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24/06/2020 | FRANCE | N°20/00326

France | France, Cour d'appel de Lyon, Jurid. premier président, 24 juin 2020, 20/00326


N° R.G. Cour : N° RG 20/00326 - N° Portalis DBVX-V-B7E-MZVL

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT



ORDONNANCE DU 24 Juin 2020





























DEMANDERESSE :



Mme [C] [K] épouse [J]

[Adresse 3]

[Localité 5]



comparante



DEFENDEURS :



M. [X] [U]

[Adresse 4]

[Localité 1]



comparant



SARL AMGP

[Adresse 6]

[Localité 2]
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non comparante



M. [F] [M] [G] [J]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 2]



comparant assisté de Me Jérémy ASTA-VOLA de la SELARL ASTA-VOLA ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON (toque 1439)



Audience de plaidoiries du 27 Mai 2020



DEBATS : audience publique du 27 Ma...

N° R.G. Cour : N° RG 20/00326 - N° Portalis DBVX-V-B7E-MZVL

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT

ORDONNANCE DU 24 Juin 2020

DEMANDERESSE :

Mme [C] [K] épouse [J]

[Adresse 3]

[Localité 5]

comparante

DEFENDEURS :

M. [X] [U]

[Adresse 4]

[Localité 1]

comparant

SARL AMGP

[Adresse 6]

[Localité 2]

non comparante

M. [F] [M] [G] [J]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 2]

comparant assisté de Me Jérémy ASTA-VOLA de la SELARL ASTA-VOLA ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON (toque 1439)

Audience de plaidoiries du 27 Mai 2020

DEBATS : audience publique du 27 Mai 2020 tenue par Olivier MOLIN, Magistrat à la cour d'appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 6 janvier 2020 assisté de Sylvie NICOT, Greffier.

ORDONNANCE : contradictoire

prononcée publiquement le 24 Juin 2020 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile;

signée par Olivier MOLIN, Magistrat et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La notification du présent arrêt est opérée par tout moyen en application de l'article 10 de l'ordonnance N° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale, tel que précisé par l'article 2.i de la circulaire du 26 mars 2020 CIV/02/20-C3/DP/2020030000319/FC

''''

EXPOSE DU LITIGE

Madame [C] [K] détient 30 % des parts de la SARL AMGP.

Son époux, Monsieur [F] [J], dont elle est séparée de corps depuis le mois d'avril 2012, en est le gérant et détient 70 % des parts de cette société.

Par actes du huissier en date du 2 juin 2016, Madame [C] [K] épouse [J] a assigné la SARL AMGP et Monsieur [F] [J] devant le juge des référés du tribunal de commerce de Bourg-en-Bresse afin d'obtenir la désignation d'un expert comptable, se plaignant d'un certain nombre d'irrégularités dans la gestion et les écritures comptables de la société.

Par une ordonnance rendue le 19 septembre 2016, le tribunal de commerce de Bourg en Bresse, statuant en référé, a ordonné une expertise et commis pour y procéder Monsieur [X] [U], dit que Madame [C] [K] devrait consigner une somme de 2000 € à valoir sur les frais d'expertise, dit que l'expert devrait déposer son rapport dans les quatre mois suivant sa saisine et mis l'avance des dépens de l'instance à la charge de Madame [K].

Par une ordonnance du 3 août 2017, le délai de dépôt du rapport a été prorogé jusqu'au 30 septembre 2017.

L'expert a déposé son rapport le 28 septembre 2017.

Le juge chargé du suivi des expertise a, par une ordonnance du 8 novembre 2017, fixé à la somme de 7818 € la rémunération de l'expert et autorisé ce dernier à se faire remettre la somme de 2000 € consignée à la régie, le versement du complément étant mis à la charge de Madame [C] [K].

Par courrier recommandé expédié le 11 janvier 2020 au greffe de la cour d'appel, Madame [C] [K] a formé un recours contre l'ordonnance de taxe du 8 novembre 2017.

Ce recours a été adressé par courriers recommandés avec avis de réception expédiés le 10 janvier 2020 à Monsieur [X] [U], le 14 janvier 2020 à Monsieur [F] [J] et le 14 janvier 2020 à la SARL AMGP.

A l'audience du délégué du premier président du 27 mai 2020, les parties ont déclaré s'en remettre à leurs écritures, qu'elles ont soutenues oralement.

Dans des écritures déposées à l'audience du 27 mai 2020, Madame [C] [K] sollicite la réformation de l'ordonnance de taxe et la fixation de la rémunération de l'expert à hauteur de la somme totale de 2000 € TTC, contestant le complément de rémunération de 5818 € taxé par le juge.

Subsidiairement, en cas de confirmation de l'ordonnance de taxe, elle demande que la rémunération de l'expert soit mise à la charge de Monsieur [F] [J] et la SARL AMGP.

Répondant au moyen tiré de l'irrecevabilité de son recours, elle affirme avoir reçu l'avis de réception d'une mise en demeure de payer le 6 septembre 2018, mais que l'ordonnance du 8 novembre 2017 ne lui a été notifiée que le 12 décembre 2019.

Sur le fond, invoquant les dispositions de l'article 280 du code de procédure civile, elle estime que l'expert, en ne sollicitant pas de consignation complémentaire, n'a pas droit à une rémunération excédant la consignation de 2000 € initialement prévue.

Par ailleurs, elle reproche à l'expert de ne pas avoir respecté les délais impartis, de ne pas avoir accompli sérieusement et intégralement sa mission, en ne sollicitant pas les pièces comptables et relevés de compte nécessaires et en délégant sa mission à une collaboratrice, de ne pas avoir été impartial dans ses conclusions, ainsi que de ne pas avoir respecté le principe du contradictoire en ne lui transmettant pas les pièces sur lesquelles il s'est appuyé.

Répondant aux moyens de Monsieur [U], Madame [K] soutient qu'elle n'a pas assuré la comptabilité de la société en 2011 après son départ de l'entreprise au mois de novembre 2011 ; que l'expert ne l'a pas informée du refus de la société AMGP et de ses experts-comptables de communiquer les documents nécessaires à sa mission ; qu'elle n'aurait pas fait de dires si elle en avait été informée ; que, dans ces conditions, l'expert aurait dû arrêter ses investigations après le dépôt de son pré-rapport le 18 avril 2017 ; que ses dires avaient essentiellement pour objet de relancer l'expert et ne nécessitaient pas d'investigations supplémentaires justifiant des honoraires complémentaires, pour lesquels l'expert aurait dû établir des devis.

Répondant à l'argumentation de la SARL AMGP et de Monsieur [F] [J], elle fait valoir que le juge des référés n'a pas statué sur la charge définitive des frais d'expertise, qui peuvent être mis à la charge d'une autre partie par le juge taxateur; que le retard dans les opérations d'expertise résulte de la résistance de Monsieur [J] et des experts-comptables de la société AMGP, qui ont refusé de transmettre les documents comptables et relevés bancaires nécessaires à la réalisation de l'expertise, ce qui justifie que le coût de l'expertise soit mis à leur charge.

Dans des écritures déposées au greffe le 21 février 2020, Monsieur [X] [U] soulève, en premier lieu, l'irrecevabilité du recours, indiquant avoir notifié l'ordonnance querellée par un courrier recommandé avec avis de réception signé par Madame [K] le 4 décembre 2018.

Répondant, sur le fond, à l'argumentation adverse, il fait valoir qu'il a débuté les opérations d'expertise lors d'une première réunion le 1er décembre 2016 ; que compte tenu de la complexité des opérations, de la nécessité de solliciter de nombreux justificatifs et des nombreux dires et demandes de Madame [K], un délai supplémentaire a été nécessaire ; qu'il a tenu compte de tous les éléments transmis par Madame [K] pour y répondre ; qu'il ne peut lui être reproché de ne pas avoir respecté le principe du contradictoire ; qu'il n'a pas été en mesure de récupérer les pièces comptables des années 2011 et antérieures ; qu'il a rempli la mission qui lui a été confiée, ce qui justifie la confirmation de l'ordonnance querellée.

Répondant à l'argumentation de la SARL AMGP et de Monsieur [F] [J], il indique qu'il n'a pas été en mesure de solliciter de complément de provision compte tenu des délais et de la difficulté à évaluer le travail nécessaire pour répondre aux demandes de Madame [K].

Enfin, il sollicite une somme de 1200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans des conclusions déposées au greffe le 28 février 2020, la SARL AMGP et Monsieur [F] [J] estiment qu'il n'appartient pas à la présente juridiction de statuer sur le fond du litige.

S'agissant du montant des honoraires de l'expert, ils s'en rapportent à la décision, mais reprochent à l'expert d'avoir manqué à ses obligations quant au coût prévisible de l'expertise et à l'obligation de solliciter une provision, conformément aux dispositions de l'article 280 du code de procédure civile.

Par ailleurs, ils s'opposent à ce que le complément d'honoraires soit mis à sa charge, faisant valoir que Madame [K] est à l'origine de la désignation de l'expert et avait demandé devant le juge des référés que l'avance des frais d'expertise soit à sa charge ; qu'en outre, ce sont les multiples demandes et dires de Madame [K] qui sont à l'origine de l'augmentation du coût de l'expertise; qu'en tout état de cause, l'ordonnance de référé a statué sur la charge des frais d'expertise et ne peut pas être remise en question dans le cadre de la présente instance.

Enfin, ils sollicitent la condamnation de Madame [K] à leur verser la somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Les dernières conclusions de la SARL AMGP et de Monsieur [F] [J] ont été enregistrées par erreur sous un nouveau de greffe 20-1735.

Les deux dossiers ont été joints par simple mention au dossier sous le numéro 20-326.

MOTIFS

Sur la recevabilité

Conformément aux dispositions des articles 724 du code de procédure civile, le recours contre la décision taxant la rémunération d'un technicien court, à l'égard de chacune des parties, à compter du jour de la notification qui lui est faite par le technicien.

Suivant l'article 714 alinéa 2 du même code, le délai de recours est d'un mois.

En l'espèce, Monsieur [X] [U] soulève l'irrecevabilité du recours au motif que la décision contestée aurait été notifiée à Madame [K] le 3 décembre 2018 par une société de recouvrement de créances.

Il convient de constater, à la lecture des pièces, que l'expert a notifié son rapport d'expertise le 3 octobre 2017, mais pas l'ordonnance de taxe rendue le 8 novembre 2017 ; que la notification par un cabinet de recouvrement de créances (M3C) le 3 décembre 2018 ne comporte pas la signature de Madame [K], aisément identifiable sur les avis de réception qu'elle a signés dans le cadre des communications de l'expert pendant les opérations d'expertise, si bien qu'il est impossible de démontrer que l'ordonnance de taxe aurait été notifiée à Madame [K] à cette date.

Dans ces conditions, il convient de retenir la date de l'avis de réception de la notification de l'ordonnance par les services de la Poste le 12 décembre 2019.

Le recours de Madame [K] ayant bien été effectué dans le délai d'un mois, la fin de non-recevoir sera rejetée de ce chef.

Sur la rémunération de l'expert

Conformément aux dispositions de l'article 284 alinéa 1 du code de procédure civile, le juge fixe la rémunération de l'expert en fonction notamment des diligences accomplies, du respect des délais impartis et de la qualité du travail fourni.

En l'espèce, le tribunal de commerce de Bourg-en-Bresse a confié à Monsieur [U], par une ordonnance du 19 septembre 2016, une mission d'expertise comptable de la société AMGP afin d'apprécier l'existence d'éventuels manquements commis par son gérant, Monsieur [J].

L'expert avait en particulier pour mission de :

- se faire communiquer par la SARL AMGP ou par son gérant, le registre des assemblées, ainsi que tout procès-verbal d'assemblée ou toute consultation écrite des associés depuis le 1er janvier 2012, et notamment tous les documents sociaux relatifs à l'approbation des comptes annuels depuis l'exercice clos le 31 décembre 2011 inclus ;

- se faire communiquer tous documents afférents à la comptabilité de la société (comptes annuels, grand livre, pièces justificatives comptables, relevés bancaires'), depuis le 1er janvier 2011 ;

- indiquer si les associés ont été convoqués ou non aux assemblées relatives à l'approbation des comptes des exercices clos le 31 décembre 2011, 31 décembre 2012, 31 décembre 2013, 31 décembre 2014 ;

- chiffrer le montant des rémunérations versées, directement ou indirectement, à Monsieur [F] [J] en sa qualité de gérant de la SARL AMGP depuis sa désignation en date du 31 décembre 2003, ainsi que le montant des cotisations sociales et autres avantages pris en charge par la SARL AMGP au titre de ses fonctions de gérant ;

- indiquer si les rémunérations versées à Monsieur [F] [J] par la SARL AMGP ainsi que la prise en charge des cotisations sociales et avantages afférents à ses fonctions de gérant, ont été ou non autorisées par la collectivité des associés ;

- vérifier la réalité des allégations de Madame [C] [K] s'agissant de dépenses personnelles directes ou indirectes de Monsieur [F] [J], sans rapport avec l'intérêt social, qui auraient été indûment prises en charge par la SARL AMGP et en chiffrer le montant depuis le 1er janvier 2011 ;

- vérifier la réalité des allégations de Madame [C] [K] s'agissant de l'irrégularité des écritures comptables relatives à la SCI PORTE DU GRAND LYON dans la comptabilité de la SARL AMGP.

Le 28 septembre 2017, l'expert a déposé son rapport et sa demande de rémunération, comprenant les postes suivants :

- frais de déplacement : 207 € TTC

- frais de secrétariat : 8 heures x 65 € = 520 €

- frais d'expertise sur place : 14 heures x 85 € = 1190 €

- frais d'expertise au bureau : 22 heures x 85 € = 1870 €

- rédaction du pré-rapport : 14 heures x 85 € = 1190 €

- rédaction du rapport : 18,5 heures x 85 € = 1572,50 €

- total des honoraires et frais de rédaction : 7611 € TTT

- total : 7818 € TTC.

Il ressort du rapport d'expertise, de ses annexes, ainsi que des courriers produits par Monsieur [U] que la mission de l'expert, s'est déroulée, sur un plan chronologique, de la manière suivante :

- réception de la consignation le 19 octobre 2016,

- transmission le 19 octobre 2016 par l'avocat de Madame [K] de 15 pièces, comprenant notamment un certain nombre d'opérations bancaires et factures d'achats relatives à la société AMGP,

- le 22 novembre 2016, l'expert invite les parties à se présenter au siège social de l'entreprise le 1er décembre 2016 et sollicite un certain nombre de pièces comptables et juridiques, en ce compris les pièces visées dans l'ordonnance le commettant,

- le 30 novembre 2016, l'avocat de la société transmet à l'expert 11 pièces fiscales et comptables,

- le 1er décembre 2016, l'expert tient une réunion dans les locaux de la SARL AMGP avec toutes les parties et récupère des justificatifs de convocation des associés de l'entreprise,

- les 2, 4 et 10 janvier 2017, l'expert prend contact avec les trois experts-comptables qui sont se sont succédés pour la société AMGP ; ces derniers lui transmettent les livres de comptes des années 2012 à 2014,

- le 22 mars 2017, l'expert récupère au siège social de la société les documents d'approbation des comptes des exercices de 2013 à 2015 et de nombreuses factures,

- communication aux parties d'un pré-rapport le 19 avril 2017,

- le 14 septembre 2017, l'expert récupère, à la demande de l'avocat de Madame [K], les relevés bancaires de la société au titre des années 2012 à 2014, ainsi que de très nombreuses factures.

Dans son rapport, l'expert précise qu'il ne lui a pas été possible d'obtenir les éléments comptables des années 2003 à 2011 auprès de la société et de ses experts-comptables.

À cet égard, l'avocat de Madame [K] a écrit le 2 mai 2017 au juge en charge du contrôle des expertises afin qu'il sollicite la communication de ces pièces. Le juge n'a pas donné suite, en répondant le 22 mai 2017 qu'il laissait l'expert poursuivre ses opérations.

Dans ces conditions, il ne peut être reproché à l'expert, qui a également informé le tribunal de cette difficulté par un courrier du 10 juillet 2017 et justifie de ses différentes demandes de communication de pièces, de ne pas avoir été plus loin dans ses démarches et d'avoir établi son rapport en l'état, conformément à la demande du juge en charge du contrôle des expertises.

Il ne peut davantage lui être reproché de ne pas avoir arrêté ses diligences au dépôt du pré-rapport le 19 avril 2017, d'autant que l'avocat de Madame [K] transmettait à l'expert le 2 mai 2017 un courrier de six pages sollicitant un délai supplémentaire pour répondre et présentant d'ores et déjà un certain nombre de dires et de demandes de pièces.

Madame [K] fait également grief à l'expert d'avoir violé le principe du contradictoire en ne lui communiquant pas les pièces sur lesquelles il s'est appuyé, mais ne précise pas les pièces concernées, alors qu'il ressort du rapport d'expertise et des courriers recommandés envoyés par Monsieur [U] que toutes les pièces annexées au rapport ont bien été communiquées aux parties.

Il résulte, en particulier, des courriers échangés entre l'expert et l'avocat de Madame [K] qu'il était sollicité le 13 juillet 2017 les livres comptables de la société et relevés bancaires après l'année 2012 et que ces documents ont été communiqués par l'expert le 14 septembre 2017.

Par ailleurs, la lecture du rapport d'expertise ne permet pas de constater de manquements à l'impartialité de l'expert.

En tout état de cause, il n'appartient pas au juge chargé de la rémunération de statuer sur la régularité des opérations d'expertise.

Il est également reproché à l'expert de ne pas avoir accompli personnellement sa mission.

À cet égard, le rapport d'expertise précise en préambule que l'expert s'est fait assister de Madame [Z] [P], collaboratrice du cabinet.

Conformément aux dispositions de l'article 278-1 du code de procédure civile, l'expert peut se faire assister dans l'accomplissement de sa mission par la personne de son choix qui intervient sous son contrôle et sous sa responsabilité.

La lecture du rapport d'expertise et les différents échanges entre Madame [P] et les parties à l'expertise permettent de constater que cette dernière est intervenue en soutien à la mission de l'expert, notamment pour se faire remettre des pièces justificatives et suivre l'avancement du dossier.

Il ne saurait donc être reproché à l'expert de ne pas avoir accompli personnellement sa mission. Par ailleurs, l'expert fait clairement apparaître des honoraires de secrétariat dans sa demande de taxation, à un taux horaire inférieur au sien.

S'agissant des diligences et de la qualité du travail de l'expert, après avoir fait un rappel du déroulement des opérations d'expertise, le rapport d'expertise reprend les données juridiques de base de la société AMGP et répond, point par point, à la mission qui lui a été confiée en analysant les éléments qu'il a recueillis relativement à la rémunération du dirigeant et aux autorisations des associés, à ses dépenses personnelles, ainsi qu'aux opérations relatives à la SCI PORTE DU GRAND LYON.

Il répond également de manière précise en 13 points aux dires présentés par l'avocat de Madame [K] dans ses courriers des 2 mai 2017 et 1er septembre 2017.

Ce rapport de 30 pages, sans les annexes, comprend une conclusion reprenant de manière synthétique les réponses aux différents chefs de mission.

S'il ne permet pas de faire une analyse des éventuels abus commis par le dirigeant avant l'année 2012, ce rapport répond clairement à la mission, s'agissant des années postérieures.

Madame [K] confond manifestement, dans ses écritures, la qualité du rapport et ce qu'elle espérait en obtenir. Il convient en effet de constater qu'elle critique les réponses de l'expert à ses dires et sollicite du juge de l'honoraire, au prétexte du présent recours, qu'il réalise lui-même une contre-expertise.

De la même façon, aucune des diligences de l'expert n'apparaît manifestement inutile et sans lien avec sa mission. À cet égard, Madame [K] ne saurait critiquer l'expert pour avoir fait des investigations relatives aux factures d'une agence matrimoniale, alors que ces investigations faisaient suite à une demande de son avocat.

Par ailleurs, la durée de l'expertise apparaît adaptée au regard du déroulement des opérations d'expertise, tel qu'il ressort des développements précédents.

L'expert a vaqué à sa mission de manière régulière et continue sans délai abusif ou injustifié.

Il convient notamment de remarquer qu'il a dû répondre, après le 1er septembre 2017, aux nombreux dires de Madame [K] justifiant un report du délai de dépôt par le juge en charge du contrôle des opérations d'expertise.

Par conséquent, le nombre d'heures facturé par l'expert apparaît conforme à l'importance et à la difficulté des opérations, ainsi qu'à la qualité du travail fourni.

Toutefois, il convient de constater une disparité importante entre la provision et le montant total réclamé par l'expert et il appartenait à ce dernier, conformément aux dispositions de l'article 280 alinéa 2 du code de procédure civile de solliciter une provision complémentaire en cas d'insuffisance manifeste de la provision allouée.

On ne voit pas en quoi le déroulement des opérations d'expertise ne permettait pas à l'expert, en particulier après les dires présentés le 2 mai 2017, puis le 1er septembre 2017 par l'avocat de Madame [K], de solliciter une provision complémentaire.

Ce manquement de l'expert à ses obligations justifie de réduire le montant de ses honoraires à la somme totale de 6000 € TTC, en ce compris les frais de déplacement, qui ne sont pas contestés.

Le recours de Madame [K] sera donc partiellement accueilli.

Sur la charge des frais d'expertise

L'article 284 alinéa 2 du code de procédure civile permet au magistrat taxateur de dire à qui incombe la charge de la rémunération de l'expert.

Toutefois, dans le cadre d'une contestation portant sur la rémunération du technicien, le premier président n'est pas compétent pour statuer sur la répartition des frais d'expertise inclus dans les dépens (Cass. 2e civ., 16 janv. 2014, n° 13-10655).

Madame [C] [K] sera donc déboutée de sa demande à ce titre et condamnée à verser la somme de 4000 € au titre du solde de la rémunération de l'expert.

Sur les demandes accessoires

Madame [C] [K] succombant principalement à l'instance sera condamnée aux dépens.

En revanche, l'équité justifie de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le délégué du premier président, statuant par ordonnance rendue publiquement et contradictoire

Rejette la fin de non-recevoir soulevée par Monsieur [X] [U].

Accueille partiellement le recours de Madame [C] [K] contre l'ordonnance de taxe rendue le 8 novembre 2017 par le juge chargé du contrôle des expertises au tribunal de commerce de Bourg-en-Bresse.

Fixe la rémunération de Monsieur [X] [U] à la somme totale de 6000 € TTC.

Rejette la demande de Monsieur [U] pour le surplus.

Rejette la demande de Madame [K] au titre de la charge des frais d'expertise.

Condamne en conséquence Madame [C] [K] à verser à Monsieur [X] [U] la somme de 4000 € au titre du solde de sa rémunération.

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne Madame [K] aux dépens.

LE GREFFIERLE MAGISTRAT DELEGUE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Jurid. premier président
Numéro d'arrêt : 20/00326
Date de la décision : 24/06/2020

Références :

Cour d'appel de Lyon 11, arrêt n°20/00326 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-06-24;20.00326 ?
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