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15/04/2022 | FRANCE | N°22/02744

France | France, Cour d'appel de Lyon, Retentions, 15 avril 2022, 22/02744


N° RG 22/02744 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OHUA



Nom du ressortissant :

[N] [L]







[L]

C/

PREFET DU RHÔNE



COUR D'APPEL DE LYON



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT





ORDONNANCE DU 15 AVRIL 2022

statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers





Nous, Isabelle OUDOT, conseiller à la cour d'appel de Lyon, déléguée par ordonnance du premier président de ladite Cour en date du 03 janvier 2022 pour statuer sur les procédures ouvertes en ap

plication des articles L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d'entrée et de séjour des étrangers en France et du droit d'asile,



Assistée de Ludwig PAWLOWSKI, greff...

N° RG 22/02744 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OHUA

Nom du ressortissant :

[N] [L]

[L]

C/

PREFET DU RHÔNE

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 15 AVRIL 2022

statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers

Nous, Isabelle OUDOT, conseiller à la cour d'appel de Lyon, déléguée par ordonnance du premier président de ladite Cour en date du 03 janvier 2022 pour statuer sur les procédures ouvertes en application des articles L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d'entrée et de séjour des étrangers en France et du droit d'asile,

Assistée de Ludwig PAWLOWSKI, greffier,

En l'absence du ministère public,

En audience publique du 15 avril 2022 dans la procédure suivie entre :

APPELANT :

M. [N] [L] alias [C] [M] se disant être en réalité [C] [M]

né le 13 juin 1998 à [Localité 6]

de nationalité tunisienne

actuellement retenu au CRA de [Localité 5]

comparant, assisté de Maître Abbas JABER, avocat au barreau de Lyon, commis d'office, avec le concours de Madame [E] [G], interprète en langue arabe, experte judiciaire inscrite sur la liste des experts près la cour d'appel de Lyon

ET

INTIME :

M. LE PREFET DU RHÔNE

[Adresse 3]

[Localité 5]

non comparant, régulièrement avisé, représenté par Maître Laurent CORDIER de la SELARL SERFATY VENUTTI CAMACHO & CORDIER, avocats au barreau de l'AIN

Avons mis l'affaire en délibéré au 15 avril 2022 à 18 heures 40 et à cette date et heure prononcé l'ordonnance dont la teneur suit :

FAITS ET PROCÉDURE

Le 30 mai 2021, une obligation de quitter le territoire français avec délai de départ volontaire de 90 jours a été notifiée à [I] se disant [N] [L] par le préfet du Rhône.

Le 08 juillet 2021, le préfet du Rhône a édicté un arrêté portant retrait de sa décision d'accorder un délai de départ volontaire à [N] [L] et lui a dit qu'il avait obligation de quitter le territoire français sans délai. Cette décision a été notifiée le jour même à l'intéressé par le truchement d'un interprète.

Le 12 mars 2022, le préfet du Rhône a fait notifier à [N] [L] son arrêté par lequel il l'assignait à résidence [N] [L] dans le département du Rhône avec obligation de pointage pour une durée de 45 jours.

Suivant procès-verbal en date du 23 mars 2022, les services de police ont constaté la carence de [N] [L] dans ses obligations de pointage dès 17 et 21 mars 2022.

Le 10 avril 2022, les services de police interpellaient un individu se disant [C] [M] dans le cadre d'une procédure de vente à la sauvette de cigarettes. La procédure pénale diligentée établissait qu'il était connu sous d'autres identités dont celle de [N] [L]. A l'issue de la procédure de garde à vue le procureur de la République faisait notifier à l'intéressé une convocation à comparaître devant le tribunal correctionnel de Lyon le 25 novembre 2022 pour répondre de l'infraction de vente à la sauvette des 18 paquets de cigarettes.

Le 11 avril 2022, l'autorité administrative a ordonné le placement de [N] [L] alias [C] [M] en rétention dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire afin de permettre l'exécution de la mesure d'éloignement.

Suivant requête du 12 avril 2022, reçue le jour même à 15 heures 06, le préfet du Rhône a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon aux fins de voir ordonner la prolongation de la rétention pour une durée de vingt-huit jours.

Suivant requête du 12 avril 2022, réceptionnée par le greffe du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon le jour même à 16 heures 15, [N] [L] alias [C] [M] a contesté la décision de placement en rétention administrative prise par le préfet du Rhône.

Dans son ordonnance du 13 avril 2022 à 13 heures 53, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon a ordonné la jonction des deux procédures, déclaré régulière la décision de placement en rétention et ordonné la prolongation de la rétention de [N] [L] alias [C] [M] dans les locaux du centre de rétention administrative de [Localité 5] pour une durée de vingt-huit jours.

Le 14 avril 2022 à 11 heures 28, [N] [L] alias [C] [M] a interjeté appel de cette ordonnance dont il demande l'infirmation. Il sollicite de voir déclarer irrégulière la mesure de placement en rétention administrative prise par le préfet du Rhône et d'ordonner sa remise en liberté.

Il fait valoir que la décision de placement en rétention est irrégulière pour être :

- insuffisamment motivée sans examen sérieux et préalable de sa situation personnelle,

- entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses garanties de représentation.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience du 15 avril 2022 à 13 heures 30.

[N] [L] alias [C] [M] a comparu et a été assisté d'un interprète et de son avocat.

Le conseil de [N] [L] alias [C] [M] a été entendu en sa plaidoirie pour soutenir les termes de la requête d'appel.

Le préfet du Rhône, représenté par son conseil, a demandé la confirmation de l'ordonnance déférée.

[N] [L] alias [C] [M] a eu la parole en dernier. Il explique que son identité correcte est [C] [M] et que s'il a effectivement pu donner d'autres identités, il y a eu aussi des fautes d'orthographe faites à son nom. Il explique qu'il veut rester avec sa femme et ses enfants et ne souhaite pas repartir en Algérie.

MOTIVATION

Sur la recevabilité de l'appel :

Attendu que l'appel de [N] [L] alias [C] [M] relevé dans les formes et délais légaux est recevable. 

Sur le moyen pris de l'insuffisance de la motivation de la décision de placement en rétention administrative et du défaut d'examen de la situation individuelle de la personne retenue :

Attendu qu'il résulte de l'article L.741-6 du CESEDA que la décision de placement est écrite et motivée ;

Qu'il est constant que cette motivation se doit de retracer les motifs positifs de fait et de droit qui ont guidé l'administration pour prendre sa décision, ce qui signifie que l'autorité administrative n'a pas à énoncer, puis à expliquer pourquoi elle a écarté les éléments favorables à une autre solution que la privation de liberté ; Que pour autant, l'arrêté doit expliciter la raison ou les raisons pour lesquelles la personne a été placée en rétention au regard d'éléments factuels liés à la situation individuelle et personnelle de l'intéressé, et ce au jour où l'autorité administrative prend sa décision ;

Attendu que le conseil de [N] [L] alias [C] [M] prétend que l'arrêté de placement en rétention du préfet du Rhône est insuffisamment motivé et lui reproche de ne pas mentionner qu'il a respecté son obligation de pointage sauf à deux reprises et pour des raisons de santé et qu'il vivait depuis le mois de janvier 2022 avec son épouse enceinte de ses oeuvres et leur fils aîné scolarisé chez un ami ;

Attendu qu'en l'espèce, l'arrêté du préfet du Rhône est motivé, notamment, par les éléments suivants :

- [N] [L] alias [C] [M] fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en date du 30 mai 2021 et que le délai de départ volontaire qui lui avait été accordé a été retiré par arrêté en date du 08 juillet 2021, décision régulièrement notifiée à l'intéressé le jour même,

- assigné à résidence par arrêté préfectoral du 12 mars 2022 il n'a pas déféré à son obligation de pointage à compter du 23 mars 2022,

- le comportement de [N] [L] alias [C] [M] est constitutif d'une menace pour l'ordre public puisqu'il a été placé en garde à vue pour des faits de vente à la sauvette le 10 avril 2022,

- l'intéressé est connu des services de police pour des faits de détention de tabac manufacturé sans document justificatif régulier (importation en contrebande), à trois reprises pour des faits de vente à la sauvette, vol aggravé par deux circonstances, violences n'ayant pas entraîné d'incapacité totale de travail de plus de 8 jours,

- [N] [L] alias [C] [M] ne peut justifier ni d'un hébergement stable et établi sur le territoire français ni de la réalité de ses moyens d'existence puisqu'il déclare dans son audition être sans domicile fixe,

- il est démuni de tout document d'identité ou de voyage en cours de validité,

- qu'il déclare être marié avec [A] [O], inconnue de l'administration française, enceinte de ses oeuvres et avoir un enfant à charge mais ne démontre pas ni de la réalité, ni de la stabilité de cette situation,

- il ne ressort pas de l'évaluation qui a été faite d'élément de vulnérabilité susceptible de faire obstacle à une mesure de rétention.

Attendu que dans son audition devant les services de police [N] [L] a dans un premier temps déclaré qu'il se nommait [C] [M] ; Qu'il s'est déclaré sans domicile fixe pour dire également qu'il vivait à [Localité 7] chez Mme [O] [D] et finalement indiquer qu'il vivait avec cette dernière au [Adresse 2] ;

Qu'au regard de l'inconstance de ces déclarations, il ne peut pas être reproché à la préfecture d'avoir mentionné qu'il ne justifiait pas d'une résidence effective et stable ;

Que la lecture simple de la décision établit que le préfet a pris en considération les dires de [C] [M] sur sa situation maritale et qu'il ne peut être affirmé le contraire ;

Attendu qu'il se déduit des considérations circonstanciées de l'arrêté préfectoral tel que repris ci-dessus que le grief tiré de l'insuffisance de la motivation de la décision contestée est infondé, comme l'a retenu le premier juge.

Sur le moyen pris de l'erreur manifeste d'appréciation des garanties de représentation :

Attendu que selon les dispositions de l'article L.741-1 du CESEDA l'autorité administrative peut placer en rétention lorsque l'étranger ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision ; Que le risque de fuite est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3 ;

Attendu que la régularité de la décision administrative s'apprécie au jour de son édiction, au regard des éléments de fait connus de l'administration à cette date et l'obligation de motivation ne peut s'étendre au-delà de l'exposé des éléments qui sous-tendent la décision en cause ;

Attendu que le conseil de [N] [L] alias [C] [M] soutient que l'autorité administrative a commis une erreur d'appréciation s'agissant de l'examen de ses garanties de représentation puisqu'il est hébergé avec son épouse chez M. [J] [B] [Adresse 1] ;

Qu'il ressort de la procédure de police et des diverses auditions de [N] [L] alias [C] [M] que ce dernier a déclaré successivement être sans domicile, puis vivre à [Localité 7] pour enfin affirmer qu'il vivait au [Adresse 2] ; Qu'il a également indiqué qu'il souhaitait rester en France ;

Qu'il a versé devant le premier juge une attestation d'hébergement de M. [B] qui déclare héberger Mme [O] et M. [C] [M] ainsi que [P] [Z] né le 19 août 2018 à son domicile situé [Adresse 1] depuis le mois de janvier 2022 ;

Que pour autant et ainsi que l'a relevé le premier juge, [A] [O] qui serait l'épouse de l'intéressé est domiciliée chez Mme [O] au [Adresse 4] selon l'attestation d'assurance 2021/2022 versée aux débats et que c'est cette même adresse qui est mentionnée sur le rapport d'échographie en date du mois de mars 2022 qui est produit pour attester que cette jeune femme est enceinte ;

Que la réalité du domicile de [C] [M] n'est donc pas établie ;

Attendu d'autre part, que la procédure de police établit que la consultation decadactylaire a permis de constater que [C] [M] était enregistré sous d'autres identités soit :

- [N] [L] né le 13 juin 1998 ;

- [C] [M] né le 13 juin 1993 ;

- [C] [M] né le 13 juin 1993 ;

- [C] [M] né le 13 juin 1998 ;

Attendu que les pièces communiquées devant le premier juge permettent de lire que l'enfant [P] est né le 15 août 2018, fils de [A] [O] épouse [M] née le 10 août 1994 en Algérie et de M. [C] [M] ;

Que ceci laisse apparaître que la véritable identité de [N] [L] alias [C] [M] n'est pas la même que celle figurant sur les documents de l'enfant dont il revendique la paternité et que sa véritable identité serait ni [N] [L], ni [C] [M] mais [C] [M] ;

Attendu en conséquence c'est à juste titre que le premier juge a retenu, qu'en raison de la situation de l'intéressé dont l'identité varie au gré de ses interpellations et/où de ses interlocuteurs, du fait qu'il n'a pas mis à profit le délai de départ volontaire dont il bénéficiait, pour ne pas avoir respecté l'intégralité des obligations de pointage qui pesaient sur lui et pour indiquer qu'il souhaitait rester en France, que le préfet du Rhône a valablement pu considérer que [N] [L] alias [C] [M] ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes pour prévenir le risque de soustraction à la mesure d'éloignement et décider de la nécessité son placement en rétention administrative, sans commettre une erreur manifeste d'appréciation ;

Attendu qu'en conséquence, à défaut d'autres moyens soulevés, l'ordonnance entreprise est confirmée.

PAR CES MOTIFS

Déclarons recevable l'appel formé par [N] [L] alias [C] [M] ;

Confirmons en toutes ses dispositions l'ordonnance déférée.

Le greffier,Le conseiller délégué,

Ludwig PAWLOWSKIIsabelle OUDOT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Retentions
Numéro d'arrêt : 22/02744
Date de la décision : 15/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-15;22.02744 ?
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