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24/06/2022 | FRANCE | N°19/02622

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 24 juin 2022, 19/02622


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





N° RG 19/02622 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MJ4S





Société CHARLOTTE COIFFURE



C/



[F]



S.E.L.A.R.L. MJ SYNERGIE

Association AGS - CGEA DE [Localité 5]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de LYON

du 14 Mars 2019

RG : 15/00122

COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 24 JUIN 2022



APPELANTE :



S

ociété CHARLOTTE COIFFURE

[Adresse 3]

Représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYO

Ayant pour avocat plaidant Me Olivier LACROIX de la SELARL CEFIDES, avocat au barreau de ...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 19/02622 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MJ4S

Société CHARLOTTE COIFFURE

C/

[F]

S.E.L.A.R.L. MJ SYNERGIE

Association AGS - CGEA DE [Localité 5]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de LYON

du 14 Mars 2019

RG : 15/00122

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 24 JUIN 2022

APPELANTE :

Société CHARLOTTE COIFFURE

[Adresse 3]

Représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYO

Ayant pour avocat plaidant Me Olivier LACROIX de la SELARL CEFIDES, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

[Y] [F]

née le 20 Mai 1969 à [Localité 6]

[Adresse 1]

Représentée par Me Laurent LIGIER de la SCP ELISABETH LIGIER DE MAUROY & LAURENT LIGIER AVOUÉS ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON

Ayant pour avocat plaidant Me Karine THIEBAULT de la SELARL CABINET KARINE THIEBAULT, avocat au barreau de LYON

PARTIE INTERVENANTE VOLONTAIRE

S.E.L.A.R.L. MJ SYNERGIE, Mandataires Judiciaires, représentée par Maître [V] [G] ès qualités de mandataire judiciaire de la société CHARLOTTE COIFFURE

[Adresse 2]

Représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON

Ayant pour avocat plaidant Me Arlette BAILLOT-HABERMANN, avocat au barreau de LYON

PARTIE INTERVENANTE FORCEE

Association AGS - CGEA DE [Localité 5]

[Adresse 4]

Non représentée

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 14 Avril 2022

Présidée par Catherine CHANEZ, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Gaétan PILLIE, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Sophie NOIR, conseiller

- Catherine CHANEZ, conseiller

ARRÊT : REPUTÉ CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 24 Juin 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Patricia GONZALEZ, Présidente et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

EXPOSE DU LITIGE

La société FMO 1 a employé Mme [Y] [F] à compter du 3 décembre 2012 sous contrat à durée indéterminée à temps plein en qualité de coiffeuse.

A compter de septembre 2013, Mme [F] a été rémunérée par la société Charlotte Coiffure, qui développe son activité de coiffure sous l'enseigne Frédéric Moreno et exploite plusieurs salons de coiffure dans la région Rhône-Alpes. Aucun document contractuel n'a été signé pour formaliser ce changement.

Au dernier état des relations contractuelles, Mme [F] occupait les fonctions de coiffeuse manager, niveau 2, échelon 3 au sein d'un salon de coiffure situé à [Localité 7].

Les relations contractuelles étaient soumises à la convention collective nationale de la coiffure et des professions connexes du 10 juillet 2006.

L'entreprise occupait à titre habituel au moins onze salariés lors de la rupture du contrat.

Le 22 février 2014, une altercation est survenue entre Mme [F] et Mme [B], l'une des coiffeuses salariées du salon. Mme [F] a été transportée par les pompiers en milieu hospitalier où elle s'est vu délivrer un certificat mentionnant une ITT de 5 jours. Elle a été placée en arrêt de travail jusqu'au 28 juin suivant pour accident du travail.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 février 2014, Mme [F] a été convoquée par Charlotte Coiffure à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement, fixé au 6 mars 2014, avec mise à pied à titre conservatoire.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 13 mars 2014, elle a été licenciée pour faute grave par Charlotte Coiffure, dans les termes suivants :

" A la suite de notre entretien du 06 mars 2014, et après réexamen de la situation, nous vous informons que nous sommes contraints de vous licencier pour faute grave.

En effet, les motifs que nous vous avons exposés lors de l'entretien sont les suivants :

Le samedi 22 février 2014, vous avez ogressé Mme [B] [M], coiffeuse au sein du salon que vous managez, et ce devant Mme [U] [W].

Ce jour, il y avait peu de clients, Mme [M] [B] a décidé de se faire laver les cheveux par Mme [U] [W], autre coiffeuse du salon, ce qui est strictement interdit.

Vous étiez très énervée. Vous avez demandé à Mme [B] de lui rendre la trousse GHD que vous lui aviez offerte.

Mme [B] est allée la chercher et a posé la trousse sur l'étagère des serviettes. La trousse est tombée par terre.

Vous avez " crié " sur elle pour qu'elle Ia ramasse. Mme [B] a refusé de le faire.

Vous êtes partie prendre le matériel de coiffure qui appartient à Mme [B] pour la contraindre à ramasser.

Mme [B] ne s'est pas laissée faire et est allée prendre votre matériel de coiffure en vous précisant qu'elle ne vous rendrait pas votre matériel si vous ne lui rendiez pas le sien.

Vous avez alors insulté Mme [B] avec des propos racistes, en lui précisant : " rends moi mes affaires sale racaille de Changaï ".

Vous vous êtes alors approchée de Mme [B] pour lui arracher votre matériel des mains. Ce faisant, vous vous êtes coupé avec un feather.

Vous êtes devenue violente et agressive en frappant Mme [B] tout en continuant à l'insulter et à tenir des propos menaçant : Vous l'avez claquée, poussée, mis des coups de talons dans les genoux.

Mme [U] vous a demandé de vous lâcher mutuellement. Mme [B], qui essayait de se défendre en vous tenant les cheveux, vous a lâché tout de suite. Vous n'avez pas lâché les siens et alors que Mme [B] était à terre, vous avez continué à lui tirer les cheveux.

Vous lui avez dit notamment: qu'elle était " une sale merde et que vous alliez la ruiner ainsi que toute sa famille, qu'elle ne savait pas encore ce qui allait lui arriver ".

Ce comportement est intolérable et incompatible avec votre fonction de manager du salon.

De plus, en agissant ainsi, vous avez manqué à l'obligation de sécurité qui vous incombe.

Votre comportement met également en cause notre obligation de sécurité qui nous incombe en tant qu'employeur.

Les conséquences immédiates de votre comportement rendent donc impossible la poursuite de votre activité au service de l'entreprise, même pendant un préavis' "

Par courrier recommandé avec avis de réception du même jour, la société FM01 a écrit à Mme [F] dans les termes suivants :

" La société CHARLOTTE COIFFURE, au sein de laquelle vous étiez détachée depuis le 1er septembre 2013, nous informe de la rupture de votre relation contractuelle avec cette entreprise.

Compte tenu du contrat de travail qui nous lie, nous vous informons que vous réintégrez, dès réception du présent courrier, votre poste au sein de notre société.

Le salon de [Localité 9] au sein duquel vous étiez affectée, ayant fermé, nous vous précisons que conformément à l'article 8 de votre contrat de travail, vous exercerez désormais votre prestation de travail au sein du salon situé centre commercial Auchan- Portes des Alpes à [Localité 8].

Votre durée de travail et votre rémunération demeure inchangée et reste conforme au contrat qui nous lie.

Vous trouverez ci-joint le planning horaire à compter du 14 mars 2014' "

Par lettre du 3 avril 2014 adressée à " Novaly ", Mme [F] a contesté son solde de tout compte, s'étonnant du défaut de versement de plusieurs sommes dues à titre de salaires et de primes, sans parvenir à un accord avec Charlotte Coiffure.

Mme [F] a également contesté le principe et les motifs du licenciement pour faute grave, a sollicité les indemnités de rupture et des dommages et intérêts ainsi que le paiement d'heures supplémentaires, par courrier du 24 avril 2014 adressé à Charlotte Coiffure. Dans ce même courrier, elle a informé la société qu'elle ne rejoindrait pas le salon de [Localité 8].

En réponse, par lettre du 15 mai suivant, la société Charlotte Coiffure lui a indiqué maintenir le licenciement pour faute grave et a refusé de lui verser un rappel de salaire au titre d'heures supplémentaires au motif que ces heures avaient été compensées par des repos. Elle lui a exposé que son contrat avec FMO 1 avait été suspendu et non rompu puisqu'elle n'avait pas souhaité signer la convention tripartite prévoyant la rupture de son contrat sur FMO 1 et son transfert sur Charlotte Coiffure, suspension à laquelle la rupture avec Charlotte Coiffure avait mis un terme, si bien qu'elle avait réintégré la société précédente depuis le 13 mars 2014.

Mme [F] a finalement saisi, par requête réceptionnée au greffe le 14 janvier 2015, le conseil de prud'hommes de Lyon pour contester son licenciement et solliciter diverses sommes à caractère indemnitaire et salarial.

Par jugement du 14 mars 2019, le conseil de prud'hommes, dans sa composition de départage, a :

- Annulé le licenciement ;

- Condamné la société à payer à Mme [F] la somme de 1 690,22 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, outre 169,02 euros au titre des congés payés afférents, 1 997,54 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 199,75 euros au titre des congés payés afférents, le tout avec intérêts au taux légal à compter du 16 mars 2015 ;

- Condamné la société à payer à Mme [F] la somme de 11 985 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul, avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;

- Débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

- Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire sous réserve des dispositions des articles R 1454-14 et 15 du code du travail ;

- Fixé la moyenne des 3 derniers mois de salaire à la somme de 1 990,54 euros ;

- Condamné la société à verser à Mme [F] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné la société aux dépens.

Par déclaration du 15 avril 2019, la société a interjeté appel de ce jugement.

Par jugement du 28 décembre 2020, le tribunal de commerce de commerce de Lyon a arrêté le plan de cession de la société au profit de la société PG Rescue management, avec faculté de substitution au bénéfice de la société PG Hair, prononcé la conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire et nommé en qualité de liquidateur judiciaire la société MJ Synergie.

Le liquidateur judiciaire est intervenu volontairement en la cause.

Mme [F] a fait assigner l'AGS CGEA en intervention forcée, suivant exploit du 6 octobre 2021.

Aux termes de ses conclusions déposées le 22 décembre 2021, la société, représentée par le liquidateur judiciaire MJ Synergie, demande à la cour de :

- Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [F] de sa demande de rappel d'heures supplémentaires et le réformer en ce qu'il a dit que le licenciement était nul ;

- Débouter Mme [F] de ses demandes.

Aux termes de ses conclusions déposées le 28 février 2022, Mme [F] demande à la cour de réformer le jugement et de dire qu'elle est créancière de la liquidation judiciaire de la société de la somme de 369,87 euros à titre de rappel de salaires pour heures supplémentaires, outre 36,99 euros au titre des congés payés afférents, de confirmer le jugement pour le surplus et de fixer sa créance sur la liquidation au titre de l'article 700 du code de procédure civile à la somme de 2 000 euros ainsi qu'aux dépens.

L'AGS CGEA n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 22 mars 2022.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, la cour rappelle qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de " constatations " ou de " dire " qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions dans la mesure où elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques ou qu'elles constituent en réalité des moyens.

Sur le licenciement

La cause réelle du licenciement est celle qui présente un caractère d'objectivité. Elle doit être existante et exacte. La cause sérieuse concerne une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite des relations contractuelles.

Aux termes de l'article L. 1232-6 alinéa 2 du code du travail, la lettre de licenciement comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur. Ces motifs doivent être suffisamment précis et matériellement vérifiables. La datation dans cette lettre des faits invoqués n'est pas nécessaire. L'employeur est en droit, en cas de contestation, d'invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier des motifs.

Si un doute subsiste, il profite au salarié, conformément aux dispositions de l'article L. 1235-1 du code du travail dans sa version applicable à l'espèce.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. Il incombe à l'employeur d'en rapporter la preuve.

Par ailleurs, aux termes de l'article L. 1226-9 code du travail, "Au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie, soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie.".

Et, en vertu de l'article L. 1226-13 du même code, toute rupture du contrat de travail prononcée en méconnaissance de ces dispositions est nulle.

En l'espèce, le licenciement est motivé dans le courrier de notification par le fait que la salariée aurait agressé une coiffeuse du salon qu'elle " manageait ", Mme [B], qu'elle aurait proféré des insultes racistes à son égard et des menaces, et ce en présence de Mme [U], autre salariée du salon.

Mme [F] soutient que la présentation des faits dans la lettre de licenciement résulte d'une appréciation partielle et partiale de la réalité dans la mesure où elle est présentée comme étant l'auteur des violences perpétrées le 22 février 2014, alors qu'elle en est en réalité la victime et où l'intervention virulente et menaçante de M. [B] n'y est pas mentionnée. Elle en veut pour preuve le récit qu'elle a fait aux policiers lors de son dépôt de plainte le 24 février 2014.

Elle produit le certificat médical rédigé le 22 février par un médecin du service des urgences de la polyclinique de Rillieux la pape, qui décrit deux ecchymoses de la région antéro interne de la cuisse droite, une dermo-abrasion du 1er espace interdigital de la main droite, un érythème du pavillon de l'oreille gauche et une ecchymose rétro-auriculaire gauche.

Mme [F] communique également l'attestation de Mme [C], manager dans un autre salon de coiffure de la marque. Celle-ci écrit que Mme [F] lui a téléphoné vers 13 heures, le 22 février, pour lui dire qu'elle était agressée verbalement depuis 9 heures par " [L] ", dont l'intimée précise qu'il s'agirait du prénom de Mme [B], qu'elle lui avait demandé de lui restituer la trousse de coiffeuse qu'elle lui avait prêtée. Mme [C] affirme avoir entendu à travers le téléphone [L] agresser verbalement Mme [F] et celle-ci lui dire " Pourquoi tu me jettes ma trousse à travers la figure ' ". Elles auraient ensuite raccroché et quelques minutes plus tard, Mme [F] l'aurait rappelée pour lui dire que [L] menaçait de la frapper et qu'il se sentait " très en danger ".

Mme [C] précise également avoir participé avec Mme [F] à des réunions au cours desquelles elle avait demandé à son responsable de la changer de salon car l'équipe était " assez difficile ". Il lui aurait été fait des promesses non tenues par la suite car aucun manager n'acceptait de gérer ce salon dans lequel d'autres responsables n'avaient pas tenu plus d'une semaine.

Enfin, Mme [F] fait remarquer que la société FMO 1 voulait qu'elle rejoigne un autre salon, ce qui démontrait bien l'inconsistance des griefs invoqués à l'appui de son licenciement.

Mme [F] soutient dans un premier temps que son licenciement serait nul comme survenu alors qu'elle se trouvait en arrêt de travail suite à un accident du travail et pour des faits non constitutifs d'une faute grave.

Elle affirme en outre que le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse.

Charlotte Coiffure réplique que Mme [C] n'a pas assisté aux faits et qu'elle ne fait que retranscrire les propos qui ont été tenus par Mme [F]. Elle produit des attestations.

Celle de M. [N], ancien salarié du salon, n'est pas datée et la signature qui y figure ne peut être comparée avec celle de sa pièce d'identité, dont la copie est de très mauvaise qualité. Elle sera donc écartée.

Dans une attestation du 21 janvier 2000, Mme [X], coordonnatrice générale du groupe Frédéric Moreno, relate que quelques jours après l'arrivée de Mme [F] dans le salon, ses collaborateurs lui ont téléphoné pour l'informer qu'elle était " très autoritaire ", mais que toutefois elle n'avait jamais été informée d'un comportement excessif de sa part, ni de propos excessifs, déplacés, humiliants ou insultants avant l'altercation du 22 février.

Mme [X] ajoute que Mme [B] s'est vu proposer un reclassement dans un salon de coiffure du [Localité 6] qu'elle a refusé.

Enfin, Mme [U] relate dans une attestation du 27 février 2014, que depuis quelque temps, Mme [F], Mme [B] et une autre collaboratrice ne s'entendaient pas et il y avait des tensions entre elles. Le matin du 22 février 201,4 Mme [F] et Mme [B] se seraient disputées au sujet du travail et du règlement du salon, ce qui aurait accru les tensions. Mme [F] aurait demandé à Mme [B] de lui rendre la trousse qu'elle lui avait offerte mais celle-ci l'aurait alors lancée sur les étagères si bien qu'elle serait tombée par terre. Elle aurait refusé de la ramasser malgré l'injonction de Mme [F] et chacune serait allée chercher les affaires de l'autre. Mme [F] aurait insulté sa collaboratrice et se serait blessée avec un outil en arrachant ses affaires de ses mains. Voyant sa blessure, elle aurait mis une claque à Mme [B] en la poussant et celle-ci se serait défendue. Elle n'aurait eu de cesse de l'insulter et elle l'aurait menacée. Toutes deux se seraient tiré les cheveux et Mme [F] aurait mis des coups de talon sur les genoux de Mme [B].

Mme [U] réfute toute violence commise de la part de M. [B], même si celui-ci a cassé la porte en voulant entrer.

La société produit également un arrêt de travail de Mme [B] daté du 22 février 2014 qui constate des cervicalgies, une contusion du visage et une dermabrasion dont la localisation ne peut être précisée, la copie du document étant de mauvaise qualité, et un certificat médical la concernant qui relève une anxiété et une insomnie nécessitant un suivi spécialisé, des cervicalgies et des hématomes sur les genoux, ayant entraîné une ITT du 26 février au 24 août 2014. Ce certificat est daté du 12 janvier 2015 et le médecin relate ce qu'il a constaté le 26 février 2014.

Même s'il est impossible, au vu des attestations et des certificats médicaux produits, de retracer précisément comment l'altercation s'est déroulée, il est constant que Mme [F], manager du salon de coiffure, a eu une altercation avec l'une de ses collaboratrices, laquelle, selon l'attestation de Mme [C] qu'elle-même produit, aurait duré toute la matinée, que sa décision de réclamer la restitution d'une trousse de travail qu'elle avait offerte à sa collaboratrice n'a pu qu'envenimer encore la situation et que cette altercation a été d'une telle gravité que celle-ci a cru bon d'appeler son mari et que la police et les pompiers sont intervenus. Mme [F] a ainsi gravement failli à l'obligation de sécurité à laquelle était tenue Charlotte coiffure et dont elle était garante pour les salariées du salon qu'elle encadrait.

Ce comportement, intolérable de la part d'une responsable, rendait impossible la poursuite de la relation de travail. La faute grave est caractérisée et le licenciement pouvait être prononcé nonobstant la suspension du contrat de travail.

Le jugement sera donc infirmé et Mme [F] sera déboutée de l'ensemble de ses demandes relatives à la rupture du contrat de travail.

Sur les heures supplémentaires

Constituent des heures supplémentaires toutes les heures de travail effectuées au-delà de la durée hebdomadaire du travail fixée par l'article L. 3121-10 du code du travail dans sa version applicable jusqu'au 10 août 2016, ou de la durée considérée comme équivalente. Cette durée du travail hebdomadaire s'entend des heures de travail effectif et des temps assimilés.

En vertu de l'article L. 3121-29 du code du travail, les heures supplémentaires se décomptent par semaine.

Les jours fériés ou de congés payés, en l'absence de dispositions légales ou conventionnelles, ne peuvent être assimilés à du temps de travail effectif ; aussi ces jours ne peuvent être pris en compte dans la détermination de calcul des droits à majoration et bonification en repos pour heures supplémentaires.

Il résulte des dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant (Le salarié peut prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies, soit avec l'accord au moins implicite de l'employeur, soit s'il est établi que la réalisation de telles heures a été rendue nécessaire par les tâches qui lui ont été confiées.

Mme [F] affirme qu'elle accomplissait un horaire hebdomadaire de 39 heures, en travaillant de 10 heures à 19 heures du mardi au vendredi, avec une heure de pause quotidienne, et de 9 heures à 17 heures le samedi, avec également une heure de pause, alors qu'elle n'était rémunérée que sur une base de 35 heures. Elle admet toutefois avoir récupéré 70 heures supplémentaires.

Charlotte Coiffure réplique que Mme [F] n'indique pas sur quelles semaines elle aurait effectué des heures supplémentaires qui n'auraient pas donné lieu à récupération et elle rappelle qu'il ressort des bulletins de salaire qu'elle a bénéficié d'absences pour formation et d'absences non rémunérées.

En tout état de cause, la société prétend que Mme [F] était en détachement auprès d'elle et qu'elle a été réintégrée au sein de FMO 1 à l'issue de leur relation, si bien qu'elle-même ne saurait être redevable des heures supplémentaires.

En effet, alors que Mme [F] admet avoir récupéré 70 heures supplémentaires, elle ne donne absolument aucune indication sur les heures supplémentaires non récupérées qu'elle aurait effectuées. Elle ne permet donc pas à l'employeur de répondre à sa demande en produisant ses propres éléments.

Le jugement sera donc confirmé de ce chef.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Mme [F] sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Infirme le jugement prononcé le 14 mars 2019 par le conseil de prud'hommes de Lyon, sauf en ce qu'il a débouté Mme [F] de sa demande de rappel de salaire ;

Statuant à nouveau ;

Déboute Mme [F] de l'ensemble de ses demandes ;

Condamne Mme [F] aux dépens de première instance et d'appel ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Le GreffierLa Présidente

Malika CHINOUNEPatricia GONZALEZ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 19/02622
Date de la décision : 24/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-24;19.02622 ?
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