

condamné la société ECMS à verser à la société Fashion Partner Network la somme de 1'000'€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,

pris acte que la société GTD ne conteste pas les deux factures de février 2017 et de mars 2017 émises par la société ECMS,

condamné en conséquence la société GTD à payer les sommes de 16'039,88'€ et 2'347,92'€ à la société ECMS, outre intérêts calculés au taux légal à compter du 28 avril 2017, date de la mise en demeure,

jugé que c'est à bon droit que la société ECMS a opéré la rétention de marchandises dont le transport lui a été confié par la société GTD en raison du non règlement des factures dues par cette dernière,

rejeté la demande de compensation entre les sommes dues par la société GTD à la société ECMS et le montant des factures réglées au titre de prestations de remplacement par la société GTD,

débouté la société ECMS au titre de sa demande d'indemnité de préavis de 5'347,80'€ comme étant mal fondée,

débouté la société GTD de ses demandes reconventionnelles concernant tant la prise en charge des factures relatives aux prestations de remplacement que l'indemnité de dommages et intérêts qu'elle sollicite au titre de la rétention de marchandises opérée par la société ECMS,

condamné la société GTD à payer à la société ECMS la somme de 1'000'€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

rejeté la demande d'exécution provisoire du jugement de la société ECMS,

condamné la société GTD aux entiers dépens.

La société GTD a interjeté appel par acte du 24 juin 2019 en ce que le jugement déféré :

a pris acte qu'elle ne conteste pas les deux factures de février 2017 et de mars 2017 émises par la société ECMS ,

l'a condamnée à payer les sommes de 16'039,88'€ et 2'347,92'€ à la société ECMS, outre intérêts calculés au taux légal à compter du 28 avril 2017, date de la mise en demeure,

a jugé que c'est à bon droit que la société ECMS a opéré la rétention de marchandises dont le transport lui a été confié par la société GTD en raison du non règlement des factures dues par cette dernière,

a rejeté la demande de compensation entre les sommes dues par elle à la société ECMS et le montant des factures réglées au titre de prestations de remplacement par elle,

l'a déboutée de ses demandes reconventionnelles concernant tant la prise en charge des factures relatives aux prestations de remplacement que l'indemnité de dommages et intérêts qu'elle sollicite au titre de la rétention de marchandises opérée par la société ECMS,

l'a condamnée à payer à la société ECMS la somme de 1'000'€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

l'a condamnée aux entiers dépens.

Par conclusions du 17 septembre 2019, fondées sur les articles L.133-7 du code de commerce, ainsi que l'article 12 du contrat type de sous-traitance les liant en application du décret du 26 décembre 2003, la société GTD demande à la cour de :

déclarer son appel recevable et bien fondé,

en l'état des pièces produites et des explications fournies au soutien :

infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

dit que c'était à bon droit que la société ECMS avait opéré la rétention de marchandises dont elle lui a confié le transport en raison du non-paiement des factures dues par cette dernière,

rejeté la compensation entre les sommes dues par ses soins à la société ECMS et ce qui lui était dû, du fait de la non-exécution du contrat par cette dernière et de la nécessité de ses prestations de remplacement,

l'a condamnée à payer à la société ECMS la somme de 1'000'€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

l'a condamnée aux entiers dépens de l'instance.

statuant à nouveau :

juger que :

c'est de façon illégale que la société ECMS a opéré la rétention de marchandises dont elle lui a confié le transport en raison du non-paiement des factures dues par cette dernière,

condamner la société ECMS à lui verser la somme de 5'000'€ à titre de dommages et intérêts pour le préjudice par elle subi, du fait de la rétention illégale de marchandises,

ordonner la compensation entre les sommes que la société ECMS lui doit et celles qu'elle doit à la société ECMS,

condamner la société ECMS au versement d'une somme de 3'000'€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner la société ECMS enfin en tous les dépens d'instance et d'appel, ces derniers étant distraits au profit de Me Romain Laffly ' Lexavoué Lyon sur son affirmation de droit.

Par conclusions du 7 novembre 2019, fondées sur les articles L.133-6, L.132-8 et L.133-7 du code de commerce, la société ECMS demande à la cour de':

la déclarer recevable et la dire bien fondée en toutes ses demandes,

confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

pris acte que la société GTD ne conteste pas les deux factures de février 2017 et de mars 2017 qu'elle a émise,

condamné en conséquence la société GTD à lui payer les sommes de 16'039,88'€ et 2'347,92'€, outre intérêts calculés au taux légal à compter du 28 avril 2017, date de la mise en demeure,

jugé que c'est à bon droit qu'elle a opéré la rétention de marchandises dont le transport lui a été confié par la société GTD en raison du non règlement des factures dues par cette dernière,

rejeté la demande de compensation entre les sommes que la société GTD lui doit et le montant des factures réglées au titre de prestations de remplacement par la société GTD,

en conséquence :

condamner la société GTD à lui payer les sommes de 16'039,88'€ et 2'347,92'€, outre intérêts calculés au taux légal à compter du 28 avril 2017, date de la mise en demeure,

déclarer irrecevable la société GTD en ses demandes reconventionnelles en ce qu'elles sont prescrites et en toute hypothèse, la déclarer mal fondées,

infirmer le jugement déféré en ce qu'il :

a jugé irrecevables ses demandes à l'encontre de la société Fashion Partner Network,

l'a déboutée en conséquence de l'ensemble des demandes formulées contre la société Fashion Partner Network,

a débouté la société Fashion Partner de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

l'a condamnée à verser à la société Fashion Partner Network la somme de 1'000'€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,

en conséquence :

la déclarer recevable et la dire bien fondée en toutes ses demandes, en ce qu'elles sont dirigées aussi à l'encontre de la société Fashion Partner Network,

condamner solidairement, in solidum, l'une à défaut de l'autre les sociétés GTD et Fashion Partner Network à lui payer la somme de : 5'347,80'€ HT, au titre du solde de l'indemnité de préavis,

condamner solidairement, in solidum, l'une à défaut de l'autre les sociétés GTD et Fashion Partner Network la somme de 5'000'€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, dont distraction faite au profit de Me Séverine Lavie, sur son affirmation de droit,

subsidiairement, si la cour devait mettre hors de cause la société Fashion Partner Network :

condamner la société GTD à lui payer la somme de 5'347,80'€ HT, au titre du solde de l'indemnité de préavis,

condamner la société GTD à lui payer la somme de 5'000'€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner la société GTD aux entiers dépens de l'instance, dont distraction faite au profit de Me Séverine Lavie, sur son affirmation de droit.

Par conclusions du 4 décembre 2019, fondées sur l'article L.133-6 du code de commerce, l'article 9 du code de procédure civile et 1315 ancien du code civil devenu 1353 du code civil, la société Fashion Partner SAS venant aux droits de la société Fashion Partner Network demande à la cour de':

constater que l'appelante GTD ne forme aucune demande contre elle,

juger irrecevable car prescrite l'action directe de la société ECMS dirigée contre elle,

dire l'action directe de la société ECMS également dépourvue de fondement et injustifiée,

en conséquence :

confirmer le jugement qui a débouté ECMS de ses demandes dirigées contre elle,

la mettre purement et simplement hors de cause,

condamner la société ECMS à lui payer :

la somme de 3'000'€ à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

la somme de 4'000'€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile

condamner la société ECMS aux entiers dépens de l'instance.

MOTIFS

Suivant décision de l'associé unique en date du 30 septembre 2019, la société Fashion Partner Network a été absorbée par la SAS Fashion Partner, par transmission universelle de patrimoine. Dans un souci de clarté, elle continuera d'être désignée sous le nom de Fashion Partner Network dans les motifs du présent arrêt.

Sur l'étendue de la saisine de la cour

Il y a lieu de rappeler à titre liminaire que les «'demandes'» tendant à voir «'constater'» et ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile et ne saisissent pas la cour ; qu'il en est de même des «'demandes'» tendant à voir «'juger'» lorsque celles-ci développent en réalité des moyens.

En application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif.

En l'espèce, en première instance, la société GTD a notamment sollicité la condamnation de la société ECMS à lui régler la somme de 13 710€ au titre de prestations non effectuées pour lesquelles des remplacements ont été mis en place, ainsi que la somme de 5 000€ à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice résultant de la rétention de marchandises et d'action directes auprès de clients.

Si dans sa déclaration du 24 juin 2019, la société GTD a interjeté appel du jugement du tribunal de commerce notamment en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes reconventionnelles concernant tant la prise en charge des factures relatives aux prestations de remplacement que l'indemnité de dommages et intérêts qu'elle sollicite au titre de la rétention de marchandises, elle ne reprend cependant pas sa demande de condamnation de la société ECMS au titre des prestations de remplacement dans le dispositif de ses conclusions.

Dans ce dispositif, la société GTD demande en effet uniquement à la cour, sur ce point, d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la compensation entre les sommes dues par elle à la société ECMS et ce qui lui était dû par cette dernière du fait de la non exécution du contrat et de la nécessité de prestations de remplacement, et statuant à nouveau, d'ordonner la compensation entre ces différentes sommes.

Or la seule demande de condamnation de la société ECMS figurant à son dispositif est celle relative à la demande de la société GTD au titre de dommages et intérêts à hauteur de 5 000 €.

Dès lors, en l'absence de toute demande d'infirmation du jugement en ce qu'il a rejeté sa demande de condamnation de la société ECMS au titre des prestations de remplacement et de toute demande de condamnation de ce chef formulée au dispositif de ses écritures, la cour n'est saisie d'aucune demande relative de condamnation de la société ECMS à ce titre et la demande de compensation de la société GTD ne pourra ainsi porter que sur les dommages et intérêts sollicités si la cour devait y faire droit.

Sur le fond

Sur la demande au titre des factures de février et mars 2017 émises par la société ECMS

La société ECMS sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société GTD à lui régler les factures de février et mars 2017 correspondant aux transports effectués et dont les montants s'élèvent respectivement à 16 039,88€ et de 2 347,92 €.

Ces factures ne sont contestées ni dans leur principe ni dans leur montant par la société GTD qui expose uniquement ne pas les avoir réglées, estimant que la société ECMS était également débitrice de plusieurs sommes à son égard. Elle ne sollicite pas la réformation du jugement de ce chef, lequel ne peut donc qu'être confirmé par la cour, en ce y compris en ce qu'il a assorti la condamnation de la société GTD à régler ces sommes, des intérêts calculés au taux légal, à compter du 28 avril 2017, date de la mise en demeure.

L'irrecevabilité soulevée par la société Fashion Partner Network au titre de la prescription de l'action directe de la société ECMS à son encontre, dont il résulte du corps de ses conclusions qu'elle est relative à la demande en paiement des factures de février et mars 2017, est sans objet, cette demande de la société ECMS n'étant dirigée qu'à l'encontre de la société GTD.

Sur la demande de dommages et intérêts formée par la société GTD

La société GTD fait grief aux premiers juges de l'avoir déboutée de sa demande de dommages et intérêts formée à l'encontre de la société ECMS alors que cette dernière, dans un contexte de dégradations de leurs relations commerciales, le 7 mars 2017, a illégalement opéré une rétention de marchandises qu'elle lui avait confiées, lui occasionnant ainsi un préjudice.

L'article L133-7 du code de commerce dispose que le voiturier a privilège sur la valeur des marchandises faisant l'objet de son obligation et sur les documents qui s'y rapportent pour toutes créances de transport, même nées à l'occasion d'opérations antérieures, dont son donneur d'ordre, l'expéditeur ou le destinataire restent débiteurs envers lui, dans la mesure où le propriétaire des marchandises sur lesquelles s'exerce le privilège est impliqué dans lesdites opérations.

En l'espèce, il résulte des échanges de courriers et de courriels entre les deux sociétés, que le 7 mars 2017, la société ECMS, n'étant pas réglée de la facture n°2017/01/04 du 31 janvier 2017, a procédé à la rétention de la marchandise transportée par le dernier véhicule assurant la tournée des «'secteurs 42-43'», avant de la restituer le lendemain, après avoir reçu un virement d'un montant de 17 946, 35€ par la société GTD.

La facture n°2017/01/04 du 31 janvier 2017 n'est produite par aucune des parties, mais au vu des autres factures établies par ECMS et versées aux débats, il apparaît que leur règlement est à échéance d'un mois. En revanche, la date de réception de la facture par la société GTD faisant courir ce délai d'un mois n'est pas connue, la société GTD affirmant dans un mail, sans en justifier, l'avoir réceptionnée le 15 février 2017. il n'est donc pas établi que cette facture a été réglée en retard par la société GTD.

En tout état de cause, comme le souligne justement la société GTD, la société ECMS n'était pas propriétaire de la marchandise retenue, et celui-ci n'est pas impliqué dans les opérations comme l'exige l'article L133-7 précité, dès lors qu'aucun élément ne permet de le rattacher au délai de règlement de la facture de janvier 2017 et que le litige ne concerne donc que les différents opérateurs de transport.

C'est donc à tort que le jugement a retenu que la société ECMS pouvait procéder à la rétention de marchandises dont le transport lui avait été confié par la société GTD en raison du non paiement de ses factures.

Pour autant, si la société GTD invoque un préjudice résultant pour elle de cette rétention injustifiée, elle ne développe aucun élément permettant de déterminer ce préjudice. Elle sollicite ainsi la somme de 5 000€ sans faire état des conséquences que la rétention des marchandises a pu avoir à son égard, étant observé par ailleurs la très courte durée de la rétention, les marchandises ayant été restituées dès le lendemain. La société GTD ne justifie ainsi pas de l'existence du préjudice allégué et doit être déboutée de sa demande.

Le jugement sera donc confirmé par substitution de motifs en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts de la société GTD.

La société GTD étant déboutée de sa demande de dommages et intérêts et la cour n'étant pas saisie par cette dernière d'une demande au titre des prestations de remplacement, il y a lieu de confirmer le jugement également en ce qu'il a rejeté la demande de compensation formée par la société GTD, aucune somme ne lui étant due par la société ECMS.

Sur la demande de la société ECMS au titre de l'indemnité de préavis

La société ECMS sollicite, par infirmation du jugement, la condamnation «'solidaire in solidum'», des sociétés GTD et Fashion Partner Network, ou subsidiairement uniquement la société GTD à lui payer la somme de 5'347,80'€ HT, au titre du solde de l'indemnité de préavis. Au visa de l'article 12.3 du contrat-type applicable aux transports publics routiers de marchandises exécutés par des sous-traitants, elle fait valoir que les tournées «'[Localité 5]'» et «'[Localité 4]'» ont un préavis de 3 mois, qu'elles devaient donc s'arrêter au 15 avril 2017 alors qu'elles se sont achevées le 4 mars 2017, que 30 journées font ainsi défaut, ce qui s'analyse comme un manque à gagner pour elle de 5'347,80'€ HT compte tenu de sa marge brute quotidienne de 178,26€.

La société Fashion Partner Network réplique que cette demande ne peut prospérer à son égard, en l'absence de tout lien contractuel avec la société EMS. Il ressort en effet du jugement du 13 mai 2016 arrêtant le plan de cession de la société Fashion Partner Group, que le contrat signé le 14 décembre 2015 entre cette dernière et la société ECMS ne fait pas partie des contrats transférés et énumérés en annexe du jugement.

La société ECMS soutient que les relations contractuelles se sont néanmoins poursuivies avec Fashion Partner Network, mais échoue à en rapporter la preuve dès lors que:

les tournées [Localité 5] et [Localité 4] ont été reprises par la société City Logistique postérieurement au jugement du 13 mai 2016 puis par la société GTD en qualité de donneurs d'ordre;

l'envoi des plans de transport et de pré-facturations par la société Fashion Partner Network à la société ECMS en février 2017 n'est pas suffisant à établir l'existence de relations contractuelles dans le cadre d'un système de sous-traitance, dès lors que les prestations effectuées par la société ECMS sont facturées à la société GTD;

c'est avec la société GTD que la société ECMS a négocié les conditions tarifaires des transports et non avec la société Fashion Partner Network, comme en témoigne notamment le courrier versé en pièce 25 de la société ECMS;

il ressort des courriels échangés par les sociétés ECMS et Fashion Partner Network en juin 2017 que cette dernière s'est positionnée en médiateur entre les sociétés GTD et ECMS, en accord avec cette dernière, ce rôle excluant qu'elle soit partie au contrat objet du litige;

les témoignages de conducteurs versés par la société ECMS qui indiquent en substance avoir poursuivi les mêmes tournées et livré les mêmes clients, ne sont pas de nature à déterminer la nature juridique des relations entre les différents sous traitants et donneurs d'ordre.

En l'absence de la démonstration de l'existence d'un lien contractuel avec la société Fashion Partner Network, la société ECMS doit être déboutée de sa demande d'indemnisation du préavis formée à l'encontre de celle-ci, et le jugement est confirmé de ce chef.

S'agissant de cette même demande dirigée par la société ECMS contre la société GTD, il y a lieu de faire application de l'article 12.2 du contrat type, aux termes duquel «'le contrat de sous-traitance à durée indéterminée peut être résilié par l'une ou l'autre des partie par l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception, moyennant un préavis d'un mois quand le temps déjà écoulé depuis le début d'exécution du contrat n'est pas supérieur à six mois. Le préavis est porté à deux mois quand ce temps est supérieur à six mois et inférieur à un an. Le préavis à respecter est de trois mois quand la durée de la relation est d'un an et plus'».

Il vient d'être jugé que le contrat du 14 décembre 2015 n'avait été maintenu ni par le plan de cession de la société Fashionpartner Group, ni par la poursuite des relations contractuelles entre la société ECMS et la société Fashion Partner Network, de sorte que la société ECMS ne peut invoquer l'ancienneté de ce contrat pour se prévaloir d'un préavis d'une durée de trois mois. Il résulte des courriels échangés entre les sociétés ECMS et GTD, ainsi que de la facturation établie par la première, que leurs relations contractuelles ont débuté le 15 novembre 2016. Dès lors, lorsque la société GTD a résilié le contrat à durée indéterminé la liant à la société ECMS, par courrier avec accusé de réception en date du 14 février 2017, moins de six mois s'étant écoulés depuis le début d'exécution du contrat, le préavis à respecter était d'un mois, la résiliation étant effective au 14 mars 2017, conformément à ce qu'elle a confirmé par courrier de cette date.

La société GTD ne justifiant pas de ce que la société ECMS aurait mis fin au contrat antérieurement à cette date, aucune indemnité de préavis ne lui est due, et c'est donc à bon droit qu'elle a été déboutée de cette demande par les premiers juges.

Sur la demande de la société Fashion Partner Network au titre de la procédure abusive dirigée contre la société ECMS

A défaut de preuve d'une faute de nature à faire dégénérer en abus le droit fondamental de la société ECMS de poursuivre en justice la défense de ses intérêts, laquelle ne peut se déduire de sa seule succombance partielle, et ne s'évince d'aucun autre élément du dossier, la société Fashion Partner Network critiquant en réalité le bien fondé des demandes adverses, et ne démontrant pas l'existence d'un quelconque préjudice, est déboutée de sa demande reconventionnelle en dommages-intérêts pour procédure abusive.

Sur les dépens et les demandes au titre de l'article 700

Il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties en cause d'appel, chacune conservant enfin la charge de ses dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, dans les limites de l'appel et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné la SARL Groupement des Transports Dubois aux dépens,

Statuant à nouveau de ce chef et ajoutant,

Déboute les parties de leurs demandes d'indemnités de procédure en appel,

Dit que chaque partie conserve à sa charge ses dépens de première instance et d'appel.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 19/04432
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-30;19.04432 ?
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