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16/06/2022 | FRANCE | N°19/05122

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 16 juin 2022, 19/05122


N° RG 19/05122

N° Portalis DBVX-V-B7D-MP23









Décision du Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 12 juin 2019



RG : 2018j01138







SELARL MJ SYNERGIE - MANDATAIRES JUDICIAIRES



C/



[G]

[L]

[A]

[W]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRÊT DU 16 Juin 2022





APPELANTE :



SELARL MJ SYNERG

IE - MANDATAIRES JUDICIAIRES, représentée par Maître [T] [I] et Maître [R] [J], ès qualités de liquidateur judiciaire de la FINANCIÈRE PUZZLE,

[Adresse 1]

[Localité 10]



Représentée par Me Raphaël PEUCHOT de la SELARL FOURMANN & PEUCHOT, avocat au barreau de LYON, t...

N° RG 19/05122

N° Portalis DBVX-V-B7D-MP23

Décision du Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 12 juin 2019

RG : 2018j01138

SELARL MJ SYNERGIE - MANDATAIRES JUDICIAIRES

C/

[G]

[L]

[A]

[W]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRÊT DU 16 Juin 2022

APPELANTE :

SELARL MJ SYNERGIE - MANDATAIRES JUDICIAIRES, représentée par Maître [T] [I] et Maître [R] [J], ès qualités de liquidateur judiciaire de la FINANCIÈRE PUZZLE,

[Adresse 1]

[Localité 10]

Représentée par Me Raphaël PEUCHOT de la SELARL FOURMANN & PEUCHOT, avocat au barreau de LYON, toque : 1786

INTIMES :

M. [E] [G]

né le 20 Janvier 1973 à [Localité 9]

[Adresse 4]

[Localité 10]

Représenté par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475 et ayant pour avocat plaidant, Me Anne BOLLAND-BLANCHARD, avocat au barreau de LYON, substitué par Me Philippe GONNET, avocat au barreau de LYON

Mme [P] [L]

née le 25 Juin 1976 à [Localité 10]

[Adresse 7]

[Localité 8]

Représentée par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475 et ayant pour avocat plaidant, Me Anne BOLLAND-BLANCHARD, avocat au barreau de LYON, substitué par Me Philippe GONNET, avocat au barreau de LYON

M. [F] [A]

né le 23 Novembre 1967 à [Localité 11]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représenté par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475 et ayant pour avocat plaidant, Me Anne BOLLAND-BLANCHARD, avocat au barreau de LYON, substitué par Me Philippe GONNET, avocat au barreau de LYON

M. [C] [W]

né le 28 Novembre 1959 à TIARET (ALGERIE)

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475 et ayant pour avocat plaidant, Me Anne BOLLAND-BLANCHARD, avocat au barreau de LYON, substitué par Me Philippe GONNET, avocat au barreau de LYON

******

Date de clôture de l'instruction : 09 Juillet 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 04 Mai 2022

Date de mise à disposition : 16 Juin 2022

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Catherine CLERC, conseiller faisant fonction de président

- Raphaële FAIVRE, vice-présidente placée

- Marie CHATELAIN, vice-présidente placée

assistées pendant les débats de Jessica LICTEVOUT, greffier

A l'audience, Catherine CLERC a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Catherine CLERC, conseiller faisant fonction de président, et par Jessica LICTEVOUT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DU LITIGE

La SAS Puzzle, dont l'activité est le conseil et le montage immobilier, l'expertise et l'assistance à maître d'ouvrage, la maîtrise d'ouvrage déléguée et l'activité de contractant général du bâtiment, a pour associés M. [C] [W], M. [E] [G], Mme [P] [L] et M. [F] [A].

La SAS Artefact Amo a pour activité l'assistance à maîtrise d'ouvrage, la maîtrise d'ouvrage déléguée et contractant général du bâtiment'; elle a pour président la société Puzzle, laquelle est son actionnaire majoritaire.

M.[H] [M] est le dirigeant du groupe TGL, lequel détient 100% de la SARL TGL Management, dont il est également le gérant.

La société TGL Management, qui est elle-même la présidente de la SAS Financière Puzzle et son associée unique, détient 100% (moins une part appartenant à M. [M]) de la société TGL Group laquelle détient 100% de l'activité de la société TGL Immobilier.

Dans une volonté d'acquisition de la société Puzzle, la société TGL Group a obtenu, en septembre 2014, la communication d'un mémorandum d'information par la société KPMG Corporate Finance basé sur un plan d'affaires 2015/2016 présentant la situation de la société cible.

Par lettre d'intention du 9 décembre 2014, adressée aux associés de la société Puzzle, la société TGL Group a formalisé une offre d'achat à hauteur de 7'460'000'€, portée à 11'000'000'€ le 12 décembre 2014, et réitérée le 22 décembre 2014.

La dernière lettre d'intention de la société TGL Group fixant l'offre de rachat à 11'000'000€ a été adressée à la société KPMG Corporate Finance le 5 janvier 2015 et signée par tous les cédants.

La SAS Financière Puzzle est une société holding créée pour réaliser le projet de rachat de la société Puzzle'; elle a pour président et associé unique la société TGL Management.

Le 5 mars 2015, M. [C] [W], M. [E] [G], Mme [P] [L] et M. [F] [A] ont signé avec la société Financière Puzzle un contrat de transfert sous conditions suspensives de 100% des titres de la société Puzzle'; le titre III de ce contrat contenait une convention de garantie par laquelle les cédants s'engageaient à restituer au cessionnaire dans les conditions visées au présent titre, une fraction du prix d'acquisition des actions (réduction de prix) correspondant à la survalorisation du prix de cession des actions de la société Puzzle résultant notamment de toute inexactitude dans les déclarations des garants et ayant une cause ou une origine antérieure à la date de résiliation.

Le 12 mars 2015, les cédants sont devenus associés de la société Financière Puzzle.

Le 24 mars 2015, une augmentation de capital de la société Financière Puzzle a été décidée à laquelle ont souscrit la société TGL Immobilier, et les quatre associés historiques de la société Puzzle. Le même jour, un pacte d'associés a été signé entre les actionnaires de la société Financière Puzzle en annexe duquel était joint le «'plan d'affaires Puzzle consolidé 2015-2016'»'.

L'ensemble de cette opération a été réalisée grâce à un montage financier dont notamment la souscription d'un prêt BPI pour 1'500'000€ et d'une dette sénior par la société Financière Puzzle pour 4'250'000€.

Au cours des années 2016- 2017, les relations entre les associés de la société Financière Puzzle et M. [M], dirigeant du groupe TGL, se sont détériorées.

Parallèlement, la situation de la société Financière Puzzle s'est dégradée et l'exercice clos le 30 septembre 2016 a affiché un résultat déficitaire de 4'979'130'€.

Le 7 février 2017, MM. [W] et [G] ont démissionné de leurs fonctions de Directeurs Généraux des sociétés Puzzle et Artefact.

Le 27 juillet 2017, la société Financière Puzzle a tenu une assemblée générale lors de laquelle elle a décidé de procéder à la réduction du capital social d'un montant de 2'742'576'€ et à l'augmentation du capital social d'un montant de 1'254'000'€ par l'émission de 31'350'000 actions nouvelles.

Par courrier du 31 juillet 2012, les associés minoritaires ont contesté la tenue de cette assemblée générale faisant valoir la société Financière Puzzle avait mis à l'ordre du jour une réduction de la participation des associés minoritaires lors d'une assemblée générale convoquée dans un délai de 8 jours pendant les congés estivaux, sachant qu'ils ne pourraient être présents.

Une nouvelle assemblée générale s'est tenue le 14 décembre 2017 avec le même ordre du jour que le 27 juillet 2017. Bien que les actionnaires minoritaires s'y soient opposés, la société TGL Immobilier, actionnaire majoritaire de la société Financière Puzzle, a voté le coup d'accordéon diluant la participation des minoritaires.

MM. [W], [G] et [A] ainsi que Mme [L] ont saisi le tribunal pour obtenir la nullité des assemblées générales irrégulières et dénoncer la fraude.

Le 8 décembre 2017, la société Financière Puzzle a déposé une requête sollicitant l'autorisation d'envoyer un huissier au siège social de la société KPMG Corporate Finance aux fins d'accéder aux serveurs de la société et de rechercher la preuve d'un dol commis à son préjudice par les cédants lors de l'acquisition de la société Puzzle, la société Financière Puzzle soutenant que des informations ont été effacées par M. [W] avant que ce dernier n'ait été mis à pied.

La société Financière Puzzle a ensuite fait réaliser un rapport d'expertise par Monsieur [X] [U], expert-comptable, qui a estimé la survalorisation de l'entreprise lors de son acquisition et a évalué le préjudice subi par la société Financière Puzzle à 3 000'000d'euros.

Par une ordonnance du 11 décembre 2017, le président du tribunal de commerce de Lyon a fait droit à la demande in futurum puis, par ordonnance du 23 mai 2018, a rétracté cette ordonnance.

Par courrier du 22 février 2018, la société Financière Puzzle a contesté la valeur des titres cédés et a déclenché la garantie d'actif et de passif prévue à l'article 18 de la convention de garantie à l'effet d'obtenir la somme de 3'000'000€ correspondant au plafond global de la garantie en cas de réduction de prix. Par courrier du 14 mars 2018, MM. [W], [G] et [A] ainsi que Mme [L] lui adressaient un refus.

Par acte d'huissier de justice du 20 juillet 2018, la société Financière Puzzle a fait assigner à bref délai MM. [W], [G] et [A] ainsi que Mme [L] devant le tribunal de commerce de Lyon en paiement de l'indemnité prévue en cas de survalorisation des titres, soit la somme de 3'000'000'€.

En cours de procédure, le tribunal de commerce de Lyon, par jugement du 18 décembre 2018, a prononcé la liquidation judiciaire de la société Financière Puzzle et a désigné la SELARL MJ Synergies représentée par Me [T] [I] et Me [R] [J], en qualité de liquidateur judiciaire (le liquidateur judiciaire).

Par jugement du 12 juin 2019, le tribunal de commerce de Lyon a :

rejeté la demande de jonction de l'instance avec l'affaire enrôlée sous le RG n°2017J01656 (litige relatif aux demandes d'annulation des procès-verbaux d'assemblée générale),

prononcé la jonction de l'instance enrôlée sous le RG n°2018J01990 (assignation de la société Financière Puzzle à l'encontre des cédants) avec la instance enrôlée sous le RG n°2018J1138 (assignation des cédants à l'encontre du liquidateur judiciaire),

débouté la société Financière Puzzle, entre les mains de la société MJ Synergie - Mandataires Judiciaires, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Financière Puzzle, de sa demande de condamnation de M. [G], Mme [L], M. [A] et M. [W],

rejeté toute autre demande des parties,

condamné le liquidateur judiciaire de la société Financière Puzzle à payer la somme de 5'000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile à M. [G], Mme [L], M. [A] et M. [W],

condamné le liquidateur judiciaire de la société Financière Puzzle aux entiers dépens de l'instance.

Le liquidateur judiciaire a interjeté appel par acte du 18 juillet 2019 en ce que le jugement déféré a :

débouté la société Financière Puzzle, représentée son liquidateur judiciaire, de ses demandes de condamnations dirigées contre M. [G], Mme [L], M. [A] et M. [W],

rejeté toute autre demande de la société Financière Puzzle,

condamné le liquidateur judiciaire, à verser la somme de 5'000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné le liquidateur judiciaire aux dépens d'instance,

«'aux motifs erronés que :

le contrat de cession de 100 % des titres de la société Puzzle à la société Financière Puzzle du 5 mars 2015 contiendrait un prix forfaitaire ne détaillant aucun mode de calcul, que ce contrat, signé par la société Financière Puzzle en qualité de cessionnaire, ne comporterait aucune lettre d'intention à ses annexes,

que seul le contrat de cession signé en date du 5 mars 2015 pouvait s'appliquer puisqu'il est le seul signé entre les parties, acquéreur et cédants,

que seul le contrat de cession fait référence au prix'».

Par conclusions du 6 février 2020, fondées sur les articles 1134 ancien,1184 ancien du code civil ainsi que sur les articles 1103, 1104, 1217 et 1224 et suivants nouveaux du code civil, le liquidateur judiciaire demande à la cour de statuer comme suit :

réformant intégralement :

juger recevable et fondé l'appel en garantie initié par la société Financière Puzzle à l'encontre des garants,

juger que Mme [L] et MM. [W], [G] et [A] ont renoncé à toute contestation de l'appel en garantie dans le délai de trente jours, imparti par l'article 21-3 de l'accord de garantie et les en déclarer forclos,

condamner en conséquence au bénéfice de la société Financière Puzzle entre ses mains :

M. [W] à lui verser la somme de 1'267'650€

M. [G] à lui verser la somme de 1'267'650€,

Mme [L] à lui verser la somme de 182'850€,

M. [A] à lui verser la somme de 281'850€,

débouter les intimés de l'ensemble de leurs fins, prétentions et conclusions contraires,

condamner solidairement l'ensemble des intimés à lui verser la somme de 15'000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner les intimés solidairement à l'ensemble des dépens d'instance.

Par conclusions du 16 mars 2020, fondées sur l'article 1134 du code civil, ainsi que sur les articles 122 et 124 du code de procédure civile, Mme [L] et MM. [G], [W] et [A] (ci-après désignés «'les garants'») demandent à la cour de':

confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

subsidiairement,

désigner tel expert judiciaire qu'il lui plaira ayant la mission de :

se rendre en tout lieu nécessaire à l'exécution de sa mission,

prendre connaissance de l'ensemble des données juridiques, économiques, comptables et financières concernant les sociétés Financière Puzzle, Puzzle et leur filiale Artefact,

prendre connaissance des analyses de M. [U] et du cabinet BMA,

entendre tout sachant susceptible de lui apporter des informations utiles à l'exécution de ce qui précède et notamment de s'entretenir avec MM. [K] (cabinet BMA) et [U],

donner son avis sur la sincérité et la régularité de l'EBITDA consolidé du groupe Puzzle des exercices 2012, 2013 et 2014,

donner son avis sur le montant de la trésorerie de BFR au 24 mars 2015,

donner son avis sur le caractère réaliste du plan d'affaire annexé à l'acte de cession du 5 mars 2015 au regard du carnet de commande au jour de la cession et des affaires signées en 2015 et 2016,

examiner la structure d'exploitation des sociétés Financière Puzzle, Puzzle et leur filiale Artefact depuis 2015,

donner son avis sur les analyses de M. [U] et du cabinet BMA,

entendre les parties en leurs dires et explications,

mettre en temps utile, aux termes des opérations d'expertise, et par une note de synthèse, les parties en mesure de faire valoir leurs dernières observations,

prendre toute mesure de sauvegarde nécessaire à la conservation des preuves,

déposer son rapport dans les trois mois de la saisine,

dire que les frais d'expertise seront partagés par moitié entre les parties,

en tout état de cause,

rejeter toutes demandes, fins et conclusions plus amples et contraires,

condamner la société MJ Synergie à leur payer 5'000€ chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

MOTIFS

A titre liminaire, il est rappelé que la cour n'est pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de procéder à des recherches que ses constatations rendent inopérantes.

Sur la recevabilité de la demande de garantie formée par la société Financière Puzzle

A titre liminaire, il doit être relevé que':

- les premiers juges ont omis de statuer sur l'irrecevabilité de l'appel en garantie telle que soutenue par les garants, s'étant limités à statuer sur le bien fondé de la demande en paiement de la société Financière Puzzle tirée de l'application de la convention de garantie,

- les garants ont réitéré cette irrecevabilité dans les motifs de leurs dernières conclusions d'intimés mais ont omis de reporter celle-ci au dispositif de ces écritures,

- le liquidateur judiciaire a pris des conclusions d'appelant en réponse sur les moyens d'irrecevabilité et a demandé dans leur dispositif que l'appel en garantie soit dit recevable.

Ainsi quand bien même que l'effet dévolutif de l'appel ne s'étend pas à l'irrecevabilité de l'appel en garantie en l'absence de décision des premiers juges sur ce point et que ce chef de prétention n'est pas repris au dispositif des conclusions d'intimés, il doit être jugé que la cour est néanmoins saisie de cette prétention,

- dès lors d'une part, que l'irrecevabilité soutenue en substance, pour défaut du droit d'agir du fait du non-respect du préalable de conciliation ou de l'expiration de la durée de la garantie, constitue une fin de non-recevoir recevable à tout stade de procédure, y compris pour la première fois en appel,

- et que de seconde part, l'appelant en concluant en réponse sur cette irrecevabilité pour soutenir dans le dispositif de ses dernières écritures la recevabilité de l'appel en garantie, a mis expressément dans le débat d'appel cette fin de non-recevoir.

Le liquidateur judiciaire proteste contre les moyens d'irrecevabilité opposés par les garants à l'encontre de l'appel en garantie initié par la société Financière Puzzle consistant à soutenir que':

celle-ci est irrecevable dans ses demandes pour défaut de droit à agir, les parties ayant contractuellement exclu de saisir le juge de la difficulté née d'une éventuelle survalorisation, les parties devant dans ce cas désigner ou faire désigner par le président du tribunal de commerce un expert aux fins de chiffrage de la survalorisation,

elle est forclose dans ses demandes initiées par assignation du 20 juillet 2018, la garantie ayant expirée le 31 mars 2018,

elle assigné les garants en justice sans respecter le préalable de conciliation prévu par le contrat de cession,

Sur le dernier point, il est admis en droit au regard des articles 122' et 124 du code de procédure civile et 1134 du code civil (dans sa version applicable au litige) que la clause de conciliation préalable constitue une fin de non-recevoir qui s'impose au juge dès lors qu'elle est invoquée par les parties.

L'article 49 de la convention de garantie intitulé'«'différend-attribution de compétence'» énonce':

«'En cas de litige survenant entre les parties sur l'interprétation ou l'exécution du contrat de transfert, et avant tout recours aux tribunaux compétents, les parties s'efforceront de rechercher toutes les solutions amiables pour le règlement dudit litige, dans un délai de 30 jours à compter de la notification du litige par l'une des parties aux autres parties, la conciliation devant être formalisée par un écrit signé de toutes les parties au litige.'»

(suivent ensuite des dispositions sur la clause de compétence territoriale étrangères au présent litige)

Le liquidateur judiciaire soutient que cette procédure de conciliation préalable obligatoire à la saisine du juge a été satisfaite, faisant valoir à cette fin que les parties ont recherché une solution amiable, tout à la fois par l'envoi de la réclamation du cessionnaire aux garants «'raisonnablement étayée'» comme exigé par la convention de garantie, et par le délai de 30 jours accordé aux garants pour accepter ou pas les termes de cette réclamation et déterminer avec le cessionnaire les modalités d'exécution de la réduction du prix, ou bien la contester, soulignant que cette procédure de conciliation préalable était assortie d'une procédure d'expertise contradictoire lorsque l'une des parties estimait nécessaire de la déclencher, faisant ainsi référence à l'article 29 de la convention de garantie intitulé «'désaccord-procédure d'expertise'» selon lequel «'qu'à défaut d'accord entre les parties sur le montant d'une survalorisation, il sera procédé à la désignation d'un expert (...)'La mission de cet expert consistera à déterminer le montant de la survalorisation. L'expert ne devra statuer que sur les points de désaccord entre les parties ('). »

Il soutient ainsi que «'le préalable de notification de la réclamation et de réponse à cette réclamation constitue par nature une phase de conciliation préalable.»

Ce qui ne peut être admis.

En effet, les étapes rappelées par le liquidateur (notification de la réclamation, délai de réponse de 30 jours) relèvent de la procédure de déclenchement de la garantie, soit un stade où le désaccord n'est pas encore né entre les parties quant au bien fondé de cet appel en garantie, le recours à l'expertise tel que prévu à la convention de garantie n'étant pas davantage un mode de conciliation dans la mesure où il est clairement spécifié à l'article 29 précité que «'la décision de l'expert, non susceptible de recours, liera les parties en dernier ressort'».

Il est rappelé au titre III intitulé «'convention de garantie'» du contrat de transfert des titres de la société Puzzle signé le 5 mars 2015, que «'la garantie est considérée par les parties comme constituant une condition essentielle et déterminante de la cession, en l'absence desquelles le cessionnaire n'aurait pas procédé à l'acquisition. (') La garantie est un élément indissociable de la cession dont elle fait partie intégrante».

Il en résulte que tout contentieux né de l'application de cette convention de garantie relève de l'exécution du contrat de transfert, et qu'à ce titre, la procédure de conciliation préalable obligatoire prévue à l'article 49 précité s'applique dans cette hypothèse.

Tel est bien le cas du désaccord qui oppose les parties sur le montant de la survalorisation'; or, aucune démarche de conciliation amiable n'a été initiée par la société Financière Puzzle préalablement à la délivrance de son assignation en justice le 20 juillet 2018, son seul envoi consistant dans sa lettre de réclamation du 22 février 2018 notifiée aux cédants les mettant en demeure de lui payer la somme de 3'000'000€ au titre du plafond de garantie contractuellement prévu'; en tout état de cause, ainsi qu'il l'a déjà été dit précédemment, le liquidateur judiciaire ne peut pas utilement soutenir que la société Financière Puzzle et les garants ont ensemble respecté l'obligation de rechercher amiablement une solution au litige, au seul motif que «'chacun a respectivement fait valoir une position de manière amiable, laquelle ne laisse aucun doute sur l'impossibilité de trouver le moindre terrain d'entente'» en ce qu'il fait seulement référence à la notification de la réclamation et à la réponse des garants, éléments, ainsi qu'il l'a déjà été dit précédemment, qui concernent le déclenchement de la garantie.

En définitive, sans qu'il y ait lieu d'examiner plus avant les autres moyens d'irrecevabilité tirés de l'absence de recours à l'expertise prévue à l'article 29 de la convention de garantie et de l''expiration de cette garantie fixée au 31 mars 2018 par l'article 31 de cette convention, le défaut de mise en 'uvre de la clause contractuelle de conciliation préalable à la saisine du juge conduit à dire irrecevable les demandes du liquidateur judiciaire fondées sur ladite convention.

Compte tenu de cette irrecevabilité, il n'y a pas lieu de statuer sur le bien fondé de l'appel en garantie formé par la société Financière Puzzle ni sur la demande d'expertise.

Le jugement est en conséquence infirmé en ce sens.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Succombant dans son recours, le liquidateur judiciaire est condamné, ès qualités, aux dépens de d'appel'; il conserve ses frais de procédure exposés dans la présente instance et doit verser aux garants une indemnité de procédure complémentaire pour la cause d'appel, le jugement déféré étant confirmé sur les condamnations aux dépens et aux frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, (dans les limites de l'appel) et par arrêt contradictoire

Infirme le jugement déféré, sauf en ces dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et ajoutant,

Dit la SELARL MJ Synergie représentée par Me [T] [I] et Me [R] [J], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Financière Puzzle, irrecevable à agir sur le fondement de la convention de garantie,

Condamne la SELARL MJ Synergie représentée par Me [T] [I] et Me [R] [J], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Financière Puzzle, à verser pour la cause d'appel, une indemnité de procédure de 5'000€ à'chacun des intimés, à savoir M. [C] [W], M. [E] [G], Mme [P] [L] et M. [F] [A],

Déboute la SELARL MJ Synergie représentée par Me [T] [I] et Me [R] [J], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Financière Puzzle, de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SELARL MJ Synergie représentée par Me [T] [I] et Me [R] [J], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Financière Puzzle aux dépens d'appel.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 19/05122
Date de la décision : 16/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-16;19.05122 ?
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