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12/05/2022 | FRANCE | N°21/07462

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 12 mai 2022, 21/07462


N° RG 21/07462

N° Portalis DBVX-V-B7F-N4D2









Décision du Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 30 septembre 2021



RG : 2020f02541







[B]

S.A.S. ALLDIFFUSION



C/



LA PROCUREURE GENERALE

S.E.L.A.R.L. [F] [X]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRÊT DU 12 Mai 2022







APPELANTS :



M. [L] [B]

né le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 6]

[Adresse 4]

[Adresse 4]



Représenté par Me Emmanuelle BAUFUME de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON, toque : 1547 et ayant pour avocat plaidant, Mes Carole DESSUS et Franck THEVENIN, avocats au b...

N° RG 21/07462

N° Portalis DBVX-V-B7F-N4D2

Décision du Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 30 septembre 2021

RG : 2020f02541

[B]

S.A.S. ALLDIFFUSION

C/

LA PROCUREURE GENERALE

S.E.L.A.R.L. [F] [X]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRÊT DU 12 Mai 2022

APPELANTS :

M. [L] [B]

né le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 6]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représenté par Me Emmanuelle BAUFUME de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON, toque : 1547 et ayant pour avocat plaidant, Mes Carole DESSUS et Franck THEVENIN, avocats au barreau de LYON, substitués par Me Sylvain BOLZONI, avocat au barreau de LYON

S.A.S. ALLDIFFUSION

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Représentée par Me Emmanuelle BAUFUME de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON, toque : 1547 et ayant pour avocat plaidant, Mes Carole DESSUS et Franck THEVENIN, avocats au barreau de LYON, substitués par Me Sylvain BOLZONI, avocat au barreau de LYON

INTIMEES :

Mme LA PROCUREURE GENERALE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

S.E.L.A.R.L. [F] [X], venant aux droits de la SELARL ALLIANCE MJ, représentée par Maître [F] [X], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société ALL DIFFUSION

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Aurélien BARRIE de la SELARL POLDER AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : T 1470, substitué par Me Franck CANCIANI, avocat au barreau de LYON

******

Date de clôture de l'instruction : 10 Mars 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 17 Mars 2022

Date de mise à disposition : 12 Mai 2022

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Catherine CLERC, conseiller faisant fonction de président

- Raphaële FAIVRE, vice-présidente placée

- Marie CHATELAIN, vice-présidente placée

assistées pendant les débats de Jessica LICTEVOUT, greffier

A l'audience, Catherine CLERC a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Catherine CLERC, conseiller faisant fonction de président, et par Jessica LICTEVOUT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DU LITIGE

A la suite de difficultés survenues à partir de 2018 (perte de clients importants, contrôle fiscal) la SAS All Diffusion spécialisée dans l'importation et la vente d'articles de décoration et d'équipement de la maison, présidée par M. [L] [B], a déclaré son état de cessation des paiements auprès du tribunal de commerce de Lyon le 11 décembre 2019.

Par jugement du 2 janvier 2020, ce même tribunal a prononcé la liquidation judiciaire de la société All Diffusion, a fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 1er décembre 2019 et a nommé la SELARL Alliance MJ, représentée par Me [F] [X], en qualité de liquidateur judiciaire (le liquidateur judiciaire).

Le 18 février 2020, l'administration fiscale a déclaré au passif de la procédure de la société All Diffusion une créance privilégiée de TVA, d'impôt sur le revenu et de cotisations foncières des entreprises à hauteur de 135'434€ à titre définitif et 1'040'544€ à titre provisionnel.

Par acte extrajudiciaire du 11 septembre 2020, le liquidateur judiciaire a saisi le tribunal de commerce de Lyon pour voir reporter la date de cessation des paiements de la société All Diffusion au 31 juillet 2018.

Postérieurement à cette assignation, le 12 janvier 2021, la société All Diffusion a formé une réclamation contentieuse à l'encontre de l'avis de mise en recouvrement de TVA émis par l'administration fiscale le 30 novembre 2020 d'un montant de 1'067'007€, la réclamation fiscale portant sur la TVA intracommunautaire et de la majoration pour manquement délibéré ; saisi de la demande de l'administration fiscale présentée le 7 décembre 2020 aux fins d'admission à titre définitif de sa créance déclarée à titre provisionnel à hauteur de 1'034'396€ au titre de la TVA, le juge-commissaire, par ordonnance du 20 janvier 2021, a sursis à statuer sur l'admission de cette créance dans l'attente de l'instruction de cette réclamation contentieuse.

Par jugement du tribunal de commerce de Lyon du 3 août 2021, la SELARL [F] [X] a été autorisée à reprendre les mandats confiés à la société Alliance MJ.

Par jugement du 30 septembre 2021, le tribunal de commerce de Lyon a :

pris acte que par jugement en date du 3 août 2021, le tribunal a désigné la SELARL [F] [X] représentée par Me [F] [X] en qualité de liquidateur judiciaire de la société All Diffusion en remplacement de Ia SARL Alliance MJ, précédemment désignée et déclaré recevable l'action poursuivie par Ia SELARL [F] [X] représentée par Me [F] [X],

débouté la société All Diffusion et M. [B] de leur demande de sursis à statuer,

dit que la société All Diffusion était en état de cessation des paiements dès le 31 juillet 2018, au moins,

dit que la date de cessation des paiements fixée provisoirement au 1er décembre 2019 par jugement déclaratif est reportée au 31 juillet 2018 dans la procédure de liquidation judiciaire de la société All Diffusion,

ordonné que la décision à intervenir modifiant la date de cessation des paiements soit publiée et mentionnée au registre, conformément aux articles R.621-8 et R.631-13 du code de commerce,

dit qu'il n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

dit que les dépens de l'instance seront tirés en frais privilégiés de la procédure.

M. [B] et la société All Diffusion ont interjeté appel par acte du 8 octobre 2021 en ce que ce jugement a :

les a déboutés de leur demande de sursis à statuer,

dit que la société All Diffusion était en état de cessation de paiements dès le 31 juillet 2018, au moins,

dit que la date de cessation des paiements fixée provisoirement au 1er décembre 2019 par jugement déclaratif est reportée au 31 juillet 2018 dans la procédure de liquidation judiciaire de la société All Diffusion,

ordonné que la décision à intervenir modifiant la date de cessation des paiements soit publiée et mentionnée au registre, conformément aux articles R.621-8 et R.631-13 du code de commerce,

dit qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions du 10 décembre 2021, fondées sur les articles L.631-1 et suivants du code de commerce, 378 et 379 du code de procédure civile, L.190, L.199, L.247 et L.281 du livre des procédures fiscales, M. [B] et la société All Diffusion demandent à la cour de réformer le jugement déféré et statuant à nouveau :

in limine litis : surseoir à statuer sur la demande de report de la date de cessation des paiements dans l'attente de l'issue de la réclamation contentieuse mise en 'uvre par la société All Diffusion le 12 janvier 2021,

subsidiairement, au fond :

dire et juger que le passif fiscal n'est pas certain,

rejeter les demandes du liquidateur judiciaire tendant à voir remonter la date de cessation des paiements au 31 juillet 2018,

en tout état de cause :

condamner le liquidateur judiciaire à verser à M. [B] une somme de 3'000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

statuer ce que de droit sur les dépens.

Par conclusions du 7 janvier 2022, fondées sur l'article 378 du code de procédure civile, L.631-1 et L.631-8 du code de commerce, le liquidateur judiciaire demande à la cour de':

rejeter toutes demandes, fins, moyens et conclusions contraires,

confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 30 septembre 2021 par le tribunal de commerce de Lyon,

condamner M. [B], à lui payer la somme de 3'000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner M. [B] aux entiers dépens de l'instance.

Le ministère public, par observations du 1er février 2021, communiquées contradictoirement aux parties, a sollicité la confirmation du jugement querellé.

MOTIFS

A titre liminaire, il est rappelé que la cour n'est est pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de procéder à des recherches que ses constatations rendent inopérantes et doit statuer sur les seules demandes mentionnées au dispositif des dernières conclusions des parties.

Sur la demande de sursis à statuer

Les appelants soutiennent que le juge administratif étant seul compétent pour statuer sur l'existence et le montant des créances liées aux impôts indirects tels que la TVA, il y a lieu pour la cour, par infirmation du jugement déféré, d'accueillir leur demande de sursis à statuer dans l'attente de leur recours formé à l'encontre de l'avis de mise en recouvrement émis par l'administration fiscale le 30 novembre 2020, soulignant que le juge-commissaire de la procédure collective a sursis à statuer sur l'intégralité de la créance fiscale dans son ordonnance du 20 janvier 2021.

Le liquidateur judiciaire réplique justement que le présent litige n'a pas pour objet l'admission d'une créance publique dont l'existence ou le montant serait à déterminer, sinon une demande de report de la date de cessation des paiements.

En outre, ainsi qu'il le sera développé ci-après, le recours contentieux exercé par la société All Diffusion à l'encontre de cet avis de mise en recouvrement ne concerne pas l'intégralité de la créance fiscale mais est limité à la créance de TVA Intracommunautaire et aux pénalités pour manquement délibéré, le surplus de la créance fiscale n'ayant pas été discuté et étant en conséquence certain à hauteur de 690'277€, étant à lui seul suffisant à caractériser l'état de cessation de paiement.

Le jugement déféré est en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de sursis à statuer.

Sur la demande de report de la date de cessation des paiements

Conformément aux articles L.631-1 et L.631-8 du code de commerce, la date de cessation des paiements ne pouvant être reportée qu'au jour où le débiteur était déjà dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible, il y a lieu pour le juge saisi d'une demande de report, de se placer, pour apprécier cette situation, non pas au jour où il statue, mais à celui auquel est envisagé le report de la date de cessation des paiements.

Ensuite, il est rappelé qu'une dette incertaine, comme faisant l'objet d'un recours, ne peut pas être incluse dans le passif exigible lequel correspond au passif échu, non assorti d'un moratoire.

L'actif disponible correspond aux fonds ou valeurs immédiatement mobilisables dont le débiteur peut disposer immédiatement pour s'acquitter de son passif exigible.

Il est par ailleurs rappelé que la TVA obéit à des règles d'exigibilité spécifiques définies à l'article 269-2-c du code général des impôts, à savoir pour les prestations de services, elle est exigible dès l'encaissement des acomptes, du prix ou de la rémunération'; il en résulte notamment que doivent être intégrés dans le passif exigible, les rappels de TVA non déclarée réclamés au débiteur dans le cadre d'une proposition de rectification portant sur une période antérieure au jugement d'ouverture.

Les appelants concluent au rejet de la demande de report de la date de cessation des paiements au 31 juillet 2018 en faisant valoir que le passif présenté comme exigible à cette date n'est pas certain ni exigible compte tenu de la réclamation contentieuse qu'ils ont formée à l'encontre de l'avis de mise en recouvrement de l'administration fiscale.

Ils ajoutent qu'à la date du 31 juillet 2018, la société All Diffusion disposait de 600'000€ de créances clients recouvrables qu'elle pouvait mobiliser grâce à la garantie fiduciaire qu'elle avait souscrite auprès de Lea Trade Finance et qu'elle disposait en outre de 22'000€ de trésorerie.

Le liquidateur judiciaire proteste contre cette présentation en rappelant le champ restreint de la réclamation contentieuse qui ne concerne pas la dette de rappel de TVA des exercices 2017 et 2018 pour un total de 690'276,66€, soit 507'242,11€ au 31 juillet 2018 qui doit être incluse dans le passif exigible de la société All Diffusion compte tenu des règles d'exigibilité de la TVA.

Il développe que le passif exigible de la société débitrice, dont il souligne qu'elle n'a pas obtenu de remise des pénalités ni de moratoire de la part de l'administration fiscale, était au 31 juillet 2018 supérieur à son actif disponible qui totalisait tout au plus 22'197,40 € à cette date, et que la preuve n'est pas rapportée que les créances clients recouvrables alléguées par l'intéressée aient été à cette époque immédiatement et facilement réalisables, la convention de fiducie-gestion et de fiducie -sûreté souscrite par celle-ci n'ayant pas pour finalité de mobiliser son poste client ni d'accroître son passif disponible.

Ce qui doit être admis.

En premier lieu, il est exact que la réclamation contentieuse exercée le 12 janvier 2021 par la société All Diffusion à l'encontre de l'avis de mise en recouvrement émis le 30 novembre 2020 par l'administration fiscale pour un montant de 1'067'007€, a été limitée à la créance de TVA «'livraisons intracommunautaires'» (soit 36'954€ pour l'exercice 2017 et 11'013€ pour l'exercice 2018) et à la majoration pour manquement délibéré (soit 295'876€)'; il s'en suit que la créance de l'administration fiscale non critiquée au titre de la rétention de TVA s'élève à un total de 690'277€ (470'288€ pour l'exercice 2017 et 219'989 pour l'exercice 2018).

Il est tout aussi exact que la société All Diffusion n'a pas sollicité dans le cadre de son recours hiérarchique du 3 juillet 2019 des remises ou un moratoire pour la créance de la rétention de TVA, celle-ci ayant uniquement formulé une demande de remise gracieuse des pénalités de 40'% pour manquement délibéré dont le rejet lui a été notifié le 8 novembre 2019.

Ainsi, la créance de TVA au 31 juillet 2018 doit être intégrée dans le passif exigible de la société All Diffusion à hauteur de la somme de 470'288€, cette somme étant certaine et exigible dès lors qu'elle ne fait pas l'objet d'une réclamation contentieuse, ni d'une remise, ni d'un moratoire.

En second lieu, il est constant à l'examen du dossier que la société All Diffusion ne disposait pas à la date du 31 juillet 2018 d'un actif disponible suffisant pour s'acquitter de dette fiscale de TVA de 470'288€, celui-ci s'établissant à 22'197,40€'; les créances clients alléguées à hauteur de plus de 600 000€ par cette société ne sont pas à retenir dans l'actif disponible dès lors qu'il n'est pas démontré qu'elles étaient immédiatement réalisables à la date du 31 juillet 2018, étant précisé que la convention de fiducie-gestion et fiducie-sûretés souscrite par l'intéressée est sans emport sur la solution du litige, une telle convention n'étant pas un moyen de recouvrement de créances comme relevé à bon droit par les premiers juges.

Au vu de l'ensemble de ces considérations et constatations, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a prononcé le report de la date de cessation des paiements de la société All Diffusion à la date du 31 juillet 2018 (et non pas 2019 comme dit dans les motifs en page 4 par suite d'une erreur purement matérielle), date à laquelle son actif disponible ne lui permettait pas de faire face à son passif exigible.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Succombant dans son recours, M. [B] est condamné aux dépens d'appel et à supporter ses frais de procédure d'appel'mais est dispensé en équité de verser une indemnité de procédure au liquidateur judiciaire; le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement déféré,

Ajoutant,

Déboute les parties de leurs demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en appel,

Condamne M. [L] [B] aux dépens d'appel.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 21/07462
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;21.07462 ?
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