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09/06/2022 | FRANCE | N°18/06065

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 09 juin 2022, 18/06065


N° RG 18/06065

N° Portalis DBVX - V - B7C - L4P4















Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond du 12 juillet 2018



Chambre 9 cab 09 G



RG : 17/08171







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRET DU 09 Juin 2022







APPELANTE :



SCI CENA

[Adresse 1]

[Localité 3]



repr

ésentée par Maître Nathalie ROSE, avocat au barreau de LYON, avocat postulant, toque : 1106

et pour avocat plaidant la SCP DESBOS BAROU & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 1726











INTIMEE :



SA BNP PARIBAS

[Adresse 2]

[Localité 4]



représentée ...

N° RG 18/06065

N° Portalis DBVX - V - B7C - L4P4

Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond du 12 juillet 2018

Chambre 9 cab 09 G

RG : 17/08171

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 09 Juin 2022

APPELANTE :

SCI CENA

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Maître Nathalie ROSE, avocat au barreau de LYON, avocat postulant, toque : 1106

et pour avocat plaidant la SCP DESBOS BAROU & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 1726

INTIMEE :

SA BNP PARIBAS

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par la SCP GRAFMEYER BAUDRIER ALLEAUME JOUSSEMET, avocat au barreau de LYON, toque : 673

******

Date de clôture de l'instruction : 22 Octobre 2019

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 13 Avril 2022

Date de mise à disposition : 09 Juin 2022

Audience présidée par Annick ISOLA, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Séverine POLANO, greffier.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Anne WYON, président

- Françoise CLEMENT, conseiller

- Annick ISOLA, conseiller

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Anne WYON, président, et par Séverine POLANO, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

*****

En mars 2013, la société Cena a emprunté la somme de 918 910,19 euros auprès de la société BNP Paribas afin de financer 50 % de l'acquisition d'un immeuble.

En parallèle, les parties ont conclu une convention d'échange de conditions d'intérêts courant jusqu'au 1er janvier 2025, le montant notionnel étant de 918 910,19 euros, le taux fixe de 1,58 % l'an étant payable par la société Cena, le taux variable étant calculé sur l'Euribor 3 mois et payable par la banque, les montants étant calculés sur 360 jours et payés tous les trois mois, la confirmation de cette opération portant la référence MD10625870 étant datée du 6 mars 2013.

Suivant acte sous seing privé du 21 mars 2013, la société BNP Paribas et la société Cena ont conclu une convention-cadre FBF relative aux opérations sur instruments financiers à terme, la convention confirmée le 6 mars 2013 faisant partie intégrante de la convention-cadre.

Arguant que la position du compte n° 2438/10026807 détenu par la société Cena dans ses livres n'avait pas permis d'honorer dans sa totalité l'appel en paiement du 1er avril 2016, la somme de 1 839,57 euros demeurant impayée, la société BNP Paribas a, par lettre du 7 avril 2016, mis en demeure la société Cena d'avoir à régulariser la situation sous trois jours.

En l'absence de régularisation, la banque lui a notifié la résiliation de l'ensemble des transactions en cours entre les parties, par lettre du 15 avril 2016.

Par courrier électronique du même jour, la société BNP Paribas a informé la société de « l'annulation de l'opération MAD 1,499,546 (swap de taux 1,58 % traité le 01/03/2013) moyennant le paiement d'une soulte de 52 800,00 € payée le 19/04/2016 ».

Parallèlement, faisant état de ce que le compte n° 2438/10026807 de la société Cena précité était demeuré débiteur à hauteur de 81,74 euros, la société BNP Paribas l'a avisée par lettre du 20 septembre 2016, de ce qu'à l'issue d'un délai de 30 jours elle procéderait à la clôture du compte.

Les mises en demeures d'avoir à régler les sommes précitées adressées les 22 septembre et 7 novembre 2016 étant demeurées vaines, le 26 juillet 2017, la société BNP Paribas a assigné la société Cena en paiement devant le tribunal de grande instance de Lyon.

Par jugement réputé contradictoire du 12 juillet 2018, le tribunal a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- condamné la société Cena à payer à la société BNP Paribas une somme de 54 639,57 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 28 septembre 2016,

- dit que les intérêts échus et dus pour une année entière à compter du 26 juillet 2017 produiront à leur tour des intérêts en application des dispositions de l'article 1154 du code civil,

- débouté la société BNP Paribas de sa demande au titre du solde débiteur du compte n°2438/10026907,

- condamné la société Cena à payer à la société BNP Paribas une somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens.

Le 22 août 2018, la société Cena a relevé appel de ce jugement.

Par ordonnance du 30 avril 2019, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de radiation de l'affaire présentée par la société BNP Paribas.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 21 mai 2019, la société Cena demande à la cour de :

- réformer le jugement en ce qu'il :

* l'a condamnée à payer à la société BNP Paribas une somme de 54 639,57 euros outre intérêts au taux légal à compter du 28 septembre 2016,

* a dit que les intérêts échus et dus pour une année entière à compter du 26 juillet 2017 produiront à leur tour des intérêts en application des dispositions de l'article 1154 du code civil,

* a assorti le jugement de l'exécution provisoire,

*l'a condamnée aux dépens.

Et, statuant à nouveau,

A titre principal,

- débouter la société BNP Paribas de l'ensemble de ses demandes,

À titre subsidiaire,

- condamner la société BNP Paribas à lui verser la somme en principal de 54 639,57 euros,

- dire et juger que cette somme se compensera avec la condamnation prononcée à son encontre,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté la société BNP Paribas de sa demande de remboursement de solde de compte courant,

- débouter la société BNP Paribas de son appel incident sur ce point,

En tout état de cause,

- condamner la société BNP Paribas à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP Jakubowicz, Mallet-Guy & associés.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 24 septembre 2019, la société BNP Paribas demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Cena à lui payer la somme de 54 639,57 euros outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 28 septembre 2016, la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code civil, et les dépens de première instance, et a ordonné la capitalisation des intérêts,

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de condamnation de la société Cena au paiement du solde du compte bancaire,

Statuant à nouveau,

- condamner la société Cena à lui payer la somme de 82,04 euros outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 7 novembre 2016,

- condamner la société Cena à lui payer la somme de 1 000 euros à titre de dommages intérêts pour résistance abusive, et celle de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- déclarer irrecevables comme prescrites les demandes subsidiaires en dommages et intérêts formées par la société Cena à hauteur de 54 639,57 euros, et subsidiairement, débouter la société Cena de ces demandes,

En tout état de cause,

- condamner la société Cena en tous les dépens de l'instance d'appel, avec distraction au profit de la SCP Grafmeyer Baudrier Alleaume Joussemet.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 octobre 2019.

L'audience fixée au 3 mars 2021 a été reportée au 13 avril 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande au titre de la convention d'échange de conditions d'intérêts

La société Cena soutient que la banque ne démontrant pas le solde prétendument débiteur de son compte courant, la résiliation des transactions en cours, comprenant le swap de taux, est abusive.

La banque réplique que la résiliation de la convention Swap a été prononcée de manière régulière, le solde du compte ne permettant pas de faire face à l'échéance du 1er avril 2016 ; que la société Cena, qui n'a pas contesté le solde débiteur, n'a procédé à aucun paiement.

Il ressort du relevé des opérations du 31 mars 2016 au 30 avril 2016 que le solde du compte de la société Cena au 1er avril 2016 ne lui permettait pas de faire face à l'échéance de 3 207,62 euros et que le compte était ainsi débiteur de 1 839,27 euros à cette date.

La société Cena ne produit aucun élément permettant de contester cet impayé partiel.

Par application de l'article 7.1 de la convention-cadre, la banque était en droit de prononcer la résiliation de la convention d'échange de conditions d'intérêts après une mise en demeure restée infructueuse pendant trois jours ouvrés.

La société BNP Paribas a adressé une mise en demeure à la société Cena le 7 avril 2016, qui n'a pas régularisé la position de son compte.

Ainsi, la résiliation de la convention de swap notifiée par lettre du 15 avril 2016 était régulière.

Par application de l'article 8.2 de la convention, il appartenait à la banque de calculer le solde de résiliation et de justifier du détail des calculs ayant permis de le déterminer.

La société BNP Paribas produit en pièce n° 15 le détail du calcul du solde de la résiliation, qui s'élève à 52 810,96 euros arrondi par la banque à 52 800 euros, et la société Cena ne démontre pas qu'il serait erroné.

Par application de la convention de swap de taux et de la convention-cadre, la société Cena est redevable à la société BNP Paribas de la somme de 52 800 euros, ainsi que l'a justement décidé le premier juge, avec capitalisation des intérêts.

Sur la demande au titre du compte n° 10026807

La banque réclame un solde de 82,04 euros, correspondant à des intérêts et commissions du 1er trimestre 2016 comptabilisés au 13 avril 2016.

En l'absence de production d'une convention de compte, la banque ne justifie pas que la société Cena s'était engagée à payer des intérêts et commissions en cas d'impayés, de sorte que le premier juge a écarté à juste titre cette demande.

Sur la responsabilité de la banque

La société Cena soutient que la banque a manqué à son obligation de conseil et de mise en garde, faute de l'avoir informée des risques et conséquences de l'opération de swap peu courante.

La banque répond que l'action en responsabilité est prescrite et, sur le fond, qu'elle n'était pas tenue à un devoir de mise en garde dès lors que la société Cena était un opérateur averti.

Dès lors que ce n'est qu'à compter de son défaut partiel de paiement que la société Cena a été mise en mesure de connaître les conséquence du manquement allégué de la banque à ses devoirs de conseil et de mise en garde, son action en responsabilité contre l'établissement bancaire n'est pas prescrite et est en conséquence recevable.

Toutefois, comme le relève la société BNP Paribas, la société Cena n'est pas un opérateur profane dès lors qu'elle a conclu un contrat de crédit-bail immobilier pour le financement et l'acquisition d'un terrain et la construction d'un immeuble à usage de bureaux, d'ateliers et de parkings, comme elle l'indique dans ses conclusions, et que son gérant est par ailleurs gérant d'une société d'investissements.

Il s'en déduit que la banque n'était pas tenue à un devoir de mise en garde à son égard.

Par ailleurs, la convention de swap signée par la société Cena porte la mention selon laquelle « Toute opération de marché sur instrument financier à terme comporte des risques du fait notamment, des variations de taux d'intérêt, des taux de change, des cours des actions ou des indices boursiers. Au regard de ces risques, chaque Partie déclare et atteste qu'elle dispose des connaissances et de l'expérience en matière d'investissement nécessaires pour évaluer les caractéristiques, les avantages et les risques encourus au titre de cette opération. Chaque Partie déclare et atteste avoir identifié ses besoins à l'égard de la présente opération par rapport à son activité et sa situation financière et avoir procédé à sa propre analyse des aspects financiers, juridiques, fiscaux, comptables et réglementaires de l'opération et ne s'en être pas remise pour cela à l'autre Partie ».

Enfin, comme le soutient la banque, il ne peut lui être fait grief de ne pas avoir prévenu son cocontractant de ce que le taux Euribor 3 mois resterait très en-deçà du taux fixe prévu à la convention, ce taux étant par nature variable et indépendant de l'établissement bancaire qui ne pouvait connaître à l'avance son évolution sur la période prévue au contrat.

Par suite, aucun manquement de la banque à ses obligations n'est établie en l'espèce et la demande de la société Cena en paiement de dommages-intérêts sera rejetée.

Sur les autres demandes

En cause d'appel, la banque sollicite des dommages-intérêts pour résistance abusive.

Toutefois, outre qu'elle ne démontre pas la mauvaise foi de son débiteur, la banque ne justifie d'aucun préjudice qui ne serait pas compensé par les intérêts moratoires, ce dont il se déduit que sa demande doit être rejetée.

En revanche, l'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la banque.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Déclare recevable la demande de la société Cena en paiement de dommages-intérêts mais la rejette ;

Rejette la demande de la société BNP Paribas au titre d'une résistance abusive ;

Condamne la société Cena aux dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP Grafmeyer Baudrier Alleaume Joussemet, avocat, par application de l'article 699 du code de procédure civile ;

Rejette la demande de la société Cena au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamne à payer à ce titre à la société BNP Paribas la somme de 1 000 euros.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 18/06065
Date de la décision : 09/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-09;18.06065 ?
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