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05/05/2022 | FRANCE | N°19/01861

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 05 mai 2022, 19/01861


N° RG 19/01861

N° Portalis DBVX-V-B7D-MH7U









Décision du Tribunal de Commerce de SAINT ETIENNE

Au fond

du 13 février 2019



RG : 2017j00439





S.A.S. OMEGA DYNAMIC



C/



SAS VIAVI SOLUTIONS FRANCE





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRÊT DU 05 Mai 2022







APPELANTE :



S.A.S. OMEGA DYNAMIC

[A

dresse 2]

[Localité 3]



Représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475 et ayant pour avocat plaidant, Me Anne BOLLAND-BLANCHARD, avocat au barreau de LYON, substitué par Me Philippe GON...

N° RG 19/01861

N° Portalis DBVX-V-B7D-MH7U

Décision du Tribunal de Commerce de SAINT ETIENNE

Au fond

du 13 février 2019

RG : 2017j00439

S.A.S. OMEGA DYNAMIC

C/

SAS VIAVI SOLUTIONS FRANCE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRÊT DU 05 Mai 2022

APPELANTE :

S.A.S. OMEGA DYNAMIC

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475 et ayant pour avocat plaidant, Me Anne BOLLAND-BLANCHARD, avocat au barreau de LYON, substitué par Me Philippe GONNET, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

SAS VIAVI SOLUTIONS FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Pierre BERGER de la SELARL LEXFACE, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE et ayant pour avocat plaidant, Me Olivier D'ABO, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me Marion SERANNE, avocat au barreau de PARIS

******

Date de clôture de l'instruction : 08 Juillet 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 19 Janvier 2022

Date de mise à disposition : 03 Mars 2022 prorgé au 05 Mai 2022

Audience tenue par Anne-Marie ESPARBÈS, président, et Raphaële FAIVRE, vice-présidente placée, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,

assistées pendant les débats de Jessica LICTEVOUT, greffier

A l'audience, Anne-Marie ESPARBÈS a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Anne-Marie ESPARBÈS, président

- Catherine CLERC, conseiller

- Raphaële FAIVRE, vice-présidente placée

Arrêt Contradictoire rendu par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Anne-Marie ESPARBÈS, président, et par Jessica LICTEVOUT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DU LITIGE

La SASU Viavi Solutions France (Viavi) anciennement JDSU est spécialisée dans les composants optiques et dans les installations à base de fibres optiques destinés aux télécommunications.

La SAS Omega Dynamic (Omega) a pour activité Ie commerce de gros de composants et matériel électroniques et de télécommunications.

En 2015, Viavi a passé deux commandes à Omega :

une commande OME038 du 16 juillet 2015 pour 200 moteurs (aussi dénommés actionneurs linéaires) et 200 rails,

une commande OME039 du 29 septembre 2015 pour 400 moteurs et 400 rails,

ces produits étant livrables suivant demandes successives de Viavi.

Entre octobre 2015 et janvier 2016, Omega a émis des bons de livraison et factures relatifs à la commande OMEO38 pour un total de 99 moteurs et de 100 rails.

Par courriel du 9 février 2016, Omega a demandé à Viavi la date d'expédition des pièces commandées restantes, lui rappelant que les commandes OME038 et OME039 devaient être soldées sous un délai maximum d'un an.

Par courriel du 10 février 2016, Viavi a répondu par l'annulation des commandes OME038 et OME039, ce à quoi Omega s'est opposée s'agissant de commandes fermes.

Le 18 février 2016, Viavi a expliqué son annulation de commandes par le fait que l'activité nécessitant des composants n'était plus gérée à [Localité 5] mais qu'elle était reprise par son sous-traitant chinois Sanmina.

Omega a maintenu par courriel du lendemain qu'il n'était pas possible d'annuler ces commandes à ce stade, les produits étant déjà commandés auprès de son fournisseur la société américaine Haydon Kerk Motions Solutions (Kerk) et a précisé qu'elle allait rechercher une solution avec ce dernier mais sans certitude et moyennant des frais élevés.

En mai 2016, Omega a informé Viavi, sur sa demande, qu'il restait 131 moteurs et 131 rails en stock chez elle et Kerk, et qu'un surcoût sera dû à transmettre lorsque le déblocage sera effectué.'

Le 13 juin 2016, Omega a demandé à Viavi ses déblocages.

Le 27 juin 2016, Viavi a demandé le déclenchement pour 5 moteurs en stock à [Localité 4] et a interrogé Omega sur les frais d'annulation de commandes, et les parties ont discuté sur l'approvisionnement par Sanmina chez Kerk.

Le 5 octobre 2016, Viavi a passé à Omega une nouvelle commande 767579 pour 10 moteurs.'

Omega a répondu le 5 octobre 2016 que le nombre était insuffisant pour la référence et surtout que les commandes précédentes n'étaient pas soldées. La livraison a été effectuée.

Le 9 novembre 2016, Omega a averti Viavi que Kerk effectuera une livraison de 50 moteurs et 50 rails dans les 4 à 5 semaines et que le solde des commandes (environ 450 moteurs et 450 rails) sera livré début janvier 2017.

En l'absence d'issue amiable et suite à une mise en demeure adressée par son conseil le 17 février 2017 à l'adversaire qui l'a reçue le 20 février suivant et contestée tout en refusant une livraison le 6 mars 2017, Omega a fait assigner Viavi devant le tribunal de commerce de Saint-Étienne par acte du 12 mai 2017 pour la voir condamnée à payer la facture FA 16171 du 5 décembre 2016 de 10.105,20 $ TTC ainsi qu'à recevoir les pièces des commandes OMEO38 et OMEO39 contre paiement des sommes respectives de 9.279,67€ TTC et 81.303,07€ TTC.

Dans ses conclusions récapitulatives, Omega a en outre sollicité le versement de 15.000€ de dommages-intérêts au titre de la résistance abusive et la déloyauté dont Viavi a fait preuve en visant l'article L.442-6 I 5° du code de commerce.

Viavi a conclu au débouté de Omega en faisant notamment état de la qualification de commandes ouvertes, des torts imputés à Omega et de l'application de ses conditions générales d'achat.

Par jugement du 13 février 2019, le tribunal précité a :

dit que Viavi était fondée à mettre un terme à ses deux commandes ouvertes OME038 et OME039 sans indemnités,

débouté Omega de ses demandes en paiement de sa facture FA 16171 et de la reprise des composants par Viavi,

condamné Omega à récupérer sous un délai de trente jours à compter du jugement à ses propres frais la marchandise indûment livrée et à établir un avoir correspondant à la facture FA16171 d'un montant de 10.105,20 $ TTC au profit de Viavi,

débouté Omega de toutes ses autres demandes y compris de dommages et intérêts,

débouté Viavi de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

condamné Omega à payer à Viavi la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Omega a interjeté appel par acte du 12 mars 2019.

Le 9 avril 2019, le conseiller de la mise en état a fait injonction aux conseils des parties de conclure au fond sur le défaut de pouvoir juridictionnel des premiers juges et de la cour pour statuer sur l'application de L. 442-6 I 5° du code de commerce (dans sa version antérieure à celle du 26 avril 2019 soit du 11 décembre 2016) et de l'éventuel excès de pouvoir commis par les premiers juges au regard de l'article D. 442-3 du même code.

Par conclusions du 11 décembre 2019, Omega demande à la cour, outre le rejet de toutes demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires, de :

1. sur l'annulation du jugement pour excès de pouvoir des premiers juges, vu les articles 542 du code de procédure civile, R. 311-4 du code de l'organisation judiciaire, L. 442-6 I. 5° et D. 442-3 du code de commerce,

constater que le tribunal de commerce de Saint--Étienne a tranché une demande de sa part formulée sur L. 442-6 I 5° et que le litige l'opposant à Viavi en son entier résulte d'une rupture brutale de relation commerciale établie entre elles deux,

juger qu'il relève des juridictions spécialisées prévues par D. 442-3 précité et en conséquence annuler en toutes ses dispositions le jugement déféré en raison de l'excès de pouvoir qui l'entache et l'inviter à saisir Ie juge matériellement compétent, à savoir le tribunal de commerce de Lyon,

2. à défaut d'annulation,

infirmer le jugement en toutes ses dispositions pour,

vu les articles 1134 et 1147 anciens du code civil :

condamner Viavi à lui payer les sommes suivantes :

- 9.279,67 € TTC, au titre de la facture FA 16171 du 5 décembre 2016 correspondant à la Iivraison de 10 moteurs de la commande n° 767579 et 45 des 200 moteurs et 50 des 200 rails de la commande n° OMEO38,

- 10.188,57 € TTC au titre du solde de la commande OMEO38 soit 50 moteurs et 50 rails,

- 81.303,07 € TTC au titre du solde de la commande OMEO39 (400 moteurs et 400 rails),

vu L .442-6 I 5° précité,

condamner Viavi à lui payer des dommages-intérêts de 104.880 € à raison de la rupture brutale et sans préavis suffisant de la relation commerciale établie,

juger que les condamnations prononcées contre Viavi porteront intérêt au taux légal à compter du 17 février 2017 date de la première mise en demeure et avec capitalisation des intérêts échus par année entière,

condamner Viavi à lui payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

et aux dépens.

Par conclusions du 27 mai 2020 fondées sur les articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce ainsi que 1104 et 1240 du code civil, Viavi demande à la cour de :

la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes,

1. sur l'éventuel excès de pouvoir des premiers juges, constater que :

Omega n'a jamais formulé de demande sur le fondement de L. 442-6 précité au stade de la première instance, mais seulement en appel ; la cour n'a pas été saisie de demande d'Omega sur ce fondement au titre des chefs de jugement critiqués dans la déclaration d'appel ; en tout état de cause, la présente cour n'est pas compétente pour statuer sur une telle demande,

en conséquence, débouter Omega de sa demande d'annulation du jugement déféré,

si par extraordinaire la cour ne devait pas se déclarer incompétente, déclarer irrecevable Omega au titre de l'intégralité de ses demandes formées sur ce fondement s'agissant de demandes nouvelles en cause d'appel,

subsidiairement, si la cour considérait qu'elle est saisie d'une demande au titre de l'article L. 442-6 du code de commerce, se déclarer incompétente au profit de la cour d'appel de Paris,

2. sur le fond, constater que :

s'agissant de commandes ouvertes, elle était fondée à y mettre un terme, sans indemnités ; qu'elle a pris le soin, concomitamment à l'annulation des commandes, de prendre livraison du stock présent chez Omega ; que Omega a entrepris toutes démarches déloyales à son encontre pour s'opposer à l'annulation des commandes ; qu'aucun grief ne saurait être sérieusement formulé à son encontre au titre de l'annulation des commandes ; que les demandes d'Omega sont mal fondées et sa procédure téméraire et abusive ; qu'Omega a abandonné les demandes formulées en première instance au titre d'une prétendue résistance abusive et déloyauté, et en conséquence,

débouter Omega de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

prendre acte de ce que Omega a renoncé à sa demande indemnitaire de 15.000 € formulée en première instance au titre de ses résistance abusive et déloyauté dont elle se prévalait, ainsi qu'à sa demande au titre de l'application du mécanisme de l'anatocisme,

confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

- dit qu'elle était fondée à mettre un terme à ses deux commandes ouvertes OME038 et OME039,

- débouté Omega de sa demande en paiement de sa facture FA 16171 et de sa demande de reprise par elle-même des composants,

- condamné Omega à récupérer, à ses propres frais, les composants correspondants à la facture FA 16171, qu'elle n'a pas commandés et ce, sous un délai de 30 jours à compter de la décision à intervenir,

- condamné Omega à établir un avoir correspondant au montant de la facture FA 16171 de 10.105,20 $ TTC,

- débouté Omega de sa demande de dommages et intérêts et de toutes ses demandes.

infirmer le jugement déféré sur son débouté de sa demande au titre de la procédure abusive et condamner Omega à lui verser les dommages et intérêts de 20.000 €,

en tout état de cause :

condamner Omega au paiement de la somme de 20.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

et aux entiers dépens.

MOTIFS

A titre liminaire, il est rappelé que le litige est soumis au droit ancien des contrats eu égard aux dates des conventions en cause.

Sur l'article L.442-6 I 5°

Il est de principe constant que seules les juridictions spécialisées désignées par l'article D. 442-3 précité ont le pouvoir de statuer sur une demande fondée sur ce texte.

Le tribunal de commerce de Saint-Étienne n'en faisant pas partie, il a commis un excès de pouvoir en statuant sur cette demande.

La présente cour qui ne dispose pas plus de pouvoir juridictionnel pour examiner en appel une prétention fondée sur ce texte, doit constater cet excès de pouvoir et annuler le jugement, mais uniquement dans sa disposition relative aux dommages-intérêts sollicités par Omega devant le premier juge à hauteur de 15.000€ sur le fondement de l'article L.442-6 I 5° précité et sous le qualificatif de résistance abusive et déloyauté de la part de Omega, le surplus des prétentions de cette dernière étant fondé sur les règles contractuelles de droit commun aux termes de son assignation introductive d'instance.

Omega est ainsi déboutée de ses demandes d'annulation de l'entier jugement et de celle visant à l'inviter à saisir le tribunal de commerce de Lyon juridiction spécialisée.

Quant à la demande de Omega formulée en deuxième partie de ses conclusions visant l'infirmation du jugement, également fondée sur l'article L. 442-6 I 5° précité afin de se voir octroyer des dommages-intérêts de 104.880 €, nouvellement chiffrés aux lieu et place des 15.000€ précédemment visés, à raison de la rupture brutale et sans préavis suffisant de la relation commerciale établie, elle est irrecevable.

Elle est bien soumise à la présente cour d'appel, contrairement à ce que soutient Viavi, puisqu'il s'agit d'un nouveau chiffrage d'un poste déjà réclamé devant le premier juge qui l'a rejeté, sans constituer une demande nouvelle en appel, mais cette cour ne dispose pas, comme déjà dit, du pouvoir juridictionnel de l'examiner.

Enfin, Viavi est déboutée de sa demande visant le caractère nouveau en cause d'appel de la prétention en dommages-intérêts formée par Omega qui est infondée.

Sur les manquements contractuels

Omega reproche à Viavi le non-respect de ses obligations résultant des commandes passées sur le fondement des articles 1134 et suivants, et 1147 du code civil, ainsi que sur les articles1582 et 1583 relatifs à la vente.

Elle soutient que les commandes de Viavi étaient fermes et précises, pour porter sur une quantité déterminée de pièces commandées, un délai de livraison précis et un prix unitaire de chaque pièce commandée de sorte que chaque commande mentionne un montant total déterminé, et qu'il ne s'agit pas de conventions-cadre sans engagement sur les quantités à livrer. Elle ajoute que la seule «'ouverture'» acceptée par elle porte sur la possibilité pour Viavi de cadencer les seules livraisons, de sorte que les appels de pièces de Viavi ne sont pas des conditions des commandes mais en sont uniquement des modalités. Elle souligne que Viavi a commis une faute en résiliant ses commandes unilatéralement. Elle s'oppose à l'application des conditions générales d'achat de Viavi qui sont contradictoires avec sa version de commandes ouvertes et qui n'ont jamais été portées à sa connaissance.

Au contraire, Viavi qualifie ses commandes de «'commandes ouvertes'», aucune livraison ne devant intervenir sans une demande expresse de sa part, seul cet ordre de livraison déclenchant la livraison des produits et la facturation afférente. Elle souligne n'avoir jamais accepté de livraisons partielles pour une livraison totale sous la durée d'un an à compter de la commande comme le dit Omega et que cette dernière a refusé l'annulation des commandes alors qu'elle ne disposait d'aucun produit en stock. Elle stigmatise le refus de Omega de communiquer les éventuels frais d'annulation pourtant connus, de communiquer un état précis de ses stocks ainsi que les commandes faites par Sanmina auprès de Kerk, outre la commande extrêmement tardive de 10 mois après l'annulation ferme de sa part auprès de Kerk pour une livraison forcée.

Des explications des parties et de leurs productions, il résulte en premier lieu que la demande de Omega dans le dispositif de ses écritures de se voir payée de la somme de 9.279,67 € TTC au titre de la facture FA 16171 du 5 décembre 2016 dite correspondre à la Iivraison de 10 moteurs de la commande n° 767579 et 45 des 200 moteurs et 50 des 200 rails de la commande n° OMEO38, est infondée.

En effet, l'examen de cette facture FA 16171, en date du 5 décembre 2016, d'un montant de 10.105,20 $ USD révèle qu'elle est uniquement relative à la commande OMEO38 expressément mentionnée portant sur 45 moteurs et 50 rails, en correspondance avec le bon de livraison BL 0384.

Il n'est nullement fait référence sur ces deux documents (bon de livraison et facture) aux produits qui ont fait l'objet de la part de Viavi de la commande 767579 à savoir 10 moteurs seulement, par ailleurs justifiée et admise par Viavi, qui précise avoir reçu ces 10 moteurs le 5 décembre 2016 et en avoir réglé le prix de 1.642 $ TTC, sur quoi Omega ne verse aucun élément contraire, en communiquant une facture spécifique FA 16170 de 1.970,40 $ USA associée à un bon de livraison BL0385.

La commande 767579 est donc jugée étrangère au litige.

En deuxième lieu, le litige concerne les commandes':

OME038 du 16 juillet 2015 afférente à 200 moteurs et 200 rails, pour un solde livré le 5 décembre 2016 par Omega correspondant selon le dispositif des conclusions de Omega à 45 moteurs et 50 rails chiffrés à 9.279,67 € TTC (la facture correspondante FA 16171, déjà évoquée, porte le montant en $ de 10.105,20), et pour 50 moteurs et 50 rails chiffrés à 10.188,57 € TTC (la mise en demeure du 17 février 2017 évoque la somme de 11.095,20 $),

et OME039 du 29 septembre 2015 afférente à 400 moteurs et 400 rails chiffrés à 81.303,07 € TTC (la mise en demeure sus-visée évoque la somme de 88.509,60 $).

A noter que Viavi ne conteste pas la corrélation entre les montants exprimés en dollars US et ceux visés en euros, ni celle entre ces montants et les produits afférents.

Ces commandes correspondent à des commandes «'ouvertes'» comme le requiert Viavi, dès lors que ce terme qui est expressément noté sur la commande OMEO39 s'applique également à la commande OMEO38 ainsi que le note le courriel d'accompagnement du 17 juillet 2015 non contesté en son temps par Omega.

Pour autant, contrairement à ce que soutient Viavi, ce qualificatif, applicable à des commandes d'importantes quantités et qui permet, comme stipulé sur les commandes, de débloquer les livraisons au fur et à mesure des besoins de l'acheteur, chaque livraison déclenchant la facturation afférente, n'autorise pas ce dernier à annuler les commandes passées, qui n'ont pas été qualifiées de prévisionnelles et qui sont donc des commandes fermes, même si les livraisons et seulement celles-ci sont étalées dans le temps.

D'ailleurs, aux termes de ses commandes, Viavi a sollicité la livraison des produits pour les dates respectives au plus tard du 4 septembre 2015 (OMEO38) et du 25 février 2016 (OMEO39), soit dans le délai respectivement de moins de 2 mois (OMEO38) et de moins de 5 mois (OMEO39), ce qui corrobore le caractère ferme de ces commandes, dont Omega a accepté qu'elles soient débloquées sur une année au plus.

Dans le cadre des relations d'affaires suivies entre les parties dont elle justifie depuis 2007, Omega était donc bien fondée à solliciter Viavi sur les dates des déblocages qu'elle souhaitait afin d'opérer une livraison totale des produits commandés, Viavi n'étant pas en droit d'annuler le 10 février 2016 ces soldes de commandes, de plus sur la relance de Omega quant aux déblocages et au prétexte que son site de Saint- Étienne ne gérait plus cette activité puis que son sous-traitant chinois la reprenait en commandant directement chez Kerk.

Cependant, c'est à bon droit que Viavi stigmatise le refus de Omega de communiquer les éventuels frais d'annulation pourtant connus et de communiquer un état précis de ses stocks dont en réalité elle ne disposait quasiment pas ainsi que des commandes faites par Sanmina auprès de Kerk, et qu'elle se plaint de la tardiveté de la commande passée par Omega auprès de Kerk pour opérer à son encontre une livraison forcée 10 mois après sa demande d'annulation.

Les échanges entre les parties, antérieurs à l'assignation, démontrent que Omega qui évoquait des frais très élevés, voire «'énormes'», appliqués notamment par son fournisseur, n'a jamais en temps utile exprimé précisément leur montant pourtant connu dès le mois de mars 2016, en conditionnant l'information de ce surcoût à l'effectivité des déblocages, alors que cette connaissance des frais invoqués aurait permis à Viavi de se désengager du solde des commandes à moindres frais sans être contrainte par une livraison forcée que Omega a décidé de réaliser en sachant pertinemment que Viavi la refuserait.

De plus, Omega qui exerce une activité de négoce, non pas de production, et qui ne détenait que de faibles stocks comme en justifie Viavi (126 moteurs), ce qui n'est pas démenti par Omega qui indique un chiffre de moteurs et de rails de 131 x 2 en sa possession et celle de son fournisseur, a manqué à la loyauté contractuelle, également en ne facilitant pas la possibilité de transférer ces produits à Sanmina comme en justifie Viavi.

Par conséquent, sur le total réclamé de 100.771,31 €, il est jugé que seule la moitié est imputable aux torts de Viavi soit 50.385,65 €, le surplus restant à charge de Omega.

Viavi est ainsi condamnée à verser à Omega la somme de 50.385,65 € outre intérêt au taux légal à compter du 20 février 2017 date de la réception de la mise en demeure du 17 février précédent et avec capitalisation des intérêts échus par année entière.

En troisième lieu, Viavi est infondée pour échapper à toute condamnation à faire état de ses conditions générales d'achat qui ne sont pas opposables à Omega dès lors que ses commandes visent l'acceptation par le partenaire de ces conditions du fait de leur exécution par ce dernier, mais en l'espèce Viavi se défend d'avoir sollicité cette exécution, ce qui exclut l'application de ses conditions.

De plus, l'article 10 de ces conditions qui autorise une annulation ou résiliation de commande vise des hypothèses étrangères au litige.

Sur les demandes de récupération et d'avoir

Viavi sollicite la condamnation de Omega à récupérer, à ses frais, les composants correspondants à la facture FA 16171, qu'elle n'a pas commandés et ce, sous un délai de 30 jours à compter de la décision à intervenir, et à lui établir un avoir correspondant au montant de la facture FA 16171 de 10.105,20 $ TTC.

Ce qui doit être écarté, dès lors que sa condamnation précédemment retenue est supérieure à ce montant visé à ladite facture dont il est rappelé qu'elle ne concerne que partie de la commande OMEO38.

Sur les dommages-intérêts pour procédure abusive

Viavi les sollicite en reprenant ses arguments sur l'opposition de Omega au transfert des commandes à Sanmina, son refus de communication des frais et le caractère forcé de la livraison, ce qui doit être écarté puisque ces éléments ont déjà permis de réduire ses torts et le montant de sa condamnation, sans compter que, contrairement à ce que Viavi allègue, Omega a effectivement tenté une voie amiable avant d'introduire son action.

Quant au caractère chicanier'et esprit de lucre imputés à Omega, qui seraient selon Viavi contraire à la recherche de la vérité judiciaire, celle-ci n'en apporte pas la preuve, d'autant que Omega gagne sur partie de ses prétentions et qu'en tous cas, Viavi ne prouve aucun préjudice qui en serait résulté.

La demande est rejetée.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Eu égard à la décision, chaque partie supporte les dépens de première instance et d'appel qu'elle a personnellement engagés ainsi que ses frais non répétibles de première instance et en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Annule le jugement déféré dans sa seule disposition relative au rejet de la demande de dommages-intérêts de 15.000 € formée par la société Omega Dynamic sur le fondement de l'article L.442-6 I 5° du code de commerce,

Déboute la société Omega Dynamic de ses demandes d'annulation de l'entier jugement et de celle visant à l'inviter à saisir le tribunal de commerce de Lyon juridiction spécialisée,

Juge irrecevable la demande de la société Omega Dynamic formée en appel de se voir octroyer des dommages-intérêts de 104.880 € sur le fondement du texte précité,

Déboute la société Viavi Solutions France de sa demande d'irrecevabilité en cause d'appel de la prétention en dommages-intérêts formée par la société Omega Dynamic,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande de la société Viavi Solutions France en dommages-intérêts pour procédure abusive de la part de la société Omega Dynamic,

L'infirme sur le surplus, statuant à nouveau et ajoutant,

Juge étrangère au litige la commande 767579 de la société Viavi Solutions France et déboute la société Omega Dynamic de sa demande au titre de cette commande 767579,

Déboute la société Viavi Solutions France de ses demandes de voir la société Omega Dynamic condamnée à récupérer les composants liés à la facture FA 16171 et en établissement d'un avoir lié à cette même facture FA 16171,

Condamne la société Viavi Solutions France à verser à la société Omega Dynamic au titre du solde des commandes OME038 et OME039 la somme de 50.385,65 € correspondant aux torts qui lui sont imputés dans l'annulation de ces commandes, avec intérêt au taux légal à compter du 20 février 2017 et capitalisation des intérêts échus par année entière,

Déboute la société Omega Dynamic du surplus de ses demandes,

Dit que chaque partie supporte les dépens et les frais non répétibles qu'elle a personnellement engagés en première instance et en appel.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 19/01861
Date de la décision : 05/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-05;19.01861 ?
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