N° RG 18/05598 - N° Portalis DBVX-V-B7C-L3LS
Décision du :
- Tribunal de Commerce de LYON
Au fond du 20 juin 2018
RG : 2017J00962
SCI VIKING
C/
SA CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE DE RHONE ALPES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
3ème chambre A
ARRET DU 03 Décembre 2020
APPELANTE :
SCI VIKING
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Laurent CRETIN, avocat au barreau de LYON, toque : 268
Assistée de Me Laurent JACQUEMOND-COLLET, avocat au barreau de BOURGOIN JALLIEU
INTIMEE :
SA CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE DE RHONE ALPES
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Frédéric ALLEAUME de la SCP GRAFMEYER BAUDRIER ALLEAUME JOUSSEMET, avocat au barreau de LYON, toque : 673
******
Date de clôture de l'instruction : 28 Juin 2019
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 21 Octobre 2020
Date de mise à disposition : 03 Décembre 2020
Audience tenue par Anne-Marie ESPARBES, président, et Catherine CLERC, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,
assistés pendant les débats de Elsa MILLARY, greffier placé
A l'audience, Catherine CLERC a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.
Composition de la Cour lors du délibéré :
- Anne-Marie ESPARBES, président
- Hélène HOMS, conseiller
- Catherine CLERC, conseiller
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Anne-Marie ESPARBES, président, et par Elsa MILLARY, greffier placé, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
****
EXPOSE DU LITIGE
La Caisse d'épargne Rhône-Alpes (CERA) a accordé à la SCI Viking, sous la garantie du cautionnement solidaire de son gérant et de son épouse, six prêts immobiliers destinés à financer l'acquisition de biens immobiliers'selon offres préalables acceptées aux dates suivantes':
1) le 7 décembre 2010,
- un prêt Primo report n°8748364, d'un montant de 119 284,86 euros comportant une phase de préfinancement d'une durée maximale de 36 mois au taux annuel proportionnel de 3,67% et une phase d'amortissement de 300 échéances mensuelles de 667,74 euros assurance comprise, au taux annuel proportionnel de 3,67%, le taux effectif global (TEG) étant fixé à 4,67% ; un avenant a été signé le 27 juillet 2015 portant réaménagement du remboursement du capital restant dû au 5 août 2015 en 257 échéances mensuelles, selon trois paliers (le premier de 12 mois, le second de 233 mois et le dernier de 12 mois) au taux annuel proportionnel de 3,67%, le TEG étant fixé à 5,251%,
2) le 29 juin 2011,
- un prêt PH Primolis n°8868061, d'un montant de 103 640,18 euros comportant une phase de préfinancement d'une durée maximale de 36 mois au taux annuel proportionnel de 4,20% et deux phases d'amortissement, la première de 180 échéances mensuelles de 437,22 euros, assurance incluse, la seconde de 120 échéances mensuelles de 1 053,08 euros, assurance incluse, l'ensemble au taux annuel proportionnel de 4,20%, le TEG s'élevant à 5,03% ; un avenant a été signé le 5 juillet 2015 portant réaménagement du remboursement du capital restant dû au 5 août 2015 en 265 échéances mensuelles sur trois paliers (le premier de 12 mois, le second de 121 mois, le dernier de 12 mois) au taux annuel proportionnel de 4,20%, le TEG étant fixé à 5,203%,
- un prêt PH Primo report n°8868062, d'un montant de 80 000 euros comportant une phase de préfinancement d'une durée maximale de 36 mois au taux annuel proportionnel de 3,60% et une phase d'amortissement de 180 mois, l'ensemble au taux annuel proportionnel de 3,60%, le TEG représentant 4,87% ; un avenant a été signé le 5 juillet 2015 portant réaménagement du remboursement du capital restant dû au 5 août 2015 en 145 échéances mensuelles sur trois paliers (le premier de 12 mois, le second de 121 mois, le dernier de 12 mois) au taux annuel proportionnel de 3,60%, le TEG étant fixé à 6,491%,
3) le 22 novembre 2011,
- un prêt PH Primo report n°8946153, d'un montant de 74 270,73 euros, comportant une phase de préfinancement d'une durée maximale de 36 mois au taux annuel proportionnel de 4,25% et une phase d'amortissement de 240 mois, l'ensemble au taux annuel proportionnel de 4,25%'et au TEG de 5,39% ; un avenant a été signé le 23 avril 2015 portant réaménagement du remboursement du capital restant dû au 5 mai 2015 en 213 échéances mensuelles sur trois paliers (le premier de 12 mois, le second de 189 mois, le dernier de 12 mois) au taux annuel proportionnel de 4,25%, le TEG étant fixé à 6,109%,
- un prêt PH Primolis 2 phases n°8946154, d'un montant de 121 186,64 euros, comportant une phase de préfinancement d'une durée maximale de 36 mois au taux annuel proportionnel de 4,65% et une première phase d'amortissement de 240 mois, puis une seconde de 120 mois, l'ensemble au taux annuel proportionnel de 4,65%'et au TEG de 5,48% ; un avenant a été signé le 23 avril 2015 portant réaménagement du remboursement du capital restant dû au 5 mai 2015 en 333 échéances mensuelles sur trois paliers (le premier de 12 mois, le second de 189 mois, le dernier de 12 mois) au taux annuel proportionnel de 4,65%, le TEG étant fixé à 5,614%,
4) le 30 mai 2012,
- un prêt Primo report n°9038225, d'un montant de 113 078,68 euros, comportant une phase de préfinancement d'une durée maximale de 36 mois au taux annuel proportionnel de 5% et une phase d'amortissement de 300 mois au taux annuel proportionnel de 5%, le TEG étant fixé à 5,95%. Ce prêt a été régulièrement remboursé à son échéance le 31 mars 2014.
Par courrier de son assureur protection juridique du 23 novembre 2016, la SCI Viking, se prévalant d'un calcul erroné des intérêts conventionnels dans ses prêts, a soumis à la CERA une proposition transactionnelle consistant à substituer l'intérêt au taux légal à l'intérêt contractuel des prêts et obtenir restitution des intérêts trop perçus.
La CERA n'ayant pas donné suite à sa demande, la SCI Viking l'a assignée par acte extrajudiciaire du 23 mai 2017 devant le tribunal de commerce de Lyon aux fins d'obtenir liminairement l'organisation d'une expertise financière et à défaut, la nullité de la stipulation conventionnelle des intérêts et que lui soit substituée les intérêts au taux légal en vigueur à la date respective des 6 prêts, à compter de leur souscription, soutenant le caractère erroné du taux effectif global porté dans chacun des contrats de prêts et avenants souscrits.
Par jugement du 20 juin 2018, le tribunal de commerce a :
débouté la SCI Viking de sa demande d'expertise judiciaire comme non fondée,
déclaré prescrite l'action de la SCI Viking en annulation du prêt,
débouté la SCI Viking de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
débouté la CERA de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive,
condamné la SCI Viking à payer à la CERA la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens de l'instance.
La SCI Viking a relevé appel de ce jugement par acte du 27 juillet 2018 sauf en ses dispositions ayant débouté la CERA de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive.
Par conclusions déposées le 26 octobre 2018 fondées sur les articles 143, 144 et 146 du code de procédure civile,1907 ancien du code civil, L.313-4 et R.313-1 du code monétaire et financier, L. 313-1, L. 313-2, R. 313-1, L.313-4, L.314-1, R.314-4 et R.314-5 anciens du code de la consommation, la SCI Viking demande à la cour de'réformer en toutes ses dispositions le jugement déféré, et statuant à nouveau de':
déclarer recevable et fondée son action,
constater l'erreur de la CERA pour avoir omis d'intégrer dans le calcul du TEG le coût des intérêts et des frais d'assurance pendant la période de financement des six actes de prêt conclus avec elle sur le fondement des rapports de la société d'expertise de M. [X], expert-comptable commissaire aux comptes des 3, 4 et 5 octobre 2017,
constater l'erreur de la CERA pour avoir omis d'indiquer, dans les six offres de prêts, la périodicité du taux de période, sur le fondement des rapports de la société d'expertise de M. [X], expert-comptable commissaire aux comptes des 3, 4 et 5 octobre 2017,
constater l'erreur de la CERA pour avoir calculé, dans les six offres de prêts, les intérêts sur une période de 360 jours au lieu de 365, sur le fondement des rapports de la société d'expertise de M. [X], expert-comptable commissaire aux comptes des 3, 4 et 5 octobre 2017,
en conséquence,
juger que le taux effectif global porté dans chacun des contrats de prêts et avenants qu'elle a souscrits auprès de la CERA est erroné en ce qu'il viole les dispositions des articles L. 313-1 et L. 313-2 du code de la consommation qui sont d'ordre public,
en conséquence,
déclarer nulle la stipulation conventionnelle des intérêts des contrats de prêts et avenants souscrits par elle auprès de la CERA,
ordonner la substitution des intérêts conventionnels mentionnés dans chacun de ces actes au taux légal en vigueur à leurs dates respectives, à compter de leur souscription,
condamner la CERA à substituer au tableau d'amortissement de chacun des contrats de prêts et avenants un tableau d'amortissement calculé sur la base du taux légal applicable à chacun de ces contrats,
condamner la CERA à lui rembourser le montant des intérêts trop payés par cette dernière et qui correspond à la substitution du taux légal au taux conventionnel pour chacun des contrats de prêts et avenants, sur la base des calculs réalisés par un expert qu'elle a mandaté aux frais de la CERA, soit une somme de 134 254,05 euros,
condamner la CERA à lui payer la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner la même aux entiers dépens.
Par conclusions déposées le 23 janvier 2019, au visa des articles 9, 31,122 et 144 alinéa 2 du code de procédure civile, L. 110-4 du code de commerce, 1304, 1315, 2224 et 1907 du code civil, L. 313-1 et suivants, R. 313-1 et suivant du code de la consommation, la CERA demande à la cour de :
à titre principal,
confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré et y ajoutant, condamner la SCI Viking à lui payer la somme de 10 000 euros pour procédure abusive, et celle de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,
à titre subsidiaire,
débouter comme irrecevable et non fondée la SCI Viking en ses contestations de taux effectif global à l'encontre des contrats et avenants,
condamner la société SCI Viking à lui payer la somme de 10 000 euros pour procédure abusive, et celle de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers depuis.
MOTIFS
La SCI Viking ne critique pas en appel le rejet de sa demande d'expertise par les premiers juges.
Il est rappelé que la cour n'est pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, étant obligée de répondre à leurs seuls moyens de droit et de fait fondant chacune des prétentions.
Sur l'application du droit de la consommation à la SCI le Viking
Selon l'article 5 de ses statuts, l'objet social de la SCI Viking est l'acquisition, la revente, la gestion et l'administration civile de tous biens et droits immobiliers lui appartenant.
Les six prêts immobiliers en litige souscrits par celle-ci étaient destinés à financer l'acquisition de biens immobiliers en nature de logement existant avec / ou sans travaux, situés respectivement à Ouistreham (14150), Badinières (38300) et Apprieu (38140), activité qui entre dans l'objet social de la SCI Vicking ; ils sont exclus du champ d'application des dispositions du code de la consommation, dès lors qu'ils ont été souscrits pour les besoins de son activité professionnelle.
Pour autant, les parties ont entendu soumettre volontairement ces prêts à ces dispositions ainsi qu'en attestent les références aux articles L. 313-1, L. 313-2 et L. 312-21 contenues dans les conditions particulières et générales des contrats de prêt, cette soumission volontaire au droit de la consommation étant également vérifiée dans les avenants aux dits contrats.
Sur la recevabilité de l'action en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels
La prescription quinquennale de l'action en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel exercée par un emprunteur qui a obtenu un concours financier pour les besoins de son activité professionnelle court, s'agissant d'un prêt, de la date de la convention.
La SCI Viking qui a souscrit les six prêts pour les besoins de son activité professionnelle est prescrite dans son action en nullité de la stipulation d'intérêt conventionnels à l'égard des cinq prêts souscrits les 7 décembre 2010, 29 juin 2011 et 22 novembre 2011, son assignation ayant été délivrée le 23 mai 2017, soit plus de cinq ans après la date de leur signature'; elle est uniquement recevable à l'égard du prêt signé le 30 mai 2012 et des 5 avenants signés les 23 avril 2015, 5 juillet 2015 et 27 juillet 2015.
Le jugement est infirmé en ce qu'il a dénaturé les prétentions de la SCI Viking en la déclarant prescrite dans son action en nullité du contrat (comprendre contrats de prêt) alors qu'elle demandait uniquement la nullité de la stipulation conventionnelle des intérêts.
Sur le bien fondé de l'action en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels
Le prêt du 30 mai 2012 et les 5 avenants précités ayant été régularisés postérieurement au 1er mai 2011, les articles du code de la consommation visés dans le présent arrêt s'entendent dans leur version issue de':
la loi 2010-737 du 1er juillet 2010 pour l'article L.313-1,
l'ordonnance 2006-346 du 23 mars 2006 pour l'article L.313-2,
du décret 2011-135 du 1er février 2011 pour l'article R.313-1,
la loi 99-532 du 25 juin 1999 pour l'article L.312-14-1,
la loi 2014-344 du 17 mars 2014 pour l'article L.312-33.
Sur les frais liés à la période de préfinancement
Le contrat de prêt du 30 mai 2012 prévoit que les frais liés au préfinancement, à savoir les intérêts intercalaires, la prime de raccordement d'assurance et les primes d'assurance, ne sont pas pris en compte dans le coût total du crédit et le TEG.
La CERA soutient que ces frais ont été exclus du calcul du TEG car leur montant n'était pas déterminable au jour de la conclusion du contrat en faisant valoir qu'elle ignorait lors de l'émission du contrat de prêt, tout à la fois la date à laquelle celui-ci allait être signé par l'emprunteur, celle à laquelle le prêt allait entrer en période d'amortissement, l'emprunteur maîtrisant seul la durée de la période de calcul des intérêts intercalaires selon la date il sollicite le déblocage des fonds mais également la base de calcul de ces intérêts, selon qu'il sollicite un déblocage partiel ou total du prêt.
Toutefois les intérêts et frais dus au titre de la période de préfinancement sont liés à l'octroi du prêt et doivent entrer dans le calcul du TEG.
En l'espèce, le contrat de prêt précise la durée de la période de préfinancement (durée maximale de 36 mois), les intérêts s'y rapportant (taux annuel proportionnel de 5%)'ainsi que le montant mensuel de l'assurance (56,54 euros)'; le montant de ces frais était donc déterminable lors de la signature du contrat.
La SCI Viking est en conséquence fondée à dénoncer l'irrégularité ainsi constatée dans le contrat de prêt du 30 mai 2012 en relevant toutefois que les 5 avenants ne sont pas concernés puisque ne comportant pas une période de préfinancement.
Sur la périodicité du taux de période
Il résulte des dispositions de l'article L.312-14-1 du code de la consommation qu'en cas de renégociation d'un prêt immobilier, les modifications du contrat initial sont apportées sous la seule forme d'un avenant comprenant diverses informations, sans que soit exigée la communication du taux et de la durée de période.
La SCI Viking est ainsi mal fondée à dénoncer l'absence de mention de la périodicité du taux de période dans les cinq avenants litigieux.
S'agissant du prêt immobilier du 30 mai 2012, l'article R. 313-1 II du code de la consommation prévoit la communication à l'emprunteur :
du taux de période, à savoir le taux d'intérêt pour la durée de la période, un taux de période proportionnel équivalant au taux annuel divisé par le nombre d'échéances par an,
de la durée de la période ; l'unité de période correspondant à la périodicité des versements, la durée de période doit s'entendre comme étant le délai qui s'écoule entre deux remboursements'; qu'ainsi, en présence de 12 échéances mensuelles par an, la durée de la période sera d'un mois.
Le contrat de prêt comporte un tableau récapitulatif indiquant notamment le taux débiteur et sa nature (taux proportionnel), la durée en mois du crédit, la périodicité (mensuelle) et le jour de l'échéance constante (le 5), le nombre d'échéances (36 en préfinancement et 300 en amortissement), leur montant unitaire, ainsi que le taux de période (0,50%).
Il doit être admis que ces mentions de l'offre de crédit satisfont à l'exigence de communication de l'article R. 313-1 II qui n'impose aucun formalisme quant aux modalités d'exécution de cette obligation d'information.
La SCI Viking est donc déboutée de sa contestation fondée sur l'absence de mention de la périodicité du taux de période dans le prêt du 30 mai 2012.
Sur le TEG
La charge de la preuve du caractère erroné du TEG incombe à l'emprunteur qui poursuit la nullité de la stipulation des intérêts conventionnels'; à cet égard, il lui appartient de démontrer que les intérêts conventionnels ont été calculés sur la base d'une année de 360 jours et que ce calcul a généré à son détriment un surcoût d'un montant supérieur à la décimale prévue à l'article R'.313-1 II du code de la consommation, soit une différence de taux d'au moins 0,1%.
Pour critiquer le TEG figurant dans le prêt du 30 mai 2012 et les 5 avenants précités, la SCI Viking produit des rapports d'un expert-comptable, M. [X], et d'une société d'analyse financière, la SARL Inovaction, qui pour n'avoir pas été établis contradictoirement ont été cependant versés au débat et donc soumis à la discussion contradictoire'des parties ; la cour relève toutefois, qu'aucun rapport de la SARL Inovaction n'a été communiqué au titre du prêt en cause.
Si le TEG doit être obligatoirement calculé sur la seule base de l'année civile conformément aux articles L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation, (articles qui ne visent que le TEG), rien n'interdit aux parties, compte tenu de l'absence de toutes dispositions législatives ou réglementaires expresses contraires et du second alinéa de l'article 1907 du code civil qui impose seulement qu'il soit fixé par écrit, de convenir que le taux des intérêts conventionnels du prêt accordé à un professionnel soit calculé sur la base de l'année bancaire en recourant au diviseur 360, la seule limite étant que ce taux conventionnel n'excède pas le taux d'usure.
En l'espèce, les conditions particulières du contrat de prêt du 30 mai 2012 prévoient que les intérêts sont calculés sur la base de l'année civile'(30/360) : «'durant la phase d'amortissement, les intérêts sont calculés sur le montant du capital restant dû, au taux d'intérêt indiqué ci-dessus sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours'» la même clause étant prévue à l'égard des intérêts intercalaires (ceux courant durant la période de préfinancement, du jour du déblocage des fonds au jour de la première mensualité) sauf à dire que les intérêts sont calculés sur le montant des sommes débloquées.
L'article 11 des conditions générales du contrat de prêt énonce quant à lui que «'le TEG est déterminé conformément aux articles L.313-1et L.313-2 du code de la consommation, en tenant compte notamment des intérêts, des primes d'assurance qui conditionnent l'octroi du crédit, des frais de dossier et de garantie qui figurent aux conditions particulières'».
La SCI Viking est mal fondée à conclure que l'intégration dans le calcul du TEG, d'un taux d'intérêt conventionnel calculé sur la base d'une année de 360 jours, a nécessairement eu pour effet de rendre inexact le TEG'; ce faisant, elle occulte le fait avéré que ce mode de calcul fondé sur l'année lombarde aboutit arithmétiquement à un résultat équivalent au calcul des intérêts effectué sur la base d'une année civile de 365 jours rapportée au mois normalisé, le rapport mensuel d'une année normalisée (0,083333) s'avèrant être identique entre les rapports 30 /360, 1 /12, (365/12) /365, ou encore 30,41666 / 365.
Il est donc établi que le calcul des intérêts mensuels du prêt sur la base de l'année bancaire de 360 jours est sans incidence sur le taux du TEG, en ce qu'il est équivalent au calcul sur l'année de 365 jours et l'année normalisée de 30,41666 jours telle que prévue au paragraphe c) de l'annexe de l'article R.313-1 du code de la consommation.
Cette clause de calcul d'intérêts conventionnels basée sur l'année lombarde est donc insuffisante, à elle seule, à faire la preuve de l'existence concrète d'un TEG erroné, alors même qu'il est établi une équivalence mathématique entre le calcul des intérêts conventionnels sur l'année lombarde et sur l'année civile et que, de plus, le contrat de prêt renvoie, en toute régularité, aux dispositions des articles L.313-1et L.313-2 du code de la consommation pour la détermination du TEG.
La SCI Viking s'abstient de démontrer que le TEG mentionné au contrat de prêt précité n'était pas en réalité le TEG réel après un calcul conforme aux dispositions du code de la consommation sur une durée de 365 jours, et que ce dernier excéderait le TEG du contrat de plus d'une décimale.
En effet, elle ne fournit pas, en l'état de l'analyse comptable de M. [X], d'élément pertinent d'un recalcul du TEG permettant à la cour de vérifier le véritable taux du TEG applicable aux prêts ; au surplus, ce consultant amiable a travaillé sur une base de calcul (année civile 365 jours = 30,41 jours) non conforme aux dispositions de l'article R'.313-1 et de son annexe'; il en résulte que sa démonstration du taux erroné de l'intérêt conventionnel n'est aucunement pertinente dès lors qu'en appliquant à son calcul la base exacte de 30,4166, le coût des intérêts mensuels est identique selon le calcul sur l'année lombarde ou sur l'année civile, à savoir 471,16 euros /mois.
La SCI Viking est en conséquence déboutée de sa contestation relative au calcul du TEG dans le prêt du 30 mai 2012.
S'agissant du TEG énoncé dans chacun des 5 avenants, les études financières versées au débat par la SCI Viking (rapports de M. [X], expert-comptable, du 5 octobre 2017 et de la SARL Inovaction de juillet 2018) ne proposent pas davantage des éléments de recalcul du TEG permettant d'en contrôler le véritable taux.
La SCI Viking s'abstient au demeurant de préciser quel devrait être selon elle, le TEG exact pour chacun de ces avenants, se bornant à annoncer un différentiel de TEG qu'elle dit être supérieur à la décimale mais qui est déterminé globalement au visa des TEG figurant dans ces avenants et dans les 5 contrats de prêt pour lesquels elle est prescrite en son action'; en tout état de cause, il n'appartient pas à la cour d'opérer un calcul dont la preuve incombe à l'emprunteur.
Il est donc dit que la preuve du caractère erroné du TEG n'est pas non plus rapportée à l'égard des 5 avenants sus-visés.
Sur la sanction
Conformément aux dispositions de l'article L.312-33 du code de la consommation, la sanction d'un TEG erroné dans l'écrit constatant le prêt immobilier est la déchéance totale ou partielle du droit du prêteur aux intérêts dans la proportion fixée par le juge, dès lors que cette erreur est supérieure à la décimale prescrite par l'article R.313-1 du code de la consommation.
A l'égard de la seule irrégularité relevée concernant le calcul du TEG, à savoir l'omission dans ce calcul des frais liés à la période de préfinancement, la SCI Viking ne peut qu'être déboutée en ce qu'elle ne rapporte pas la preuve que cette omission entraîne une erreur de TEG supérieure à la décimale et qu'au surplus, elle est irrecevable à poursuivre, non pas la déchéance du droit aux intérêts de la CERA, mais la nullité de l'intérêt conventionnel et la restitution subséquente du montant des intérêts perçus à titre excédentaire depuis la conclusion du contrat.
En conclusion, pour prendre en compte l'ensemble des motivations de cet arrêt sur l'action en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels, le jugement est infirmé en totalité.
Sur les autres demandes
Le jugement déféré est confirmé sur le rejet de la demande en paiement pour procédure abusive soutenue par la CERA, cette dernière n'établissant pas que la SCI Viking a interjeté appel par malveillance manifeste ou avec une légèreté blâmable caractérisant un abus du droit d'ester en justice.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
La SCI Viking succombant dans son recours est tout à la fois condamnée aux entiers dépens et à verser une indemnité de procédure à la CERA estimée globalement à 4 000 euros, sa réclamation présentée au même titre étant rejetée.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
Statuant dans les limites de l'appel,
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions à l'exception de celles relatives aux dommages et intérêts pour procédure abusive et aux dépens,
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,
Dit l'action de la SCI Viking prescrite à l'égard des prêts':
Primo report n°8748364 du 7 décembre 2010,
PH Primolis n°8868061 du 29 juin 2011,
PH Primo report n°8868062 du 29 juin 2011,
PH Primo report n°8946153 du 22 novembre 2011,
PH Primolis 2 phases n°8946154 du 22 novembre 2011,
Dit recevable l'action de la SCI Viking à l'encontre du prêt et des avenants suivants':
Primo report n°9038225 du 30 mai 2012,
avenant du 23 avril 2015 au prêt PH Primo report n°8946153,
avenant du 23 avril 2015 au prêt PH Primolis 2 phases n°8946154,
avenant du 5 juillet 2015 au prêt Primolis report n°8868061,
avenant du 5 juillet 2015 au prêt PH Primo report n°8868062,
avenant du 27 juillet 2015 au prêt Primo report n°8748364,
Déboute la SCI Viking de sa demande en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels au titre de la périodicité du taux de période et du calcul du taux effectif global à l'égard du prêt Primo report n°9038225 du 30 mai 2012 et des 5 avenants sus-visés,
Dit la SCI Viking irrecevable en sa demande de substitution du taux légal à celui du taux conventionnel à l'égard du prêt Primo report n°9038225 du 30 mai 2012 du chef de l'exclusion des frais de la période de préfinancement dans le calcul du taux effectif global,
Y ajoutant,
Condamne la SCI Viking à verser à la Caisse d'épargne Rhône-Alpes une indemnité de procédure globale de 4 000 euros,
Condamne la SCI Viking aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,