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09/05/2022 | FRANCE | N°22/00078

France | France, Cour d'appel de Lyon, Jurid. premier président, 09 mai 2022, 22/00078


N° R.G. Cour : N° RG 22/00078 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OHJQ

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT



ORDONNANCE DE REFERE

DU 09 Mai 2022





























DEMANDEUR :



M. [H] [L]

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représenté par Me CHATELAIN substituant Me Joseph PALAZZOLO de la SCP YVES HARTEMANN JOSEPH PALAZZOLO, avocat au barreau de LYON (toque 480)





DEFENDERESSE :



Mm

e [V] [X]

en sa qualité de propriétaire, suite au décès de Madame [N] [G]

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par Me GIRARDON substituant Me Eric CESAR de la SELARL LEGI AVOCATS, avocat au barreau de LYON (toque 664)



Audience de ...

N° R.G. Cour : N° RG 22/00078 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OHJQ

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT

ORDONNANCE DE REFERE

DU 09 Mai 2022

DEMANDEUR :

M. [H] [L]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me CHATELAIN substituant Me Joseph PALAZZOLO de la SCP YVES HARTEMANN JOSEPH PALAZZOLO, avocat au barreau de LYON (toque 480)

DEFENDERESSE :

Mme [V] [X]

en sa qualité de propriétaire, suite au décès de Madame [N] [G]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me GIRARDON substituant Me Eric CESAR de la SELARL LEGI AVOCATS, avocat au barreau de LYON (toque 664)

Audience de plaidoiries du 27 Avril 2022

DEBATS : audience publique du 27 Avril 2022 tenue par Pierre BARDOUX, Conseiller à la cour d'appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 3 janvier 2022, assisté de Sylvie NICOT, Greffier.

ORDONNANCE : contradictoire

prononcée publiquement le 09 Mai 2022 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile;

signée par Pierre BARDOUX, Conseiller et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

''''

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 19 mai 1987, les époux [G] ont donné à bail commercial, à M. [H] [L], un local à usage d'hôtel et de café situé à [Localité 3] ([Localité 3]).

Par acte du 23 novembre 2015, Mme [N] [G], usufruitière et Mme [V] [X], nue-propriétaire ont assigné M. [L] devant le tribunal de grande instance de Lyon aux fins de prononcé de la résiliation du bail à ses torts exclusifs.

Mme [N] [G] est décédée le 19 février 2018 et Mme [V] [X], nue-propriétaire du bien jusqu'à cette date, est devenue pleine propriétaire des biens loués.

Par jugement contradictoire du 17 mars 2022, le tribunal judiciaire de Lyon, ordonnant l'exécution provisoire, a notamment :

- prononcé la résiliation du bail commercial liant Mme [X] et M. [L], aux torts exclusifs de M. [L], à la date du 17 mars 2022,

- ordonné l'expulsion de M. [L] et de tout occupant de son chef,

- dit que l'indemnité d'occupation due par M. [L] à compter de la résiliation du bail commercial du 17 mars 2022 jusqu'à complète libération du local commercial, est fixée à un montant de 925 € mensuels,

- condamné M. [L] à démolir l'ensemble des aménagements d'habitation réalisés au sein de la salle de restaurant du 1er étage, le garage construit dans la cour, le muret et la cuve de gaz, et à remettre ces lieux en état, dans un délai de deux mois à compter de la signification du présent jugement,

- dit que faute, pour M. [L], de procéder aux démolitions et remises en état ordonnées, il sera redevable, passé ce délai, d'une astreinte provisoire pendant trois mois dont le montant est fixé à 50 € par jour de retard,

- condamné M. [L] aux dépens de l'instance avec droit de recouvrement direct.

M. [L] a interjeté appel de ce jugement le 25 mars 2022.

Par assignation en référé délivrée le 4 avril 2022 à Mme [X], M. [L] a saisi le premier président afin d'arrêter l'exécution provisoire du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lyon et d'obtenir la condamnation de la défenderesse à lui verser la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

A l'audience du 27 avril 2022 devant le délégué du premier président, les parties, régulièrement représentées, s'en sont remises à leurs écritures, qu'elles ont soutenues oralement.

Dans son assignation, M. [L] soutient l'existence de moyens sérieux de réformation tenant à l'absence de manquement de sa part dans l'exploitation des chambres d'hôtel. De ce fait, le bail commercial n'aurait pas dû être résilié.

Il se fonde notamment sur une précédente décision du 18 février 2014 par laquelle la cour d'appel de Lyon avait ordonné la suspension des effets de la clause résolutoire.

Il fait valoir que les prétendus manquements invoqués n'ont fait l'objet d'aucun commandement de payer visant la clause résolutoire et considère que l'exécution provisoire est abusive en ce qu'il le priverait d'appel alors même qu'il continue à payer les loyers.

Il fait état de conséquences manifestement excessives compte tenu de sa situation personnelle qui ne lui permet pas de payer les condamnations prononcées.

Il estime qu'après 49 ans d'exploitation du fonds de commerce et l'absence de problème jusqu'en 2012, la résiliation du bail est disproportionnée et que l'enfer procédural depuis 2012 s'explique par la volonté du bailleur de l'expulser à moindre coût.

Par ailleurs, compte tenu de ses problèmes de santé, il indique avoir confié à la société Urus la location gérance du fonds de commerce selon le contrat du 7 août 2017. M. [L] revendique le caractère excessif de l'exécution provisoire quant aux conséquences par ricochet pour la société Urus.

Enfin, la remise en l'état des lieux suppose la démolition d'ouvrages qui sera non seulement contraignante pécuniairement mais également irréversible.

Dans ses conclusions déposées au greffe par RPVA le 26 avril 2022, Mme [X] s'oppose à la demande d'arrêt de l'exécution provisoire et sollicite la condamnation de M. [L] à lui verser la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile comme à supporter les dépens.

Elle fait état de ce que M. [L] a commis de nombreuses fautes, tenant à l'absence d'entretien des lieux, à l'absence d'exploitation, à la modification de la disposition des lieux, au non-respect de la prohibition d'une location gérance.

Elle conteste les conséquences alléguées comme excessives par M. [L] concernant les suites de son expulsion en faisant état de son âge et des tracas générés par le comportement de son locataire.

Pour satisfaire aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties, à la décision déférée, aux conclusions régulièrement déposées et ci-dessus visées, comme pour l'exposé des moyens à l'énoncé qui en sera fait ci-dessous dans les motifs.

MOTIFS

Attendu que l'exécution provisoire ordonnée dans le jugement rendu le 17 mars 2021 par le tribunal judiciaire de Lyon ne peut être arrêtée, conformément aux dispositions de l'article 524 alinéa 1 du Code de procédure civile, dans sa version antérieure au 1er janvier 2020, que si elle est interdite par la loi ou si elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ;

Attendu que M. [L] invoque à tort les dispositions de l'article 517-1 du Code de procédure civile qui ne sont pas applicables en l'espèce, au regard de la date de l'assignation ayant saisi le tribunal judiciaire, soit le 23 novembre 2015, car l'article 55 du décret 2019-1333 du 11 décembre 2019 prévoyant qu'il ne s'applique qu'aux instances introduites postérieurement au 1er janvier 2020 ;

Attendu que M. [L] ne soutient pas que l'exécution provisoire serait interdite par la loi, mais invoque le risque de conséquences manifestement excessives ; qu'il n'appartient pas au premier président d'apprécier la légitimité de l'exécution provisoire prononcée ou de vérifier son opportunité, mais uniquement de tenir compte des conséquences de cette exécution provisoire au vu des preuves et éléments apportés par le demandeur ;

Attendu que les développements de M. [L] sur l'existence de chances sérieuses de réformation, comme les réponses de son adversaire sur ce point, sont inopérants et ne sont pas examinés en ce que les moyens articulés ne constituent pas une condition de l'arrêt de l'exécution provisoire ; que son appréciation sur l'opportunité de la résiliation du bail au regard de son ancienneté est tout autant sans emport, la présente instance n'étant pas destinée à arbitrer la bonne ou la mauvaise foi contractuelle de l'une ou l'autre des parties ;

Attendu que s'agissant de l'existence de conséquences manifestement excessives, il y a lieu de rappeler qu'il appartient seulement au premier président de prendre en compte les risques générés par la mise à exécution de la décision rendue en fonction des facultés de remboursement de l'intimé si la décision était infirmée, mais également de la situation personnelle et financière du débiteur ;

Qu'en outre, le caractère manifestement excessif des conséquences de la décision rendue ne saurait exclusivement résulter de celles inhérentes à la mise à exécution d'une condamnation au paiement d'une somme d'argent ou d'une expulsion, mais ces conséquences doivent présenter un caractère disproportionné ou irréversible ;

Attendu que c'est au débiteur, demandeur à l'instance, de rapporter la preuve des risques occasionnés par l'exécution provisoire et des conséquences disproportionnées ou irréversibles qui pourraient leur être consécutives ;

Attendu que M. [L] n'est pas fondé à soutenir que l'exécution provisoire prononcée par les premiers juges a pour conséquence de le priver des effets de l'appel, cette voie de recours n'ayant pas la nature première d'être dilatoire et ne l'empêchant pas de le faire examiner par la cour ;

Attendu qu'il fait valoir que sa propre exécution du jugement dont appel sera irréversible, au regard de son expulsion et des démolitions auxquelles il est tenu ; qu'il met en avant son âge et son mauvais état de santé pour expliquer son désarroi consécutif à la décision d'expulsion ;

Que la remise en état des lieux sous astreinte est affirmée comme difficile au regard de cet état de santé ;

Attendu que s'agissant de l'expulsion prononcée, il ressort des propres explications de M. [L] qu'il a consenti une location gérance d'une partie des biens loués, concernant l'activité de bar restaurant ; qu'il n'est pas contesté par le demandeur qu'il a cessé l'activité d'hôtel depuis plusieurs années et en tout cas depuis janvier 2016 comme cela ressort du contrat de location gérance du 7 août 2017 ;

Que comme cela a été relevé lors de l'audience et confirmé par son conseil, M. [L] dispose d'un logement situé en dehors des lieux loués et ne peut invoquer l'effet de l'expulsion prononcée sur son lieu d'habitation ;

Attendu que concernant la présence dans les lieux loués d'un locataire gérant et l'expulsion qui lui serait imposée, Mme [X] relève avec pertinence que le contrat signé le 7 août 2017 avec la société Urus informait clairement cette dernière de la procédure en cours devant le tribunal judiciaire et du risque de résiliation du bail ;

Que M. [L] n'est pas fondé à invoquer un risque de conséquences manifestement excessives concernant l'expulsion de sa locataire gérante qui avait délibéré accepté le risque inhérent à la procédure judiciaire en cours ; qu'il ne peut pas plus se prévaloir des tracas inhérents à cette expulsion qu'il ne subira pas personnellement étant donné qu'il a cessé d'exploiter son fonds de commerce depuis le 16 août 2017 ;

Attendu que s'agissant de la condamnation l'obligeant à remettre en état une partie des lieux loués, M. [L] se contente d'alléguer que les aménagements qu'il a réalisés étaient connus du bailleur et ne conteste pas qu'ils l'ont été sans autorisation de ce dernier ;

Qu'il ne peut soutenir le caractère disproportionné d'une démolition de ces différents éléments sans même préciser que les aménagements litigieux font partie des lieux concédés dans le cadre de la location gérance ;

Attendu que l'état de santé actuel de M. [L], dont il justifie par ses pièces, et son âge de 71 ans ne sont en rien un obstacle à ce que les travaux de démolition et de remise en état soient confiés à un professionnel ; qu'il ne tente pas de faire état de sa situation financière et souligne être totalement à jour de ses loyers et charges ;

Qu'il n'explique pas en quoi le caractère irréversible de tels travaux de démolition ou de remise en état est susceptible d'entraîner des conséquences disproportionnées notamment concernant la société Urus ;

Attendu que M. [L] ne rapporte pas la preuve d'un risque de conséquences manifestement excessives et en conséquence, sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire doit être rejetée ;

Attendu que M. [L] succombe et doit supporter les dépens de ce référé, mais l'équité ne commande pas de décharger Mme [X] des frais irrépétibles engagés pour assurer sa défense ;

PAR CES MOTIFS

Nous, Pierre Bardoux, délégué du premier président, statuant publiquement, en référé, par ordonnance contradictoire,

Vu la déclaration d'appel du 25 mars 2022,

Rejetons la demande d'arrêt de l'exécution provisoire présentée par M. [H] [L],

Condamnons M. [H] [L] aux dépens de ce référé et rejetons la demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile présentée par Mme [V] [X].

LE GREFFIERLE MAGISTRAT DELEGUE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Jurid. premier président
Numéro d'arrêt : 22/00078
Date de la décision : 09/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-09;22.00078 ?
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