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09/05/2019 | FRANCE | N°17/04775

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 09 mai 2019, 17/04775


N° RG 17/04775














Décision du Tribunal de Commerce de LYON


Au fond


du 16 juin 2017














SARL TRANS UNION





C/





Société TOKIO MARINE KILN INSURANCELIMITED - TMEI


Compagnie d'assurances HELVETIA COMPAGNIE SUISSE D ASSURANCES


Société COLIS PRIVE








RÉPUBLIQUE FRANÇAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS








COUR D'APPEL DE LYON>




3ème chambre A





ARRÊT DU 09 Mai 2019











APPELANTE :





SARL TRANS UNION


[...]





Représentée par Me Eric DUMOULIN de la SCP DUMOULIN - ADAM, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant, Me Kotaro UCHIKAWA, avocat au barreau de PARIS











INT...

N° RG 17/04775

Décision du Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 16 juin 2017

SARL TRANS UNION

C/

Société TOKIO MARINE KILN INSURANCELIMITED - TMEI

Compagnie d'assurances HELVETIA COMPAGNIE SUISSE D ASSURANCES

Société COLIS PRIVE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRÊT DU 09 Mai 2019

APPELANTE :

SARL TRANS UNION

[...]

Représentée par Me Eric DUMOULIN de la SCP DUMOULIN - ADAM, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant, Me Kotaro UCHIKAWA, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉES :

SA de droit étranger TOKIO MARINE EUROPE SA venant aux droits de la société TOKIO MARINE KLN INSURANCE LIMITED anciennement dénommée TOKIO MARINE EUROPE INSURANCE LIMITED

[...]

Représentée par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant, Me Nicolas FANGET, avocat au barreau de LYON

Société de droit étranger HELVETIA COMPAGNIE SUISSE D'ASSURANCES

[...]

[...] / SUISSE

Représentée par Me Christophe RAMBAUD de la SELARL RAMBAUD-BILLON-PARDI AVOCATS, avocat au barreau de LYON, substitué par Me Marie-Caroline BILLON-RENAUD, avocat au barreau de LYON

SA HELVETIA ASSURANCES

[...]

Représentée par Me Christophe RAMBAUD de la SELARL RAMBAUD-BILLON-PARDI AVOCATS, avocat au barreau de LYON, substitué par Me Marie-Caroline BILLON-RENAUD, avocat au barreau de LYON

S.A.S. COLIS PRIVE

[...]

Représentée par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant, Me Nicolas FANGET, avocat au barreau de LYON

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 14 Mars 2019

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 14 Mars 2019

Date de mise à disposition : 09 Mai 2019

Audience tenue par Hélène HOMS, président, et Pierre BARDOUX, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,

assistés pendant les débats de Jessica LICTEVOUT, greffier

A l'audience, Hélène HOMS a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Anne-Marie ESPARBÈS, président

- Hélène HOMS, conseiller

- Pierre BARDOUX, conseiller

Arrêt Contradictoire rendu par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Anne-Marie ESPARBÈS, président, et par Sylvie GIREL, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

Dans le cadre de son activité d'affrètement et d'organisation de transport pour le compte de professionnels du commerce et du e-commerce, la SAS Colis Privé, pour assurer une navette quotidienne de marchandises entre sa plate-forme située à Saran (45) et la société Côte d'azur routage à Carros (06), s'est substituée la SARL Trans Union qui a confié le transport à la société de droit étranger Nordisk bioline trucking APS.

Entre le 1er juin 2013 4 h et le 3 juin 2013 6 h, une partie de la marchandise chargée le vendredi 31 mai à 20 h 30 a été dérobée alors que la remorque était stationnée dételée sur le parking d'un restaurant à Domazan (30).

La semaine suivante, le 9 juin 2013 entre 9 h et 23 h, la semi-remorque, stationnée dételée sur le parking face au stade de Saze (30) et son contenu ont été volés.

Par acte du 1er septembre 2014, Colis Privé et la société de droit étranger Tokio Marine Europe insurance limited (Tokio Marine), assureur de Colis Privé et se disant subrogée dans les droits de son assurée ont assigné Trans Union et la société Helvétia compagnie suisse d'assurances ès qualités d'assureur de Trans Union devant le tribunal de commerce de Lyon aux fins de les voir solidairement condamnées au paiement d'une somme globale de 56'653,47'€ outre intérêts aux taux légal à compter du 26 mai 2014 et capitalisation de ces derniers.

Par jugement contradictoire du 16 juin 2017, le tribunal de commerce a :

jugé que Colis Privé et Tokio Marine ont qualité et intérêt à agir,

jugé que l'action de Tokio Marine et Colis Privé est recevable contre Trans Union,

jugé que l'action de Tokio Marine et Colis Privé contre la société Helvétia compagnie suisse d'assurances est irrecevable car prescrite,

jugé que le quantum est fixé à la somme de 56'653,47'€ incluant les limitations d'indemnité,

condamné Trans Union à payer aux requérantes la somme de 56'653,47'€ outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 26 mai 2014 décomposée comme suit :

54'193,47'€ à Tokio Marine,

2'460'€ à Colis Privé,

ordonné la capitalisation des intérêts,

rejeté comme non fondés tous autres moyens, fins et conclusions contraires des parties et les en déboutées,

rejeté la demande d'exécution provisoire de Tokio Marine et Colis Privé,

condamné Trans Union à verser à chacune des sociétés Colis Privé, Tokio Marine et Hélvétia 2'000'€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné Trans Union aux dépens.

Trans Union a interjeté appel par acte du 28 juin 2017.

Le 13 juillet 2017, Tokio Marine et Colis Privé ont interjeté appel en intimant la société Helvétia compagnie suisse d'assurances.

le 28 juillet 2013, ces dernières ont déposé une seconde déclaration d'appel en intimant la société Helvétia compagnie suisse d'assurances ainsi que la SA Helvétia assurances.

Par ordonnance du 27 février 2018, les trois procédures ont été jointes.

Par conclusions déposées le 6 décembre 2017, fondées sur les articles L.'132-4 et suivants du code de commerce, l'article 1315 du code civil, l'article 31 du code de procédure civile, Trans Union demande à la cour de :

la juger recevable et fondée en son appel,

infirmer le jugement attaqué,

statuant à nouveau,

juger Tokio Marine et Colis Privé tant irrecevables que mal fondées en leurs demandes.

les en débouter purement et simplement,

condamner solidairement Tokio Marine et Colis Privé à lui payer la somme de 6'000'€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens qui seront recouvrés par Me Eric Dumoulin, avocat,

subsidiairement,

condamner la compagnie Helvétia à la relever et garantir de toute condamnation en principal, intérêts, indemnités, frais et dépens qui pourrait être prononcée à son encontre,

condamner la compagnie Helvétia à lui payer la somme de 6'000'€ en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, qui seront recouverts par Me Eric Dumoulin, avocat.

Par conclusions déposées le 26 février 2018, au visa des articles L.'114-1, L.'121-12 du code des assurances et de l'article L.'133-6 du code de commerce, la société Helvétia Assurances et la société Helvétia compagnie suisse d'assurance, demandent à la cour de :

déclarer recevables mais mal fondées Trans Union en son appel, Tokio Marine et Colis Privé en leur appel incident,

confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré l'action de Tokio Marine et Colis Privé à l'encontre de Helvétia compagnie suisse d'assurances irrecevable car prescrite,

les déclarer recevables et fondées dans leur appel incident,

et y faisant droit,

mettre hors de cause Helvétia compagnie suisse d'assurances,

déclarer irrecevable car prescrite toute action de Colis Privé et Tokio Marine à leur encontre ainsi que la demande de Trans Union à l'encontre de Hévétia assurances,

subsidiairement,

juger que Helvétia assurance est fondée à contester devoir garantir Trans Union, en vertu du non respect des dispositions de la clause vol,

débouter Trans Union de sa demande en garantie à l'encontre de Helvétia assurances,

plus subsidiairement encore,

juger que Tokio Marine et Colis Privé ne rapportent pas la preuve du préjudice allégué,

limiter la responsabilité de Trans Union pour une éventuelle faute personnelle à la somme de 6'417,49'€ en vertu des dispositions du contrat type commission de transport,

condamner in solidum, ou l'une à défaut de l'autre, Tokio Marine, Colis Privé et Trans Union au paiement d'une indemnité de 5'000'€ par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner in solidum, ou l'une à défaut de l'autre, Tokio Marine, Colis Privé et Trans Union en tous les dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de Me Rambaud, SELARL Rambaud-BILLON avocats, sur son affirmation de droit.

Par conclusions déposées le 11 mars 2019, au visa des articles L.'132-5 et suivants et L.'133-8 du code de commerce, Colis Privé et la SA de droit étranger Tokio Marine Europe SA (Tokio Marine) venant aux droits de la société Tokio Marine KLN insurance limited anciennement dénommée Tokio Marine Europe insurance limited demandent à la cour de :

déclarer recevable et bien fondé leur appel incident limité,

confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

condamner Trans Union à leur payer la somme de 56'653,47'€ outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 26 mai 2014 décomposée comme suit :

- 54'193,47'€ à Tokio Marine,

- 2'460 € à Colis Privé,

ordonner la capitalisation des intérêts,

condamner Trans Union à leur payer la somme de 2'000'€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

le réformer pour le surplus et statuant à nouveau,

condamner solidairement avec Trans Union, la compagnie Helvétia à leur payer la somme de 56'653,47'€ outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 26 mai 2014 décomposée comme suit :

54'193,47'e à Tokio Marine,

2'460'€ à Colis Privé,

ordonner la capitalisation des intérêts,

condamner solidairement Trans Union et Helvétia à leur payer la somme de 5'000'€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel.

MOTIFS

A titre liminaire, la cour note qu'il est acquis au débat d'une part, que Colis Privé est intervenu en qualité de commissionnaire de transport de ses donneurs d'ordre et d'autre part, qu'elle recherche la responsabilité de Trans Union en qualité de commissionnaire intermédiaire substitué, qualité non contestée par l'intéressé.

C'est donc en considération de ces qualités juridiques, que le litige doit être examiné.

Sur le moyen d'irrecevabilité de l'action tiré du défaut de preuve de l'indemnisation par Colis Privé des ayants droits

Le commissionnaire de transport n'est recevable à agir contre son substitué que s'il justifie lui-même d'un intérêt à agir, c'est-à-dire s'il rapporte la preuve qu'il a désintéressé le créancier ou qu'il s'est engagé à le faire suite à une réclamation d'indemnisation et que ce dernier a accepté d'attendre le résultat de la procédure que le commissionnaire a introduit à l'encontre de son substitué.

Trans Union soutient que Colis Privé ne prouve pas avoir indemnisé les ayants droits des marchandises ce que ce dernier conteste.

Il produit les factures que lui ont adressées ses clients au titre des pertes suite aux vols et la preuve de leur paiement à hauteur de 112'111,17 €.

Le point de savoir si preuve de ce que les dommages indemnisés résultent bien des vols commis entre le 1er et le 3 juin et le 9 juin 2013 est une question de fond ne conditionnant pas la recevabilité de l'action.

En conséquence, c'est à bon droit que le tribunal de commerce a rejeté ce moyen d'irrecevabilité ce qui conduit à la confirmation sur ce point.

Sur le moyen d'irrecevabilité de l'action de Tokio Marine pour défaut de subrogation dans les droits de son assurée

Trans Union conteste la subrogation légale comme conventionnelle de Tokio Marine dans les droits de Colis Privé.

Sur l'absence de subrogation légale, elle fait grief aux premiers juges de l'avoir admise au motif que l'indemnité a été versée en vertu d'un contrat d'assurance alors que preuve n'en ait pas rapportée, Tokio Marine ne précisant pas quelle garantie et quelle franchise ont été appliquées.

Le contrat d'assurance versé au débat garantit notamment la responsabilité contractuelle et professionnelle et couvre les conséquences pécuniaires des responsabilités encourues par Colis Privé pour les dommages et pertes relatifs aux marchandises qui lui sont confiées à titre onéreux par des tiers, qu'il s'agisse de dommages matériels ou immatériels consécutifs lorsqu'il agit dans le cadre des activités déclarées, parmi lesquelles figure l'activité de commissionnaire de transport, et dès lors que le préjudice, dans ses conséquences matérielles et immatérielles, résultera soit d'un dommage causé à la marchandise soit plus généralement de l'inexécution ou de l'exécution défectueuse de l'une de ses obligations contractuelles telle que retard, erreur de destination (...).

Les pertes de marchandises litigieuses, survenues dans cadre de l'exécution d'un contrat de commission de transport entrent dans le cadre de cette garantie.

Tokio Marine a donc indemnisé son assurée en application du contrat d'assurance et est légalement subrogée dans les droits de celle-ci à hauteur des indemnités versées.

La discussion sur la subrogation conventionnelle est dès lors sans objet.

Il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré recevable l'action de Tokio Marine et Colis Privé.

Sur la demande au fond

La demande de Colis Privé et Tokio Marine d'un montant global de 56'653,47'€ correspond à l'évaluation provisoire des dommages effectuée par l'expert AM Group à hauteur de 12'353,63'€ pour le premier sinistre et de 44'299,84'€ pour le second. Cette évaluation fait application de la limitation d'indemnisation prévue par le contrat type pour les transports routiers nationaux ce qui, ainsi que le fait valoir Trans Union, rend sans objet la discussion sur la faute inexcusable.

Cette dernière prétend que les intimés sont dans l'incapacité de démontrer les quantités de marchandises transportées et dérobées.

Il est exact que la lettre de voiture établie lors de la prise en charge des marchandises le 1er juin 2013 mentionne 33 box sans indication relative au poids, à la nature ou au colisage des marchandises. L'original de cette lettre aurait été dérobé lors du vol ; la chauffeur a établi une lettre de remplacement mentionnant le vol mais elle n'a pas été émargée par Côte d'Azur Routage à laquelle le chargement devait être livré et dégroupé avant livraison des destinataires.

Il n'est pas produit de lettre de voiture concernant le transport du 7 juin 2013 dont le voiturier a indiqué à l'expert qu'elle a été dérobée avec la semi-remorque dans laquelle elle se trouvait.

L'expert note qu'il n'existe pas de bordereau de groupage, les informations transitant par EDI entre la plate-forme de groupage et celle de dégroupage ; que les colis sont scannés au chargement puis au déchargement ; qu'un fichier Excel lui a été communiqué.

1 - sur le premier vol

Il ressort du rapport d'AM Group que le contenu de la remorque a été minutieusement fouillé, qu'il a été présenté à l'expert 15 box dont 12 contenaient des déchets d'emballage et 3 des produits en vrac non identifiables et donc non livrables et non retournables à leurs expéditeurs : vêtements, articles de bazar, jeux, équipements électroménagers mais à très faible valeur. Ces marchandises ont été retournées sur le Hub de Colis Privé pour participer à une vente de sauvetage dont il n'est pas établi qu'elle ait eu lieu.

Ces box regroupaient, pour en faciliter le transport et la manutention, les marchandises transportées qui étaient des biens de consommation courante voyageant dans leur emballage de vente protégé par un master carton sur lequel était apposée une étiquette directionnelle.

Le fichier Excel communiqué à l'expert contient une liste de 1239 colis.

L'inventaire réalisé par différence entre les colis attendus et dont le détail est transmis par Colis Privé par liaison EDI avant transport et les colis réceptionnés après le vol et scannés par Côte d'Azur Routage fait ressortir :

* 571 colis intacts sur 1239

* 443 colis spoliés / 1239

* 225 colis dérobés / 1239.

A ces 668 expéditions en litige, l'expert a ajouté 187 colis du chargeur Pixmania (après analyse des pièces produites et déduction de 42 colis se trouvant déjà sur la liste initiale des 225 colis dérobés ou à la fois sur les deux listes concernant les deux vols) portant le chargement à 1422 expéditions et le nombre de colis dérobés ou spoliés à 885 représentant un poids total 1'283,499'kg.

L'expert a procédé à un rapprochement entre les quantités manquantes ou non identifiables, les factures commerciales d'origine et les éléments de réclamations des clients à Colis Privé.

L'expert n'a pas reçu toutes les factures de réclamation des clients de Colis Privé mais elles sont produites à l'instance au soutien de la demande.

Il est exact qu'ainsi que le fait valoir Trans Union, certaines de ces factures ne mentionnent pas la date du vol comme date du sinistre mais pour les clients, la date du sinistre n'est pas celle du vol (survenu pendant une fin de semaine) mais celle à laquelle ils n'ont pas reçu la livraison attendue laquelle était postérieure à la livraison dans la plate-forme de dégroupage qui devait avoir lieu le lundi 3 juin 2013 et aux opérations de dégroupage. Il est également exact que Colis privé a indemnisé des clients ne figurant pas dans les pièces examinées par l'expert. Cependant ces indemnités ne sont pas incluses dans la demande qui est limitée à l'indemnité calculée par l'expert.

Il résulte de l'ensemble de ces pièces, et tenant compte du fait que l'absence de bordereau de colisage correspond à la pratique des parties dans le cadre d'une navette quotidienne transportant de très nombreux colis, que Colis Privé a indemnisé ses clients, le plus souvent au-delà des limitations applicables et qu'il justifie avoir réglé les indemnités calculées par l'expert sauf une indemnité de 45,14 € retenue par l'expert pour le client Bergères de France qu'il convient donc de déduire de la réclamation.

Tokio Marine, subrogée dans les droits de Colis Privé à concurrence de 11 393,63€ est donc fondée à solliciter la condamnation de Trans Union au paiement de 11'348,49'€ (11'393,63'- 45,14) et Colis Privé la somme de 960'€ restée à sa charge.

2 - le second vol

Il ressort du rapport d'AM Group que la remorque volée a été retrouvée avec quelques colis à l'intérieur ; que l'expert désigné par Trans Union au cours des opérations menées par AM Group, M. E..., s'est déplacé le 15 octobre 2013 à la gendarmerie et n'a pas été rejoint par son confrère compte tenu de la faible quantité d'articles dont M. E... a précisé qu'il s'agissait essentiellement d'articles publicitaires et de cadeaux dont l'inventaire n'a pas été réalisé par la gendarmerie ; que les experts ont convenu, compte tenu de ces éléments, de traiter le dossier en perte totale avec tentative de procéder à une vente de sauvetage dont le produit serait très faible dont il n'est pas établi qu'elle ait eu lieu.

La nature des marchandises transportées était identique à celle du chargement volé la semaine précédente et leur conditionnement était le même.

Selon la même méthode, l'expert a évalué les dommages et calculé les indemnités dues en fonction des limitations applicables.

Il résulte de cette expertise et des factures de réclamation produites par Colis Privé que ce denier a indemnisé ses clients, le plus souvent au-delà des limitations applicables et qu'il justifie avoir réglé les indemnités calculées par l'expert sauf une indemnité de 73,21€ retenue par l'expert pour le client Outiror qu'il convient donc de déduire de la réclamation.

Tokio Marine, subrogée dans les droits de Colis Privé à concurrence de 42 799,84€ est donc fondée à solliciter la condamnation de Trans Union au paiement de 42 726,63 € (42'799,84'- 73,21) et Colis Privé la somme de 1'500'€ restée à sa charge.

En conséquence, Trans Union est condamnée, par infirmation du jugement entrepris sur le montant de la condamnation, à payer à Tokio Marine la somme de 54'075,12'€ (11'348,49 + 42 726,63) et par confirmation de ce jugement, à payer à Colis Privé, 2'460'€, ces sommes avec intérêts au taux légal à compte de la mise en demeure du 26 mai 2014 et capitalisation des intérêts.

Sur la prescription de l'action dirigée à l'encontre des sociétés Helvétia Assurances et la société Helvétia compagnie suisse d'assurance par Tokio Marine et Colis Privé

L'assignation a été délivrée, le 1er septembre 2014, par Tokio Marine et Colis Privé à la société Helvétia compagnie suisse d'assurance immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous le numéro 775 753 072 dont le siège est situé [...] (Suisse) prise en son établissement de Lyon situé [...] ; le jugement dont appel a été rendu à l'encontre de cette seule société.

L'appel a été dirigé par Trans union le 28 juin 2017 et par Tokio Marine et Colis Privé le 13 juillet puis le 28 juillet 2017 à l'encontre de la société Helvétia compagnie suisse d'assurances.

Lors de cette seconde déclaration d'appel du 28 juillet 2017, Tokio Marine et Colis Privé ont également intimé la SA Helvétia assurances inscrite au registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous le numéro 339 489 379 et ayant son siège social [...] .

L'action directe de la victime contre l'assureur se prescrit par le même délai que l'action de la victime contre le responsable soit en l'espèce un délai d'un an commençant à courir le 3 juin 2013 pour le premier sinistre et le 9 juin pour le second ce qui ne fait pas débat entre les parties.

Ce délai était expiré le 1er septembre 2014 au moment où l'action a été engagée à l'encontre de la société Helvétia compagnie suisse d'assurance qui conteste l'opposabilité de la prorogation de 3 mois du délai de prescription accordée par Trans Union à Colis Privé et ce à juste titre, ainsi que l'a retenu le tribunal de commerce, dès lors que la prorogation accordée par Trans Union ne peut concerner que l'action pouvant être dirigée contre elle et non une éventuelle action directe contre son prétendu assureur qui n'a pas consenti à cette prorogation dont il n'a même pas été informé.

La décision déférée est confirmée en ce qu'elle a déclaré irrecevable l'action dirigée à l'encontre de la société Helvétia compagnie suisse d'assurances.

En ce qui concerne les demandes dirigées à l'encontre de la société Helvétia assurances inscrite au registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous le numéro 339 489 379, celle n'a été mise en cause que devant la cour par Colis Privé et Tokio Marine le 28 juillet 2017 soit plusieurs années après l'expiration du délai de prescription qui comme le fait justement valoir l'intéressée, n'a jamais été interrompu.

L'action dirigée contre cette dernière est donc également irrecevable.

Sur la prescription de l'action dirigée à l'encontre de la société Helvétia Assurances par Trans Union

Trans Union sollicite la garantie de la société Helvétia Assurances dont il admet qu'elle est son assureur laquelle n'a pas été assignée devant le tribunal de commerce mais il conteste la prescription de sa demande au motif qu'en application de l'article L. 114-1 du code des assurances, son action se prescrivait par deux ans à compter de l'assignation du 1er septembre 2014 et que si cette action a été introduite à l'encontre de la société Helvétia compagnie suisse d'assurance, la société Helvétia Assurances a déposé des conclusions devant le tribunal de commerce auxquelles il a répliqué en sollicitant sa garantie, ces conclusions déposées à l'audience du 17 juillet 2015, soit avant l'expiration du délai de prescription (1er septembre 2016), ayant interrompu la prescription.

La société Helvétia Assurances réplique qu'elle n'est pas intervenue volontairement devant le tribunal de commerce et maintient que le délai d'action à son encontre n'a pas été interrompu.

En premier lieu, la cour note que Trans Union ne conteste pas que la société Helvétia compagnie suisse d'assurance ne soit pas son assureur, ayant souscrit un contrat d'assurance auprès de Goupama transport devenu Gan eurocourtage qui a cédé son portefeuille de contrats d'assurance à la SA Helvétia assurances inscrite au registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous le numéro 339 489 379 et ayant son siège social [...] .

En deuxième lieu, la société Helvétia assurances ne débat pas sur le délai d'action de son assuré lequel en application de l'article L. 144-1 du code des assurances, était de deux ans à compter du recours formé par Tokio Marine et Colis Privé et qui est la cause de l'action de l'assuré contre l'assureur, délai expirant donc le 1er septembre 2016.

En troisième lieu, Trans Union produit des conclusions de la société Helvétia assurances en première instance et ses conclusions responsives du 17 juillet 2015 dirigées contre Helvétia assurance SA sans autre précision et sollicitant, dans le dispositif la garantie de "la compagnie Hélvétia".

Dans ses conclusions, la société Helvétia assurances ne précise pas qu'elle intervient volontairement en qualité d'assureur au lieu et place de la société Helvétia compagnie suisse d'assurance laquelle, partie à l'instance, n'a pas demandé sa mise hors de cause. De la même manière, Trans Union s'est contenté de conclure à l'encontre de la société Helvétia assurances qui n'était pas dans la cause sans explication et sans grande précision.

Le tribunal de commerce a rendu le jugement à l'encontre de la seule la société Helvétia compagnie suisse d'assurance.

Dans ces conditions, n'étant pas partie à l'instance ayant donné lieu au jugement dont appel, les conclusions de Trans Union (à les supposer déposées devant le tribunal de commerce) ne valent pas demande en justice interruptive du délai de prescription à l'encontre de la société Helvétia assurances.

Aucun autre acte interruptif du délai d'action n'étant invoqué, il y a lieu de déclarer irrecevable la demande en garantie présentée par Trans Union à l'encontre de la société Helvétia assurances en ajoutant à la décision déférée qui a omis de statuer sur ce point.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Les dépens incombent à Trans Union, partie perdante qui doit supporter les frais irrépétibles qu'elle a exposés et verser une indemnité de procédure aux autres parties, in solidum avec Tokio Marine et Colis Privé aux sociétés Helvétia, les condamnations prononcées à ce titre en première instance étant confirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a condamné la SARL Trans Union à payer à la société Tokio Marine Europe insurance limited devenue Tokio Marine KLN insurance limited et aux droits de laquelle vient la SA de droit étranger Tokio Marine Europe la somme de 54'653,47'€ en principal,

Statuant à nouveau sur ce seul point et ajoutant,

Condamne la SARL Trans Union à verser à la SA de droit étranger Tokio Marine Europe venant aux droits de la société Tokio Marine KLN insurance limited anciennement dénommée Tokio Marine Europe insurance limited, la somme de 54'075,12'€,

Déclare irrecevables les actions formées par la SA de droit étranger Tokio Marine Europe SA venant aux droits de la société Tokio Marine KLN insurance limited anciennement dénommée Tokio Marine Europe insurance limited, la SAS Colis Privé et la SARL Trans Union à l'encontre de la SA Helvétia assurances,

Condamne in solidum la SA de droit étranger Tokio Marine Europe SA venant aux droits de la société Tokio Marine KLN insurance limited anciennement dénommée Tokio Marine Europe insurance limited, la SAS Colis Privé et la SARL Trans Union à verser à la société de droit étranger Helvétia compagnie suisse d'assurances et à la SA Helvétia assurances, une indemnité de procédure de 3'000'€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL Trans Union aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers à recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 17/04775
Date de la décision : 09/05/2019

Références :

Cour d'appel de Lyon 3A, arrêt n°17/04775 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-05-09;17.04775 ?
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