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03/06/2022 | FRANCE | N°19/01751

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 03 juin 2022, 19/01751


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





N° RG 19/01751 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MHXH





Société ATALIAN PROPRETE



C/



[N]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de LYON

du 14 Février 2019

RG : F 16/01395

COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 03 JUIN 2022



APPELANTE :



Société ATALIAN PROPRETE

[Adresse 2]

[Localité 4]



Re

présentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON

Ayant pour avocat plaidant Me Séverine HOUARD-BREDON, avocat au barreau de PARIS





INTIMÉ :



[X] [N]

né le 18 Mai 1984 à [Localité 5]

[Ad...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 19/01751 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MHXH

Société ATALIAN PROPRETE

C/

[N]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de LYON

du 14 Février 2019

RG : F 16/01395

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 03 JUIN 2022

APPELANTE :

Société ATALIAN PROPRETE

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON

Ayant pour avocat plaidant Me Séverine HOUARD-BREDON, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉ :

[X] [N]

né le 18 Mai 1984 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Béatrice FARABET, avocat au barreau de LYON

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 69123/2/2019/09542 du 04/04/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 04 Mars 2022

Présidée par Sophie NOIR, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Gaétan PILLIE, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Sophie NOIR, conseiller

- Françoise CARRIER, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 03 Juin 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Patricia GONZALEZ, Présidente et par Gaétan PILLIE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES:

La société Atalian Propreté, antérieurement dénommée TFN propreté Rhône Alpes puis Atalian Propreté Rhône Alpes, est spécialisée dans le secteur du nettoyage courant des bâtiments.

Elle applique la convention collective des entreprises de propreté.

M. [N] a été embauché par la société Atalian Propreté en qualité de 'manutentionnaire AS 1 B sur le site Chronopost' en remplacement d'un salarié absent, par contrat de travail à durée déterminée à temps complet pour la période du 2 février 2015 au 5 juin 2015.

Le contrat de travail de M. [N] a pris fin à son terme.

Le 13 novembre 2015, M. [N] a saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes de Lyon pour voir de condamner l'employeur à lui remettre une attestation Pôle Emploi régulière c'est à dire à son nom.

Par ordonnance du 10 février 2016 la formation des référés a pris acte de la remise au salarié d'une attestation destinée à Pôle emploi régulière.

Le 6 avril 2016, M. [N] a saisi le conseil de prud'hommes de Lyon pour obtenir la condamnation de la société Atalian Propreté à lui payer une indemnité pour travail dissimulé.

Par jugement en date du 14 février 2019, le conseil de prud'hommes de Lyon a :

- condamné la société Atalian Propreté Rhône Alpes (anciennement TFN Propreté Rhone-Alpes) à verser à M. [N] la somme de 9.109,32 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement ;

- condamné la société Atalian Propreté Rhône Alpes à verser à Me [S], avocat, la somme de 1.250,00 euros au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens conformément à l'article 700 alinéa 2 du Code de procédure civile ;

- donné acte à Me [S] de ce qu'elle s'engage à renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle si, dans les 12 mois du jour où la décision est passée en force de chose jugée, elle parvient à recouvrer auprès de la société Atalian Propreté Rhône Alpesla somme allouée et si cette somme est supérieure à l'indemnité qui aurait été versée au titre de l'aide juridictionnelle ;

- débouté société Atalian Propreté Rhône Alpesde sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

- condamné société Atalian Propreté Rhône Alpesaux entiers dépens de la présente instance, qui seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.

La société Atalian Propreté a régulièrement interjeté appel du jugement du conseil de prud'hommes le 8 mars 2019.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 8 février 2022, elle demande à la cour de :

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Lyon le 14 février 2019.

Statuant à nouveau :

- débouter M. [N] de l'intégralité de ses demandes fins et conclusions ;

- condamner M. [N] à la somme de 1.000,00 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 7 février 2022, M. [N] demande à la cour de :

- confirmer le jugement de départage rendu par le conseil de prud'hommes de Lyon en date du 14 février 2019 en ce qu'il a :

- condamné la société Atalian Propreté (anciennement TFN Propreté Rhone-Alpes) à payer à M. [N] la somme de 9.109,32 euros, à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé ;

- condamné la société Atalian Propreté (anciennement TFN Propreté Rhone-Alpes) à payer à Maître [S] la somme de 1.250 euros au titre de l'article 700 alinéa 2 du Code de procédure civile à charge pour elle de renoncer à l'aide juridictionnelle ;

- condamné la société Atalian Propreté (anciennement TFN Propreté Rhone-Alpes) aux dépens de l'instance.

Y ajoutant :

- condamner la société Atalian Propreté venant aux droits de la SAS Atalian Rhone-Alpes (anciennement TFN Propreté Rhone-Alpes) à payer à M. [N] la somme de 2.000 euros à titre de procédure abusive ;

- condamner la société Atalian Propreté venant aux droits de la SAS Atalian Rhone-Alpes (anciennement TFN Propreté Rhone-Alpes) à payer à Maître [S] la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 alinéa 2 du Code de procédure civile pour la procédure d'appel, à charge pour elle de renoncer à l'aide juridictionnelle ;

- condamner la société Atalian Propreté venant aux droits de la SAS Atalian Rhone-Alpes (anciennement TFN Propreté Rhone-Alpes) aux dépens de première instance et d'appel.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 8 février 2022.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande indemnité forfaitaire pour travail dissimulé :

L' article L. 8221-1 du code du travail prohibe le travail totalement ou partiellement dissimulé, et l'article L. 8221-5, 1° du même code dispose notamment qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié, le fait pour un employeur de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche.

Selon les dispositions de l'article L1221-10 du code du travail, l'embauche d'un salarié ne peut intervenir qu'après déclaration nominative accomplie par l'employeur auprès des organismes de protection sociale désignés à cet effet.

Aux termes de l' article L.8223-1 du code du travail, le salarié auquel l'employeur a recours en commettant les faits prévus à l'article L.8221-5 précité a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Il incombe au salarié de rapporter la preuve du caractère intentionnel du travail dissimulé.

En l'espèce, M. [X] [N] fait valoir :

- que l'employeur n'a pas effectué de déclaration préalable à l'embauche pour la période du 2 février 2015 au 5 juin 2015

- que le fait que l'employeur lui ait remis une attestation Pôle emploi établie au nom d'un autre salarié, ait attendu six mois pour lui remettre une nouvelle attestation Pôle emploi dans le cadre d'une procédure de référé et ait produit aux débats des documents établis pour les besoins de la cause afin de justifier de l'existence de déclarations sociales démontrent le caractère intentionnel de la dissimulation d'emploi.

La société Atalian Propreté conteste pour sa part l'existence d'un travail dissimulé et soutient :

- qu'elle a bien effectué les démarches de déclarations d'embauche auprès des organismes sociaux

- que dès qu'elle a pris connaissance du courrier de l'URSSAF du 11 septembre 2015 indiquant qu'aucune DPAE n'aurait été effectuée, elle a contacté l'URSSAF pour demander une réédition de l'accusé de réception de la DPAE

- qu'il lui a alors été répondu par courrier du 14 décembre 2016 que cette réédition était impossible au-delà du délai d'un an expiré en l'espèce le 2 février 2016

- que la déclaration annuelle des salaires déposée le 8 février 2016 est un élément de preuve de la déclaration du salarié auprès des organismes sociaux

- qu'en tout état de cause, le caractère intentionnel de la dissimulation n'est pas démontré dans la mesure où elle a établi un contrat travail, a remis chaque mois au salarié ses bulletins de paie ainsi que ses documents de fin de contrat, lui a transmis l'intégralité des documents lui permettant de se prévaloir d'un contrat de travail pour la période correspondant à la durée du CDD et où M. [X] [N] figurait sur les documents de décompte du temps de travail consultables par l'inspection du travail.

Il résulte d'un courrier de l'URSSAF du 11 septembre 2015 que la consultation du fichier national des déclarations préalables à l'embauche effectuée le même jour ne fait pas apparaître de déclaration concernant M. [X] [N] pour la période du 2 février 2015 au 5 juin 2015.

Il est par ailleurs constant que la société Atalian Propreté n'est pas en mesure de produire l'accusé réception de la déclaration préalable à l'embauche concernant M. [X] [N] qu'elle allègue avoir déposé le 2 février 2015.

La société Atalian Propreté se prévaut également d'un courrier de l'URSSAF du 14 décembre 2018 précisant que la déclaration annuelle des données sociales récapitulant l'ensemble des embauches de l'année peut également constituer un élément de preuve de l'embauche d'un salarié.

Cependant, la cour relève :

- que la déclaration annuelle des salaires de l'année 2015 n'est pas versée aux débats

- que le courriel de Mme [F] du service paie daté du 12 avril 2017 adressé à Madame [E] [C], autre salariée du groupe, dans lequel il est indiqué que 'comme convenu, je te joins le fichier txt déposé par mes soins au titre de la n4ds 2015 sur net entreprises pour la sté OMH le 8/02/16 (traité et transmis par la rpr [R] [Z] pour dépôt après validation des cumuls par [I] [J])' ne suffit pas à rapporter la preuve de l'envoi de la déclaration annuelle des données sociales de la société Atalian Propreté pour l'année 2015 puisqu'il est échangé entre deux membres du groupe et qu'il concerne en outre une société OMH

- que le courriel de la société net entreprises du 8 février 2016 adressé à Madame [R] [Z], salariée du groupe, indiquant que : 'la ou les déclarations de votre envoi DADS-U réel, présentées ci-dessous, sont valides aux normes de forme, de cohérence et de cinématique appliquées par net entreprises V01X10" ne suffit pas non plus à rapporter la preuve de ce que la DADS de l'année 2015 mentionnant la présence de M. [X] [N] aux effectifs a effectivement été adressée aux organismes sociaux le 8 février 2016.

C'est donc à juste titre que le premier juge a relevé que l'employeur n'apporte aucun élément permettant de justifier une quelconque déclaration d'emploi salarié de M. [X] [N] aux organismes sociaux, y compris avec retard.

Le travail dissimulé étant constitué notamment soit par le défaut intentionnel de déclaration d'embauche soit par le défaut intentionnel de remise de bulletins de paye exacts, l'absence de travail dissimulé par défaut de déclaration d'embauche ne peut en aucun cas résulter du constat de la remise de bulletins de paye exacts comme le soutient la partie appelante.

La remise d'une attestation Pôle emploi établie au nom d'un autre salarié et le délai d'établissement d'une nouvelle attestation conforme obtenue sur décision de la formation des référés du conseil des prud'hommes ne permettent pas d'établir l'existence d'une intention frauduleuse de l'employeur et il n'est pas démontré que les documents versés aux débats par la société appelante ont été établis pour les besoins de la cause.

En revanche, il ressort de la pièce n° 4 versée aux débats par la société Atalian Propreté, non discutée par la partie intimée, que M. [X] [N] était bien mentionné dans les documents de décompte du temps de travail établis par l'employeur, lesquels étaient consultables par l'inspection du travail en application de l'article D3171-16 du code du travail.

Il ressort de tous ces éléments que la preuve de l'intention frauduleuse de l'employeur n'est pas établie.

En conséquence la cour, infirmant le jugement de ce chef, rejette la demande d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.

Sur la demande d'amende civile :

Au soutien de sa demande et au visa de l'article 559 du code de procédure civile M. [X] [N] fait valoir :

- que la société Atalian Propreté n'a pas critiqué le jugement déféré

- qu'elle ne verse pas non plus de nouvelles pièces aux débats et ne démontre donc pas en quoi le jugement devrait être infirmé

- que son initiative a pour conséquence de retarder de plusieurs mois le règlement des condamnations.

Cependant, l'appelante a bien fait valoir des moyens au soutien de son appel et produit des pièces au soutien de son argumentation.

De plus, il est fait droit à ses demandes.

L'appel ne revêt donc aucun caractère dilatoire ou abusif de sorte et la demande de M. [N] sera rejetée.

Sur les demandes accessoires:

Partie perdante, M. [X] [N] supportera la charge des dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridique.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

- Rejette l'intégralité des demandes de M. [X] [N] ;

- Condamne M. [X] [N] aux dépens de première instance et d'appel et dit qu'ils seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridique ;

- Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le GreffierLa Présidente

Gaétan PILLIEPatricia GONZALEZ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 19/01751
Date de la décision : 03/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-03;19.01751 ?
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