La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/06/2022 | FRANCE | N°19/04866

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 17 juin 2022, 19/04866


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







N° RG 19/04866 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MPG7





[B]



C/



Société BYBLOS HUMAN SECURITY







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 21 Juin 2019

RG : F 18/01281

COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 17 JUIN 2022



APPELANT :



[Y] [B]

né le 04 Février 1976 à [Localité 4] (CONGO)

[Adresse 2]

[A

dresse 2]



Représenté par Me Stéphane TEYSSIER de la SELARL TEYSSIER BARRIER AVOCATS, avocat au barreau de LYON substitué par Me Frantz KOSKAS, avocat au barreau de LYON





INTIMÉE :



Société BYBLOS HUMAN SECURITY

[Adresse 1]

[Adr...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

N° RG 19/04866 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MPG7

[B]

C/

Société BYBLOS HUMAN SECURITY

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 21 Juin 2019

RG : F 18/01281

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 17 JUIN 2022

APPELANT :

[Y] [B]

né le 04 Février 1976 à [Localité 4] (CONGO)

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Stéphane TEYSSIER de la SELARL TEYSSIER BARRIER AVOCATS, avocat au barreau de LYON substitué par Me Frantz KOSKAS, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

Société BYBLOS HUMAN SECURITY

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON

Ayant pour avocats plaidants, Me Béatrice CHAINE et Me Thomas BERTHILLIER, de la SELARL BEATRICE CHAINE AVOCAT avocats au barreau de LYON substitués par Me Julie PERRON, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 07 Avril 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Patricia GONZALEZ, Présidente

Sophie NOIR, Conseiller

Catherine CHANEZ, Conseiller

Assistées pendant les débats de Gaétan PILLIE, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 17 Juin 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Patricia GONZALEZ, Présidente, et par Gaétan PILLIE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La société Byblos Human Security exerce une activité de sécurité et de prévention.

Elle applique la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité.

M. [B] a été embauché par la société Byblos Human Security à compter du 1er janvier 2016 avec une reprise d'ancienneté au 9 mai 2015 en qualité de chef d'équipe des services de sécurité incendie dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet en contrepartie d'une rémunération mensuelle de 1732,32 euros bruts correspondant à 151,67 heures de travail par mois.

Par courrier du 16 janvier 2018, M. [B] a été convoqué à un entretien fixé au 26 janvier 2018, préalable à un éventuel licenciement.

Le salarié a été licencié pour faute grave par lettre recommandée avec accusé réception du 5 février 2018 rédigé dans les termes suivants:

'Vous êtes salarié dans notre entreprise en qualité d'Agent SSIAP 2. Dans ce cadre, vous recevez tous les mois, par voie électronique, un planning individuel qui précise vos jours et horaires de travail avec le lieu d'intervention.

Vous êtes en l'occurrence affecté sur le site du UGC Cité Internationale, situé [Adresse 3].

Le mardi 9 janvier 2018, nous avons été informés par le client pour lequel vous êtes affecté d'une faute professionnelle de votre part, que nous ne pouvons tolérer au vu des faits reprochés.

En effet, le 9 janvier 2018, alors que vous étiez planifié de 17 heures 30 à 00 heures 30, une alarme feu s'est déclenchée aux alentours de 21h30. Vous avez alors demandé au SSIAP 1 présent au moment des faits, d'aller procéder à la levée de doutes.

Suite à un échange au talkie-walkie avec le SSIAP 1 qui vous a fait part qu'aucun sinistre n'était en cours, vous avez alors décidé de quitter le PC de sécurité pour vous rendre sur les lieux et vérifier par vous-même.

Vous n'êtes cependant pas sans savoir que la sécurité de nos sites exige la présence permanente d'un agent au PC de sécurité. En abandonnant votre poste de SSIAP 2 au PC de sécurité et en adoptant la conduite décrite ci-dessus, vous avez compromis la sécurité du site et la pérennité de la relation commerciale qui nous lie à notre client.

En effet, il existe dans notre profession peu de fautes aussi graves que celle de laisser sciemment, sans surveillance, un site que l'on est chargé de sécuriser.

Ainsi à l'endroit où est positionné le poste de SSIAP 2, vous étiez censé réarmer correctement l'ensemble des dispositifs du système de sécurité incendie. Votre absence à un tel endroit a créé une faille importante au dispositif de sécurité mis en place, comme vous l'avez fait, faisant courir un danger particulièrement grave aux biens et aux personnes qui se trouvent sur le site. Du fait de votre négligence, 147 personnes ont dû être évacuées du site, et de ce fait, occasionnant un préjudice financier d'un montant de 1.734,60 euros pour notre client sans compter les ventes additionnelles (confiseries).

Conformément aux missions du SSIAP 2, que vous n'êtes pourtant pas sans connaître, qu'il est strictement interdit de quitter le PC de sécurité en situation de crise.

Lors de votre embauche, vous avez eu connaissance de nos exigences quant à l'attitude attendue et requise de nos collaborateurs, eu égard à la spécificité de nos métiers.

Force est de constater que votre manque de professionnalisme a donc mis en péril la sécurité du site, mais surtout, a créé un sentiment d'insécurité pour notre client, alors même que nous vous engageons pour éviter ce type de situation.

Par ailleurs, vous avez nui gravement à l'image de notre société et mis en danger le contrat de prestation de service qui nous lie à notre client, ce dernier s'étant déclaré particulièrement outré par votre attitude.

Fait aggravant à votre situation, ce n'est pas la première fois que nous avons à vous rappeler vos devoirs en tant qu'agent SSIAP 2. En effet, en date du 19 avril 2017, nous vous avions adressé un avertissement pour des faits similaires, puisque vous aviez déjà manqué à vos obligations professionnelles, en ne respectant pas les consignes de sécurité présentes sur le site client. Force est de constater votre légèreté vis-à-vis de votre Responsable hiérarchique et de notre client, compte tenu de la répétition de vos agissements décrits ci-dessus.

Les explications recueillies au cours de l'entretien ne nous ont pas permises de faire évoluer notre position. En conséquence, nous vous notifions, par la présente, votre licenciement pour faute grave, sans préavis ni indemnité, votre maintien dans l'entreprise s'avérant désormais impossible au regard du trouble occasionné par votre attitude et vos manquements.

Votre licenciement prendra donc effet à la date d'envoi du présent courrier, le cachet de la poste faisant foi (...)'.

M. [B] a saisi le conseil de prud'hommes de Lyon d'une contestation de ce licenciement le 30 avril 2018.

Par jugement du 21 juin 2019, le conseil des prud'hommes de Lyon a :

- déclaré fondé le licenciement prononcé à l'égard de M. [Y] [B] ;

- débouté M. [Y] [B] de toutes ses demandes ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires ;

- condamné M. [Y] [B] aux entiers dépens de l'instance.

M. [Y] [B] a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 10 juillet 2019.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 9octobre 2019, il demande à la cour :

- de réformer intégralement les chefs du jugement du Conseil de prud'hommes l'ayant débouté de ses demandes :

- de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- d'indemnité compensatrice de préavis outre congés payés afférents,

- d'indemnité de licenciement,

- de rappel de salaire au titre du coefficient réellement applicable, outre congés payés afférents,

- de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de formation,

- de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité de résultat,

- de rappel d'heures supplémentaires, outre les congés payés afférents,

- de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat,

- d'article 700 du code de procédure civile.

- de statuer de nouveau sur ces chefs du jugement,

Sur le licenciement :

- de déclarer sans cause réelle et sérieuse le licenciement

Sur le contrat de travail :

- de dire et juger que l'employeur a commis les manquements suivants à ses obligations lors de l'exécution du contrat de travail :

- non-respect des visites médicales obligatoires,

- non-respect de l'obligation de formation,

- non-paiement de l'intégralité de la rémunération,

- exécution fautive du contrat de travail,

Sur l'indemnisation du préjudice subi :

- d'écarter l'application de l'article L-1235-3 du Code du travail qui est contraire à l'article 24 de la charte sociale européenne et à l'article 10 de la convention n° 158 de l'OIT ou à tout le moins en appréciant in concreto le préjudice du salarié qui n'est pas réparé de manière adéquate par le barème,

- de condamner la société Byblos Human Security à lui payer les sommes suivantes :

outre intérêts au taux légal à compter de la saisine du Conseil de prud'hommes (article 1231-7 du code civil)

- 29.415 euros nets de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 3.922 euros bruts d'indemnité compensatrice de préavis,

- 392 euros au titre des congés payés afférents,

- 1.388 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 8.411,40 euros de rappel de salaire au titre du coefficient réellement applicable à ses fonctions,

- 841 euros au titre des congés payés afférents,

- 5.000 euros nets de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de formation,

- 2.500 euros nets de dommages et intérêts pour non-respect des visites médicales à la médecine du travail,

- 490 euros bruts à titre de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires,

- 49 euros au titre des congés payés afférents,

- 10.000 euros nets de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail,

- d'ordonner la capitalisation des intérêts en vertu de l'article 1343-2 du code civil,

- de condamner la société Byblos Human Security à lui remettre des documents de rupture et des bulletins de salaire rectifiés conformes à la décision, dans les 15 jours de la signification de l'arrêt et passé ce délai sous astreinte de 150 euros par jour de retard,

- de se réserver le contentieux de la liquidation de l'astreinte,

- de condamner la société Byblos Human Security à lui payer une indemnité de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure,

- de condamner la société Byblos Human Security aux dépens.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 7 janvier 2020, la société Byblos Human Security demande pour sa part à la cour:

A titre principal :

- de constater que le licenciement de M. [Y] [B] repose sur des faits matériellement vérifiables et imputables à ce dernier qui rendaient impossible la poursuite des relations de travail ;

- de constater qu'elle a appliqué le bon coefficient hiérarchique à M. [Y] [B] ;

- de constater qu'elle a respecté son obligation de sécurité envers M. [Y] [B] ; - de constater qu'elle a respecté son obligation de formation et d'adaptation au poste envers M. [Y] [B] ;

- de constater qu'elle a payé à M. [Y] [B] l'intégralité des heures supplémentaires qu'il a effectuées ;

- de constater qu'elle a exécuté loyalement le contrat de travail la liant à M. [Y] [B];

En conséquence

- de confirmer le jugement du Conseil de prud'hommes ayant jugé que le licenciement de M. [Y] [B] repose sur une faute grave ;

- de confirmer le jugement du Conseil de prud'hommes ayant débouté M. [Y] [B] de l'intégralité de ses demandes ;

- de réformer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande indemnitaire au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et condamner, à titre reconventionnel, M. [Y] [B] à lui verser la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile au titre des frais irrépétibles tant en première instance qu'en appel ainsi qu'aux entiers dépens, ceux d'appel étant distraits au profit de Maître Romain Laffly - Lexavoué [Localité 5] sur son affirmation de droit ;

A titre subsidiaire,

Si, par extraordinaire, la Cour d'Appel de Lyon venait à réformer le jugement entrepris et à juger que le licenciement de M. [Y] [B] ne reposait pas sur une faute grave, elle ne pourrait que : - dire et juger que le licenciement de M. [Y] [B] repose sur une cause réelle et sérieuse ;

En conséquence :

- de fixer le salaire brut moyen de référence de M. [Y] [B] à 1.961 euros ;

- de débouter M. [Y] [B] de sa demande indemnitaire ;

Si, par extraordinaire, la cour d'appel de Lyon venait à faire droit, sur le principe, à tout ou partie des autres demandes formulées, elle ne pourrait que :

- de réduire à de plus justes et légitimes proportions le quantum des demandes de M. [Y] [B] en fonction du préjudice réellement subi et démontré par lui ;

A titre infiniment subsidiaire :

Si, par impossible, la cour d'appel de Lyon venait à requalifier le licenciement de M. [Y] [B] en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, elle ne pourrait que :

- de limiter la demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de M. [Y] [B] à la somme de 5.883 euros en fonction du préjudice réellement subi, démontré et lié à la rupture de son contrat de travail ;

En tout état de cause,

- de débouter M. [Y] [B] de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- de condamner M. [Y] [B] à lui verser la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile au titre des frais irrépétibles tant en première instance qu'en appel ainsi qu'aux entiers dépens, ceux d'appel étant distraits au profit de Me. [F] [I] - Lexavoué sur son affirmation de droit.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 8 mars 2022.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le bien fondé du licenciement

Par application de l'article L. 1232-1 du code du travail, tout licenciement individuel doit reposer sur une cause réelle et sérieuse.

Selon l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles; si un doute subsiste, il profite au salarié.

Par ailleurs, il résulte des articles L.1234-1 et L.1234-9 du code du travail, ce dernier dans sa version antérieure à l'ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017 que, lorsque le licenciement est motivé par une faute grave, le salarié n'a droit ni à un préavis ni à une indemnité de licenciement.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis.

L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve, laquelle doit reposer sur des faits précis et matériellement vérifiables, qu'il doit reprendre dans la lettre de licenciement prévue par l'article L1232-6 du code du travail, cette lettre fixant ainsi les limites du litige.

En l'espèce il résulte des termes de la lettre de licenciement retranscrits ci-dessus que le salarié a été licencié pour faute grave en raison des faits suivants :

- avoir, le 9 janvier 2018, abandonné la surveillance du PC de sécurité du site client UGC Ciné Cité Internationale situé à [Localité 5] après le déclenchement d'une alarme feu aux alentours de 21h30 en décidant de se rendre sur les lieux pour effectuer les vérifications par lui-même après un échange avec sa collègue SSIAP1 chargée de la levée de doute lui ayant confirmé qu'aucun sinistre n'était en cours

- avoir ainsi généré l'évacuation de 147 personnes du site, occasionnant un préjudice financier au client de l'entreprise d'un montant minimum de 1734,60 euros

- avoir ainsi compromis la sécurité du site et la pérennité de la relation commerciale avec le client et nuit à l'image de la société

- avoir par le passé déjà fait l'objet d'un avertissement le 19 avril 2017 pour des faits similaires à savoir un non-respect des consignes de sécurité applicables sur le site client.

Contrairement à ce que soutient le salarié, la lettre de licenciement ne fait pas état d'une insuffisance professionnelle en raison du non-respect d'une procédure mais évoque expressément l'existence d'une 'faute professionnelle'.

M. [Y] [B] n'a donc pas été licencié pour motif disciplinaire en raison d'une insuffisance professionnelle.

Le salarié ne conteste pas avoir quitté son poste au PC sécurité du client UGC Ciné Cité Internationale le 9 janvier 2018 afin de procéder lui-même à la levée de doute suite au déclenchement d'une alarme feu.

Il soutient cependant que cette initiative n'est pas fautive dans la mesure où :

- l'employeur ne justifie pas de la consigne lui faisant interdiction de quitter son poste au PC sécurité

- la réglementation ne fait d'ailleurs plus obligation à un chef d'équipe de rester en permanence au PC sécurité, l'annexe I de l'arrêté du 2 mai 2005 n'est qu'un référentiel emploi et non une obligation réglementaire et en toute hypothèse ne fait pas obligation au chef d'équipe de services de sécurité incendie de demeurer au PC sécurité

- l'employeur ne peut lui reprocher 'une méconnaissance des règles de procédure' puisque les faits sont la conséquence directe de manquements à ses obligations réglementaires dans la mesure où :

- lorsqu'une alarme feu s'est déclenchée, il a immédiatement demandé par talkie-walkie à l'agent de sécurité incendie (SSIAP1) de se rendre sur le lieu de l'alarme afin d'effectuer une levée de doute, quelques minutes après il a eu la surprise de voir celle-ci revenir au PC sécurité afin qu'il lui indique comment se rendre sur le lieu de la levée de doute car elle ne connaissait pas bien le site, quelque temps plus tard elle est revenue vers lui en lui indiquant que la levée de doute semblait négative, devant les hésitations répétées de sa collègue liées à son absence de formation sur le site, sa méconnaissance du site et le risque encouru en cas d'incendie pour l'ensemble des clients du cinéma, il a été contraint de quitter temporairement son poste au PC sécurité pour s'assurer par lui-même de l'absence incendie en cours

- le jour des faits, il travaillait en sous-effectif puisqu'il n'y avait que deux salariés présents au lieu de trois comme exigé par l'article MS 46 alinéa 6 de l'arrêté du 25 juin 1980 relatif aux règles de sécurité incendie dans les établissements recevant du public de sorte qu'il a été contraint lui-même de se déplacer pour vérifier qu'il n'y avait pas d'erreur dans la levée de doute effectuée par la seconde salariée qui ne connaissait pas le site

- l'exploitant n'était pas présent sur le site lors de l'incendie et ne lui avait laissé aucune consigne claire, ce en violation de l'article MS50 de l'arrêté du 25 juin 1980.

L'article MS50 de l'arrêté du 25 juin 1980 portant approbation des dispositions générales du règlement de sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public dispose que :

- lorsque le service est assuré par des agents de sécurité incendie, le poste de sécurité mis à la disposition des personnels chargés de la sécurité incendie doit être occupé en permanence par une personne au moins.

En sa qualité de chef d'équipe des services de sécurité incendie, dont l'une des missions consiste selon l'article 2 l'arrêté du 2 mai 2005 relatif aux missions, à l'emploi et à la qualification du personnel permanent des services de sécurité incendie des établissements recevant du public et des immeubles de grande hauteur, a assurer la direction du poste de sécurité lors des sinistres, M. [Y] [B] avait nécessairement connaissance de cette réglementation qui lui imposait de rester en permanence au PC sécurité lorsqu'il y était affecté.

La société Byblos Human Security verse aux débats la copie d'un courriel daté du 11 janvier 2018 de Mme [P] [W], directrice adjointe de l'UGC Ciné Cité internationale de Lyon, dont aucun élément ne permet de remettre en cause l'authenticité, rédigé ainsi :

'Suite à notre entretien de ce jour, voici les faits suite à l'évacuation générale du mardi 19 janvier 2018.

Après un été contacté par le site à 21h35, [K] et moi-même sommes partis au cinéma pour une arrivée sur site à 21h55 en constatant que les portes automatiques asservies étaient ouvertes, donc [K] en a déduit que le CMSI n'était pas réarmé, de ce fait [K] s'est dirigé directement au PCS en m'informant que le SSIAP2 n'était pas présent à son poste.

Pour ma part en allant me rendre sur le lieu de la détection, je rencontre [V] SSIAP1 et [Y] SSIAP2 au niv-1. Je demande à [Y] de rejoindre [K] au PCS de suite, [K] a procédé au réarmement du CMSI en présence de [Y] afin de faire repartir les projections.

Avec l'aide du personnel en poste et [K] nous avons pu faire repartir quelques séances de 22 heures soit 9 sur 14.

Après avoir fait repartir les séances, [K] s'est occupé du réarmement des moteurs de désenfumage ainsi que du réarmement des clapets en partie réarmés par [Y] alors que les moteurs étaient toujours en action.

Ensuite nous avons demandé à [Y] de nous rejoindre au PCS afin qu'ils ne donne des explications sur le pourquoi nous avons dû évacuer le bâtiment, dans un premier temps sans la présence de [V] SSIAP1.

Il nous explique que [V] est venue au PCS pour prendre connaissance du lieu de la détection et s'y est rendue avec les explications suivantes : 'niveau -2 côté ascenseur', nous explique qu'il a réarmé le SSI en nous montrant du doigt le SDI et n'ayant pas eu de nouvelles de [V], il a pris la décision de quitter son poste afin de vérifier par lui-même. Nous lui avons demandé quel type de déclenchement s'est produit (DAI ou DM) et il nous a répondu avec beaucoup d'hésitation que c'était un DM.

[V] rentre dans le PCS, nous lui demandons de nous expliquer sa version et elle nous informe qu'elle était au point de contrôle des billets lorsque l'alarme restreinte a retentie, elle s'est dirigée directement au PCS pour prendre connaissance du lieu de la détection.

Elle a dû faire répéter à deux fois les informations car cette dernière n'était pas assez précise pour elle (niv-2 côté ascenseur), sur ces informations relativement peu précise (DAI ou DM) elle s'est rendue sur les lieux en constatant qu'une tête de détection était activée dans la zone. Elle informe [Y] que la levée de doutes est négative.

[K] a donc redemandé la raison pour laquelle il a quitté son poste, en réponse il nous dit qu'il voulait vérifier les informations du SSIAP1 car elle ne connaissait pas bien le bâtiment.

[K] rappelle quelques règles sur le rôle d'un SSIAP2 en cas de sinistre dont celle de ne pas quitter son poste.

Il nous redit qu'il avait réarmé le SSI donc qu'il pouvait aller vérifier les informations données par le SSIAP1.

[K] rappelle à [Y] qu'un SSI se compose d'un SDI et d'un CMSI et que si le CMSI n'est pas réarmé le message d'évacuation se déclenche au bout de cinq minutes, il lui demande par la même occasion ce que veut dire CMSI, il reste hésitant et sans réponse.

Au vu de l'incompétence, des faits, du changement de discours à l'arrivée du SSIAP1 au PCS et de l'état de [V] en entendant ces propos nous avons décidé de stopper l'entretien.

Suite à cet incident j'ai sondé l'équipe du cinéma qui a trouvé [Y] incompréhensible et en état de stress. Les collaborateurs ne se sentent pas en sécurité en sa présence, nous l'avons déjà repris pour l'avoir surpris en train de dormir au PCS, cet incident plus celui du 09/01 nous amène à demander à ce qu'il ne soit plus en poste au sein du cinéma'.

Il résulte de cette pièce que le salarié a volontairement quitté le PC sécurité sans y être contraint par un élément extérieur à savoir le comportement, l'absence de formation de sa collègue SSIPA1, les hésitations de celle-ci sur la levée de doute, le manquement de l'employeur aux règles de sécurité incendie dans les établissements recevant du public ou encore par l'absence de l'exploitant ou de l'un de ses représentants sur le site et de consignes claires de la part de ce dernier.

L'employeur ne justifie pas du préjudice financier causé à son client par le manquement fautif du salarié.

Aucun élément n'est versé aux débats par l'employeur pour démontrer que cet incident a compromis la pérennité de la relation commerciale avec le client.

En revanche, le courriel de Mme [P] [W] du 11 janvier 2018 démontre que le comportement de M. [Y] [B] a nuit à son image.

De même, au vu des exigences imposées par l'article MS50 de l'arrêté du 25 juin 1980 précité, l'abandon même momentané du PC sécurité a incontestablement compromis la sécurité du site.

Enfin, la société Byblos Human Security justifie d'un précédent avertissement notifié à M. [Y] [B] le 19 avril 2016 pour plusieurs manquements aux consignes de sécurité après que ce dernier ait été surpris en train de dormir au PC sécurité pendant son service sur le site UGC Ciné Cité Internationale, pour être difficilement joignable au talkie-walkie et pour avoir visionné des films pendant ses vacations.

Au vu de tous ces éléments, la cour estime que les faits reprochés au salarié dans la lettre de licenciement constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis.

En conséquence la cour confirme le jugement en ce qu'il a dit que le licenciement était fondé et en ce qu'il a débouté M. [Y] [B] de ses demandes d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la demande de rappel de salaire :

Il appartient au salarié qui se prévaut d'une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail, de démontrer qu'il assure de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il revendique, ce qui ne peut résulter des simples mentions de la fiche du poste occupé.

Au soutien de sa demande de rappel de salaire qui n'est pas détaillée, M. [Y] [B] fait notamment valoir : 

- qu'il était rémunéré sur la base du coefficient 150 alors qu'il devait bénéficier du coefficient 185 en raison de ses fonctions

- qu'en effet, il ressort de l'arrêté du 2 mai 2005 relatif aux missions, à l'emploi et à la qualification du personnel permanent des services de sécurité incendie des établissements recevant du public et des immeubles de grande hauteur que les missions du chef d'équipe de sécurité incendie correspondent aux missions du coefficient 185 de l'annexe II de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité.

La société Byblos Human Security répond :

- que le poste de chef d'équipe sécurité incendie est classé au coefficient 150 par l'annexe 1 de l'accord du 1er décembre 2006 sur les qualifications professionnelles des métiers de la prévention et de la sécurité et par l'annexe 2 du même accord portant classification des emplois repères

- que M. [Y] [B] se contente de considérations générales et ne justifie pas qu'il accomplissait effectivement les missions correspondant au coefficient 185, avec le degré d'autonomie afférent.

En l'espèce, M. [Y] [B] ne produit aucun élément permettant de démontrer que dans le cadre de ses fonctions, il accomplissait des tâches et responsabilités relevant de la classification coefficient 185.

En conséquence, le salarié n'est pas fondé à se prévaloir d'une reclassification au coefficient 185 et la cour, confirmant le jugement de ce chef, rejette la demande de rappel de salaire.

Sur la demande de dommages-intérêts pour non-respect de l'obligation de formation :

Selon l'article L 6321-1 du code du travail, l'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail et veille au respect de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations.

M. [Y] [B] affirme que la société ne démontre pas l'avoir formé et adapté à son poste, lui faisant ainsi perte d'une chance de retrouver un emploi qualifié alors qu'il se trouve désormais privé d'emploi.

La société Byblos Human Sécurity réplique que M. [Y] [B] a bénéficié d'une formation au mois de mai 2015 en arrivant sur le site de l'UGC Ciné Cité internationale ainsi que de formations tout au long de la relation contractuelle et qu'il ne justifie pas de la réalité et de l'étendue de son préjudice.

Il ressort du planning de travail du salarié du mois de mai 2015 versé aux débats par l'employeur que M. [Y] [B] a été positionné sur une formation durant quatre jours : les 9, 11,12 et 13 mai 2015.

S'agissant d'une formation dispensée dès le premier jour de la jour de la relation de travail, elle visait nécessairement l'adaptation à son poste de travail, même son intitulé et son contenu ne sont pas précisés.

En revanche, il n'est pas démontré que le titre d'habilitation délivré par la société Byblos Human Security à M. [Y] [B] le 1er janvier 2016 pour l'autoriser à accéder sans surveillance à un local réservé aux électriciens fait suite à la délivrance d'une formation.

La délivrance d'une seule formation d'adaptation au poste d'une durée de 4 jours durant les 32 mois de la relation de travail caractérise un manquement de l'employeur à son obligation de formation.

Cependant, M. [Y] [B] ne justifie pas de sa situation professionnelle postérieure au licenciement et la cour relève que la seule indemnisation par Pôle emploi dont il est justifié concerne la période du 1er octobre 2018 au 13 septembre 2019 pour la somme totale de 3834,02 euros ce qui démontre que le salarié a retrouvé un emploi après son licenciement.

La perte de chance de retrouver un emploi n'étant pas démontrée, la cour confirme le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande de dommages-intérêts pour non-respect de l'obligation de formation.

Sur la demande de dommages-intérêts pour non-respect des visites médicales à la médecine du travail :

L'article R 4624-10 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable, dispose que: ' Le salarié bénéficie d'un examen médical avant l'embauche ou au plus tard avant l'expiration de la période d'essai par le médecin du travail.

Les salariés soumis à une surveillance médicale renforcée en application des dispositions de l'article R. 4624-18 ainsi que ceux qui exercent l'une des fonctions mentionnées à l'article L. 6511-1 du code des transports bénéficient de cet examen avant leur embauche.'

Selon l'article L3122-42 du code du travail dans sa version abrogée à compter du 10 août 2016 : 'Tout travailleur de nuit bénéficie, avant son affectation sur un poste de nuit et à intervalles réguliers d'une durée ne pouvant excéder six mois par la suite, d'une surveillance médicale particulière dont les conditions d'application sont déterminées par décret en Conseil d'Etat'.

L'article R 3122-19 du même code, dans sa version applicable en la cause, dispose que: ' La surveillance médicale renforcée des travailleurs de nuit s'exerce dans les conditions suivantes:

1° Un travailleur ne peut être affecté à un poste de nuit que s'il a fait l'objet d'un examen préalable par le médecin du travail et si la fiche d'aptitude atteste que son état de santé est compatible avec une telle affectation. Cette fiche indique la date de l'étude du poste de travail et celle de la dernière mise à jour de la fiche d'entreprise lorsqu'elle est exigible. Elle est renouvelée tous les six mois, après examen du travailleur par le médecin du travail ;

2° Le médecin du travail est informé par l'employeur de toute absence, pour cause de maladie, des travailleurs de nuit ;

3° En dehors des visites périodiques, le travailleur peut bénéficier d'un examen médical à sa demande. Le médecin du travail prescrit, s'il le juge utile, des examens spécialisés complémentaires lesquels sont à la charge de l'employeur ;

4° Des recommandations précisant les modalités des examens à pratiquer en vue d'assurer la surveillance médicale des travailleurs de nuit font l'objet, en tant que de besoin, d'un arrêté conjoint des ministres chargés du travail et de l'agriculture.'

La réparation d'un préjudice résultant d'un manquement de l'employeur suppose que le salarié qui s'en prétend victime produise en justice les éléments de nature à établir d'une part la réalité du manquement et d'autre part l'existence et l'étendue du préjudice en résultant.

En l'espèce, M. [Y] [B] soutient que la société Byblos Human Security ne l'a pas soumis à une visite médicale tous les six mois alors qu'il était travailleur de nuit et que ce manquement lui a fait perdre une chance de bénéficier d'examens médicaux.

La société Byblos Human Sécurity réplique que le salarié :

- ne justifie pas de sa qualité de travailleur de nuit

- a bénéficié de 3 visites médicales entre juin 2015 et octobre 2017,

- ne justifie pas de la réalité de son préjudice.

Pour démontrer sa qualité de travailleur de nuit, M. [Y] [B] fait seulement valoir que l'employeur 'ne saurait prétendre qu'il ne travaillait pas de nuit alors que la lettre de licenciement fait état de faits se déroulant la nuit'.

Cet argument ne suffit pas à établir sa qualité de travailleur de nuit.

En toute hypothèse, M. [Y] [B] ne précise ni ne justifie des examens médicaux dont il a été privé du fait du manquement qu'il reproche ici à l'employeur.

En conséquence la cour, confirmant le jugement de ce chef, rejette la demande de dommages-intérêts pour non-respect des visites médicales à la médecine du travail.

Sur la demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires :

La durée légale du travail effectif de 35 h par semaine prévue à l'article L.3121-10 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, constitue le seuil de déclenchement des heures supplémentaires payées à un taux majoré dans les conditions de l'article 3121-22 du même code.

Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments de contrôle de la durée du travail. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

M. [Y] [B] se borne à faire valoir que 'l'employeur ne rémunérait pas la totalité des heures supplémentaires comme le démontre la différence entre le nombre d'heures travaillées inscrit sur les bulletins de salaire et le nombre d'heures supplémentaires payé' sans aucune autre précision, ne serait-ce que sur le volume des heures travaillées et leur période, et sans produire aucun élément au soutien de sa demande.

Aussi et comme le fait justement valoir la partie appelante, le salarié ne produit aucun élément suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies.

La demande de rappels d'heures supplémentaires doit donc être écartée.

M. [Y] [B] fait également valoir que l'employeur ne démontre pas la validité de l'accord d'entreprise portant sur l'aménagement du temps de travail conclu au sein de l'UES Byblos le 9 septembre 2010 lui ayant permis de le rémunérer de ses heures supplémentaires au taux de 10 % au lieu du taux légal de 25 %.

La société Byblos Human Security répond qu'elle a valablement rémunéré les heures supplémentaires réalisées par le salarié avec une majoration de 10 % sur la base de cet accord d'entreprise et ce conformément aux dispositions de l'article L3121-22 alinéa 2 du code du travail devenu l'article L3121-33.

Selon les dispositions de l'article L3121-33 du code du travail dans sa version applicable à compter du 1er janvier 2016, une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche prévoit le ou les taux de majoration des heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale ou de la durée considérée comme équivalente. Ce taux ne peut être inférieur à 10 %.

Selon l'article L2232-12 du code du travail dans sa version applicable en la cause : 'La validité d'un accord d'entreprise ou d'établissement est subordonnée à sa signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli au moins 30 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants, et à l'absence d'opposition d'une ou de plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés à ces mêmes élections, quel que soit le nombre de votants'.

Or, la société Byblos Human Security ne justifie pas de ce que le syndicat CFDT, représenté par M. [X] [D], délégué syndical, remplissait bien les conditions de représentativité fixées à l'article L2232-12 du code du travail.

En conséquence, l'accord d'entreprise du 9 septembre 2010 n'est pas régulier et la société Byblos Human Security doit payer les heures supplémentaires réalisées par M. [Y] [B] au taux majoré de 25 %.

Il ressort des fiches de paie versées aux débats par l'employeur au titre de la période du 1er janvier 2016 au 5 février 2018 que M. [Y] [B] a réalisé :

- 10,16 heures supplémentaires au mois de janvier 2016 au taux horaire de 11,4210 euros

- 2,58 heures supplémentaires au mois de janvier 2017 au taux horaire de 11,5930 euros

- 1,75 heures supplémentaires au mois d'avril 2017 au taux horaire de 11,5930 euros

- 2,33 heures supplémentaires au mois de mai 2017 au taux horaire de 11,5930 euros

- 5,33 heures supplémentaires au mois de janvier 2018 au taux horaire de 11,5930 euros.

M. [Y] [B] a perçu un total de 302,82 euros en paiement de ses heures supplémentaires au taux majoré de 10 % alors qu'il aurait du percevoir la somme totale de 344,12 euros en tenant compte d'un taux majoré à 25%.

En conséquence la cour, infirmant le jugement de ce chef, condamne la société Byblos Human Security à payer à M. [Y] [B] la somme 41,30 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 4,13 euros de congés payés y afférents, assortis d'intérêts au taux légal à compter du 7 mai 2018, date de convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation et d'orientation valant première mise en demeure dont il est justifié.

Sur la demande de dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail :

Au soutien de sa demande de dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail M. [Y] [B] soutient :

- que la société Byblos Human Security l'a régulièrement planifié sur un temps de travail inférieur à celui prévu au contrat de travail et notamment en février, mars, avril, mai, juin, septembre, octobre, novembre, décembre 2016 et en juin, octobre, novembre 2017, manquant ainsi à son obligation de lui fournir un travail

- que l'employeur ne rémunérait pas correctement les heures supplémentaires.

La société Byblos Human Security répond :

- que M. [Y] [B] ne rapporte pas la preuve de ce qu'il était régulièrement planifié sur un temps de travail inférieur à celui prévu au contrat de travail

- que cette allégation n'est pas compatible avec sa demande de rappels d'heures supplémentaires

- que M. [Y] [B] a été rémunéré a minima pour le temps de travail contractuellement prévu

- que le salarié ne justifie pas de l'étendue de son préjudice à hauteur de 10'000 euros.

Il ressort de toutes les fiches de paie versées aux débats que M. [Y] [B] a systématiquement été rémunéré sur la base d'une durée de travail de 151,67 heures entre le 1er janvier 2016 et le 5 février 2018.

Le salarié ne justifie d'aucun préjudice distinct de celui d'ores et déjà indemnisée par le rappel d'heures supplémentaire calculées sur la base d'un taux majoré de 25 %.

En conséquence la cour, confirmant le jugement de ce chef, rejette la demande de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail.

Sur la capitalisation des intérêts légaux:

La capitalisation des intérêts sera ordonnée, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil.

Sur la remise des documents de fin de contrat sous astreinte:

La société Byblos Human Security sera également condamnée à délivrer à M. [Y] [B] dans les 6 semaines du prononcé du présent arrêt les documents de fin de contrat et un dernier bulletin de salaire dûment rectifiés au vu des dispositions du présent arrêt.

Dans la mesure où il n'y a pas lieu de douter de la bonne exécution de cette condamnation, la demande d'astreinte sera rejetée.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur les demandes accessoires:

Partie perdante, la société Byblos Human Security supportera la charge des dépens de première instance et d'appel.

Par ailleurs, M. [Y] [B] a dû pour la présente instance exposer tant en première instance qu'en appel des frais de procédure et honoraires non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser intégralement à sa charge.

Il y a donc lieu d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a débouté de sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner l'employeur à lui payer sur le même fondement une indemnité de 500 euros au titre des frais qu'il a dû exposer en première instance et en appel.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Confirme le jugement entrepris, sauf en celles de ses dispositions ayant :

- rejeté la demande de rappels d'heures supplémentaires

- rejeté la demande de remise des documents de rupture ;

- rejeté la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- mis les dépens de l'instance à la charge de M. [Y] [B] ;

Statuant à nouveau sur ces chefs et y ajoutant :

Condamne la société Byblos Human Security à payer à M. [Y] [B] la somme 41,30 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 4,13 euros de congés payés y afférents, assortis d'intérêts au taux légal à compter du 7 mai 2018 ;

Ordonne la capitalisation des intérêts dus au moins pour une année entière ;

Dit que les sommes allouées supporteront, s'il y a lieu, le prélèvement des cotisations et contributions sociales ;

Condamne la société Byblos Human Security à remettre à M. [Y] [B] dans les 6 semaines du prononcé du présent arrêt les documents de fin de contrat et un dernier bulletin de salaire dûment rectifiés au vu des dispositions du présent arrêt ;

Condamne la société Byblos Human Security à payer à M. [Y] [B] la somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Byblos Human Security aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Le GreffierLa Présidente

Gaétan PILLIEPatricia GONZALEZ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 19/04866
Date de la décision : 17/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-17;19.04866 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award