N° RG 20/07476 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NKGS
Décision du
Juge aux affaires familiales de LYON 2ème Chambre
Cabinet 9
du 11 décembre 2020
ROULLEAU
C/
[E]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
2ème chambre A
ARRET DU 1er Juin 2022
APPELANT :
M. [T] [Z] [P] [M]
né le 19 Juin 1946 à BOULOGNE BILLANCOURT (Hauts de Seine)
6 rue Commandant Faurax
69006 LYON
Représenté par Me Christian BIGEARD de la SELARL BIGEARD - BARJON, avocat au barreau de LYON
INTIMEE :
Mme [I] [O] [X] [E]
née le 22 Juillet 1951 à LYON 6ème arrondissement (Rhône)
34 place Bellecour
69002 LYON
Représentée par Me Géraldine ROUX de la SELARL B2R & ASSOCIÉS, avocate au barreau de LYON
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Date de clôture de l'instruction : 17 Mars 2022
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 6 Avril 2022
Date de mise à disposition : 1er Juin 2022
Audience tenue par Isabelle BORDENAVE, présidente, et Georges PÉGEON, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,
assistés pendant les débats de Sophie PENEAUD, greffière
A l'audience, Isabelle BORDENAVE a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.
Composition de la Cour lors du délibéré :
- Isabelle BORDENAVE, présidente
- Georges PEGEON, conseiller
- Carole BATAILLARD, conseillère
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Isabelle BORDENAVE, présidente, et par Sophie PENEAUD, greffière, à laquelle la minute a été remise par la magistrate signataire.
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M. [T] [M] et Mme [I] [E] se sont mariés le 9 décembre 1978 sous le régime de la communauté de biens réduite aux acquêts, après contrat de mariage reçu le 5 décembre 1978.
Par acte notarié du 6 juillet 1999, homologué par le tribunal de grande instance de Lyon le 17 septembre 1999, ils ont adopté le régime de la séparation de biens.
Par ordonnance de non-conciliation du 9 juin 2008, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Lyon a notamment attribué à l'épouse la jouissance du domicile conjugal et à l'époux la jouissance du local professionnel.
Le divorce des époux a été prononcé par jugement du juge aux affaires familiales de Lyon du 17 mars 2011, lequel a notamment ordonné la liquidation et le partage du régime matrimonial.
M. [M] a assigné Mme [E] devant le juge aux affaires familiales de Lyon le 22 janvier 2013 en vue de liquidation du régime matrimonial.
Par ordonnance du 31 janvier 2014, le juge de la mise en état a désigné un expert judiciaire pour procéder à l'évaluation de l'ensemble immobilier situé 34 place Bellecour à Lyon 2ème.
Le rapport d'expertise a été déposé le 12 janvier 2015.
Par jugement du 9 mars 2017, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Lyon a notamment ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage du régime matrimonial et de l'indivision post communautaire ayant existé entre M. [M] et Mme [E], et désigné maître [F], notaire à Lyon, pour y procéder, fixé la date des effets patrimoniaux du divorce au 9 juin 2008, fixé la valeur vénale des biens immobiliers (lots 61 et 50) à la somme respective de 205 000 euros et de 13'500 euros attribuant préférentiellement ces deux biens à Mme [E] et statué sur diverses autres demandes opposant les parties.
Par arrêt du 7 octobre 2018, la cour d'appel de Lyon, saisie par M. [M], a partiellement infirmé le jugement, et a notamment dit que M. [M] est redevable d'une indemnité d'occupation pour une partie du garage de la place Bellecour pour la période du 9 juin 2008 à juin 2011, fixé à l'actif de communauté le montant total des valeurs financières à la somme de 49'593,86 euros, la valeur des actions du Yatch Club à la somme de 10'000 euros, et celle du local professionnel et du garage à la somme de 218'500 euros, fixé l'actif de la communauté à la somme de 774 474,86 euros, et tranché diverses autres demandes des parties, notamment au titre du compte d'indivision.
Par arrêt du 28 mai 2019, la cour d'appel de Lyon, saisie d'une demande de rectification d'erreur matérielle a rejeté celle-ci et complété le dispositif de l'arrêt du 16 octobre 2018, en précisant que M. [M] doit restituer à Mme [E] une porcelaine du XVIIIe siècle, un tableau (Marine) imparti, un livre d'obstétrique du XVIIIe siècle, une gravure ancienne, une terre cuite de Picasso.
Le notaire a dressé un procès-verbal de dire des parties le 3 octobre 2019 et a établi un projet d'acte liquidatif.
Le 20 janvier 2020, le juge commis du cabinet numéro 9 a rendu son rapport au tribunal après procès-verbal de dires, établissant les points de désaccord suivants :
- point de désaccord numéro 1 : contestations relatives au compte d'indivision,
- point de désaccord numéro 2 : contestations relatives à la récompense de 200'000 euros due par Mme [E],
- point de désaccord numéro 3 : contestations relatives à la réévaluation des immeubles,
- point de désaccord numéro 4 : contestations relatives à l'occupation privative du local professionnel par Mme [E] à compter de février 2019.
Par jugement du 11 décembre 2020, auquel il est référé, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Lyon, vu le jugement du 9 mars 2017, l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 16 octobre 2018, l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 28 mai 2019, le procès-verbal de dire du 3 octobre 2019, et le rapport du juge commis du 20 janvier 2020 a :
- rejeté le dire numéro 3 relatif à la réévaluation du bien immobilier place Bellecour formé par M. [M],
- dit que la part de récompense de 100'000 euros due à M. [M] a été réglée en application de l'acte sous-seing privé du 19 avril 2007 et qu'en conséquence, la récompense de 200'000 euros due par Mme [E] est inscrite pour mémoire à l'acte définitif de partage, (dire numéro 2),
- débouté Mme [E] de sa demande de remboursement au titre des frais et charges de copropriété du bien situé place Bellecour (dire numéro 1),
- dit qu'aucune indemnité d'occupation n'est due par Mme [E] sur le local professionnel (dire numéro 4),
- renvoyé les parties devant le notaire aux fins de dresser l'acte de partage conformément au dispositif du jugement, en application de l'article 1375 du code de procédure civile, et selon son projet d'acte de partage,
- rejeté la demande de dommages et intérêts de Mme [E],
- rejeté les demandes des parties plus amples ou contraires,
- ordonné l'exécution provisoire,
- rejeté les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et dit que les dépens seront partagés par moitié entre les parties et employés en frais privilégiés de partage.
M. [M] a relevé appel de cette décision le 29 décembre 2020, l'appel portant sur :
- le rejet du dire numéro 3 relatif à la réévaluation du bien immobilier place Bellecour,
- la part de récompense de 100'000 euros due à lui qui aurait été réglée en application de l'acte sous-seing privé du 19 avril 2007 et qu'en conséquence, la récompense de 200'000 euros est inscrite pour mémoire à l'acte définitif de partage (dire numéro 3),
- l'absence d'indemnité d'occupation mise à la charge de Mme [E] sur le local professionnel (dire numéro 4),
- le rejet des demandes formées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
MOYENS ET PRETENTIONS
Aux termes de ses conclusions récapitulatives notifiées le 16 décembre 2021, M. [M] demande à la cour de le déclarer recevable et bien fondé en son appel, de réformer le jugement en ce qu'il a :
- rejeté le dire numéro 3 relatif à la réévaluation du bien immobilier place Bellecour,
- dit que la part de récompense à lui due a été réglée et est inscrite pour mémoire à l'acte définitif de partage (dire numéro 2),
- dit qu'aucune indemnité d'occupation n'est due par Mme [E] sur le local professionnel (dire numéro 4),
- rejeté les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Statuant à nouveau, il demande à la cour de :
- faire procéder au notaire commis, conformément à la loi, à l'évaluation des immeubles à la date la plus proche de l'acte de partage ainsi que pour le calcul de la récompense de 257'593 euros,
- dire et juger en conséquence que la réévaluation du bien situé 34 place Bellecour doit intervenir par référence au barème des notaires actualisé pour 2021,
- dire que le montant de la récompense de 200'000 euros due par Mme [E] à la communauté est définitivement établi au titre de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt du 16 octobre 2018, qu'il n'y a pas lieu de se prononcer sur ses modalités de règlement excédant la compétence du juge de la liquidation, et que les intérêts légaux courent sur cette somme depuis la date du divorce,
- dire n'y avoir lieu à statuer sur les modalités de règlement de compte courant d'associé d'une société civile immobilière ne dépendant pas des opérations de liquidation mais du patrimoine commun,
- débouter Mme [E] de ses contestations relatives au compte de l'indivision et notamment de ses demandes de remboursement de frais et charges de la copropriété comme prescrites d'une part, comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée d'autre part, et n'étant pas prouvées de troisième part,
- déclarer recevable et bien fondée sa demande au titre de l'indemnité d'occupation, par Mme [E] seule, du local professionnel indivis depuis février 2019, et l'actualiser à la somme de 11'550 euros, arrêtée à janvier 2021, sauf à parfaire,
- débouter Mme [E] de l'intégralité de ses demandes, notamment indemnitaires, comme infondées et injustifiées,
- condamner Mme [E] à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et à supporter les dépens distraits au profit de la Selarl Bigeard Barjon.
Il soutient, concernant la réévaluation de l'immeuble situé 34 place Bellecour, qu'il est de règle constante dans le partage judiciaire que le notaire apprécie les biens et arrête les comptes à une date aussi proche que possible du partage, soit à la date de l'état liquidatif, se référant à la notion de jouissance divise.
Il conclut que, lorsque les tribunaux entérinent des valeurs fixées par voie d'expertise, ils ne font que statuer sur la valeur des biens à la date où leur décision a été rendue, sans se prononcer sur la date de jouissance divise, et précise en l'occurrence que l'arrêt ne comporte aucune dérogation à la date de jouissance divise, de sorte que la fixation des valeurs à la date du jugement n'empêche pas une réévaluation des biens à la date de la jouissance divise, ce d'autant que cette valeur a varié au gré du marché immobilier.
Sans solliciter qu'il soit procédé à une nouvelle expertise, il demande une actualisation du bien suivant le barème des notaires et indique que les prétentions de Mme [E], au titre de l'article 1475 du code civil ne sauraient être retenues, l'attribution préférentielle ayant été accordée sur le fondement de l'article 1476 alinéa 2 du code civil.
Il précise que cet article renvoie expressément aux dispositions communes du partage et donc à l'article 832-4 du code civil qui fixe l'estimation du bien à la date de jouissance divise, faisant ainsi valoir que l'article 1475 du code civil est inapplicable faute d'avoir été sollicité.
Il conclut que c'est à tort que le jugement déféré considère que la règle de l'article 829 alinéa 2 peut être écartée par la commune intention des parties, et que tel serait le cas en l'espèce, alors qu'il avait maintenu sa demande d'homologation du rapport d'expertise, soutenant qu'il n'y a pas de contradiction avec l'actualisation sollicitée de la valeur du bien, et faisant observer que ce bien n'a pas la même valeur en 2021 alors que l'expertise a été réalisée en 2014.
Il soutient qu'aucun accord n'est intervenu entre les parties pour écarter expressément les dispositions de l'article 829 alinéa 2 du code civil.
Concernant la question de la récompense due par Mme [E] à la communauté, il conclut que c'est au mépris de toute motivation que le jugement a dit que cette part de récompense avait été réglée en application de l'acte sous-seing privé du 19 avril 2007, faisant état d'un malentendu et d'une discussion hors sujet.
Il conclut que la question du montant de la récompense à hauteur de 200'000 euros a été définitivement tranchée par la cour dans son arrêt du 16 octobres 2018, qui a autorité de chose jugée, et que les prétentions de Mme [E] sur le mode de règlement de cette récompense sont hors sujet et ne concernent pas le juge de la liquidation.
Il indique que le sort et le fonctionnement de la société civile immobilière dont Mme [E] fait état ne concernent en rien la liquidation du régime matrimonial.
Concernant la contestation relative à l'occupation privative par Mme [E] du local professionnel à compter de février 2019, il soutient que cette dernière a récupéré les clés de ce local, qu'elle a fait changer les serrures et qu'il était impossible dès lors de pénétrer dans l'appartement, rappelant que suivant ordonnance en la forme des référés du 29 juin 2020 il a été jugé qu'elle devait lui remettre la clé du verrou inférieur, ce qu'elle n'a toujours pas fait.
Il soutient ainsi avoir été privé de ce local pendant 22 mois pour chiffrer sa demande d'indemnité d'occupation à ce titre.
Enfin, concernant le compte d'indivision, il s'oppose aux demandes présentées, lesquelles se heurtent à l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt du 16 octobre 2018 qui a débouté Mme [E] de la demande présentée à ce titre, faisant par ailleurs observer que ces demandes sont prescrites alors que plus de 5 années se sont écoulées depuis le jugement de divorce du 17 mars 2011, et qu'en toute hypothèse il conviendrait alors de prendre en compte l'ensemble des règlements effectués par lui de 2008 à 2012, de même que l'ensemble des impôts payés pour le compte commun entre 1999 et 2008.
Aux termes de ses conclusions récapitulatives numéro 3, notifiées le 10 mars 2022, Mme [E] demande à la cour de confirmer le jugement, sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de remboursement de la moitié des frais et charges de copropriété du bien commun, de sa demande d'élévation de l'indemnité d'occupation due par M. [M], et de sa demande de dommages et intérêts.
Statuant à nouveau sur ces points, elle demande à la cour de :
- fixer l'indemnité d'occupation due par M. [M] à elle-même au titre de la jouissance exclusive du local professionnel à 1 050 euros par mois du 9 juin 2006 jusqu'en mars 2012, soit la somme de 72'450 euros, conformément à l'autorité de chose jugée attachée au jugement du tribunal de grande instance de Lyon du 9 mars 2017, confirmé par l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 16 octobre 2018,
- actualiser les taxes, factures et charges de copropriété payées par elle pour le compte de l'indivision post communautaire afférente aux biens situés place Bellecour au jour de l'acte de partage définitif, lesquels s'élèvent à la somme de 51'006,59 euros au 31 décembre 2021 (assurances 2022 incluses) outre charges et frais postérieurs ainsi que les frais liés à l'entretien du balcon du local professionnel soit 1 071,78 euros dont la moitié est due par M. [M],
- subsidiairement, fixer les taxes d'habitation et les taxes foncières à 14'450 euros pour la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2021, et fixer les autres dépenses afférentes au
local indivis (charges de copropriété, assurance 2022 inclus, chauffage gaz) à 19'308 euros pour la même période, soit 34'087,31 euros au total outre charges postérieures jusqu'au partage définitif dont moitié due par M. [M],
- condamner M. [M] à lui verser la somme de 15'000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la contradiction inacceptable de ses demandes destinées à ralentir le partage et ses stratagèmes mensongers.
Subsidiairement, dans le cas ou une nouvelle évaluation ou expertise des biens immobiliers communs (lots 60 et 51) serait ordonnée,
- fixer la valeurs desdits biens à retenir pour le partage à la date du 18 septembre 2012, date à laquelle elle a sollicité l'attribution préférentielle, conformément au contrat de mariage et à l'article 1475 alinéa 2 du code civil,
- condamner M. [M] à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens de l'instance distraits au profit de maître Roux.
Elle rappelle, concernant la valeur de l'immeuble situé place Bellecour, que ce bien immobilier était l'ancien domicile conjugal constitué d'une partie habitation, lot 60, bien propre, et d'une partie contigüe utilisée par M. [M] pour l'exercice de son activité professionnelle de psychiatre, lot 61, cette partie correspondant au quart de la surface totale et des tantièmes de copropriété.
Elle se prévaut d'une fin de non recevoir tirée de l'interdiction de se contredire au détriment d'autrui, faisant état d'une loyauté procédurale, et indique en l'espèce que M. [M] avait sollicité l'homologation des conclusions du rapport d'expertise tant devant le tribunal de grande instance que devant la cour d'appel, ne pouvant dès lors, sans se contredire, revenir sur l'évaluation.
Elle soutient que la cour d'appel a arrêté tous les comptes entre les parties en fixant l'actif de communauté et les créances entre époux, ayant ainsi implicitement, mais nécessairement, fixé la date de jouissance divise au jour de l'arrêt du 16 octobre 2018.
Elle précise que la règle de l'article 829 du code civil selon laquelle les biens doivent être estimés à la date de jouissance divise, qui doit être la plus proche possible du partage, n'est pas une règle d'ordre public, les co-partageants pouvant convenir d'évaluer certains biens à une date différente, situation de l'espèce, qu'a justement retenu le premier juge.
Elle se réfère par ailleurs aux dispositions du contrat de mariage du 15 décembre 1978, qui précisent que, pour les immeubles acquis au cours du mariage formant annexe d'un immeuble propre à l'un des époux, ou contigu à cet immeuble, l'époux propriétaire de ce propre aura la faculté de se le faire attribuer par imputation sur sa part moyennant soulte d'après la valeur au jour où l'attribution sera demandée, précisant que cette stipulation n'est que la reprise de l'article 1475 alinéa 2 du code civil.
Elle indique que le local professionnel, bien commun, lot 61, est contigu à l'appartement d'habitation, lot 60, qui lui appartient en propre, et qu'elle a ainsi la faculté de se faire attribuer le local professionnel moyennant soulte d'après sa valeur au jour de l'attribution, cette situation lui permettant dès lors de solliciter l'évaluation du local à la date du 18 septembre 2012.
Mme [E] conclut ainsi que les valeurs des actifs immobiliers communs, soit le local professionnel et le grenier, valorisés par l'expert à la somme de 218'500 euros, ainsi que la récompense due par elle à la communauté de 257'593 euros pour les impenses de la communauté dans son appartement propre ne peuvent qu'être entérinées par la cour.
Si par impossible il était fait droit à la demande de réévaluation, elle sollicite que la valeur à retenir soit fixée au 18 septembre 2012.
Concernant le mode de règlement de la récompense au titre du bien situé à Gaou Benat, elle indique que les époux, alors qu'ils n'avaient pas liquidé le régime de communauté au moment de l'adoption du régime de séparation de biens, et alors qu'ils n'avaient pas engagé une
procédure de divorce, avaient convenu, par acte sous-seing privé du 19 avril 2007, que la communauté avait financé des travaux de rénovation sur un bien qui lui était propre à Borme Les Mimosas, que ces travaux avaient généré une récompense due par elle à la communauté de 200'000 euros à titre forfaitaire, soit 100'000 euros revenant à M. [M], que ce dernier avait décidé d'utiliser cette somme à la participation dans le capital d'une société civile immobilière, La Louisiane, à hauteur de 8 %, le complément représentant une créance de compte courant.
Elle rappelle que la cour, dans l'arrêt du 16 octobre 2018, a jugé que le contrat du 19 avril 2007 fait la loi des parties et doit recevoir application, et que dès lors, c'est à ce titre que le notaire rappelle l'emploi qui a été fait par M. [M] de cette somme.
Mme [E] précise que les comptes de la société civile immobilière ont été régularisés conformément aux dispositions ayant force de chose jugée de l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, que M. [M], convoqué à l'assemblée générale du 16 décembre 2019, n'était ni présent ni représenté, et que les comptes ont été validés, ses parts étant libérées à hauteur de 9 600 euros, et son compte courant crédité à hauteur de 90'400 euros, M. [M] ayant d'ailleurs, depuis lors, sollicité remboursement de son compte courant.
Concernant l'indemnité d'occupation afférente au local professionnel, elle conteste être tenue d'une telle indemnité, indiquant que le notaire a fait une erreur en accédant à cette demande, alors qu'elle n'a pas la jouissance exclusive de ce local dès lors que M. [M] a bloqué la serrure, se référant à divers constats d'huissier.
Elle indique qu'elle n'a jamais usé ou jouit privativement du local professionnel, et ne peut dès lors être redevable d'une quelconque indemnité d'occupation, sollicitant modifications sur ce point du projet d'état liquidatif et suppression de l'indemnité d'occupation mise à sa charge ; elle précise que le premier juge ne s'est pas trompé en retenant qu'elle était privée de toute jouissance privative, sollicitant dès lors confirmation du jugement de ce chef.
Elle détaille par ailleurs le compte d'indivision, indiquant qu'elle a assumé les dépenses de conservation du local professionnel depuis 2008, et que les dépenses de conservation, conformément aux dispositions de l'article 815-13, doivent être prises en compte, soit un total de 39'034,18 euros, correspondant au quart des charges totales du bien immobilier.
Elle indique que si la cour d'appel a effectivement jugé qu'elle n'était pas en droit de faire état de ces dépenses, la cour a pour autant retenu qu'il était démontré qu'elle s'en était acquittée et les a rejetées, à défaut de décompte précis qu'elle fournit désormais
Elle conclut qu'aucune prescription ne peut lui être opposée, rappelant les dispositions de l'article 2241 du code civil, et précisant que la prescription a été interrompue depuis l'assignation délivrée par M. [M] le 22 janvier 2013, qu'elle a formé ses demandes dans un délai inférieur à 5 ans depuis le jugement de divorce du 17 mars 2011, rappelant par ailleurs qu'elle avait déjà formulé cette demande, qui avait été actée, dans le procès-verbal d'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage du 18 septembre 2012, lequel est lui-même interruptif de prescription.
Elle chiffre le montant des sommes engagées à la somme de 51'006,59 euros, dont moitié due par M.[M], ajoutant le coût des factures des huissiers de justice intervenus.
Subsidiairement, si la cour devait considérer qu'elle n'est recevable à réclamer le partage des charges qu'à compter de 2014, du fait de l'autorité de chose jugée de l'arrêt du 16 octobre 2018, elle chiffre le total des demandes à la somme de 34'087,31 euros.
Elle détaille l'indemnité d'occupation due par M. [M] au titre du local professionnel
et se prévaut de l'autorité de chose jugée à ce titre ressortant des diverses décisions de justice intervenues, sollicitant rectification du projet de partage sur ce point quant au montant d'indemnité retenue, en soutenant que c'est à tort que le premier juge a considéré que cet argument ne serait pas recevable, comme n'ayant pas fait l'objet d'un dire.
Elle soutient enfin une demande de dommages et intérêts en indiquant que M. [M] lui avait clairement indiqué qu'il retarderait les opérations pour voir majorer la valeur des biens, ayant dans le même temps refusé de lui restituer divers biens personnels.
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux conclusions récapitulatives visées ci-dessus pour un exposé plus précis des faits, prétentions, moyens et arguments des parties.
La clôture a été prononcée le 17 mars 2022, l'affaire a été plaidée le 6 avril 2022 et mise en délibéré ce jour.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Par ordonnance de non conciliation du 9 juin 2008, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Lyon a notamment attribué à Mme [E] la jouissance du domicile conjugal et à M. [M] la jouissance du local professionnel, sous réserve pour ce dernier bien des droits de chacun dans la liquidation du régime matrimonial.
Par jugement du 17 mars 2011, le divorce a été prononcé, et la liquidation et le partage du régime matrimonial ayant existé entre les époux ont été ordonnés.
Le 18 septembre 2012, un procès verbal a ouvert les opérations de compte, liquidation et partage du régime matrimonial.
Le projet de liquidation des droits patrimoniaux existant entre les parties, établi le 29 février 2012 et annexé au procès verbal d'ouverture des opérations de compte liquidation et partage et les pièces produites, permettent de retenir :
- que les parties ont acquis, par acte du 15 juin 1989, les lots 60, un appartement, 61, un local professionnel, 42, une cave, 51, un grenier, et 35, un garage, situés 34 place Bellecour à Lyon, et qu'un deuxième grenier a été acquis par les parties suivant acte reçu par notaire en 1995,
- que suivant acte du 25 octobre 1990, a été constaté le remploi par Mme [E] des lots ci-dessus, à l'exclusion du local professionnel.
Par ordonnance du 31 janvier 2014, le juge de la mise en état a désigné M. [R] pour procéder à l'évaluation de l'ensemble immobilier situé 34 place Bellecour à Lyon 2eme.
Selon rapport d'expertise judicaire du 13 janvier 2015, les biens communs, objets du présent litige, à savoir le lot 61 soit un local professionnel, et le lot 50 soit un grenier, ont été estimés aux sommes respectives de 205 000 euros et de 13 500 euros.
Par jugement du 9 mars 2017, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Lyon a notamment :
- ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage du régime matrimonial et de l'indivision post communautaire ayant existé entre M. [M] et Mme [E], et désigné maître [F], notaire à Lyon, pour y procéder,
- fixé la date des effets patrimoniaux du divorce au 9 juin 2008,
- fixé la valeur vénale des biens immobiliers, lots 61 et 50, aux sommes respectives de 205 000 euros et de 13'500 euros,
- débouté Mme [E] de sa demande visant à voir inscrire au passif de la communauté la somme de 22'870 euros,
- condamné M. [M] à payer à Mme [E] à titre d'indemnité d'occupation les sommes suivantes :
- 1 050 euros par mois pour l'occupation du local professionnel à compter du 9 juin 2006 jusqu'au mois de mars 2012,
- 170 euros par mois pour l'occupation du garage situé place Bellecour à compter du 9 juin 2008 jusqu'au partage,
- 100 euros par mois pour l'occupation du garage Abbado à compter du 9 juin 2008 jusqu'à la libération effective des lieux,
-attribué à titre préférentiel à Mme [E] les actions du Yatch Club ainsi que les biens immobiliers, le lot 61 et le lot 50, situés 34 place Bellecour à Lyon 2e.
Par arrêt du 7 octobre 2018, la cour d'appel de Lyon, saisie par M. [M], a partiellement infirmé le jugement et, statuant à nouveau, a dit que M. [M] est redevable d'une indemnité d'occupation pour une partie du garage de la place Bellecour, pour la période du 9 juin 2008 à juin 2011.
Le jugement a été confirmé en ses autres dispositions, et la cour, y ajoutant, a :
- fixé à l'actif de communauté le montant total des valeurs financières à la somme de 49'593,86 euros, la valeur des actions du Yatch Club à la somme de 10'000 euros, et celle du local professionnel et du garage place Bellecour à la somme globale de 218'500 euros,
- débouté Mme [E] de sa demande de voir inscrire au passif de la communauté la somme de 7 622 euros au titre du prêt,
- dit que Mme [E] doit récompense à la communauté de la somme de 257 593 euros au titre du bien situé place Bellecour et de la somme de 200'000 euros au titre du bien situé à Gaou Benat,
- débouté M. [M] de ses autres demandes à ce titre,
- dit que M. [M] doit une récompense à la communauté de 38'599 euros,
- fixé l'actif de la communauté à la somme de 774 474,86 euros,
- dit que M. [M] est redevable, à l'égard de Mme [E], des sommes suivantes :
- 28 132,36 euros des frais de travaux de transformation du bien place Bellecour,
- 170 euros par mois pour la période de juin 2008 à juin 2011 à titre d'indemnité d'occupation du garage place Bellecour,
- 3 772 euros au titre du ravalement de façade du bien situé place Bellecour,
- 966 euros au titre de l'indemnité d'occupation du parking situé quai Tilsitt,
- 9 319,70 euros au titre du prêt professionnel,
- 1 550,36 euros au titre des comptes du Yatch Club,
- débouté Mme [E] de ses demandes au titre des charges et frais divers du bien situé place Bellecour et de ses demandes au titre du prix de vente du bateau et à titre de la contribution aux charges du ménage,
- dit que Mme [E] est redevable à l'égard de M. [M] des sommes suivantes :
- 16 666 euros au titre des travaux effectués par M. [M] dans le logement de Mme [E] situé place Bellecour,
- 95,40 euros par mois depuis juin 2008 jusqu'au partage pour le hall d'entrée du bien situé place Bellecour.
Saisie par M. [M] d'une requête en rectification d'errreur matérielle, la cour, par arrêt du 28 mai 2019, l'a débouté de celle-ci, et a complété le dispositif du précédent arrêt.
Sur la base de ces deux décisions de justice, le notaire commis a convoqué les parties le 27 mars 2019 puis a établi, le 3 octobre 2019, un procès verbal de dires reprenant les désaccords persistants.
L'objet du litige porte ainsi sur :
- la réévaluation des biens place Bellecour,
- le versement d'une indemnité d'occupation,
- le compte d'indivision,
- la prise en compte de la récompense de 200 000 euros dans l'acte liquidatif.
M. [M] sollicite la réevaluation des deux biens sur la base de la valeur médiane du prix au mètre carré place Bellecour, suivant le barème des notaires actualisé, en précisant que le dispositif de la cour d'appel de Lyon du 16 octobre 2018, qui fixe la valeur du bien à la somme de 218 500 euros, n'a pas fixé la date de jouissance divise.
Mme [I] [K] s'oppose à cette demande en invoquant une fin de non recevoir tirée de l'interdiction de se contredire au détriment d'autrui, soutenant que l'appelant n'a jamais contesté l'évaluation du 13 janvier 2015, que la cour d'appel a implicitement fixé la date de jouissance divise au jour de l'arrêt du 16 octobre 2018, et qu'enfin, le contrat de mariage des époux du 15 décembre 1978 stipule, en son point 5ème, que l'époux propriétaire d'un bien propre annexe à un bien commun, et qui est contigu à ce dernier, a la faculté de se le faire attribuer, moyennant une soulte, d'après leur valeur au jour où l'attribution sera demandée, à savoir en l'espèce le 18 septembre 2012, soulignant que cette date est moins favorable que celle résultant du rapport d'expertise.
Il apparaît que trois des demandes ci-avant listées, faisant l'objet de l'appel, celle de réévaluation des biens, celle de versement d'une indemnité d'occupation et celle relative aux frais engagés sur l'appartement, reposent sur une question préalable qui a trait à la date de jouissance divise.
Sur la date de jouissance divise et les demandes en lien avec cette date
Il n'est pas contesté que l'indivision s'est ouverte à la date de l'ordonnance sur tentative de conciliation, le 9 juin 2008, comme le rappelle le jugement du 9 mars 2017, cette indivision perdurant jusqu'à la date de jouissance divise, qui clôt les comptes entre les parties.
Aux termes de l'article 829 alinéa 2 du code civil, en vue de leur répartition, les biens sont estimés à leur valeur à la date de la jouissance divise, telle qu'elle est fixée par l'acte de partage, en tenant compte, s'il y a lieu, des charges les grevant. Cette date est la plus proche possible du partage. Cependant, le juge peut fixer la jouissance divise à une date plus ancienne si le choix de cette date apparaît plus favorable à la réalisation de l'égalité.
S'il ressort de ce texte que la date d'évaluation des biens indivis à partager doit être réalisée au jour le plus proche possible du partage, le texte n'exclut pas pour autant une fixation de la date de jouissance à une date antérieure, cette date pouvant ressortir de la commune intention des parties.
En l'espèce, le jugement du 9 mars 2017 permet de relever que la valeur du local professionnel et du grenier, situés 34 place Bellecour à Lyon, évaluée par l'expert mandaté aux sommes respectives de 205'000 euros pour le local professionnel et 13'500 euros pour le grenier, n'avait pas fait l'objet d'observations de la part des parties, M. [M] ayant précisément sollicité, devant le premier juge, l'homologation du rapport sur ce point.
L'arrêt de la présente cour du 16 octobre 2018 note, en page 14, que l'expert judiciaire a retenu dans son rapport du 13 janvier 2015 une valeur de 205'000 euros et de 13'500 euros pour chacun des lots, sans contestation par les parties dans leurs écritures, étant observé que plus de trois années séparaient déjà le dépôt de l'expertise de la décision, sans pour autant que la valeur des biens ne soit remise en cause de quelque façon par l'une ou l'autre des parties.
Il apparaît par ailleurs que cet arrêt, outre la fixation de la valeur des différents biens figurant à l'actif de la communauté, dont le local professionnel et le garage, a chiffré le passif de communauté, le montant des récompenses, en prenant acte de l'accord des parties quant à la récompense due par Mme [E] à la communauté pour l'immeuble place Bellecour, a arrêté l'actif net de communauté, fixé le montant des différentes créances entre époux et a attribué les biens situés place Bellecour, à titre préférentiel, à Mme [E].
La lecture de cette décision permet de retenir que la commune intention des parties était de voir fixer les soldes de la communauté, actif et passif, et les créances l'une sur l'autre et que, pour ce qui concerne les deux biens litigieux, les parties s'accordaient sur leur valeur, telle que fixée par expertise, pourtant déjà réalisée plusieurs mois auparavant.
C'est à bon droit, dès lors, que le premier juge a considéré que, par cet accord que la cour a retenu, les parties acceptaient la fixation de la date de jouissance divise par la juridiction, pour permettre de liquider les comptes.
Cette date de jouissance divise ainsi retenue, comme procédant de la commune intention des parties, conduit à confirmer la décision déférée en ce qu'elle a rejeté la demande de réévaluation des deux biens, lots 61 et 50, situés 34 place Bellecour.
Cette date de jouissance divise, fixée ainsi à la date de l'arrêt du 16 octobre 2018, conduit à rejeter toute demande d'indemnité d'occupation pour la période postérieure, en confirmant ainsi le jugement, qui a débouté M. [M] de la demande à ce titre, pour l'occupation par Mme [E], à compter de février 2019, du local professionnel.
Concernant les dépenses relatives au bien immobilier place Bellecour, la cour d'appel, par l'arrêt du 16 octobre 2018, avait débouté Mme [E] de toute demande présentée à ce titre, au motif d'une part qu'à défaut de décompte précis, il était impossible d'établir le montant total définitif assumé par elle, et que d'autre part le décompte produit par Mme [I] [K] incluait les taxes d'habitation et foncières, dont il était établi qu'elles avaient été assumées par chacune des parties.
Cet arrêt ayant autorité de chose jugée, Mme [E] ne saurait désormais, comme l'a justement relevé le premier juge, chercher à contourner cette décision en produisant devant la cour les pièces non transmises lors du premier appel.
Par ailleurs, la date de jouissance divise étant arrêtée à la date de l'arrêt du 16 octobre 2018, elle ne saurait réclamer quelconque somme au titre des frais engagés depuis lors sur les biens, alors qu'elle reconnaît elle même, dans ses écritures, que la cour a ainsi arrêté tous les comptes entre les parties.
La décision déférée sera dès lors confirmée en ce qu'elle l'a déboutée de toute demande au titre des frais et charges engagés par elle sur les deux biens.
Mme [E] sollicite enfin, à titre incident, une indemnité d'occupation d'un montant de 72 450 euros et la modification à ce titre du projet d'état liquidatif, pour viser la période allant du 9 juin 2006 jusqu'en mars 2012 (et non de 2008 à 2012) tel que jugé par le tribunal de grande instance de Lyon le 9 mars 2017, confirmé par l'arrêt définitif de la cour d'appel de Lyon.
Ce point ayant déjà été tranché par les décisons susvisées, la cour n'a pas à statuer et il appartiendra à Mme [E] de produire les décisions devant le notaire en charge des opérations liquidatives.
Pour autant, pour éviter toute difficulté d'exécution alors que le jugement dans la motivation de ce chef "confirme l'état liquidatif" et dans le dispositif "déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires", il sera précisé qu'il appartiendra au notaire commis de se référer au jugement du 9 mars 2017, confirmé par la cour pour fixer la période de calcul de l'indemnité d'occupation due par M. [M].
Sur le versement de la récompense
Il ressort des éléments du dossier, qu'au cours du mariage et avant le changement de régime matrimonial, Mme [E] avait reçu en donation de ses parents la pleine propriété de biens et droits immobiliers situés à Bormes Les Mimosas, et que la communauté avait financé des travaux de rénovation sur ce bien, générant droit à récompense.
Le 19 avril 2007, les parties ont signé un acte sous seing privé par lequel, alors que Mme [E] avait décidé de vendre ce bien, elles sont convenues que le montant de la récompense due à la communauté était fixée à la somme, avec valeur actualisée, de 200 000 euros.
L'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 16 octobre 2018, après avoir relevé que conformément aux dispositions de l'article 1134 du code civil alors en vigueur, le contrat en date du 19 avril 2007 est la loi des parties et doit recevoir pleine application, a ainsi retenu que la récompense de Mme [E] à la communauté au titre de cet immeuble s'élève à la somme de 200 000 euros.
Le premier juge, tout en indiquant que le principe de la récompense avait été tranché par l'arrêt de la cour de Lyon du 16 octobre 2018, retient que l'autorité de chose jugée porte seulement sur ce principe, et non sur le mode de réglement de cette récompense et, au regard des termes de l'acte sous seing privé, juge que cette récompense ne doit être inscrite que pour mémoire, alors que le règlement de celle-ci est déjà intervenu.
Il convient de retenir, contrairement à ce qui est soutenu par M. [M], que la question du règlement de la dite somme ressort pleinement de l'établissement de l'acte liquidatif, de sorte que c'est à bon droit que le premier juge a statué de ce chef.
S'il est effectif que le principe de cette récompense due par Mme [E] à la communauté a acquis autorité de chose jugée, suite à l'arrêt de la présente cour du 16 octobre 2018, il convient cependant de relever que le contrat du 19 avril 2007, passé sous seing privé, entre Mme [E] et M. [M] prévoit que la somme revenant à ce dernier sera répartie à hauteur de 8%, soit un montant de 9 600 euros pour l'achat des parts de la Sci La Louisiane, et le solde, soit la somme de 90 400 euros, par une créance en compte courant.
Cet acte précise que le notaire, maître [N], auquel un exemplaire signé de l'acte est destiné, doit, suivant ordre de M. [M], virer les sommes suivant la répartition indiquée.
Mme [E] produit aux débats les pièces suivantes :
- un procès verbal d'assemblée générale de la Sci La Louisiane du 16 décembre 2019, non signé de M. [M], absent, dans lequel il est fait état, au 26 novembre 2019, d'un solde créditeur du compte courant de M. [M] pour la somme de 69 867,76 euros,
- un courrier accusé-réception de convocation de M. [M] à cette assemblée générale de la Sci Louisiane, pli revenu non réceptionné,
- un bilan comptable du 31 décembre 2018 de la Sci La Louisiane, faisant état d'un solde de compte courant, au 31 décembre 2017, d'actif circulant, en qualité de créances, pour la somme de 20 057,62 euros, et un détail de compte au bilan passif détaillé, au titre des emprunts, de la somme de 69 867,76 euros,
- une lettre de demande de remboursement du 14 janvier 2022, adressée par M. [M] à Mme [E], gérante de la Sci La Louisiane, pour la somme de 67 715, 55 euros, correspondant au crédit porté au compte courant d'associé à la clôture de l'exercice,
- un extrait grand livre de la Sci La Louisiane 2021, pour la période du 01 janvier 2021 au 31 janvier 2021, faisant état de la somme de 67 715, 55 euros au titre du compte courant.
Ces divers éléments viennent conforter le fait que le montant de la récompense due à M. [M] a été intégré, lors de l'accord conclu entre les parties en 2007, dans l'acquisition de parts par ce dernier dans la Sci, et le versement d'une somme sur un compte courant.
M. [M] se limite à contester cette situation mais n'apporte aucun élément probant pour la démentir, et notamment aucune attestation du notaire qui était chargé de virer les sommes sur le compte de la Sci, venant contester l'effectivité de ces virements.
Dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que la somme de 100 000 euros due à M. [M] ne doit être inscrite que pour mémoire dans l'acte liquidatif.
Sur les demandes de dommages et intérêts et d'application de l'article 700 du code de procédure civile
Mme [E] sollicite la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure et comportements abusifs, en réparation du préjudice subi, au motif que M. [M] a voulu retarder les opérations pour voir majorer la valeur des biens, ayant dans le même temps refusé de lui restituer divers biens personnels, et l'ayant privée de l'accès au local professionnel, bien indivis.
L'exercice d'une action en justice étant un droit, et le caractère fautif de l'action initiée tant devant le premier juge que devant la cour n'étant pas démontré, Mme [E] sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts à ce titre.
L'équité ne commande pas de faire application, au profit de l'une ou l'autre des parties, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et les dépens seront employés en frais privilégiés de partage.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant par arrêt contradictoire, après débats en chambre du conseil, et après en avoir délibéré,
Confirme le jugement du 11 décembre 2020,
Dit qu'il appartiendra au notaire commis de se référer au jugement du 9 mars 2017, confirmé par la cour, pour fixer la période de calcul de l'indemnité d'occupation due par M. [M],
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens, lesquels seront employés en frais privilégiés de partage.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
Signé par Isabelle Bordenave, présidente de chambre, et par Sophie Peneaud, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
La greffière La présidente