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21/06/2022 | FRANCE | N°19/06433

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale d (ps), 21 juin 2022, 19/06433


AFFAIRE : CONTENTIEUX PROTECTION SOCIALE





COLLÉGIALE



RG : N° RG 19/06433 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MS5G





[Y]



C/

URSSAF RHÔNE ALPES







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LYON

du 19 Juin 2018

RG : 20141973





AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS





COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE D



PROTECTION SOCIALE



ARRÊT DU 21 JUIN 2022





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APPELANT :



[V] [Y]

né le 23 Mars 1973 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



comparant en personne







INTIMÉE :



URSSAF RHÔNE ALPES

6 rue du 19 mars 1962

[Localité 2]



représentée par Mme [C] [S] , munie d'un pouvoir





DÉ...

AFFAIRE : CONTENTIEUX PROTECTION SOCIALE

COLLÉGIALE

RG : N° RG 19/06433 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MS5G

[Y]

C/

URSSAF RHÔNE ALPES

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LYON

du 19 Juin 2018

RG : 20141973

AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE D

PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU 21 JUIN 2022

APPELANT :

[V] [Y]

né le 23 Mars 1973 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparant en personne

INTIMÉE :

URSSAF RHÔNE ALPES

6 rue du 19 mars 1962

[Localité 2]

représentée par Mme [C] [S] , munie d'un pouvoir

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 22 Mars 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Nathalie PALLE, Présidente

Bénédicte LECHARNY, Conseiller

Thierry GAUTHIER, Conseiller

Assistés pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 21 Juin 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Nathalie PALLE, Présidente et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par une déclaration d'appel du 7 juillet 2018, M. [V] [Y] (le cotisant) a relevé appel de quatre jugements au fond et deux jugements de refus de transmission de deux questions prioritaires de constitutionnalité rendus par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lyon le 19 juin 2018 dans des affaires l'opposant à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Rhône-Alpes (l'URSSAF de Rhône-Alpes).

Devant la cour d'appel, le cotisant a présenté, par mémoires séparés, deux questions prioritaires de constitutionnalité identiques à celles présentées devant les premiers juges, qui ont donné lieu, le 20 septembre 2021, à des observations du Ministère public, notifiées aux parties le 23 et le 24 septembre 2021.

Dans ses écritures adressées à la cour le 26 septembre 2018 et maintenues à l'audience du 22 mars 2022, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, le cotisant demande à la cour de :

- constater l'existence d'un moyen contestant la conformité d'une disposition législative, aux droits et libertés garanties par la Constitution,

- transmettre à la Cour de cassation pour transmission au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité suivantes :

« Au regard notamment des articles 2, 8 et 16 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789, et de l'article 34 de la Constitution, l'article L. 244-9 du code de la sécurité sociale, qui détermine les effets de la contrainte délivrée par les organismes de recouvrement et permet à une personne privée de se délivrer à elle-même un titre exécutoire, est-il constitutionnel ' »

« 1/ L'article L. 213-1 du code de la sécurité sociale, tel qu'il est interprété par la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle les unions de recouvrement constituant des personnes morales distinctes, la décision prise par l'une ne peut être opposée à une autre, porte-t-il atteinte au principe constitutionnel d'égalité devant la loi et d'égalité devant les charges publiques consacrées par les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789 et par l'article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958 '

2/ L'article L. 213-1 du code de la sécurité sociale, tel qu'il est interprété par la jurisprudence de la Cour de cassation comme conférant la personnalité morale aux URSSAF, soumettant ainsi les organismes de sécurité sociale à des règles de constitution différentes de celles applicables aux organismes purement privés, porte-t-il atteinte aux principes constitutionnels d'égalité devant la loi et d'égalité devant les charges publiques consacrés par les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 89 et par l'article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958 ' ».

A l'appui de ses questions, le cotisant fait valoir en substance que les dispositions contestées sont incontestablement applicables au litige pendant devant la cour d'appel, qu'elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel et que les questions présentent un caractère sérieux.

L'URSSAF n'a déposé aucun écrit et n'a présenté oralement aucun moyen relatif à la demande de transmission des deux questions prioritaires de constitutionnalité.

La Procureure générale près la cour d'appel a conclu, le 19 septembre 2019, à la non transmission des questions, la condition préalable du caractère sérieux n'étant pas remplie.

MOTIVATION

1. Sur la question prioritaire de constitutionnalité visant l'article L. 244-9 du code de la sécurité sociale

L'article L. 244-9 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction modifiée par la loi n° 88-16 du 5 janvier 1988, applicable à l'espèce, dispose que :

La contrainte décernée par le directeur d'un organisme de sécurité sociale pour le recouvrement des cotisations et majorations de retard comporte, à défaut d'opposition du débiteur devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, dans les délais et selon des conditions fixés par décret, tous les effets d'un jugement et confère notamment le bénéfice de l'hypothèque judiciaire

En l'espèce, le moyen tiré de l'atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution a été présenté devant la cour dans un écrit distinct des conclusions du cotisant et motivé.

Aussi convient-il de déclarer le moyen recevable.

L'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel dispose que la juridiction transmet sans délai et dans la limite de deux mois la question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation si les conditions suivantes sont remplies :

1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites ;

2° Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ;

3° La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux.

La disposition législative contestée est applicable au litige et elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

La cour observe que le cotisant se contente de citer les articles 2, 8 et 16 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789 et 34 de la Constitution sans énoncer les principes constitutionnels qui seraient violés par l'article L. 244-9 du code de la sécurité sociale.

En outre, d'une part, la question posée, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle, dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.

D'autre part, la question posée ne présente pas un caractère sérieux.

En effet, en premier lieu, le législateur peut conférer un effet exécutoire à certains titres délivrés par des personnes morales de droit privé chargées d'une mission de service public, au nombre desquelles figurent les organismes de sécurité sociale, et permettre ainsi la mise en oeuvre de mesures d'exécution forcée, sous réserve de garantir le droit à un recours effectif. En deuxième lieu, la contrainte décernée, après mise en demeure demeurée infructueuse, peut être contestée par le cotisant devant une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale et ce n'est qu'à l'expiration du délai prévu pour former ce recours que la contrainte comporte les effets d'un jugement. En troisième lieu, l'assimilation de la contrainte au jugement en ce qui concerne ses effets ne confère pas à celle-ci la nature d'une décision juridictionnelle.

Il ne saurait, dès lors, être sérieusement soutenu que l'article L. 244-9 du code de la sécurité sociale méconnaît l'article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958, ni qu'il porte atteinte aux droits garantis par les articles 2, 8 et 16 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789.

En conséquence, il n'y a pas lieu de transmettre à la Cour de cassation la question prioritaire de constitutionnalité.

2. Sur la question prioritaire de constitutionnalité visant l'article L. 213-1 du code de la sécurité sociale

L'article L. 213-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2012-1189 du 26 octobre 2012, applicable à l'espèce, dispose que :

Des unions de recouvrement assurent :

1° Le recouvrement des cotisations d'assurances sociales, d'accidents du travail, d'allocations familiales dues par les employeurs au titre des travailleurs salariés ou assimilés, par les assurés volontaires et par les assurés personnels ;

2° Le recouvrement des cotisations d'allocations familiales dues par les employeurs et membres des professions libérales ;

3° Une partie du recouvrement des cotisations et contributions sociales dues par les employeurs et les personnes exerçant les professions artisanales, industrielles et commerciales, dans les conditions prévues aux articles L. 133-6-2, L. 133-6-3 et L. 133-6-4 ;

4° Le recouvrement d'une partie de la contribution sociale généralisée selon les dispositions des articles L. 136-1 et suivants ;

5° Le recouvrement des contributions, versements et cotisations mentionnés aux articles L. 5422-9, L. 5422-11 et L. 3253-18 du code du travail ;

5° bis Le calcul et l'encaissement des cotisations sociales mentionnées aux articles L. 642-1, L. 644-1, L. 644-2, et au c du 1° de l'article L. 613-1 pour l'application des dispositions prévues à l'article L. 133-6-8.

6° Le contrôle et le contentieux du recouvrement prévu aux 1°, 2°, 3° et 5°.

Les unions sont constituées et fonctionnent conformément aux prescriptions de l'article L. 216-1.

Un décret détermine les modalités d'organisation administrative et financière de ces unions.

En matière de recouvrement, de contrôle et de contentieux, une union de recouvrement peut déléguer à une autre union ses compétences dans des conditions fixées par décret.

En l'espèce, le moyen tiré de l'atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution a été présenté devant la cour dans un écrit distinct des conclusions du cotisant et motivé.

Aussi convient-il de déclarer le moyen recevable.

La disposition législative contestée est applicable au litige et elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

Le cour relève encore que la question qui ne porte pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.

Enfin, s'agissant du caractère sérieux de la question, la cour rappelle que le Conseil constitutionnel a jugé que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qu'il établit.

Les URSSAF revêtent le caractère d'organismes de droit privé chargés de l'exécution de missions de service public et investis à cette fin de prérogatives de puissance publique. Elles sont instituées en vue de répondre à une mission exclusivement sociale fondée sur le principe de solidarité nationale et dépourvue de tout but lucratif et ne constituent donc pas des entreprises au sens des règles européennes de la concurrence.

Les organismes purement privés et les URSSAF étant incontestablement dans des situations différentes, le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que les secondes soient soumises à des règles de constitution différente de celles applicables aux premiers.

Encore, le fait que les URSSAF constituent des personnes morales distinctes et que la décision prise par l'une ne puisse être opposée à l'autre ne porte pas atteinte au principe d'égalité, dès lors qu'un recours effectif est ouvert à chaque cotisant pour contester le bien-fondé des sommes réclamées.

Il ne saurait, dès lors, être sérieusement soutenu que l'article L. 213-1 du code de la sécurité sociale méconnaît les principes constitutionnels d'égalité devant la loi et d'égalité devant les charges publiques consacrés par les articles 6 et 13 de la déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789 et par l'article 1er de la constitution du 4 octobre 1958.

En conséquence, il n'y a pas lieu de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,

DIT n'y avoir lieu de transmettre à la Cour de cassation les questions prioritaires de constitutionnalité.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale d (ps)
Numéro d'arrêt : 19/06433
Date de la décision : 21/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-21;19.06433 ?
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