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16/01/2020 | FRANCE | N°18/00355

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 16 janvier 2020, 18/00355


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





N° RG 18/00355 - N° Portalis DBVX-V-B7C-LPB7





W...



C/

SARL GABETI







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de SAINT-ETIENNE

du 19 Décembre 2017

RG : F 16/00275





COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 16 JANVIER 2020





APPELANTE :



D... W...

née le [...] à LA MURE

[...

]

[...]



représentée par Me Gaël SOURBE de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON,

ayant pour avocat plaidant Me Anne-sophie XICLUNA, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE





INTIMÉE :



SARL GABETI

[...]

[...]



repré...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 18/00355 - N° Portalis DBVX-V-B7C-LPB7

W...

C/

SARL GABETI

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de SAINT-ETIENNE

du 19 Décembre 2017

RG : F 16/00275

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 16 JANVIER 2020

APPELANTE :

D... W...

née le [...] à LA MURE

[...]

[...]

représentée par Me Gaël SOURBE de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON,

ayant pour avocat plaidant Me Anne-sophie XICLUNA, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIMÉE :

SARL GABETI

[...]

[...]

représentée par Me Laurent LIGIER de la SCP ELISABETH LIGIER DE MAUROY & LAURENT LIGIER AVOUÉS ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON,

ayant pour avocat plaidant Me Stéphane CHAUTARD, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

PARTIE INTERVENANTE :

SARL DIMU

[...]

[...]

représentée par Me Kader KARAKAYA, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE substitué par Me Jean-pierre COCHET, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 17 Octobre 2019

Présidée par Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Elizabeth POLLE-SENANEUCH, président

- Laurence BERTHIER, conseiller

- Bénédicte LECHARNY, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 16 Janvier 2020 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président et par Elsa SANCHEZ, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Suivant contrat à durée indéterminée, la société DIMU a engagé Mme D... W... en qualité d'employée polyvalente à compter du 16 avril 1992, dans le cadre d'un contrat de retour à l'emploi de 8 mois, converti en contrat à durée indéterminée à temps complet.

A compter du 1er octobre 2015, le contrat de travail de Mme W... a été transféré à la SARL GABETI, laquelle a repris l'exploitation du magasin [...], spécialisé dans le vente d'articles religieux, suite à la vente du fonds de commerce.

La relation de travail était régie par la convention nationale des commerces de détail non alimentaires.

Au dernier état de la relation de travail, la rémunération mensuelle brute s'établissait à la somme de 923,51 €.

L'état de santé de Mme W... s'est dégradée au fil des années, en raison d'une névralgie cervico brachiale bilatérale chronique, avec cervicalgies intenses, consécutives à une syringomyélie, maladie touchant la moelle épinière, de sorte qu'elle s'est vue reconnaître la qualité de travailleur handicapé du 7 décembre 2006 au 7 décembre 2011 puis du 1er septembre 2012 au 31 août 2017.

Elle a par ailleurs été placée à mi-temps thérapeutique du 2 février 2009 au 31 janvier 2010 puis une pension d'invalidité lui a été allouée à compter du 1er février 2010.

Lors de visites de reprise des 12 avril 2006 et 10 mars 2010, le médecin du travail a déclaré Mme W... apte à son poste mais en tenant compte de restrictions tenant aux efforts physiques et port de charges.

Le 30 août 2012, il a préconisé un poste aménagé en tâches et en horaires avec nécessité de privilégier l'administratif à la vente.

A compter du 1er septembre 2014, sans avenant contractuel, le temps de travail a été réduit à 80,17 heures par mois.

Mme W... a été arrêtée du 2 mars au 6 avril 2015.

Dans le cadre de la visite de reprise de son poste dans l'entreprise, le médecin du travail a été examiné Mme W... et a conclu le 7 avril 2015 comme suit: 'Apte aménagement du poste: doit pouvoir s'asseoir de temps en temps '.

La société DIMU dans le cadre des ces différents avis a affecté prioritairement Mme W... à des tâches administratives, les opérations de vente ne représentant que 30 % de son temps de travail et a financé un bureau électrique, une chaise ergonomique et une grille électrique pour l'ouverture et la fermeture du magasin.

A la reprise du contrat de travail de Mme W... par la société GABETI, cette dernière lui a adressé le 16 octobre 2015 un courrier rédigé comme suit :

'Comme suite à la vente du fonds de commerce intervenue en date du 1er octobre 2015 entre la société SARL DiMU et la société SARL GABETI et conformément à l'article L 1224-1 du code du travail, votre contrat de travail suit le repreneur du fonds de commerce.

Nous vous rappelons que vous avez été embauchée en date du 16 avril 1992 en qualité de vendeuse - aide comptable par la Société SARL DIMU à temps plein, 39 heures hebdomadaire. Vous avez eu un mi-temps thérapeutique du 26 janvier 2009 au 31 janvier 2010. A l'issue de ce mi-temps thérapeutique, il a été convenu d'un aménagement de votre poste de travail, avec une durée de travail à temps partiel à hauteur de 19 heures 30 minutes hebdomadaire. Enfin depuis le 1er septembre 2014, suite à votre demande et pour répondre à vos convenances personnelles votre horaire hebdomadaire contractuel a été modifié pour atteindre 18 heures de travail effectif rémunérées pour 18 heures 30 minutes.

Par la présente nous vous confirmons que votre contrat de travail ne subit aucune modification et que vous restez ainsi embauchée sur la base de 18 heures hebdomadaire dont la répartition est la suivante :

Mardi

10 h 00 - 12 h 00

et

14 h 00 - 18 h 00

Mercredi

10h00-12h00

et

14h00-18 h 00

Samedi

10 h 00 - 12 h 00

et

14 h 00 - 18 h 00

Ces 18 heures hebdomadaire resteront rémunérées 18 heures 30 minutes, pour un poste de vendeuse - aide comptable, niveau 4, de la convention collective nationale des commerces de détail non alimentaires applicable à la société.

Pour la bonne forme, nous vous demandons de bien vouloir nous retourner un exemplaire du présent courrier signé avec la mention bon pour accord.'

Mme W... s'est opposée à cette demande estimant que cela constituait une modification de son poste et qu'elle ne pouvait être affectée uniquement à la vente au regard de son handicap.

Mme W... a été placée en arrêt de travail du 14 octobre 2015 au 28 février 2016.

Lors de la visite de reprise effectuée les 15 février et 29 février 2016, le médecin du travail a déclaré Mme W... inapte au poste de vendeuse, indiquant qu'elle pourrait occuper un poste administratif type aide comptable ou autre, à temps partiel, avec les aménagements déjà mis en place par l'AGEFIPH en 2006.

Par courrier recommandé du 2 mars 2016, la société GABETI a proposé à Mme W... un poste à temps partiel d'assistante administrative à hauteur de 10 heures hebdomadaires à concurrence de 5 heures par jour, le mardi et le mercredi de 10 h à 12 h et de 15h à 18 h .

Selon courrier du 7 mars 2016, Mme W... a refusé cette proposition de reclassement.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 9 mars 2016, la société GABETI a convoqué Mme W... le 25 mars 2016 en vue d'un entretien préalable à son licenciement.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 31 mars 2016, la société GABETI a notifié à Mme W... son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le 6 juin 2016, Mme W... a saisi le conseil de prud'hommes SAINT ETIENNE en lui demandant de déclarer son licenciement sans cause réelle et sérieuse, de condamner en conséquence la société GABETI à lui payer des dommages-intérêts pour licenciement abusif, une indemnité compensatrice de préavis, une indemnité de licenciement, outre un rappel de salaire correspondant à un temps plein.

Par jugement rendu le 19 décembre 2017 , le conseil de prud'hommes a:

- Dit et jugé que l'action dirigée par la Société GABETI à l'encontre de la Société DIMU est irrecevable et l'en déboute.

- Condamné la Société GABETI, prise en la personne de son représentant légal, à verser à Madame D... W... le s sommes suivantes

- 608€ à titre de rappel de salaire pour la période de septembre 2014 à septembre 2015,

- 60,80 au titre des congés payés afférents.

- Débouté Madame H... du surplus de sa demande de rappel de salaire et de sa demande de rappel d'indemnité de licenciement

- Dit et jugé que le licenciement pour inaptitude de Madame D... W... repose sur une cause réelle et sérieuse

- Débouté Madame D... W... de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour manquement à l'obligation de sécurité et de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis,

- Condamné la Société GABETI prise en la personnede son représentant légal à verser à Madame D... W... la somme de 309 € au titre de l'article 700 du ode de procédure civile,

- Débouté la Société DIMU et la Société GABETI de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamné la société GABETI aux entiers dépens de l'instance.

La cour est saisie de l'appel interjeté le 15 janvier 2018 par Mme D... W....

Par conclusions régulièrement communiquées,, auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé, Mme W... demande à la cour de :

- DIRE ET JUGER recevable l'appel interjeté par Madame W..., à l'encontre du jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de SAINT ETIENNE le 19 décembre 2017.

INFIRMER le jugement déféré en ce qu'il a :

- Débouté Mme D... W... de sa demande de requalification de la relation contractuelle en un contrat à temps complet et du surplus de sa demande de rappel de salaire et de sa demande de rappel d'indemnité de licenciement, étant précisé que Mme W... sollicitait en lère instance la somme de 20.779,08 € à titre de rappel de salaire, outre 2.389,59 € de congés payés afférents et 802,15 € à titre de rappel d'indemnité de licenciement,

- Dit et jugé que le licenciement pour inaptitude de Mme D... W... repose sur une cause réelle et sérieuse,

- Débouté Madame D... W... de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à hauteur de 33.228 €

Débouté Madame D... W... de ses demandes de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité à hauteur de 10.523,19 €

- Débouté Madame D... W... de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis, à hauteur de 2.770,53 €

- Condamné la Société GABETI, prise en la personne de son représentant légal, à verser à Madame D... W... la somme de 300 € au titre de l'article 700 du CPC, alors que Mme W... sollicitait en 1ère instance la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du CPC.

STATUANT A NOUVEAU,

- DIRE ET JUGER que la société GABETI a manqué à son obligation de sécurité.

CONDAMNER la société GABETI à verser à Madame W... la somme de 10.523,19 €, à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,

- DIRE ET JUGER le licenciement de Madame W... privé de cause réelle et sérieuse.

- CONDAMNER la société GABETI à verser à Madame W... la somme de 33.228 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

- CONDAMNER la société GABETI à verser à Madame W... la somme de 2.770,53 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis.

- REQUALIFIER la relation contractuelle, en un contrat à temps complet.

- CONDAMNER la société GABETI à verser à Madame W... la somme de 20.779,08 € à titre de rappel de salaire, outre 2 389,59 € de congés payés afférents.

- CONDAMNER la société GABETI à verser à Madame W... la somme de 802,15 € à titre de rappel d'indemnité de licenciement.

- CONDAMNER la société GABETI à verser à Madame W... la somme de 3.500 €, au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Par conclusions régulièrement communiquées,, auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé,la société GABETI demande à la cour de :

Vu les articles L1224-2 et R1451-1 du code du travail, Vu les articles 331 et 550 du code de procédure civile,

Plaise à la Cour de réformer le jugement du conseil de prud'hommes de Saint-Etienne et déclarer recevable la mise en cause de la société DIMU,

Vu les articles L1224-1 et L4624-1 du code du travail,

Plaise à la Cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

o débouté Madame W... de ses demandes de dommages intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité.

A titre subsidiaire, condamner la Société DIMU au paiement des éventuels dommages intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,

o dit que le licenciement de Madame D... W... repose sur une cause réelle et sérieuse et débouté cette dernière de ses demandes de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'indemnité compensatrice de préavis,

- A titre subsidiaire, déclarer responsable et condamner la Société DIMU au paiement des éventuels dommages intérêts,

Vu l'article 5 du code de procédure civile, Vu les articles L3123-14 et L1224-2 du code du travail,

- Réformer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a condamné la Société Gabeti à 608 euros à titre de rappel de salaire et 60.8 au titre des congés payés afférents pour la période de septembre 2014 à septembre 2015

- Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Madame W... de sa demande de requalification de son contrat à temps plein

A titre subsidiaire :

- condamner la société DIMU à la prise en charge des rappels de salaire, congés payés afférents, complément d'indemnité de licenciement et intérêts de droit et au remboursement à la Société GABETI des sommes qu'elle aurait acquittées,

- Infirmer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a condamné la Société Gabeti à 300 euros au titre de l'article 700

- Débouter Madame W... de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamner au versement de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- A titre subsidiaire, si une condamnation au titre de l'article 700 était prononcée au bénéfice de Madame W..., la mettre à la charge de la Société DIMU

- Condamner la société DIMU au versement de la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions régulièrement communiquées,, auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé,la société DIMU demande à la cour :

- Retenant que le jugement du conseil des prud'hommes de SAINT ETIENNE du 19 décembre 2017 est aujourd'hui définitif dans ses dispositions relatives à l'action dirigée par la société GABETI à l'encontre de la société DIMU, qu'il a rejetée,

- Retenant que l'assignation en garantie délivrée le 12 juin 2018 à la société DIMU est irrecevable en application de l'autorité de la chise jugée et des dispositions de l'article 1355 du code civil,

- Condamner la société GABETI au paiement de la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 12 février 2019.

MOTIVATION.

Sur la mise en cause de la société DIMU.

La société DIMU soutient d'abord que l'appel en cause par la société GABETI ayant été délivré le 12 juin 2018, après que le jugement du conseil des prud'hommes du 19 décembre 2017 soit devenu définitif concernant la relation procédurale entre elle et Madame W..., il est la concernant irrecevable.

La société GABETI soutient d'une part que l'appel provoqué est recevable, même hors délai pour interjeter appel à titre principal, dès lors que l'appel principal est recevable.

Sur la mise en cause, elle soutient que si l'article L 1224-2 du code du travail a pour objet de rendre le nouvel employeur débiteur des obligations nées avant le transfert du contrat de travail, pour autant, ces dispositions n'ont pas pour effet de décharger l'ancien employeur de ses dettes puisque celui-ci doit rembourser au nouvel employeur les sommes devant être acquittées par lui.

Conformément à l'article 550 du code de procédure civile, dans sa version applicable au litige, l'appel provoqué peut être formé en tout état de cause, alors même que celui qui l'interjetterait serait forclos pour agir à titre principal. Dans ce dernier cas, il ne sera toutefois reçu si l'appelant principal n'est pas lui-même recevable.

Il résulte de ces dispositions que alors que Mme W... a relevé appel de la décision du 19 décembre 2017 dans le délai de la loi et que son appel est recevable, l'appel provoqué formalisé par la société GABETI à l'encontre de la société DIMU, selon assignation du 12 juin 2018 apparaît recevable.

Sur la mise en cause de la société DIMU, il résulte de l'article L 1224-1 du code du travail que lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise.

Conformément à l'article L 1224-2 du même code, le nouvel employeur est tenu, à l'égard des salariés dont les contrats de travail subsistent, aux obligations qui incombaient à l'ancien employeur à la date de la modification, sauf dans les cas suivants:

1° Procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire,

2° Substitution d'employeurs intervenue sans qu'il y ait eu de convention entre ceux-ci.

Le premier employeur rembourse les sommes acquittées par le nouvel employeur, dues à la date de la modification, sauf s'il a été tenu compte de la charge résultant de ces obligations dans la convention intervenue entre eux.

Il résulte de ce texte que le salarié dont le contrat de travail s'est poursuivi dans le cadre du transfert d'une entité et qui entend obtenir l'exécution des obligations nées à la date du transfert, peut exercer son action aussi bien à l'encontre de l'ancien employeur que du nouveau.

Dès lors, si l'obligation à paiement d'une indemnité de requalification d'un contrat à durée déterminée naît dès la conclusion de ce contrat en méconnaissance des exigences légales et pèse en conséquence sur l'employeur l'ayant conclu, cette circonstance ne fait pas obstacle à l'application de l'article L 1224-2 et le salarié peut donc demander au nouvel employeur le paiement de cette indemnité au titre du contrat conclu avec le premier employeur, sauf le recours du nouvel employeur contre celui-ci.

En l'espèce, si l'acte de vente du fonds de commerce intervenu entre la société DIMU et la société GABETI a prévu le transfert des contrats de travail des deux salariées employées du fonds de commerce, le vendeur a par ailleurs déclaré avoir respecté l'ensemble des dispositions légales relatives audroitdu travail et être à jour de toutes les dettes salariales à l'égard deson personnel.

Dès lors, dans le cadre de la cession intervenue et en application des dispositions susvisées, il apparaît que, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, la mise en cause de la société DIMU est recevable.

Sur la demande de requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein.

Mme W... soutient qu'elle ne pouvait prévoir son emploi du temps et était tenue à la disposition permanente de son employeur, ses horaires et journées de travail variant d'une semaine à l'autre.

Elle rappelle que si elle avait été embauchée à temps complet par la société DIMU, sans contrat écrit, elle est passée à mi-temps thérapeutique le 2 février 2009 qui a été ensuite prolongé du fait de son placement en invalidité puis à partir du 1er septembre 2014 jusqu'à la rupture du contrat de travail, effectuait 80,17 heures par mois, cependant, jusqu'au 1er octobre 2015, date de sa reprise par la société GABETI, aucun avenant contractuel ne lui a été soumis.

La société GABETI fait valoir que si le contrat est présumé conclu à temps complet en l'absence d'écrit, l'employeur peut renverser cette présomption en établissant d'une part que le salarié avait une durée de travail stable et d'autre part des horaires réguliers.

Elle ajoute que Mme W... étant titulaire d'une pension d'invalidité depuis le 1er février 2010, réduisant des 2/3 sa capacité de travail ou de gain, elle s'est trouvée à mi-temps depuis cette date, ce qu'elle indique elle-même dans un courrier du 15 octobre 2015.

Elle précise également qu'elle a communiqué à Mme W... un contrat de travail à temps partiel, dès qu'elle a appris, lors de l'entretien du 7 octobre 2015 que la salariée n'aurait pas eu de contrat de travail écrit.

En tout état de cause, dès lors qu'elle utilise le titre emploi service entreprises, elle est dispensée del'établissement d'un contrat écrit et de l'inscription des mentions obligatoires pour les contrats à temps partiel, conformément au 5° de l'article L 1273-5 du code du travail.

Enfin, elle soutient que Mme W... ne vient pas établir que ses horaires auraient été irréguliers.

Conformément à l'article L 3123-14 du code du travail, alors applicable au litige, le contrat de travail à temps partiel est un contrat écrit mentionnant notamment les horaires de travail pour chaque journée travaillées.

L'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet et il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve d'une part de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur.

En l'espèce, il est constant que Mme W... qui travaillait à plein temps depuis son embauche par la société DIMU est ensuite passée à mi-temps sans avenant à son contrat de travail du 16 avril 1992.

Il résulte cependant des éléments de la cause et notamment du courrier adressé par Mme W... à la société GABETI le 15 octobre 2015 que celle-ci indique être à mi-temps depuis le 2 février 2010, date à laquelle son invalidité première catégorie a été reconnue.

En effet, cette situation entraînait nécessairement une réduction des 2/3 de sa capacité de travail.

Il est également établi, au regard de l'échange de courriers entre les parties, que Mme W... effectuait son travail à temps partiel les mardi, mercredi et samedi de 10 h à 12 h et de 14 h à 18 h, soit 18 heures hebdomadaires payées 18h30 et ce depuis septembre 2014, étant précisé qu'à sa demande, sa durée mensuelle est passée de 84,5 heures à 80,17 heures et son horaire hebdomadaire de 19heures 30 à 18heures 30 rémunérées pour 18 heures de travail effectif.

Ce temps de travail et cette répartition des horaires sur la semaine résultent du courrier du 16 octobre 2015 adressé par la société GABETI à Mme W... et que celle-ci n'a pas contesté, la contestation formée par elle portant alors sur la modification des tâches incompatibles avec son statut de travailleur handicapé.

Il s'en déduit que, nonobstant l'absence d'écrit, l'employeur vient démontrer d'une part la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part que la salariée n'était pas placée dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur.

Il convient dès lors de débouter Mme W... de sa demande de requalification de son contrat de travail en temps partiel en contrat de travail à temps plein et des demandes financières subséquentes en résultant.

Le jugement qui a ainsi accordé à Mme W... la somme de 608 € outre congés payés afférents, en considérant qu'elle était passée de 84,50h à 80,17h en septembre 2014, sans justificatif ni écrit, doit être réformé.

Sur la rupture du contrat de travail.

Mme W... considère que la société GABETI en ne respectant pas les préconisations du médecin du travail a manqué à son obligation de sécurité la concernant, ce qui justifie en premier lieu sa condamnation à dommages et intérêts à hauteur de 10 523,19 €, au besoin solidairement à l'égard de la société DIMU.

Elle soutient également que ce manquement a pour conséquence de rendre le licenciement intervenu sans cause réelle et sérieuse, que la proposition de reclassement formulée était inacceptable et demande en conséquence la condamnation de la société GABETI au paiement de la somme de 33 228 € à titre de dommages et intérêts outre 2770,53 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis.

La société GABETI rappelle que Mme W... n'a travaillé que trois jours non consécutifs en octobre 2015 et qu'il n'était pas dans son intention de ne pas respecter les préconisations du médecin du travail puisqu'elle avait pris rendez-vous avec lui pour qu'il examine son aptitude au poste de travail de vendeuse-aide comptable.

Elle soutient donc qu'elle n'a pas tenté de modifier le contrat de travail de Mme W... et qu'elle n'a eu connaissance des fiches de la médecine du travail des 12 avril 2006 et 30 août 2012 que le 2 décembre 2015.

Enfin, elle a eu connaissance des restrictions d'aptitude à la communication de la fiche médicale de recommandation du 1er février 2016.

En l'espèce, il apparaît que Mme W... qui affirme, sans être contredite que, dans le cadre de son temps partiel, elle effectuait seulement 30 % de vente et 70 % de tâches comptables ou administratives, affirme, sans apporter le moindre élément de ce chef que la société GABETI voulait lui imposer de faire uniquement de la vente et ce en contradiction avec les prescriptions du médecin du travail intervenues en 2006 et 2012.

Or, le courrier du 16 octobre 2015 révèle que la société GABETI, en rappelant l'évolution du temps de travail de Mme W... en fonction du mi-temps thérapeutique puis de l'aménagement de son poste de travail, à l'issue de ce mi-temps, n'avait aucunement l'intention de ne pas respecter les prescriptions du médecin du travail et indiquait du reste à Mme W..., le 27 octobre 2015, avoir pris rendez-vous le 3 novembre 2015 avec le médecin du travail pour que ce dernier se prononce sur son aptitude à son poste de vendeuse aide-comptable, la salariée étant en effet en arrêt depuis le 14 octobre 2015, nécessité qu'elle réitérait dans un courrier du 20 novembre 2015.

Par ailleurs, le courrier de la société GABETI du 10 janvier 2016, révèle qu'elle a pris connaissance des éléments médicaux antérieurs par Mme W... elle-même, ainsi que du fait qu'elle ne pouvait être affectée de façon prolongée à la vente.

C'est donc de bonne foi que la société GABETI a pu vouloir en octobre 2015 demander à Mme W... de passer plus de temps à la vente , l'application de l'article L 1224-1 du code du travail, ne faisant pas en effet obstacle aux pouvoirs du nouvel employeur d'organiser ses services et d'affecter le personnel intégré au sein de l'entreprise.

Ainsi, les recommandations du médecin du travail, antérieures à la reprise du contrat, dont il n'est pas établi que le nouvel employeur ait eu connaissance avant les échanges de courrier, ne portaient aucune restriction concernant les fonctions de vendeuse, mais prescrivaient que Mme W... puisse s'asseoir de temps en temps.

Dès lors, Mme W... qui ne reproche aucun manquement précis de ce chef à la société DIMU et ne demande pas du reste sa condamnation solidaire dans le dispositif de ses conclusions pour manquement à l'obligation de sécurité, ne vient pas plus démontrer un quelconque manquement de la société GABETI à cette obligation et doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

Subsidiairement, Mme W... soutient que la proposition qui lui a été faite par la société GABETI dans le cadre du reclassement n'était pas acceptable, dans la mesure où elle impliquait une modification de ses fonctions, de son temps de travail et de sa rémunération et était contraire à l'article L 3123-6 du code du travail, prévoyant que l'horaire de travail du salarié à temps partiel ne peut comporter, au cours d'une même journée, plus d'une interruption d'activité ou une interruption supérieure à 2 heures.

Or, en l'espèce, il existait dans la proposition de reclassement une coupure supérieure à 2 heures, étant de 3 heures ( mardi et mercredi de 10h à 12 h et de 15h à 18 h).

Elle invoque également les dispositions de la convention collective.

La société GABETI soutient que, pour les commerces fermant à l'occasion de la pause déjeuner, comme c'est le cas la concernant, la coupure peut être de trois heures maximum.

En l'espèce, la société GABETI a fait à Mme W... la proposition de reclassement suivante selon courrier du 2 mars 2016:

'Suite à votre arrêt de travail pour maladie, vous avez passé deux visites médicales espacées de 15 jours les 15 et 29 février dernier.

Le 18 février dernier, le médecin du travail s'est rendu dans l'entreprise pour étudier votre poste de travail.

L'avis émis à l'issue de la 2ème visite médicale précise : « Inaptitude définitive confirmée au poste de vendeuse. Pourrait occuper un poste administratif; type aide-comptable ou autre, à temps partiel, avec les aménagements déjà mis en place par l'AGEFIPIH en 2006. »

Notre entreprise est de petite taille (2 salariés à temps partiel occupés à des emplois de vente), j'en assure moi-même la direction dont le travail administratif.

Elle n'appartient à aucun groupe de sociétés.

Le précédent avis médical vous concernant, daté du 7 avril 2015, concluait à votre aptitude avec aménagement du poste : doit pouvoir s'asseoir de temps en temps.

Jusqu'à présent, vous exerciez simultanément les activités de vente et administrative Votre inaptitude définitive confirmée au poste de vendeuse nous rend impossible votre affectation à la vente ce qui - compte tenu de notre petite taille et de la nature de notre activité qui implique la présence d'une personne en capacité d'assurer la vente durant toute la durée d'ouverture du magasin - est extrêmement contraignant.

Nous vous proposons, compte tenu de vos contraintes médicales, un poste à temps partiel d'assistante administrative à hauteur de 10 heures hebdomadaires réparties à concurrence de 5 heures par jour.

Vos horaires seraient les suivants : Mardi 10H121H 15H18H

Mercredi 10H12H 15H18H

Votre classement serait maintenu au niveau 4 et votre rémunération mensuelle brute de base serait de 434,28 € bruts mensuels pour 43,33 heures mensuelles moyennes auxquelles s'ajoutent les avantages conventionnels ou d'usage au prorata du temps de travail.

Vous voudrez bien, le cas échéant, nous faire part de votre accord sur cette proposition avant le 10 mars prochain, dernier délai.

Nous vous adresserons alors une proposition de contrat de travail à temps partiel.

L'absence de réponse adressée avant le 10 mars dernier sera considérée comme un refus de votre part.

En cas de refus de votre part, nous n'aurons pas d'autre possibilité de reclassement à vous proposer, dès lors que l'ensemble des postes dans notre entreprise de petite taille comporte nécessairement de la vente et de la manutention et que la durée de travail exclusivement administrative ne peut excéder 10 heures hebdomadaires.

Nous serons donc contraints d'envisager votre licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.'

En application des dispositions de l'article L 1226-2 du code du travail, il appartient à l'employeur, après que le salarié a été déclaré inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, de proposer à ce dernier un autre emploi approprié à ses capacités, en prenant en compte les conclusions du médecin du travail et les indications formulées, et en proposant un emploi aussi comparable que possible à celui précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagements du temps de travail.

Les recherches aux fins de reclassement doivent être sérieuses, loyales et personnalisées, et s'effectuer au sein de l'entreprise mais aussi du groupe auquel elle appartient parmi les entreprises entre lesquelles une permutation en tout ou partie du personnel est possible.

Il apparaît que la proposition de reclassement faite à Mme W... était loyale et sérieuse, eu égard à la taille de l'entreprise, à la nécessité de proposer un emploi conforme aux recommandations du médecin du travail, ayant déclaré Mme W... inapte à l'emploi de vendeuse et eu égard à la nécessité d'avoir une personne assurant la vente pendant toute la durée d'ouverture du magasin.

Par ailleurs, cette proposition n'était pas contraire aux dispositions conventionnelles, l'article 3.2 de la convention collective applicable prévoyant en effet que :

' Dans le cadre de ces contrats (à temps partiel), la répartition quotidienne des horaires sera déterminée selon d'une des deux modalités suivantes :

- soit la journée comporte une seule séquence continue de travail et, dans ce cas, sa durée ne peut être inférieure à 3 heures et demie;

- soit la journée de travail comporte deux séquences de travail séparées par une coupure et, dans ce cas, la durée de travail ne peut être inférieure à 6 heures. La durée de la coupure est fixée à 1 heure maximum, à l'exception des commerces fermant à l'occasion de la pause déjeuner dont la coupure peut être de 3 heures maximum'.

En l'espèce, il n'est pas contesté que la boutique fermait à l'heure de la pause déjeuner, de sorte que l'interruption de 3 heures entre les deux séquences de travail telle que proposée à Mme W... dans le cadre de son reclassement n'était pas contraire aux dispositions conventionnelles.

Dans ces conditions, l'employeur ayant rempli loyalement et sérieusement son obligation de reclassement, le licenciement intervenu, suite au refus de la salariée de la proposition de reclassement, repose sur une cause réelle et sérieuse.

Il convient en conséquence, par confirmation de la décision déférée, de débouter Mme W... de sa demande de dommages et intérêts ainsi que de sa demande au titre des indemnités de rupture.

Sur les demandes accessoires

Mme W... qui succombe dans son appel doit être déboutée de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et condamnée de ce chef au paiement à la société GABETI de la somme de 1000 €.

Par ailleurs, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la société GABETI ses frais irrépétibles exposés dans le cadre de l'appel provoqué à l'égard de la société DIMU.

Il convient enfin de condamner Mme W... au paiement des frais de l'appel principal, ceux de l'appel provoqué devant être mis à la charge de la société DIMU.

PAR CES MOTIFS.

La Cour, statuant par décision publique, contradictoire, rendue en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

REFORME la décision déférée en ce qu'elle a déclaré la mise en cause de la société DIMU par la société GABETI irrecevable,

Statuant à nouveau,

DIT la mise en cause de la société DIMU par la société GABETI recevable,

Y ajoutant,

DIT l'appel provoqué formé par la société GABETI à l'encontre de la société DIMU recevable,

CONFIRME la décision déférée pour le surplus de ses dispositions sauf en ce qu'elle a alloué à Mme D... W... un rappel de salaire de 680 € outre congés payés afférents,

Statuant à nouveau du chef réformé,

DEBOUTE Mme D... W... de sa demande de rappel de salaire,

Y ajoutant,

DEBOUTE Mme D... W... de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

LA CONDAMNE de ce chef à payer à la société GABETI la somme de 1000 €,

LA CONDAMNE aux dépens d'appel,

DEBOUTE la société GABETI de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de la société DIMU.

LAISSE tant à la société GABETI qu'à la société DIMU les dépens de l'appel provoqué.

La Greffière La Présidente

Elsa SANCHEZ Elizabeth POLLE-SENANEUCH


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 18/00355
Date de la décision : 16/01/2020

Références :

Cour d'appel de Lyon SC, arrêt n°18/00355 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-01-16;18.00355 ?
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