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18/12/2019 | FRANCE | N°17/05086

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 18 décembre 2019, 17/05086


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







N° RG 17/05086 - N° Portalis DBVX-V-B7B-LEJB





SA PAGES JAUNES



C/

[J]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 29 Juin 2017

RG : F 15/04444







COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 18 DECEMBRE 2019





APPELANTE :



SA PAGES JAUNES

[Adresse 2]

[Localité 4]





Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat postulant au barreau de LYON,

Me MARIE-ASTRID BERTIN, avocat plaidant au barreau de PARIS

Me Hortense GEBEL de la SCP FROMONT BRIENS, avocat plaidant au barreau de PARIS,





INTIMÉ :


...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

N° RG 17/05086 - N° Portalis DBVX-V-B7B-LEJB

SA PAGES JAUNES

C/

[J]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 29 Juin 2017

RG : F 15/04444

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 18 DECEMBRE 2019

APPELANTE :

SA PAGES JAUNES

[Adresse 2]

[Localité 4]

Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat postulant au barreau de LYON,

Me MARIE-ASTRID BERTIN, avocat plaidant au barreau de PARIS

Me Hortense GEBEL de la SCP FROMONT BRIENS, avocat plaidant au barreau de PARIS,

INTIMÉ :

[M] [J]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat postulant au barreau de LYON

Me Murielle MAHUSSIER de la SCP REVEL MAHUSSIER & ASSOCIES, avocat plaidant au barreau de LYON substituée par Me Alexis PERRIN, avocat au barreau de LYON,

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 01 Octobre 2019

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Evelyne ALLAIS, Conseiller

Nathalie ROCCI, Conseiller

Assistés pendant les débats de Manon FADHLAOUI, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR DU DÉLIBÉRÉ :

Joëlle DOAT, Présidente

Evelyne ALLAIS, Conseiller

Nathalie ROCCI, Conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 18 Décembre 2019, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Joëlle DOAT, Présidente, et par Manon FADHLAOUI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

Monsieur [M] [J] a été embauché le 2 avril 1991 dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée par la société PAGES JAUNES , en qualité de Vendeur Représentant Placier (VRP).

Au dernier état de la relation de travail, soumise à la convention collective nationale des VRP, Monsieur [J] exerçait les fonctions de conseiller commercial spécialiste, statut VRP.

Suite à un projet de réorganisation de la société PAGES JAUNES, un plan de sauvegarde de l'emploi a été adopté par accord collectif signé le 20 novembre 2013 puis validé par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France le 2 janvier 2014.

C'est dans ce cadre que par lettre recommandée du 7 janvier 2014, la société PAGES JAUNES a proposé à Monsieur [J] une modification de son contrat de travail pour motif économique.

Suite à son refus le 27 janvier 2014 de la modification de contrat de travail proposée, Monsieur [J] a été licencié pour motif économique le 12 mai 2014.

Par arrêt du 22 octobre 2014, statuant sur le recours d'un autre salarié, la cour administrative d'appel de VERSAILLES a annulé cette décision de validation, au motif que l'accord du 20 novembre 2013 ne revêtait pas le caractère majoritaire requis par les dispositions de l'article L. 1233-24-1 du code du travail. Le 22 juillet 2015, le Conseil d'Etat a rejeté les pourvois formés à l'encontre de cet arrêt.

Monsieur [J] a saisi le conseil de prud'hommes de LYON le 30 novembre 2015. Il sollicitait en dernier lieu de voir condamner la société PAGES JAUNES à lui payer des dommages et intérêts à titre principal sur le fondement de l'article L.1235-16 du code du travail, à titre subsidiaire pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi qu'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, avec exécution provisoire de la décision à intervenir.

Par jugement en date du 29 juin 2017, le conseil de prud'hommes, dans sa formation paritaire, a:

- déclaré recevable l'action introduite par Monsieur [J] le 30 novembre 2015, la prescription n'étant pas acquise,

- dit qu'en raison de l'annulation de la décision de validation de la DIRECCTE du 2 janvier 2014, Monsieur [J] avait droit à une indemnité de 34.362,00 euros,

- condamné la société PAGES JAUNES à payer à Monsieur [J] la somme de 1.600,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- rappelé que les intérêts couraient de plein droit au taux légal à compter de la mise en demeure de la partie défenderesse devant le bureau de conciliation en ce qui concerne les créances de nature salariale et à compter du prononcé de la présente décision pour les autres sommes allouées,

- dit que les frais d'huissier de justice nécessaires, le cas échéant, à l'exécution du jugement, seraient à la charge de la société PAGES JAUNES ,

- condamné la société PAGES JAUNES aux dépens.

Par déclaration en date du 10 juillet 2017, la société PAGES JAUNES a interjeté appel de la décision.

Dans ses conclusions, la société PAGES JAUNES demande à la Cour de:

à titre principal,

- déclarer irrecevables les demandes de Monsieur [J] sur le fondement de l'article L.1235-16 du code du travail comme étant prescrites en application de l'article L.1235-7 du code du travail,

- débouter Monsieur [J] de ses autres demandes,

à titre subsidiaire,

- confirmer le jugement quant au montant de l'indemnité allouée en application de l'article L.1235-16 du code du travail,

- débouter Monsieur [J] de ses autres demandes,

- condamner Monsieur [J] aux dépens, distraits au profit de Maître LAFFLY, Avocat, sur son affirmation de droit.

Dans ses conclusions, Monsieur [J] demande à la Cour de:

à titre principal,

- confirmer le jugement, sauf quant au montant des dommages et intérêts alloués au titre de l'article L.1235-16 du code du travail,

- condamner la société PAGES JAUNES à lui verser la somme de 120.000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement dudit article,

à titre subsidiaire,

- dire que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse,

- condamner la société PAGES JAUNES à lui verser les sommes suivantes:

120.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,

2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de la somme déjà allouée par le jugement,

- condamner la société PAGES JAUNES aux dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 12 septembre 2019.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties aux conclusions écrites susvisées.

SUR CE:

sur la demande indemnitaire en application de l'article L.1235-16 du code du travail:

Aux termes de l'article L.1235-16 du code du travail dans sa rédaction applicable, l'annulation de la décision de validation mentionnée à l'article L. 1233-57-2 ou d'homologation mentionnée à l'article L. 1233-57-3 pour un motif autre que celui mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 1235-10 donne lieu, sous réserve de l'accord des parties, à la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

A défaut, le salarié a droit à une indemnité à la charge de l'employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice de l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9.

L'article L.1235-7 du code du travail, dans sa rédaction applicable, dispose que toute contestation portant sur la régularité ou la validité du licenciement (pour motif économique) se prescrit par douze mois à compter de la dernière réunion du comité d'entreprise ou, dans le cadre de l'exercice par le salarié de son droit individuel à contester la régularité ou la validité du licenciement, à compter de la notification de celui-ci. Ce délai n'est opposable au salarié que s'il en a été fait mention dans la lettre de licenciement.

Le délai de prescription de douze mois prévu par l'article L. 1235-7 du code du travail, dans sa version issue de la loi n°2013-504 du 14 juin 2013 et applicable du 1er juillet 2013 au 24 septembre 2017, qui concerne les contestations, de la compétence du juge judiciaire, fondées sur une irrégularité de la procédure relative au plan de sauvegarde de l'emploi ou sur la nullité de la procédure de licenciement en raison de l'absence ou de l'insuffisance d'un tel plan, telles les contestations fondées sur les articles L. 1235-11 et L. 1235-16 du code du travail, court à compter de la notification du licenciement.

Monsieur [J] a été informé dans la lettre de licenciement du délai d'action en contestation de la régularité ou de la validité du licenciement fixé par l'article L.1235-7 du code du travail. Il a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande de dommages et intérêts en application de l'article L.1235-16 du code du travail le 30 novembre 2015, soit plus d'un an après son licenciement pour motif économique.

Aussi, c'est à tort que les premiers juges ont déclaré Monsieur [J] recevable en son action fondée sur l'article L.1235-16 du code du travail et condamné la société PAGES JAUNES à lui payer des dommages et intérêts en application de cet article. Le jugement sera infirmé sur ce point.

sur la demande indemnitaire subsidiaire pour licenciement sans cause réelle et sérieuse:

quant au motif économique:

Aux termes de l'article L.1233-2 du code du travail, tout licenciement pour motif économique doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

L'article L.1233-3 du code du travail précise que constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel de son contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.

Une réorganisation de l'entreprise, lorsqu'elle n'est pas liée à des difficultés économiques ou des mutations technologiques, peut constituer une cause économique de licenciement à condition qu'elle soit effectuée pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou pour prévenir des difficultés économiques liées à des évolutions technologiques et leurs conséquences sur l'emploi.

Lorsqu' une entreprise fait partie d'un groupe, si la réalité de la suppression ou transformation d'emploi ou de la modification substantielle du contrat est examinée au niveau de l'entreprise, l'élément causal doit être apprécié au niveau du groupe, dans la limite du secteur d'activité auquel appartient l'entreprise.

Il incombe à l'employeur d'établir le motif économique invoqué, lequel s'apprécie à la date de la rupture du contrat de travail.

Il ressort de la lettre de licenciement que le motif économique de celui-ci est le refus par Monsieur [J] d'une modification de son contrat de travail consécutive à une réorganisation de la société effectuée pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise.

Monsieur [J] fait valoir que l'employeur n'était pas contraint de se réorganiser pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise, aucune menace avérée ou à venir ne mettant en péril celle-ci à la date de la rupture du contrat de travail, que l'employeur ne produit pas d'élément objectif et vérifiable de nature à établir cette menace, qu'en outre, l'employeur ne prouve pas que cette menace existait au niveau du groupe auquel la société appartient, que la proposition de modification du contrat de travail faite par l'employeur était sans lien avec le motif économique allégué, notamment en ce qui concerne l'abandon du statut de VRP au profit du statut cadre et l'insertion d'une clause de mobilité, que les conditions de calcul de sa rémunération variable étaient trop imprécises pour qu'il accepte la proposition de modification considérée.

La société PAGES JAUNES répond que compte tenu des évolutions du marché, elle était obligée de se réorganiser pour sauvegarder sa compétitivité, que la réorganisation envisagée n'avait pas pour objet de supprimer des emplois mais de les adapter ou en créer de nouveaux, tout en améliorant les conditions de travail de ses collaborateurs, que le salarié a refusé la proposition de modification de son contrat de travail, bien que cette proposition lui octroyait un statut ainsi que des conditions de travail plus intéressantes.

La société PAGES JAUNES est un acteur de la publicité et de l'information locale sur internet, mobile et imprimé. Elle opère également sur les services de renseignements par téléphone et SMS, des petites annonces en ligne et la création de sites internet.

Elle appartient au groupe SOLOCAL, qui a pour secteur d'activité principal le marché de la publicité et dont les autres filiales (une douzaine environ) interviennent sur des des activités complémentaires au secteur d'activité principal de la publicité.

Son chiffre d'affaires représente plus de 90 % du chiffre d'affaires du groupe.

Il résulte des pièces versés aux débats, notamment des comptes de la société et du groupe:

-que le chiffre d'affaires de la société PAGES JAUNES a baissé de 12 % de 2010 à 2013 (934.920 K€ au lieu de 1.052.520 K€),

-que pendant la même période, le chiffre d'affaires du groupe SOLOCAL a chuté de 11 % (999.000 K€ en 2013 au lieu de 1.125.000 K€ en 2010), et la Marge Brute Opérationnelle (MBO) du groupe de 18 % ( 424.000 K€ en 2013 au lieu de 518.000 Keuros en 2010 ), alors que le groupe avait un niveau d'endettement très important en 2013 (1.600 millions d'euros).

Le projet d'évolution du modèle et de l'organisation de la société PAGES JAUNES (livre II) présenté au comité d'entreprise en application de l'article L.2323-6 du code du travail explique cette baisse de résultats économiques par le modèle actuel de l'entreprise qui est déconnecté des besoins du marché et menace la pérennité de l'entreprise pour les raisons suivantes:

l'organisation généraliste de l'entreprise ne lui donne pas les moyens nécessaires pour répondre aux besoins du marché de la publicité,

le service client n'est plus adapté aux nouveaux besoins du marché dans un contexte où l'expérience est un élément de fidélisation,

les processus centralisés sont éloignés des exigences des annonceurs,

la performance opérationnelle et l'amélioration des conditions de travail sont limitées par le cadre contractuel et par des modalités de rémunération inappropriés,

les horaires de télé-ventes ne sont plus adaptés à la clientèle.

Le rapport de l'expert comptable nommé par le comité d'entreprise dans le cadre de la procédure d'information-consultation portant sur le projet de réorganisation de la société, présenté le 27 novembre 2013, mentionne certes que 'la rentabilité nette de l'entreprise reste attractive avec des niveaux de rentabilité largement supérieurs à ceux observés dans d'autres secteurs' (page 31). Néanmoins, il conclut, après une analyse exhaustive du marché de la publicité, et notamment de la dynamique concurrentielle auquel est soumis ce marché, que le groupe SOLOCAL 'est d'abord malade de lui-même, le marché n'intervant finalement que comme un catalyseur', fait état 'de sérieux handicaps inhérents à l'histoire du groupe, à la sous-performance de certains pans d'activité, au manque d'innovations et de propositions de valeurs nouvelles, à la situation financière ainsi qu'à des déficiences organisationnelles à tous les étages du groupe.' (page 138). Il souligne que le projet d'évolution 'digital 2015" répond à un constat d'évidence, dans les termes suivants 'le groupe n'est plus en phase avec son écosystème et se fait malmener..à périmètre constant, son avenir est fortement compromis si rien ne bouge à terme,.. la transformation du groupe pour une meilleur adéquation au marché est donc une condition qui s'impose-ne pas devenir Kodak, le monopoleur en faillite'(page 122)

Il ressort de ces analyses, étayées par des éléments chiffrés, qui ne sont contredits par aucune pièce du salarié, que la réorganisation de la société PAGES JAUNES était nécessaire pour sauvegarder la compétitivité du groupe SOLOCAL intervenant dans le même secteur d'activité qu'elle.

Le projet de réorganisation de la société PAGES JAUNES entraînait:

22 suppressions de postes intégralement compensées par des créations de poste de qualification équivalente,

70 créations de poste, soit 48 créations de postes nettes,

1.690 modifications contractuelles,

594 propositions de modifications de contrat sur la base du volontariat pour les postes de télévendeur actuellement en « optimisation ».

et consistait principalement en:

- une réorganisation des forces de ventes et des offres par secteur d'activité, au travers de 5 Business Units (BU) (Hôtel-Restauration, Services, etc..).

- un focus renforcé de l'organisation vers l'expérience et la satisfaction client,

- un modèle décentralisé avec un rééquilibrage des responsabilités, à savoir une responsabilisation des BU dans la stratégie de prospection et la gestion de leurs ressources ainsi qu'une autonomie accrue des acteurs terrain,

- la priorisation de la performance opérationnelle ainsi que la prise en compte du bien être et des conditions de travail, avec notamment le passage au statut cadre, favorisant l'optimisation du portefeuille client tant pour l'entreprise que pour les collaborateurs.

Aux termes de la proposition de modification du contrat de travail faite le 7 janvier 2014 à Monsieur [J], ce dernier

- poursuivait l'exercice de ses fonctions commerciales sous l'intitulé de poste 'conseiller communication digitale spécialiste » au sein de l'agence de [Localité 5], avec une clause de mobilité sur l'un quelconque des établissements de la société situé en France Métropolitaine,

- bénéficiait du statut de cadre, catégorie 3 niveau 2, selon les dispositions de la convention collective de la publicité,et non plus du statut de VRP,

- percevait une rémunération composée d'un salaire fixe mensuel de 2.970, 51 Euros et d'une rémunération variable représentant, à objectifs atteints, 60 % du salaire brut annuel fixe/1,10 (soit 21.387 euros outre les congés payés afférents),

- travaillait selon un forfait annuel de 210 jours.

Un ensemble d'informations étaient jointes à cette proposition, notamment la fiche générique de la fonction

prévue au nouveau contrat de travail (document d'information reprenant les principaux éléments du nouveau contrat de travail) ou encore le comparatif statut VRP / statut cadre.

Il ressort du projet de réorganisation de la société PAGES JAUNES que les modifications du contrat de travail portant sur le statut de l'emploi du salarié ainsi que sur la mobilité de celui-ci étaient justifiées par l'objectif de priorisation de la performance opérationnelle poursuivi par ce projet (projet d'évolution du modèle et de l'organisation de la société PAGES JAUNES, livre II, pages 230 et suivantes). En outre, les modifications du contrat de travail contestées par le salarié concernaient 243 conseillers commerciaux spécialistes sur le territoire métropolitain. Aussi, les seules allégations du salarié ne sont pas suffisantes pour démontrer que les modifications litigieuses n'étaient pas nécessaires pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise. Par ailleurs, aucune incertitude n'existait quant aux modalités de calcul de la rémunération variable, l'employeur ayant précisé en annexe 1 du contrat proposé les critères sur lesquels porteraient les objectifs et n'ayant aucune obligation de préciser les objectifs retenus pour le calcul de la rémunération variable dans le cadre de la proposition de contrat critiquée. Au surplus, les pièces versées aux débats par l'employeur démontrent que la rémunération globale proposée à Monsieur [J] à objectifs atteints était équivalente à celle qu'il percevait antérieurement et que le nouveau statut dont le salarié devait bénéficier était plus favorable que l'ancien.

Il résulte de ces éléments que la proposition de modification du contrat de travail de Monsieur [J] était consécutive à la réorganisation de la société pour sauvegarder la compétitivité du groupe et que l'employeur n'a pas manqué à son obligation de loyauté dans le cadre de cette proposition.

Le motif économique du licenciement de Monsieur [J] est donc établi.

quant à l'obligation de reclassement:

Le licenciement économique d'un salarié ne peut intervenir que si le reclassement de l'intéressé dans l'entreprise ou dans le groupe dont elle relève n'est pas possible ; il appartient à l'employeur, même lorsqu'un plan social a été établi, de rechercher s'il existe des possibilités de reclassement, prévues ou non dans le plan social, au sein du groupe et parmi les entreprises dont l'activité, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, et de proposer aux salariés dont le licenciement est envisagé des emplois disponibles de même catégorie ou, à défaut, de catégorie inférieure, avec leur accord clairement exprimé, fût-ce par voie de modification des contrats de travail, en assurant au besoin l'adaptation de ces salariés à une évolution de leur emploi; faute pour l'employeur d'avoir accompli ces obligations, un licenciement prononcé pour motif économique est dépourvu de cause réelle et sérieuse;

Monsieur [J] fait valoir que les offres de reclassement qui lui ont été faites par courriers des 20 février et 28 mars 2014 n'étaient pas précises, ne lui permettant pas de connaître les conditions dans lesquelles il pouvait prétendre à sa rémunération variable.

L'employeur a proposé à Monsieur [J] le poste de conseiller communication digitale spécialiste que le salarié avait refusé au titre de la modification de son contrat de travail ainsi que d'autres postes de conseiller communication digitale spécialiste et de conseiller communication digitale.

La rémunération variable des emplois proposés à Monsieur [J] dans le cadre du reclassement interne est définie de la même manière que dans le contrat de travail modifié, proposé au salarié le 7 janvier 2014, à savoir 60 % du salaire brut annuel fixe. La Cour a dit que les modalités de calcul de la rémunération variable étaient suffisamment précises pour la proposition de modification du contrat de travail du 7 janvier 2014.

Aussi, les propositions d'emploi faites à Monsieur [J] dans le cadre du reclassement interne étaient suffisamment précises pour les mêmes motifs que ceux retenus par la Cour quant à la proposition du 7 janvier 2014.

Monsieur [J] ne fait pas valoir d'autre moyen à l'encontre de l'obligation de reclassement, étant observé qu'il a bénéficié d'un congé de reclassement de 15 mois à compter du 30 mai 2014 dans le cadre du plan de sauvegarde de l'emploi et a bénéficié d'une formation financée par l'employeur pour l'aider dans le cadre d'un projet de création d'entreprise.

L'employeur a donc respecté son obligation de reclassement à l'égard de Monsieur [J].

Monsieur [J] ne démontrant ni l'absence de motif économique du licenciement, ni l'absence de respect de l'obligation de reclassement, il sera débouté de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Monsieur [J] , partie perdante, sera condamné aux dépens de première instance et d'appel.

Toutefois, l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société PAGES JAUNES.

PAR CES MOTIFS

statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement,

INFIRME le jugement en toutes ses dispositions;

STATUANT A NOUVEAU,

DECLARE irrecevable comme étant prescrite la demande de dommages et intérêts de Monsieur [J] fondée sur l'article L.1235-16 du code du travail;

DEBOUTE Monsieur [J] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement économique sans cause réelle et sérieuse;

DEBOUTE la société PAGES JAUNES de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

CONDAMNE Monsieur [J] aux dépens de première instance et d'appel.

DIT que les dépens d'appel pourront être recouvrés par Maître LAFFLY, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier La Présidente

Manon FADHLAOUIJoëlle DOAT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 17/05086
Date de la décision : 18/12/2019

Références :

Cour d'appel de Lyon SA, arrêt n°17/05086 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-12-18;17.05086 ?
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