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16/06/2022 | FRANCE | N°18/01376

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 16 juin 2022, 18/01376


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





N° RG 18/01376 - N° Portalis DBVX-V-B7C-LRPT





[Y]



C/

SASU TNT EXPRESS FRANCE







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de LYON

du 30 Janvier 2018

RG : 15/01010



COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 16 JUIN 2022







APPELANT :



[K] [Y]

né le 30 Mars 1979 à [Localité 5] (ALGERIE)

[Adres

se 1]

[Localité 3]



représenté par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON

ayant pour avocat plaidant Me Pascale REVEL de la SCP REVEL MAHUSSIER & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON subs...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 18/01376 - N° Portalis DBVX-V-B7C-LRPT

[Y]

C/

SASU TNT EXPRESS FRANCE

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de LYON

du 30 Janvier 2018

RG : 15/01010

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 16 JUIN 2022

APPELANT :

[K] [Y]

né le 30 Mars 1979 à [Localité 5] (ALGERIE)

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON

ayant pour avocat plaidant Me Pascale REVEL de la SCP REVEL MAHUSSIER & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON substituée par Me Elodie SIGNOL, avocat au barreau de LYON,

INTIMÉE :

Société TNT EXPRESS FRANCE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 4]

non représentée

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 07 Janvier 2022

Présidée par Nathalie PALLE, Présidente magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Elsa SANCHEZ, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Nathalie PALLE, président

- Bénédicte LECHARNY, conseiller

- Thierry GAUTHIER, conseiller

ARRÊT : REPUTE CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 16 Juin 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Nathalie PALLE, Président et par Elsa SANCHEZ, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [Y] (le salarié) a été engagé par la société TNT express France (la société) à compter du 23 mai 2007, par contrat de professionnalisation, en qualité de conseiller commercial.

La relation contractuelle s'est poursuivie par un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 24 mars 2008. Le salarié a occupé un poste de conseiller commercial, groupe 7, emploi 51, coefficient 132,5, statut employé, en application de la Convention collective nationale des transports routiers.

Au dernier état de la relation contractuelle, le salarié a occupé le poste de conseil commercial senior, groupe 9, emploi 61, coefficient 148,5, statut employé.

Au terme d'un courriel du 9 février 2015, le salarié a sollicité auprès de la société le bénéfice d'une rupture conventionnelle.

Par courrier du 5 mars 2015, le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail.

Par requête du 13 mars 2015, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Lyon aux fins de voir requalifier la prise d'acte de la rupture en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et d'obtenir la condamnation de la société à lui verser diverses sommes à titre de rappel de salaire et de congés payés afférents, de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents, d'indemnité de licenciement, et de dommages-intérêts pour licenciement abusif.

La caisse des congés payés des intempéries du bâtiment du Rhône et de la Drôme a été appelée dans la cause à la demande du salarié.

Par jugement du 30 janvier 2018, le juge départiteur, statuant seul après avoir pris l'avis des conseillers présents, a :

- prononcé la mise hors de cause de la Caisse des congés payés des intempéries du bâtiment du Rhône et de la Drôme,

- condamné le salarié à verser à la Caisse des congés payés des intempéries du bâtiment du Rhône et de la Drôme la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- requalifié la prise d'acte de la rupture en une démission,

- débouté le salarié de l'ensemble de ses demandes,

- condamné le salarié à verser à la société la somme de 2 061,75 euros à titre de préavis de démission outre intérêts légaux à compter de la décision,

- débouté la société de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné le salarié aux dépens.

Le salarié a relevé appel du jugement le 26 février 2018, en intimant la seule société TNT express France.

Dans ses conclusions notifiées le 23 mai 2018, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses moyens, le salarié demande à la cour de :

- réformer le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté la société de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

statuant à nouveau,

- dire et juger que la société a manqué à son obligation de loyauté dans l'exécution de son contrat de travail,

- condamner la société au paiement des sommes suivantes :

15 000 euros nets à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

500 euros à titre de rappels de salaire, outre 50 euros de congés payés y afférents,

- dire et juger que sa prise d'acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la société au paiement des sommes suivantes :

4 123,50 euros au titre de l'indemnité de préavis, outre 412,35 euros au titre des congés payés y afférents,

3 298,80 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

30 000 euros nets à titre de dommages-intérêts en réparation du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- débouter la société de l'ensemble de ses demandes,

- condamner la société au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamner aux dépens de l'instance.

Le salarié fait essentiellement valoir que :

- il a été victime d'une rupture d'égalité dans le traitement de sa mobilité interne pour ne pas avoir bénéficié d'une mobilité dans les mêmes conditions que ses collègues suivant la procédure mise en place par la société elle-même. Alors qu'il avait une grande ancienneté et de bons résultats, l'accès à la mobilité interne lui a été refusé quand de plus jeunes collaborateurs, moins expérimentés, évoluaient rapidement sur des postes de commercial sur le terrain. Malgré ses nombreuses demandes et son investissement, il n'a jamais pu accéder au poste d'attaché commercial sur le terrain. La société ne saurait prétendre que près de cinq années d'inégalité de traitement seraient justifiées par un prétendu mauvais mois de novembre 2013.

- la société a unilatéralement modifié ses fonctions, son périmètre de prospection et sa rémunération. Alors que les missions principales du conseiller commercial s'exerçaient sur la base d'un binôme avec l'attaché commercial, à la suite de plusieurs plans de sauvegarde de l'emploi, ses fonctions de conseiller commercial ont été modifiées en profondeur, puisqu'en 2014 la société a unilatéralement procédé à la séparation des portefeuilles de conseillers commerciaux et d'attachés commerciaux, le privant de l'atout indispensable que représente le contact physique avec le client, ainsi qu'à la suppression des fonctions des chargés de clientèle par transfert sur les fonctions de conseillers commerciaux, le tout ayant un impact défavorable sur ses résultats commerciaux. La société a également procédé à une modification de son périmètre de prospection dans lequel figurait de nombreux clients inactifs entraînant une perte de sa rémunération variable.

- il a été privé de sa rémunération variable en janvier et février 2015, la société lui ayant remis ses résultats le 16 février 2015, sans lui avoir préalablement délivré ses objectifs à atteindre.

- les nombreux manquements de la société l'ont placé dans un état de stress et d'angoisse permanents, le conduisant à un arrêt de travail à compter du mois de janvier 2015, et ces mêmes manquements l'ont contraint à prendre acte de la rupture de son contrat de travail.

Bien que régulièrement avisée de la déclaration d'appel par acte signifié à personne, le 3 avril 2018, la société n'a pas constitué avocat. L'appelant lui a signifié ses conclusions par acte du 28 mai 2018.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 avril 2020.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le salarié n'ayant pas intimé la Caisse de congés payés Rhône et Drôme intempéries BTP et aucune critique n'étant dirigée contre le chef du dispositif du jugement qui la met hors de cause, ce chef du dispositif est définitif.

En l'absence de constitution de la société, partie intimée, et donc faute de conclusions prises par cette partie, il convient de faire application des dispositions de l'article 954 dernier alinéa du code de procédure civile qui prévoient que la partie qui ne conclut pas est réputée s'approprier les motifs du jugement.

Sur l'exécution déloyale du contrat de travail

En application de l'article L. 1222-1 du code du travail, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.

Il en résulte que tout salarié a droit à l'indemnisation du préjudice lié à la faute de l'employeur dans l'exécution de ses obligations.

La réparation d'un préjudice résultant d'un manquement de l'employeur suppose que le salarié qui s'en prétend victime produise en justice les éléments de nature à établir, d'une part, la réalité du manquement, d'autre part, l'existence et l'étendue du préjudice en résultant.

A l'appui de sa demande en paiement de dommages-intérêts, le salarié fait valoir quatre séries de manquements fautifs qu'il impute à son employeur au titre d'une exécution déloyale du contrat de travail.

S'agissant de l'inégalité de traitement en termes d'évolution du fait du non respect de la procédure de mobilité interne :

Il est constant, d'une part, que la procédure de mobilité interne prévoyait qu'il appartient au salarié sollicitant une mobilité en interne d'établir un dossier de candidature et de solliciter auprès de son manager un entretien préalable (pièce n°15 de l'appelant), d'autre part que des reclassements ont été effectués dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi.

Si, comme en première instance, le salarié produit aux débats les courriels aux termes desquels il se déclarait candidat au poste d'attaché commercial terrain, de chargé de clientèle comme au poste de coordinateur SPS, il ne justifie pas davantage que devant le premier juge avoir suivi la procédure interne prévue en y joignant un dossier de candidature. Le salarié ne produit à hauteur d'appel aucune pièce nouvelle, autre que le courriel faisant état de sa demande de rupture conventionnelle. Sur la base de l'analyse des pièces produites par le salarié, c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a retenu qu'aucune atteinte au principe d'égalité de traitement, ni aucun manquement aux règles de mobilité ne sont établis.

S'agissant de la modification unilatérale du contrat de travail impactant directement sa rémunération :

Il est constant que le lien fonctionnel qui existait entre le poste de conseiller commercial senior qu'occupait le salarié et celui d'attaché commercial a disparu. Pour autant et sur le constat que le salarié ne démontre pas qu'il s'en est suivie une modification de ses missions principales, telles qu'elles ressortent de leur description dans la fiche de son poste, la modification apportée par l'employeur à l'exercice par le salarié de ses fonctions ressortissait d'une modification de ses conditions de travail relevant du pouvoir de direction de l'employeur et dont il ne peut lui être fait grief, ainsi que l'a retenu le premier juge. De même, le premier juge a justement relevé que l'employeur pouvait attribuer au salarié une nouvelle mission consistant à contribuer au déploiement des accords cadres ou stratégiques pour les entités rattachées au portefeuille du conseil commercial, sans qu'il s'en suive une modification du contrat de travail. Il sera ajouté que le salarié ne démontre pas, pièce à l'appui, que ces modifications dans les conditions d'exercice de ses fonctions ont eu pour conséquence directe une diminution de sa rémunération, comme il le soutient.

Aux termes du contrat de travail (pièce n°1 du dossier de l'appelant), la rémunération est composée d'un fixe et d'une partie variable. Sont produits aux débats les plans d'intéressement - dit Pay plan - des années 2008 à 2015. Ainsi, au titre des années 2014 et 2015, il y est mentionné que «les territoires ne présentent pas de caractère de fixité et peuvent être modifiés en cours d'année selon la décision de l'entreprise. [...] La prime sur chiffre d'affaires mensuelle, versée chaque mois, porte sur le % [pourcentage] de réalisation de l'objectif mensuel de chiffre d'affaires, des clients de votre territoire». [...] Les commissions correspondent à un pourcentage du chiffre d'affaires New Business, selon le taux en vigueur par type d'offre et le territoire».

Il ressort de ces documents que, depuis l'origine de la relation contractuelle, le périmètre d'action du salarié était unilatéralement fixé par la société. La circonstance qu'en janvier 2015, selon les termes du courriel du 15 janvier 2015 de son supérieur hiérarchique, le périmètre de travail du salarié a été «ajusté» et que celui-ci s'est vu confier «un portefeuille plus petit en CA (chiffre d'affaires)» et que, selon le salarié, son portefeuille comptait désormais de nombreux clients «inactifs», ne peut permettre d'en conclure que la modification de son périmètre d'action entraînait nécessairement une perte de sa rémunération variable, étant observé que son supérieur estimait que ce portefeuille avait «un impact plus significatif en pourcentage d'évolution», ce que le salarié ne contredit pas utilement, et qu'il était commissionné en pourcentage sur le chiffre des nouvelles affaires. Il s'ensuit que le grief tiré de la modification à son détriment du périmètre de prospection n'est pas fondé, ainsi que l'a retenu le premier juge.

En revanche, alors que les objectifs étaient fixés mensuellement et annuellement par le plan d'intéressement - dit Pay plan -, le salarié justifie, sans être utilement contredit, que ce n'est que le 16 février 2015 qu'il a reçu ses objectifs. Les objectifs des mois de janvier et février 2015 apparaissent ainsi fixés a posteriori. Cette circonstance caractérise le manquement par l'employeur à son obligation de communication en début d'exercice des objectifs fixés unilatéralement permettant au salarié d'avoir connaissance des éléments permettant de déterminer sa rémunération variable, et ce peu important que le salarié ne conteste pas que ces objectifs chiffrés étaient réalisables, ni que celui-ci avait été absent pendant une partie de la période en cause. Il en résulte que le salarié est fondé à obtenir le paiement de l'intégralité de la prime de 250 euros par mois prévue pour un objectif rempli à 100%, soit 500 euros à titre de rappel de rémunération pour les mois de janvier et février 2015, outre la somme de 50 euros de congés payés afférents. S'agissant d'une demande en condamnation qui a été chiffrée en cours de procédure devant le bureau de jugement, ces sommes portent intérêts au taux légal à compter du 12 septembre 2017, date de la convocation de la société devant la formation de départage, valant mise en demeure.

S'agissant de l'impact des manquements de l'employeur sur la santé du salarié :

Aux termes de ses écritures, le salarié soutient que la dégradation de son état de santé qui a motivé un arrêt de travail pour maladie en janvier 2015 est en lien direct avec son vécu professionnel et avec les manquements de l'employeur à ses obligations.

Alors que seul est établi le manquement de l'employeur à son obligation de porter à la connaissance du salarié ses nouveaux objectifs en début d'exercice 2015, ce fait ne peut être considéré comme étant à l'origine de l'état anxio dépressif pour lequel le salarié était antérieurement en soins courant juillet 2014 (pièce n°20), ni avec les arrêts de travail pour maladie qui lui ont été prescrits en juin et juillet 2014 (pièce 19 et 19-1), étant observé que la copie de l'avis d'arrêt de travail produite en pièce n°19-3 du dossier de l'appelant est inexploitable comme s'avèrant illisible.

Sur la prise d'acte de la rupture

La prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié ne produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse que si sont constatés, à l'encontre de l'employeur, des manquements suffisamment graves à ses obligations empêchant la poursuite du contrat de travail.

Dans le cas contraire, elle produit les effets d'une démission.

L'écrit de prise d'acte ne fixe pas les limites du litige et la preuve des faits qui fondent la prise d'acte incombe au salarié.

A l'appui de sa prise d'acte, notifiée à l'employeur par courrier du 5 mars 2015, et aux termes de ses conclusions, le salarié invoque la modification unilatérale par l'employeur de ses fonctions et de son périmètre d'action ainsi que la gestion des accord cadres ayant eu un fort impact sur sa rémunération (1), la fixation tardive de ses objectifs mensuels et annuels 2015 entraînant une perte importante de sa rémunération (2), la situation de blocage professionnel générée par le refus de l'employeur de lui faire bénéficier du processus de mobilité interne (3), ainsi qu'une certaine forme de harcèlement moral face à une réorganisation en terme de surcharges de travail, de mails reçus en permanence de la hiérarchie, une situation professionnelle proche de celle du burn-out, un profond désordre au sein des services créé par un deuxième PSE, des réorganisations intempestives de son travail, le tout ayant eu un impact sur sa santé et ayant rendu nécessaire un traitement médical pour syndrome anxio-dépressif (4).

Pour les motifs retenus plus avant, il est jugé que les premier et troisième griefs ne sont pas établis.

S'agissant du second grief, s'il est établi qu'en attendant le 16 février 2015 pour communiquer au salarié ses objectifs 2015 la société a manqué à son obligation de porter à sa connaissance ses nouveaux objectifs en début d'exercice, pour autant, ainsi que l'a relevé le premier juge, les plans d'intéressements 2009, 2010 et 2012 avaient eux-aussi été transmis tardivement, dans le premier trimestre de l'exercice en cause, sans empêcher la poursuite de la relation contractuelle. Il sera ajouté que, sur la base d'une rémunération brute mensuelle de 2 061,75 euros, ce manquement sur les deux premiers mois de l'année 2015 ne représentait que 2,02% du total de la rémunération annuelle du salarié.

Ensuite, à l'appui du harcèlement moral qu'il évoque, le salarié ne produit en cause d'appel aucun élément autre que ceux relatifs aux premier et troisième griefs dont il est jugé plus avant qu'ils ne sont pas établis. Dans ce contexte et sans qu'il ne soit corroboré par d'autres éléments, le fait que le médecin traitant du salarié évoque que le syndrome anxio dépressif présenté par le salarié en juillet 2014 est en lien avec le travail ne permet pas, à lui seul, de présumer l'existence d'une situation de harcèlement moral.

Enfin, et ainsi qu'il est jugé plus avant, le fait que la société a manqué à son obligation de porter à sa connaissance ses nouveaux objectifs en début d'exercice 2015 ne peut être considéré comme étant à l'origine de l'état anxio dépressif pour lequel le salarié était antérieurement en soins courant juillet 2014, ni avec les arrêts de travail pour maladie qui lui ont été prescrits en juin et juillet 2014.

En définitive, seule la communication tardive au salarié de ses objectifs pour l'exercice 2015 est établie. Toutefois, compte tenu de la modicité de son impact rapporté au salaire annuel, ce manquement de l'employeur à ses obligations n'était pas d'une nature suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail, de sorte que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié s'analyse en une démission, ainsi que l'a retenu le premier juge.

Selon l'article L. 1237-1 du code du travail, en cas de démission, l'existence et la durée du préavis sont fixées par la loi, ou par convention ou accord collectif de travail.

Le salarié démissionnaire n'ayant pas exécuté le préavis doit à l'employeur une indemnité compensatrice de préavis, dont le montant est égal au salaire et avantages qu'aurait perçus le salarié s'il avait travaillé.

En application des dispositions de l'article 13 de l'accord du 27 février 1951 relatif aux employés figurant à l'annexe II de la Convention collective nationale des transports routiers et auxiliaires du transport du 21 décembre 1950, en cas de démission et quelle que soit l'ancienneté de l'employé, la durée du délai congé est d'un mois.

Le salarié ne soutenant pas avoir effectué le préavis de démission, le jugement est confirmé en ce qu'il l'a condamné à payer à la société la somme de 2 061,75 euros correspondant à un mois de salaire.

Le jugement est par conséquent confirmé en ce qu'il a requalifié la prise d'acte en démission et en ce qu'il a en conséquence condamné le salarié à verser une indemnité de préavis correspondant à un mois de salaire.

Sur les demandes accessoires

Il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a mis à la charge du salarié les dépens de première instance.

Compte tenu de l'infirmation partielle du jugement, la société sera tenue aux dépens de l'appel.

Il est équitable de fixer à 1 000 euros l'indemnité que la société devra payer au salarié au titre des frais non compris dans les dépens qu'il a pu engager pour faire valoir ses droits dans la présente procédure.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, mis à disposition au greffe et en dernier ressort,

INFIRME le jugement en ce qu'il a rejeté la demande en rappel de rémunération variable des mois de janvier et février 2015 et des congés payés afférents,

CONFIRME le jugement en ses autres dispositions,

Et statuant à nouveau des chefs infirmés,

CONDAMNE la société TNT express France à payer à M. [K] [Y] la somme de 500 euros bruts à titre de rappel de salaire de janvier et février 2015 et celle de 50 euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 12 septembre 2017,

Y ajoutant,

CONDAMNE la société TNT express France à payer à M. [K] [Y] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société TNT express France aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 18/01376
Date de la décision : 16/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-16;18.01376 ?
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