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19/09/2019 | FRANCE | N°18/07762

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 19 septembre 2019, 18/07762


N° RG 18/07762

N° Portalis DBVX - V - B7C - MAPL









Décisions :



- du tribunal de grande nstance de Lyon (4ème chambre)

Au fond du 22 juin 2015



RG : 12/06929







- de la cour d'appel de Lyon (1ère chambre B) en date du 23 mai 2017



RG : 15/06275







- de la Cour de cassation (2ème chambre civile) en date du 13 septembre 2018



pourvoi n° D 17-22.427

arrêt n° 1127 F-D

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUP

LE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRET DU 19 Septembre 2019



statuant sur renvoi après cassation







APPELANT :



M. [X] [S]

né le [Date naissance 1] 1990 à [Localité 1] (RHONE...

N° RG 18/07762

N° Portalis DBVX - V - B7C - MAPL

Décisions :

- du tribunal de grande nstance de Lyon (4ème chambre)

Au fond du 22 juin 2015

RG : 12/06929

- de la cour d'appel de Lyon (1ère chambre B) en date du 23 mai 2017

RG : 15/06275

- de la Cour de cassation (2ème chambre civile) en date du 13 septembre 2018

pourvoi n° D 17-22.427

arrêt n° 1127 F-D

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 19 Septembre 2019

statuant sur renvoi après cassation

APPELANT :

M. [X] [S]

né le [Date naissance 1] 1990 à [Localité 1] (RHONE)

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON (toque : 938)

assisté de la SELARL CABINET CLAPOT - LETTAT, avocat au barreau de LYON (toque : 189)

INTIMEES :

SA ASSURANCES DU CREDIT MUTUEL IARD

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par la SCP SARDIN ET THELLYERE (ST AVOCATS), avocat au barreau de LYON (toque : 586)

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU RHONE

[Adresse 3]

[Localité 4]

non constituée

******

Date de clôture de l'instruction : 06 juin 2019

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 13 juin 2019

Date de mise à disposition : 19 septembre 2019

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Aude RACHOU, président

- Françoise CLEMENT, conseiller

- Vincent NICOLAS, conseiller

assistés pendant les débats de Marion COUSTAL, greffier

A l'audience, Françoise CLEMENT a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt réputé contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Aude RACHOU, président, et par Julie BOUVARD, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

Le 9 juin 2010, Boulevard de l'Hippodrome à Rillieux La Pape (69), M. [X] [S], âgé de 20 ans, qui pilotait une motocyclette, est entré en collision avec un véhicule assuré auprès de la société Assurances du crédit mutuel, conduit par Mme [Y].

Il a présenté selon certificat médical : «une fracture de la jambe gauche avec dévascularisation du pied qui a nécessité une amputation trans-tibiale, une fracture de la diaphyse fémorale gauche ouverte qui a nécessité, dans un premier temps, une traction puis mise en place d'un clou centromédullaire, une plaie articulaire du genou et une fracture de la rotule à gauche, ainsi que de nombreuses plaies sur le membre inférieur gauche».

Par ordonnance du 14 février 2012, le juge des référés a ordonné une expertise médicale confiée au Dr [H].

Aux termes de son rapport daté du 11 juillet 2012, l'expert a conclu de la manière suivante :

Déficit fonctionnel temporaire total correspondant aux périodes d'hospitalisation initiale :

Du 09/06/2010 au 26/11/2010,

Du 03/02/2011 au 05/05/2011,

Le 07/06/2011

Déficit fonctionnel temporaire partiel :

Du 27/11/2010 au 02/02/2011, estimé à 60 %,

Du 06/05/2011 au 06/06/2011, estimé à 50 %,

Du 08/06/2011 au 31/01/2012, estimé à 40 %.

La consolidation : au 01/02/2012.

Déficit fonctionnel permanent partiel selon le barème officiel annexé au décret 2003-314 du 04 Avril 2003 peut être estimé à 37 %.

Souffrances endurées : estimé à 5.5/7.

Préjudice esthétique :

Temporaire : jusqu'au 26/11/2010, peut être estimé à 5/7,

Définitif : peut être estimé à 3/7.

Durées des arrêts de travail : il s'agit d'un accident de travail, durée de l'arrêt de travail est médicalement justifié du 09/06/2010 au 01/02/2012.

Répercussion professionnelle :

M. [S] allègue l'impossibilité de passer les examens de police nationale initialement prévus avant son accident.

Un licenciement pour inaptitude dans l'entreprise Mc Donald le 08/03/2012,

Un emploi de bureau est possible prenant en compte une fatigabilité accrue du fait des séquelles post traumatiques.

Préjudice d'agrément : impossibilité de reprise des activités préalables (escalade, badminton, boxe française). L'évolution de l'adaptabilité à la prothèse et les progrès dans la conception de celle-ci peuvent faire espérer dans l'avenir à une reprise partielle d'une activité sportive, cette reprise de sport sera éventuellement possible à un niveau inférieur dans les activités de loisirs déclarées.

Nécessité en tierce personne durant les périodes de retour à domicile à raison :

de 3 heures par jour 7 jours sur 7 du 26/11/2010 au 03/02/2011,

de 2 heures par jour 7 jours sur 7 du 05/05/2011 au 07/06/2011,

à raison d'une heure par jour 7 jours sur 7 du 08/06/2011 au 01/02/2012.

Pas de tierce personne définitive.

Soins futurs et appareillages : nécessité de changement :

Prothèse définitive tous les 5 ans,

Prothèse de secours tous les 7 ans avec renouvellement sur prescription médicale en fonction de l'usage et de l'usure,

Emboîture avec renouvellement médical en fonction de l'usage et de l'usure et lors de modification du volume du moignon,

Manchon silicone, changement tous les 6 mois,

Le changement de composant prothétique devra suivre l'évolution technologique.

Deux cannes en cas d'indisponibilité de la prothèse,

Une prothèse de bain doit être renouvelée tous les 7 ans.

Préjudice sexuel : Le rapport sexuel est possible. La dysmorphie induite par l'amputation peut entraîner une gêne et une répercussion sur la pratique sexuelle.

Réserve dans les soins futurs : l'état actuel de la rotule de genou gauche peut nécessiter une intervention chirurgicale ultérieure imputable à l'accident initial.

Par acte des 23 et 25 mai 2012, la société Assurances du crédit mutuel a assigné M. [X] [S] et la Caisse primaire d'assurance maladie du Rhône devant le tribunal de grande instance de Lyon.

Elle a demandé au tribunal de limiter le droit à indemnisation de M. [S] de 50 % et de fixer les préjudices de M. [S] sur la base de ses offres.

M. [S], contestant toute faute de sa part, a demandé au tribunal l'indemnisation intégrale de son préjudice.

M. et Mme [Z] et [O] [S], parents de la victime, agissant en leur nom personnel et ès qualités de représentants légaux de leur fille mineure [Q], Mme [B] (sa fiancée), et M. [I], (ami et ancien colocataire), sont intervenus volontairement à l'instance aux fins d'indemnisation de leurs propres préjudices.

La Caisse primaire d'assurance maladie du Rhône n'a pas constitué avocat.

Par jugement du 22 juin 2015, le tribunal de grande instance de Lyon a :

- dit que le droit à indemnisation de M. [S] est réduit de 40 %,

- condamné la société Assurances du crédit mutuel à payer à M. [S] la somme de 20 371,33 euros, provisions payées déduites, outre intérêts légaux à compter du jugement, et celle de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société Assurances du crédit mutuel à payer à M. [S] une provision de 20 000 euros sur les frais futurs de prothèse,

- dit que M. [S] devra justifier des achats correspondant à cette provision auprès de la société Assurances du crédit mutuel pour régularisation des sommes restant dues ou du trop-perçu,

- dit que pour l'avenir, M. [S] pourra renouveler son matériel prothétique dans les conditions fixées indiquées ci-dessous, le délai de renouvellement courant à compter du premier achat :

- tous les cinq ans pour la prothèse définitive,

- tous les sept ans avec renouvellement sur prescription médicale en fonction de l'usage et de l'usure pour la prothèse de secours avec renouvellement médical en fonction de l'usage et de l'usure et lors de modifications du volume du moignon pour l'emboîture,

- tous les six mois pour le manchon silicone de composant prothétique pour suivre l'évolution technologique,

- tous les sept ans pour la prothèse de bain,

- tous les deux ans pour le revêtement pour sa prothèse principale,

- dit que la société Assurances du crédit mutuel devra rembourser à M. [S] 60 % du montant restant à sa charge sur ces frais de renouvellement après intervention des tiers payeurs et sur présentation de la facture,

- condamné la société Assurances du crédit mutuel à payer à M. [Z] [S] la somme de 4 709,47 euros, outre intérêts légaux à compter du jugement,

- condamné la société Assurances du crédit mutuel à payer à Mme [O] [S] la somme de 4 450,88 euros, outre intérêts légaux à compter du jugement,

- condamné la société Assurances du crédit mutuel à payer à [Q] [S] la somme 1 800 euros, outre intérêts légaux à compter du jugement,

- condamné la société Assurances du crédit mutuel à payer à Mme [B] la somme de 5 796,17 euros, outre intérêts légaux à compter du jugement,

- débouté M. [I],

- ordonné l'exécution provisoire de la décision,

- débouté les parties pour le surplus,

- condamné la société Assurances du crédit mutuel aux dépens, avec droit de recouvrement direct dans les conditions prévues à l'article 699 du code de procédure civile.

M. [X] [S], ses parents : Mme [O] [L] épouse [S] et M. [Z] [S], agissant à titre personnel et ès qualités de représentants légaux de leur fille mineure [Q] [S] née le [Date naissance 2] 2001, son épouse Mme [K] [B] et M. [M] [I] en sa qualité «d'ami et ancien colocataire», ont formé appel à l'encontre de ce jugement.

Par arrêt du 23 mai 2017, la première chambre civile B de la cour d'appel de Lyon a :

confirmé le jugement déféré en ce qu'il a :

- dit que le droit à indemnisation de M. [S] est réduit de 40 %, condamné la société Assurances du crédit mutuel à payer à M. [Z] [S] la somme de 4 709,47 euros, outre intérêts légaux à compter du jugement, à Mme [O] [S] la somme de 4 450,88 euros, outre intérêts légaux à compter du jugement, à [Q] [S] la somme de 1 800 euros , outre intérêts légaux à compter du jugement, à Mme [B] la somme de 5 796,17 euros, outre intérêts légaux à compter du jugement,

- débouté M. [I],

- condamné la société Assurances du crédit mutuel à payer à M. [X] [S] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Assurances du crédit mutuel aux dépens, avec droit de recouvrement direct dans les conditions prévues à l'article 699 du code de procédure civile,

le réformant partiellement sur le montant de l'indemnisation de M. [X] [S] et statuant de nouveau pour le surplus,

fixé le préjudice total de M. [X] [S] de la manière suivante :

préjudice total : 1 067 419,6 euros

part incombant à la société ACM (60 %) : 640 451,76 euros

part revenant à la Caisse primaire d'assurance maladie : 419 663,24 euros

part revenant à M. [X] [S] : 220 788,52 euros

condamné la société Assurances du crédit mutuel à payer à M. [X] [S] la somme de 220 788,52 euros, provisions payées restant à déduire, avec intérêts au taux légal, et celle de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour les frais non compris dans les dépens en cause d'appel,

débouté les parties pour le surplus, les réserves étant de droit,

condamné la société Assurances du crédit mutuel aux dépens d'appel, avec droit de recouvrement direct dans les conditions prévues à l'article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Laffly, avocat.

Par arrêt du 13 septembre 2018, la Cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt du 23 mai 2017, mais seulement en ce qu'il a fixé le préjudice total de M. [X] [S] à la somme de 1'067'419,60 euros, la part incombant à l'assureur (60 %) étant fixée à 640'451,76 euros, la part revenant à la caisse à 419'663,24 euros, la part revenant à Monsieur [X] [S] à 220'788,52 euros et condamné la société Assurances du crédit mutuel à payer à M. [X] [S] la somme de 220'788,52 euros, provisions payées restant à déduire, avec intérêts au taux légal, renvoyant la cause et les parties devant la cour d'appel de Lyon autrement composée.

La Cour de cassation a considéré que pour évaluer le préjudice corporel de M. [X] [S], l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que l'expert a retenu la nécessité d'une assistance par tierce personne temporaire durant les périodes de retour à domicile ; que cette aide a été apportée par la famille ; que M. [X] [S] n'a donc pas supporté de charges sociales pour l'emploi d'un salarié ; qu'il sera donc indemnisé sur la base d'un horaire de 12 euros, s'agissant d'une aide non médicalisée et non spécialisée ; qu'en statuant ainsi la cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime.

Selon déclaration du 7 novembre 2018, M. [X] [S] a saisi la cour de renvoi.

Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 13 novembre 2018 par M. [X] [S] qui conclut à la réformation du jugement du 22 juin 2015 et demande à la cour de condamner la société Assurances du crédit mutuel à lui payer les sommes de :

- préjudices patrimoniaux temporaires :

- à titre principal : 68'583,08 euros

- à titre subsidiaire : 22'669,19 euros, avec désignation d'un expert en architecture,

- préjudices patrimoniaux permanents :

- à titre principal : 2'095'376,20 euros, outre réserves concernant les évolutions techniques en matière de prothèses plus performantes,

- à titre subsidiaire : 1'959'862,56 euros, outre réserves concernant les évolutions techniques en matière de prothèses plus performantes,

- préjudices extra patrimoniaux temporaires : 60'645 euros,

- préjudices extra patrimoniaux permanents : 210'000 euros,

- préjudice permanent exceptionnel : 20'000 euros,

en tout état de cause,

dire et juger que l'arrêt à intervenir sera commun opposable à la Caisse primaire d'assurance-maladie du Rhône,

condamner la société Assurances du crédit mutuel aux dépens et à payer à M. [X] [S] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 29 mai 2019 par la société Assurances du crédit mutuel qui demande à la cour de :

à titre principal :

constater que la cassation de l'arrêt a porté sur la motivation adoptée par les juges d'appel concernant le poste tierce personne temporaire uniquement et qu'il n'y a pas lieu de rediscuter l'ensemble des préjudices et les règles de capitalisation,

constater que les parties s'étaient entendues pour rectifier amiablement l'erreur matérielle figurant dans l'arrêt du 23 mai 2017 relative aux postes de dépenses de santé future,

fixer le préjudice de Monsieur [X] [S], en tenant compte du droit à indemnisation limité à 60 %, de la manière suivante :

- préjudices patrimoniaux :

- préjudices patrimoniaux temporaires :

- dépenses de santé actuelle : 81,44 euros,

- frais divers (dont aménagements temporaires et tierce personne) :

9 298,68 euros,

- perte de gains professionnels actuels : néant,

- préjudices patrimoniaux permanents :

- dépenses de santé future (selon accord des parties) : 238'216,06 euros

- acquisition et aménagement de l'habitat : rejet

- perte de gains professionnels futurs : néant,

- incidence professionnelle : néant,

- tierce personne future : rejet,

- préjudices extra patrimoniaux :

- préjudices extra patrimoniaux temporaires :

- déficit fonctionnel temporaire : 5 491,20 euros,

- souffrances endurées : 21'000 euros,

- préjudice esthétique temporaire : 3 000 euros,

- préjudices extra patrimoniaux permanents :

- déficit fonctionnel permanent : néant

- préjudice d'agrément : 12'000 euros,

- préjudice esthétique : 4 800 euros,

- préjudice sexuel : 4 500 euros,

- préjudice permanent exceptionnel : rejet,

Total : 298'387,38 euros

provision à déduire : - 67'871 euros

exécution de l'arrêt du 23 mai 2017 : - 230'516,38 euros

solde indemnitaire : 0 euro,

à titre subsidiaire, si tous les postes de préjudice sont réexaminées comme le sollicite M. [S], fixer le préjudice de ce dernier en tenant compte du droit à indemnisation limité à 60 % de la manière suivante :

- préjudices patrimoniaux :

- préjudices patrimoniaux temporaires :

- dépenses de santé actuelle : 48,86 euros,

- frais divers: 2 160 euros,

- aménagement de l'habitat : rejet,

- assistance par tierce personne : 3 722,40 euros,

- perte de gains professionnels actuels : néant,

- préjudices patrimoniaux permanents :

- dépenses de santé future : rejet

- acquisition et aménagement de l'habitat : rejet

- perte de gains professionnels futurs : rejet,

- incidence professionnelle : néant,

- tierce personne future : rejet,

- préjudices extra patrimoniaux :

- préjudices extra patrimoniaux temporaires :

- déficit fonctionnel temporaire total : 3 484,80 euros,

- déficit fonctionnel temporaire partiel : 2 006,40 euros,

- souffrances endurées : 12'000 euros,

- préjudice esthétique temporaire : 900 euros,

- préjudices extra patrimoniaux permanents :

- déficit fonctionnel permanent : néant

- préjudice d'agrément : 4 500 euros,

- préjudice esthétique : 3 600 euros,

- préjudice sexuel : 4 500 euros,

- préjudice permanent exceptionnel : rejet,

total : 36'922,46 euros,

provision à déduire : - 67'871 euros,

exécution arrêt du 23 mai 2017 : - 230'516,05 euros,

solde indemnitaire : - 261'464,59 euros,

dire que si la cour devait faire droit à la demande de réserves quant à l'achat et au renouvellement de prothèses plus performantes, elle devra préciser qu'il s'agit de réserves sur le coût du changement de composants prothétiques pour suivre l'évolution technologique au moment du renouvellement de la prothèse dans les conditions et à la fréquence fixée par l'expert et que les éventuels besoins en tierce personne permanente et aménagements du domicile seront alors évalués ou réévalués selon le cas au moment du changement de composants en fonction du gain d'autonomie acquis,

débouter l'appelant du surplus de ses demandes,

condamner M. [X] [S] à rembourser à la société Assurances du crédit mutuel la somme de 261'464,59 euros,

en toute hypothèse,

condamner l'appelant aux dépens et à payer à la société Assurances du crédit mutuel la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu la signification par M. [S], de la déclaration d'appel et de ses conclusions à la Caisse primaire d'assurance maladie du Rhône selon acte d'huissier du 16 novembre 2018, justifiant que l'arrêt soit réputé contradictoire,

Vu l'ordonnance de clôture de la procédure en date du 6 juin 2019.

MOTIFS ET DECISION

L'article 624 du code de procédure civile dispose que 'La portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce. Elle s'étend également à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.'

Il résulte clairement de l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 13 septembre 2018 que seules ont été censurées les dispositions relatives à la prise en charge de l'assistance temporaire par une tierce personne ce qui entraîne nécessairement une nouvelle fixation du préjudice patrimonial global incluant ce chef de préjudice.

Il appartient dès lors à la cour de renvoi de ne juger que la demande relative à l'indemnisation du poste de préjudice d'assistance temporaire par une tierce personne, l'ensemble des chefs de jugement supplémentaires étant désormais définitivement jugés en l'absence de cassation.

M. [S] avait présenté devant le premier juge une demande tendant à l'organisation d'une expertise architecturale ou à titre subsidiaire à l'indemnisation des frais temporaires de logement adapté à hauteur de 45 913,89 euros et il avait indiqué réserver le poste frais de logement adapté en sollicitant une expertise en architecture ; l'assureur avait conclu au rejet de la demande y compris celle tendant à l'organisation d'une expertise architecturale.

Le tribunal de grande instance a rejeté la demande d'expertise, allouant à la victime une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice né de la dépense engagée au titre des frais temporaire de logement adapté.

En cause d'appel, M. [S] a repris sa demande tendant au paiement d'une somme de 45 913,89 euros en réparation des dépenses engagées au titre des frais de relogement temporaire et sa demande d'expertise en architecture à titre subsidiaire, indiquant formuler des réserves concernant les frais d'aménagement de son logement personnel.

Dans son arrêt du 23 mai 2017, la cour d'appel de Lyon a confirmé le jugement ayant alloué une somme de 5 000 euros à la victime au titre des frais de relogement temporaire.

Si le poste de préjudice concernant les frais de logement temporaire adapté a fait l'objet d'une décision devenue aujourd'hui définitive en l'absence de cassation sur ce point, aucune décision n'a encore été prise par le juge concernant le poste des frais de logement adapté concernant le logement personnel de M. [S] qui après avoir été logé chez ses parents, a engagé des dépenses concernant son propre domicile.

Aucune cassation n'a donc pu intervenir en la matière et il convient dès lors à la cour de renvoi, prenant en compte l'évolution du litige, de se prononcer de ce chef.

La Caisse primaire d'assurance maladie du Rhône est partie à la présente instance et il n'y a donc pas lieu de déclarer l'arrêt opposable à son égard.

I. Sur la demande au titre de l'assistance temporaire par une tierce personne :

M. [S] prétend que ce sont les membres de sa famille qui l'ont assisté lors de ses retours à domicile ; que l'indemnisation ne peut être cependant réduite à ce motif, la moyenne des taux horaires pratiqués par les sociétés d'aide à domicile s'élevant à 20,89 euros.

La société Assurances du crédit mutuel soutient quant à elle que le montant de 12 euros retenu par le premier juge doit être confirmé en ce qu'il est supérieur au SMIC horaire et au montant minimum prévu par la convention collective nationale des salariés du particulier employeur.

Sur ce :

L'expert a retenu la nécessité d'une assistance tierce personne temporaire au cours des périodes de retour à domicile, soit pour un total de 517 heures admis par les parties ; s'agissant d'une aide non médicalisée et non spécialisée, il convient d'indemniser M. [S] à hauteur d'une somme de 15 euros de l'heure, le montant de l'indemnité ne pouvant être réduit en cas d'assistance par un membre de la famille tel le cas en l'espèce, ni justifié à la production des dépenses réalisées.

Compte tenu de la limitation du droit à indemnisation de la victime, une somme de 4 653 euros doit être allouée à M. [S] de ce chef, réformant en cela la décision du premier juge.

II. Sur la demande au titre des frais de logement adapté :

M. [S] sollicite l'octroi d'une indemnité de 829 753,86 euros de ce chef, correspondant pour 315 000 euros aux frais d'acquisition de sa maison d'habitation et pour 514 753,86 euros aux coût des travaux d'aménagement entrepris ; il indique qu'en vertu du principe tendant à la réparation intégrale du préjudice de la victime, ce poste de préjudice peut inclure le coût de l'acquisition d'un nouveau logement adapté susceptible d'être adapté au handicap de cette dernière ; qu'il a ainsi, après avoir d'abord dû séjourner au domicile de ses parents, fait l'acquisition d'une maison le 4 février 2016 qu'il a ensuite adaptée à son handicap pour éviter de se mettre en danger, notamment lorsqu'il quitte sa prothèse en raison d'irritations et douleurs de son moignon et se déplace alors en fauteuil roulant ou à l'aide de cannes anglaises.

À titre subsidiaire, il réclame l'organisation d'une expertise en architecture.

La société Assurances du crédit mutuel soutient quant à elle qu'il appartient à M. [S] de démontrer que l'achat de sa maison est en lien avec son handicap et que ce handicap a justifié les travaux d'aménagement invoqués ; elle expose que l'expert n'a retenu aucun besoin en tierce personne après consolidation, ni aucun usage d'un fauteuil roulant, le chiffrage par un expert de l'assureur des travaux d'aménagement n'ayant été diligenté qu'à titre indicatif sans reconnaissance par l'assureur du bien fondé de la demande.

Sur ce :

M. [S] était âgé de 20 ans au moment de l'accident ; lorsqu'il a acheté avec son épouse une maison d'habitation en 2006, il se trouvait alors appareillé et ne pouvait méconnaître le handicap dont il se trouve affecté ; il a alors fait le choix d'acquérir une maison qui n'est pas de plain pied et il réclame aujourd'hui non seulement le prix d'acquisition de cette maison mais les frais d'aménagement de celle-ci, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de façon à pouvoir accueillir le passage d'un fauteuil roulant, avec création d'un ascenseur intérieur et de cheminements extérieurs rendant ainsi accessible la piscine et le potager notamment.

Il ressort du rapport de l'expert judiciaire déposé après consolidation, qu'aucun besoin en tierce personne n'a été retenu pour la période postérieure à la consolidation de M. [S] ; qu'eu égard à la mise en place d'une prothèse de la jambe gauche en 2011, l'usage d'un fauteuil roulant n'a jamais été envisagé ni justifié d'ailleurs dans son acquisition par l'intéressé, aucun frais n'ayant été engagé en la matière par la Caisse primaire d'assurance maladie du Rhône au titre de son décompte, l'expert indiquant qu'en cas d'indisponibilité de la prothèse, la victime se déplace au moyen de cannes anglaises.

Aucun élément ne permet dès lors de considérer que M. [S] a été contraint, du fait des séquelles liées à l'accident dont il a été victime, d'engager des frais spécifiques tenant soit dans l'acquisition d'un logement spécialement adapté à son handicap, la maison qu'il a acquise en 2006 n'étant pas spécialement adaptée puisqu'elle comprend notamment deux étages, soit en la réalisation de travaux rendus nécessaires par ce handicap, les travaux dont il réclame la prise en charge consistant dans des travaux d'adaptation au passage en intérieur et en extérieur, d'un fauteuil roulant.

La demande indemnitaire présentée de ce chef par l'intéressé doit donc être rejetée, sans qu'une expertise ait lieu d'être ordonnée en la matière.

III. Sur l'existence d'une erreur matérielle affectant l'arrêt rendu le 23 mai 2017 :

Il ressort des documents produits au dossier que les parties ont, par écrit et amiablement, décidé de rectifier les calculs opérés par la cour dans son arrêt du 23 mai 2017 au titre des dépenses de santé futures, considérant que la cour avait omis, par simple erreur matérielle, de déduire les débours engagés par l'organisme social à hauteur de 180 468,57 euros, dans ses calculs.

Il sera donné acte à la société Assurances du crédit mutuel, de cet accord, devant dorénavant être pris en compte dans la fixation du préjudice.

IV. Sur la fixation du préjudice de M. [S] :

La cour constate à la lecture de l'arrêt rendu le 23 mai 2017 par la cour d'appel de Lyon, que dans la fixation du préjudice global de la victime et des parts incombant à l'assureur ou revenant à la CPAM du Rhône et à M. [S], la cour avait inversé, au titre de sa condamnation, la part revenant à la CPAM du Rhône avec celle revenant à la victime, alors même que le tableau récapitulatif présentait inversement les attributions (419 663,24 euros au titre de la part de la victime et 220 788,52 euros au titre de la part revenant à la CPAM).

Faisant application de l'article 462 du code de procédure civile, la cour invite dès lors les parties à présenter leurs observations sur la nécessité de réparer l'éventuelle erreur matérielle commise en la matière par la cour.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant sur renvoi après cassation, par arrêt réputé contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Vu l'arrêt de la Cour de cassation du 13 septembre 2018,

Statuant dans les limites de la cassation intervenue,

Infirme le jugement rendu le 22 juin 2015 en ce qu'il a fixé à 12 euros de l'heure et à la somme totale de 3 722,40 euros le montant de l'indemnisation revenant à M. [S] au titre de l'assistance tierce personne temporaire après application de la limitation de son droit à indemnisation,

Statuant à nouveau de ce chef,

Fixe à la somme de 15 euros de l'heure et à la somme totale de 4 653 euros le montant de l'indemnisation revenant à M. [S] au titre de l'assistance tierce personne temporaire après application de la limitation de son droit à indemnisation,

Y ajoutant,

Déboute M. [S] de sa demande tendant à l'indemnisation des frais d'acquisition et d'aménagement de logement à hauteur de la somme de 829 753,86 euros et de sa demande subsidiaire tendant à l'organisation d'une mesure d'expertise en architecture,

Constate que les parties se sont accordées pour procéder à la rectification des calculs opérés par la cour d'appel de Lyon dans son arrêt du 23 mai 2017, au titre des dépenses de santé futures,

Sur la fixation du préjudice global de la victime et les demandes de condamnation présentées,

Ordonne la réouverture des débats à l'audience de plaidoiries du 12 décembre 2019 et invite les parties à présenter, avant le 22 novembre 2019, leurs observations sur la nécessité de réparer l'éventuelle erreur matérielle commise par la cour au titre de l'inversion des parts indemnitaires revenant à la victime et à l'organisme social,

Réserve les dépens.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 18/07762
Date de la décision : 19/09/2019

Références :

Cour d'appel de Lyon 01, arrêt n°18/07762 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-09-19;18.07762 ?
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