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16/05/2022 | FRANCE | N°22/00074

France | France, Cour d'appel de Lyon, Jurid. premier président, 16 mai 2022, 22/00074


N° R.G. Cour : N° RG 22/00074 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OHDF

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT





ORDONNANCE DE REFERE

DU 16 Mai 2022





























DEMANDEURS :



Mme [S] [K]

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentée par Me Florent MATHEVET BOUCHET de la SELARL BLG AVOCATS, avocat au barreau de ROANNE





M. [U] [K]

[Adresse 3]

[Localité 5]


>Représenté par Me Florent MATHEVET BOUCHET de la SELARL BLG AVOCATS, avocat au barreau de ROANNE







DEFENDERESSE :



Association AUTOUR DU LINGE

[Adresse 2]

[Localité 4]



avocat postulant : Me Sylvain SENGEL de la SELARL SELARL AD JUSTITIAM, avocat...

N° R.G. Cour : N° RG 22/00074 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OHDF

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT

ORDONNANCE DE REFERE

DU 16 Mai 2022

DEMANDEURS :

Mme [S] [K]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Florent MATHEVET BOUCHET de la SELARL BLG AVOCATS, avocat au barreau de ROANNE

M. [U] [K]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Me Florent MATHEVET BOUCHET de la SELARL BLG AVOCATS, avocat au barreau de ROANNE

DEFENDERESSE :

Association AUTOUR DU LINGE

[Adresse 2]

[Localité 4]

avocat postulant : Me Sylvain SENGEL de la SELARL SELARL AD JUSTITIAM, avocat au barreau de ROANNE

avocat plaidant : Maître Adrien MATHEVET, avocat au barreau de ROANNE

Audience de plaidoiries du 02 Mai 2022

DEBATS : audience publique du 02 Mai 2022 tenue par Pierre BARDOUX, Conseiller à la cour d'appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 3 janvier 2022, assisté de Sylvie NICOT, Greffier.

ORDONNANCE : contradictoire

prononcée publiquement le 16 Mai 2022 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile;

signée par Pierre BARDOUX, Conseiller et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

''''

EXPOSE DU LITIGE

L'association Autour du linge est titulaire d'un bail commercial daté du 2 février 2012 sur les locaux situés [Adresse 2], appartenant à Mme [S] [K] en qualité d'usufruitière et M. [U] [K] en qualité de nu-propriétaire dits ensuite les consorts [K].

La sous-toiture s'étant effondrée, l'association Autour du linge a saisi le président du tribunal judiciaire de Roanne par assignation du 15 novembre 2021, lequel par ordonnance de référé du 3 février 2022, a notamment :

- ordonné aux consorts [K] de faire procéder aux travaux de réparation de la sous-toiture du bien loué à l'association Autour du linge, tels que préconisé par le devis émis le 29 juin 2021 par la société Vallorge, et ce sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter du 41ème jour suivant le jour de signification de la présente décision,

- condamné solidairement les consorts [K] à verser à l'association Autour du linge la somme de 1 500 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance.

Les consorts [K] ont interjeté appel de cette ordonnance le 11 mars 2022.

Par assignation en référé délivrée le 24 mars 2022 à l'association Autour du linge, ils ont saisi le premier président afin d'ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire de cette ordonnance et de joindre les frais de ce référé aux dépens de la procédure d'appel.

A l'audience du 2 mai 2022 devant le délégué du premier président, les parties, régulièrement représentées, s'en sont remises à leurs écritures, qu'elles ont soutenues oralement.

Dans leur assignation, les consorts [K] soutiennent l'existence de moyens sérieux de réformation tenant notamment aux engagements réciproques des parties au bail commercial et à la nature des réparations.

Ils se réfèrent aux conditions générales du bail commercial régularisées entre les parties pour affirmer que les travaux ordonnés concernant la réparation de sous-toitures, la dépose de l'habillage ainsi que celle du faux plafond ne correspondent pas aux grosses réparations de l'article 606 du Code civil et indiquent que ces réparations d'entretien appartiennent au seul locataire.

Ils relèvent cependant que les travaux de réparation restent à la charge des bailleurs lorsque ceux-ci sont dus à la vétusté des locaux donnés à bail. Mais en l'absence d'état des lieux, ils sont réputés avoir été en bon état. Ils font également valoir que la vétusté n'a pas été retenue par le premier juge et qu'elle n'a pas non plus été justifiée par une expertise contradictoire de la partie adverse. De plus, ils insistent sur les activités d'entretien du linge, de lavage automatique et de repassage générant une grande quantité d'humidité à l'origine des dégradations du local.

Les consorts [K] invoquent le fait qu'ils ne sont que de simples particuliers pour qui la somme de 14 092, 80 € est une dépense particulièrement importante.

Ils estiment que l'exécution provisoire rendra inutile l'appel car la décision de la cour conduira à une impossible remise en état ou du moins à des conséquences manifestement excessives eu égard à la nature de l'affaire.

Par ailleurs, ils indiquent la possibilité d'une action en responsabilité à l'encontre de la locataire sur le fondement contractuel et l'exécution des travaux aurait un effet irrémédiable de supprimer autant de preuves susceptibles de déterminer la propension existante entre les effets des activités et une vétusté des locaux.

Dans leurs conclusions déposées au greffe par RPVA le 26 avril 2022, l'association Autour du linge s'oppose à la demande d'arrêt de l'exécution provisoire et sollicite la condamnation solidairement, à défaut in solidum, des consorts [K] au paiement des sommes de 5 000 € à titre des dommages et intérêts pour procédure abusive et de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Elle affirme que la sous-toiture d'un immeuble est un élément assurant un rôle déterminant dans la protection de la toiture et contribue à la bonne isolation du bien.

Ils ajoutent que les travaux litigieux sont particulièrement importants puisque l'intégralité de la sous-toiture doit être reprise. Par ailleurs, elle estime que la clause introduite par les bailleurs est contraire à l'article premier du décret du 26 août 1987 définissant les réparations locatives. Enfin, elle affirme que le procès-verbal constatant l'état de dégradation avancé du plafond du local et les fissures des revêtements contreplaqués menaçant de s'effondrer suffit à prouver la vétusté des locaux. Elle rappelle également que la société Vallorge avait confirmé l'état de dégradation avancé de cette sous-toiture. Elle avait ainsi établi un devis et préconisé les travaux urgents devant être entrepris. Elle invoque l'inutilité d'une expertise judiciaire.

Elle conteste également que les désordres soient dus à son activité étant donné que toutes les machines sont équipées de systèmes d'aspiration et d'évacuation. Cela permet à la vapeur d'être rejetée à l'extérieur du local. Elle conteste le bien fondé des attestations fournies par la partie adverse qui semblent rédigées pour les besoins de la cause sans être circonstanciées. Elle précise qu'à aucun moment un taux d'humidité élevé a été relevé.

Elle s'étonne que les consorts [K] se plaignent de la vapeur et de l'humidité produite par les activités alors même que la concluante est locataire depuis plus de 10 ans et qu'aucun reproche ne lui a été adressé à ce titre.

S'agissant des conséquences manifestement excessives de l'exécution provisoire, l'association Autour du linge reproche aux consorts [K] de ne pas justifier de leur situation financière et du caractère excessif du montant des travaux au vu de leurs ressources respectives.

Elle s'étonne également que les consorts [K] évoquent une éventuelle procédure en responsabilité alors qu'ils n'ont jamais formulé de reproche à son encontre.

En tout état de cause, elle affirme que les travaux sont nécessaires compte tenu du caractère inopiné de l'effondrement du revêtement de la sous-toiture et de la chute consécutive des plaques du faux-plafond. Elle ajoute que tout retard dans la réalisation des travaux ne fait qu'aggraver la situation du local commercial.

A titre reconventionnel, elle évoque le caractère abusif de la procédure car elle lui semble être motivée que par le refus des consorts [K] de procéder à la réalisation des travaux alors même qu'ils sont urgents. Pourtant, elle déclare qu'ils avaient initialement admis que la charge des travaux leur incombait eu égard au caractère urgent des travaux.

Pour satisfaire aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties, à la décision déférée, aux conclusions régulièrement déposées et ci-dessus visées, comme pour l'exposé des moyens à l'énoncé qui en sera fait ci-dessous dans les motifs.

MOTIFS

Sur la demande d'arrêt de l'exécution provisoire

Attendu que l'exécution provisoire de droit dont est assortie l'ordonnance rendue le 3 février 2022 par le président du tribunal judiciaire de Roanne ne peut être arrêtée, conformément aux dispositions de l'article 514-3 du Code de procédure civile, lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ; que ces deux conditions sont cumulatives ;

Attendu qu'un moyen sérieux ne relève pas d'une simple affirmation ni de la seule reprise des arguments développés en première instance ; qu'en d'autres termes un moyen sérieux est un moyen suffisamment consistant pour mériter d'être allégué ou soutenu, pris en considération et avoir des chances d'être retenu après discussion et réflexion et qui doit en tout état de cause conduire à l'annulation ou à la réformation ;

Attendu qu'il ressort des pièces du débat que les parties sont liées par un bail qu'elles qualifient comme commercial, point qui a été confirmé lors des débats sur notre interpellation ; que cette qualification permet aux parties de déroger au droit commun du bail ;

Attendu que les parties sont contraires sur l'application d'une de ses clauses, en l'espèce la clause II.2, dite par les consorts [K] comme confiant la charge des travaux litigieux à la locataire et pas au bailleur ;

Que les consorts [K] produisent leurs conclusions de première instance dans lesquelles ils ont relevé que «soutenir que la charge du coût de ces travaux devrait être supportée par les bailleurs relève incontestablement d'une question de fond» ;

Attendu que l'association défenderesse affirme de son côté que la clause susvisée est contredite par la référence expresse faite dans le bail au décret du 26 août 1987 qui détermine les réparations locatives ;

Attendu que si le premier juge a motivé sa décision sur l'application de l'article 835 du Code de procédure civile, lui permettant de prendre des mesures de nature à prévenir un dommage imminent même en cas de contestation sérieuse, il ne ressort d'aucun des termes de son ordonnance qu'il a été répondu à la contestation émise par les bailleurs sur la question de l'application de la clause discutée dite confiant la charge des réparations litigieuses à la locataire ;

Qu'aucun de ces motifs ne vient statuer sur l'obligation des bailleurs à supporter cette charge, seule la reconnaissance des désordres par ces derniers ayant été visée ;

Attendu qu'il convient de retenir que ce moyen portant sur l'application du bail constitue un moyen sérieux de réformation, et en cet état il n'est pas besoin d'examiner les autres moyens articulés en ce que la détermination par la cour de l'application de la clause II.2 conditionne largement l'issue du litige ;

Attendu que, s'agissant de l'existence de conséquences manifestement excessives, il convient de rappeler qu'il appartient seulement au premier président de prendre en compte les risques générés par la mise à exécution de la décision rendue ;

Que les conséquences manifestement excessives de la décision rendue ne peuvent pas résulter exclusivement de celles inhérentes à la seule mise à exécution de la décision, mais ces conséquences doivent présenter un caractère disproportionné ou irréversible pour la partie condamnée ; que la charge de leur preuve incombe aux demandeurs ;

Attendu que les consorts [K] font valoir que le devis auquel ils doivent se reporter au regard des termes de l'ordonnance dont appel représente un montant considérable de 14 092,80 €, auquel il leur sera difficile de faire face ; qu'ils ajoutent qu'aucune remise en état n'est susceptible d'intervenir en cas d'infirmation, car l'exécution des travaux aura pour effet irrémédiable de supprimer les preuves susceptibles d'intéresser tout expert dans le cadre d'une recherche de responsabilité qu'ils indiquent vouloir engager ;

Qu'il vient d'être relevé que la discussion sur la charge des travaux était sérieuse, alors surtout qu'aucune expertise technique ne permet de départager les parties sur l'origine effective de la survenance des désordres ;

Attendu que ces investigations paraissent nécessaires à la solution du litige qui oppose les parties et l'exécution des travaux ordonnés par le président du tribunal judiciaire de Roanne aura pour conséquence irrémédiable de priver les consorts [K] d'une faculté de rechercher les causes des désordres et de garder une chance d'engager le cas échéant la responsabilité de sa locataire ;

Attendu qu'il convient de retenir le risque de conséquences manifestement excessives et de faire droit à la demande d'arrêt de l'exécution provisoire ;

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

Attendu que cette demande est insusceptible de prospérer en ce qu'il a été fait droit à la demande d'arrêt de l'exécution provisoire ; qu'elle doit être rejetée ;

Sur les dépens

Attendu que l'association défenderesse succombe et doit supporter les dépens de ce référé ;

Que la présente instance étant distincte de celle d'appel, ses dépens doivent nécessairement être liquidés ;

PAR CES MOTIFS

Nous, Pierre Bardoux, délégué du premier président, statuant publiquement, en référé, par ordonnance contradictoire,

Vu la déclaration d'appel du 11 mars 2022,

Ordonnons l'arrêt de l'exécution provisoire attachée de plein droit à l'ordonnance rendue le 3 février 2022 par le président du tribunal judiciaire de Roanne,

Condamnons l'association Autour du linge aux dépens de ce référé.

LE GREFFIERLE MAGISTRAT DELEGUE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Jurid. premier président
Numéro d'arrêt : 22/00074
Date de la décision : 16/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-16;22.00074 ?
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