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03/04/2019 | FRANCE | N°17/01369

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 03 avril 2019, 17/01369


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : N° RG 17/01369 - N° Portalis DBVX-V-B7B-K3WL





[X]



C/

SAS CLASSE EXPORT







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 09 Février 2017

RG : F 15/04475





COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 03 AVRIL 2019







APPELANT :



[X] [X]

né le [Date naissance 1] 1977 à

[Adresse 1]>
[Adresse 1]



comparant en personne, assisté de Me Patrick SOREL de la SELARL SOREL-HUET-LAMBERT MICOUD, avocat au barreau de LYON





INTIMÉE :



SAS CLASSE EXPORT

[Adresse 2]

[Adresse 2]



représentée par Me Nicolas CHAVRIER de la SCP FROMO...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : N° RG 17/01369 - N° Portalis DBVX-V-B7B-K3WL

[X]

C/

SAS CLASSE EXPORT

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 09 Février 2017

RG : F 15/04475

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 03 AVRIL 2019

APPELANT :

[X] [X]

né le [Date naissance 1] 1977 à

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparant en personne, assisté de Me Patrick SOREL de la SELARL SOREL-HUET-LAMBERT MICOUD, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

SAS CLASSE EXPORT

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Nicolas CHAVRIER de la SCP FROMONT BRIENS, avocat au barreau de LYON substituée par Me Anne-Laure COTTIN, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 06 Novembre 2018

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Joëlle DOAT, Président

Evelyne ALLAIS, Conseiller

Annette DUBLED VACHERON, Conseiller

Assistés pendant les débats de Carole NOIRARD, Greffier placé.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 03 Avril 2019, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Joëlle DOAT, Président, et par Manon FADHLAOUI auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

*************

Suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 1er décembre 2003, la société CLASSE EXPORT a engagé Monsieur [X] [X] en qualité de journaliste/secrétaire de rédaction, coefficient 355 position 2.3 de la convention collective des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs conseils et sociétés de conseils (SYNTEC).

En dernier lieu, Monsieur [X] exerçait la fonction de chef d'édition.

Par courrier en date du 15 octobre 2015, Monsieur [X] a réclamé à la société CLASSE EXPORT le paiement de son salaire du mois de septembre 2015, faisant valoir que ce salaire ne lui avait pas été payé en totalité. Il a en outre signalé que ses fiches de paye étaient erronées, la date et le moyen de paiement indiqués ne correspondant pas à la réalité des paiements, et que la convention collective n'était pas la bonne, puisque la convention applicable à un journaliste professionnel était celle des journalistes.

Par requête en date du 3 décembre 2015, Monsieur [X] [X] a saisi le conseil de prud'hommes de Lyon aux fins de se voir reconnaître le statut de journaliste et celui de cadre, voir condamner la société CLASSE EXPORT à lui payer diverses sommes à titre de rappel de primes d'ancienneté, de 13e mois, d'heures supplémentaires, de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et pour travail dissimulé, voir prononcer la résolution judiciaire de son contrat de travail et condamner la société CLASSE EXPORT à lui payer des indemnités et des dommages et intérêts consécutifs à la rupture du contrat.

Par jugement en date du 9 février 2017, le conseil de prud'hommes a :

' dit que Monsieur [X] [X] exerce la profession de journaliste professionnel et doit se voir appliquer le statut correspondant, ainsi que la convention collective des journalistes, à compter de la saisine du conseil, soit le 1er décembre 2015

' dit que Monsieur [X] [X] relève du statut cadre et doit se voir appliquer ce statut à compter de la saisine du conseil, soit le 1er décembre 2015

' condamné la société CLASSE EXPORT à verser à Monsieur [X] la somme de 4.000 euros bruts à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et celle de 275 euros bruts, à titre de rappel de 13e mois, outre 27,50 euros au titre des congés payés

' débouté Monsieur [X] du surplus de ses demandes

' débouté la société CLASSE EXPORT de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

' condamné la société CLASSE EXPORT à payer à Monsieur [X] la somme de 1.400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance.

Monsieur [X] [X] a interjeté appel de ce jugement, le 21 février 2017.

Il avait été placé en arrêt-maladie le 16 février 2017.

À l'issue de la visite médicale de reprise du 20 mars 2017, Monsieur [X] a été déclaré inapte au poste par le médecin du travail.

Le 11 juillet 2017, la société CLASSE EXPORT a prononcé le licenciement de Monsieur [X] pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement.

Monsieur [X] [X] demande à la cour :

' de confirmer le jugement en ce qu'il a dit qu'il doit se voir appliquer le statut de journaliste professionnel et la convention collective nationale des journalistes et qu'il relève du statut de cadre

' de l'infirmer pour le surplus

' de condamner la société CLASSE EXPORT à lui payer les sommes suivantes :

17.771 euros à titre de rappel de primes d'ancienneté du 1er décembre 2012 au 19 juin 2017

1.777 euros à titre d'indemnité de congés payés afférents

17.569 euros à titre de rappel de 13e mois

1.756 euros à titre d'indemnité de congés payés afférents

45.762,47 euros à titre d'heures supplémentaires

4.576,24 euros à titre d'indemnité de congés payés afférents

30.000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-affiliation à une caisse de cadre

et, subsidiairement, 15.000 euros

50.000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, harcèlement et manquement à l'obligation de sécurité résultat

31.865,70 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé et, subsidiairement, 24.238,50 euros

' de prononcer la résolution judiciaire du contrat de travail et, subsidiairement, de dire que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse

' de condamner la société CLASSE EXPORT à lui payer les sommes suivantes :

10.621,90 euros à titre d'indemnité de préavis et, subsidiairement, 8079,50 euros

1.062,20 euros à titre d'indemnité de congés payés afférents et, subsidiairement, 807,95 euros

79.664,25 euros à titre d'indemnité de licenciement et, subsidiairement, 60'596,25 euros

90.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et, subsidiairement, 70.000 euros

' de dire que l'ensemble des condamnations à l'exception des dommages et intérêts et de l'article 700 du code de procédure civile porteront intérêts au taux légal à compter du 30 novembre 2015

' de dire que les intérêts se capitaliseront dans les conditions prévues à l'article 1154 ancien du code civil à compter du 28 février 2016

' de condamner la société CLASSE EXPORT à lui payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Il soutient :

' que les fonctions de journaliste rédacteur, de secrétaire de rédaction, puis de chef d'édition lui sont expressément reconnues par son employeur sur son contrat de travail, sur ses bulletins de salaire, ainsi que dans l'ours de chacun des numéros du magazine publié sous la responsabilité du directeur de publication, ce qui, selon la Cour de Cassation lui confère incontestablement la qualité de journaliste professionnel

' que, lorsqu'il a été embauché par la société CLASSE EXPORT, il lui a été appliqué à juste titre la convention collective nationale des journalistes, que la société ne pouvait pas postérieurement lui appliquer une autre convention plus défavorable et ne correspondant ni à son emploi, ni à sa qualification, d'autant plus que la société emploie ou a employé des journalistes pigistes et leur applique ou a appliqué légitimement la convention collective nationale des journalistes

' que le coefficient 355, position 2.3 de la convention collective nationale du SYNTEC affecté à son emploi vise des postes qui ne peuvent pas s'appliquer à lui

' que les qualifications qui lui ont été attribuées par l'employeur correspondent à des définitions de fonctions afférentes à la convention collective nationale des journalistes et qu'il bénéficie incontestablement du statut de journaliste professionnel

' que la société CLASSE EXPORT est une entreprise de presse, qu'en effet, son dirigeant est également directeur de publication, qu'elle est dotée d'un rédacteur en chef, cette fonction n'existant que dans les entreprises de presse, qu'elle dispose d'un numéro de commission paritaire lui permettant de bénéficier d'un taux réduit de TVA et de tarifs postaux préférentiels dont seule bénéficie la presse dans le cadre des aides d'Etat indirectes, qu'elle est certifiée 'OJD', que la loi du 20 août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse n'a jamais indiqué que l'entreprise de presse devait avoir pour objet exclusif l'édition de publications de presse, que la première activité de la société CLASSE EXPORT est : « les éditions CLASSE EXPORT », ce qui est confirmé par le fait qu'il occupe les fonctions de chef d'édition, que la page d'accueil du site de la société met en évidence son activité d'éditeur et comporte pour l'essentiel les sommaires des différents articles et la présentation de ses magazines récents et que la notion d'indépendance éditoriale visée par la Cour de Cassation dans son arrêt du 25 septembre 2013 n'a vocation à s'appliquer que pour le cas où l'employeur n'est pas une entreprise de presse

' à titre subsidiaire, pour le cas où la société CLASSE EXPORT ne serait pas considérée comme une entreprise de presse, que la qualité de journaliste professionnel devra lui être reconnue car il exerce son activité dans une publication de presse disposant d'une indépendance éditoriale, qualité que revendique elle-même la société CLASSE EXPORT, qu'il verse aux débats l'intégralité des magazines auxquels il a collaboré depuis son entrée en service dans l'entreprise, ce qui démontre bien qu'il s'agit de magazines d'information spécialisés dans le commerce international jouissant d'une indépendance éditoriale, que les articles figurant à l'intérieur de ces magazines sont des articles d'information écrits essentiellement par lui

' que c'est le magazine et non le journaliste qui doit bénéficier d'une indépendance éditoriale et que le fait qu'il travaille sous la responsabilité directe de [L] [R], rédacteur en chef et actionnaire majoritaire du journal, caractérise simplement le lien de subordination juridique existant à l'égard de son employeur, que son travail de correction des articles rédigés par des pigistes correspond à la définition même de la fonction de secrétaire de rédaction qui est, selon la convention collective nationale des journalistes, un emploi de journaliste, qu'il conviendra ainsi de prendre acte de l'aveu judiciaire fait par la société CLASSE EXPORT qu'il est journaliste professionnel

' qu'il démontre que, depuis 15 ans, il écrit l'essentiel des articles d'information parus dans CLASSE EXPORT et qui constituent plus de 90 % du contenu de la publication, les autres 10 % étant constitués de publicité ou de publi-reportages, que l'affirmation selon laquelle c'est le service commercial de la société CLASSE EXPORT qui détermine les thèmes et articles à rédiger est contraire à la réalité des faits, que le planning rédactionnel dont fait état Monsieur [H] [O] ne concerne que l'aspect publicitaire du journal qui n'est pas dans ses fonctions contractuelles, qu'il n'y a rien d'inhabituel à ce qu'il lui soit demandé occasionnellement d'écrire des publi- reportages puisqu'il s'agit d'une tâche qu'effectuent, à la demande de leur employeur, la plupart des journalistes, sans que pour autant ne soit remis en cause leur statut

' qu'il justifie en tout état de cause de la réalité de ses fonctions au moyen des attestations, de l'intégralité des magazines CLASSE EXPORT auxquels il a collaboré depuis l'origine et des guides réalisés par lui qu'il verse aux débats, qu'il rédige également des newsletters et des articles sur le Web, que l'essentiel des articles publiés sont signés par lui ou comportent ses initiales, que ces articles sont d'évidence des articles d'information et non pas de promotion de CLASSE EXPORT

' que ses compétences particulières en langue allemande et ses relations avec le milieu économique franco-allemand lui permettent régulièrement d'interviewer des ministres allemands et français, ainsi que d'autres personnalités et des spécialistes de haut niveau, qu'il participe à de nombreux voyages de presse ouverts uniquement à des journalistes professionnels, que, depuis qu'il est entré au service de CLASSE EXPORT, il a animé plus d'une cinquantaine de conférences en français à l'étranger, qu'il signe les bons à tirer auprès des imprimeurs, qu'il établit le 'chemin de fer' du magazine

' qu'à titre subsidiaire, la cour devra faire application de l'article L7111-4 du code du travail selon lequel sont assimilés aux journalistes professionnels les collaborateurs directs de la rédaction

' qu'il est en outre fondé à revendiquer le statut de cadre depuis la date de son embauche par la société CLASSE EXPORT

' que, dès l'origine des relations contractuelles, il a été contraint d'effectuer de nombreuses heures supplémentaires à la demande de son employeur, que les heures supplémentaires qu'il a réalisées peuvent être évaluées à 1410 heures entre le 1er décembre 2012 le 1er décembre 2015, que les éléments qu'il produit sont bien de nature à étayer sa demande, que l'employeur ne verse aux débats aucun élément pour justifier des horaires de travail effectués par lui, mais que, bien au contraire, il admet la réalité de ses heures supplémentaires

' que, subsidiairement il conviendrait d'appliquer l'article L7113-1 du code du travail et que cet article n'a rien à voir avec l'article L7113-2 du même code

' que les nombreuses heures supplémentaires réalisées, le fait qu'il lui a été imposé d'écrire à son domicile pendant son arrêt maladie du 28 septembre au 27 novembre 2015 et le fait qu'il a effectué à plusieurs reprises un travail non prévu à son contrat de travail sans percevoir de rémunération spéciale sont des éléments qui caractérisent le travail dissimulé

' qu'il s'est vu refuser de manière abusive le statut de journaliste et les conditions de rémunération afférentes, circonstance qui caractérise une exécution déloyale du contrat de travail, d'autant plus grave que la société persiste à refuser à lui appliquer le statut qui aurait dû être le sien, y compris après le jugement dont appel, que depuis le mois de mars 2015, il est payé seulement sur la base d'acomptes et avec un retard systématique, ce qui lui cause notamment des difficultés avec sa banque qui lui facture des agios, qu'il a fallu la saisine du conseil de prud'hommes pour que la société CLASSE EXPORT daigne enfin le payer, que son préjudice est extrêmement important et ne peut être réparé par la simple condamnation de la société CLASSE EXPORT au paiement des rappels de salaires dûs, que, compte-tenu des règles de prescription, il n'est pas possible de remonter au-delà de trois ans, qu'en refusant de lui accorder le statut de journaliste et celui de cadre, l'employeur l'a privé non seulement d'une garantie incapacité permanente-décès, mais surtout du bénéfice d'une affiliation à une caisse de retraite des cadres pendant 13 ans, ce qui a une incidence très importante sur sa future retraite

' que la société CLASSE EXPORT a exécuté de manière déloyale le contrat de travail, qu'elle s'est livrée à du harcèlement à son encontre postérieurement à l'audience devant le conseil de prud'hommes et a manqué gravement à l'obligation de sécurité de résultat de préserver sa santé, que le but poursuivi par l'employeur était de le faire craquer, ce qui s'est produit au demeurant puisqu'il a été placé en arrêt travail avant d'être déclaré inapte le 16 mars 2017

' qu'il invoque des manquements graves de l'employeur justifiant que soit prononcée la résiliation judiciaire du contrat de travail, que cette demande n'est pas hâtive puisqu'elle a été précédée d'une demande amiable, à laquelle l'employeur a refusé de faire droit, que le fait que la relation de travail se soit poursuivie n'est pas un obstacle à la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail

' subsidiairement, que si la cour ne prononçait pas la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, elle devrait considérer que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse puisque son état d'inaptitude trouve sa cause dans le harcèlement et le manquement de l'employeur à son obligation de préserver sa santé.

La société CLASSE EXPORT demande à la cour :

' d'infirmer le jugement en ce qu'il a dit que Monsieur [X] exerçait la profession de journaliste professionnel et devait se voir appliquer le statut correspondant (cadre) ainsi que la convention collective des journalistes et en ce qui concerne les condamnations en paiement prononcées à son encontre

' de confirmer le jugement qui a débouté Monsieur [X] du surplus de ses demandes

' de rejeter les demandes subsidiaires formées par Monsieur [X] en cause d'appel

' de condamner Monsieur [X] à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Elle soutient :

' que Monsieur [X] a bénéficié d'une convention collective qui lui a aussi permis l'octroi de nombreux avantages supra légaux et le bénéfice d'un niveau de salaire bien supérieur à celui auquel il aurait pu prétendre si elle avait appliqué le barème minimum de la convention collective des journalistes, de sorte que, même si la cour jugeait que la convention collective des journalistes doit s'appliquer, elle ne pourra considérer que l'application en ses lieu et place des dispositions conventionnelles issues de la convention collective du SYNTEC puisse suffire à entraîner la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts

' qu'en tout état de cause, Monsieur [X] doit prouver que les griefs qui sous-tendent la demande de résiliation judiciaire ont empêché la poursuite des relations contractuelles, ce qui n'est pas le cas, étant observé que près de 13 années se sont écoulées sans la moindre difficulté

' qu'elle n'est pas d'une entreprise de presse, mais qu'elle est spécialisée dans le secteur d'activité de l'organisation de foires, salons professionnels et congrès, qu'elle est une société de services et d'accompagnement à l'international, que l'information (c'est-à-dire le magazine CLASSE EXPORT) représente la part la moins importante de son activité et qu'elle n'a nullement fait de l'édition de ce magazine sa spécialité, qu'en pratique, le travail de Monsieur [X] consiste notamment, en collaboration avec Madame [L] [R], rédacteur en chef, à rédiger des comptes rendus des réunions de rédaction qui sont organisées par elle et à corriger les articles qu'elle fait rédiger par des pigistes, qu'il rédige des brèves et des textes, d'après les communiqués reçus en permanence à la rédaction et d'après des articles de presse d'autres magazines ou journaux, qu'en coopération avec le service d'assistance, il synthétise des textes techniques sur des sujets concernant le transport ou les douanes, qu'il travaille en collaboration étroite avec les commerciaux qui lui indiquent quels sont les clients à privilégier et commandent les publi-rédactionnels ou interviews qu'ils pré-vendent, que c'est le service commercial de la société qui détermine les thèmes des articles à rédiger en fonction de l'activité commerciale espérée et selon une grille rédactionnelle élaborée chaque année laquelle s'impose à Monsieur [X] qui n'est pas libre du choix des thèmes et contenus des articles à rédiger, que Monsieur [X] assiste le maquettiste dans la réalisation de la mise en page du magazine CLASSE EXPORT

' que la classification attribuée à Monsieur [X] (et donc son salaire) correspond à la classification la plus élevée des fonctions d'études ou de préparation prévue par la convention collective du Syntec

' qu'au sens de la loi du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse, une entreprise de presse, au sens strict, s'entend comme une entreprise ayant pour objet exclusif l'édition de publications de presse, que l'édition du magazine et les abonnements ne représentaient que 10,13 % du chiffre d'affaires de la société en 2013, 11,4 % en 2014,11 % en 2015 et 5,4 % en 2016, que le magazine est publié tous les deux mois et n'occupe qu'un seul salarié sur les 14 de la société, qu'il n'y a aucune autonomie structurelle et organisationnelle du magazine CLASSE EXPORT

' que la condition tenant à l'indépendance éditoriale du magazine n'est pas remplie, qu'à travers le magazine, il s'agit pour elle de promouvoir son domaine de compétence dans l'organisation d'événements professionnels de grande ampleur (de type salons professionnels) et surtout d'accompagnement et de formation à l'exportation, qu'elle envoie le magazine gratuitement à toutes les entreprises qui réalisent au moins 300.000 euros de chiffre d'affaires à l'international et qu'il s'agit d'un outil marketing sur des thèmes spécialisés se rapportant au domaine du commerce extérieur

' que le salarié qui prétend au statut de journaliste professionnel doit également répondre à l'exigence d'indépendance dans l'exercice de ses fonctions, ce qui n'est pas le cas en l'espèce

' que Monsieur [X] devra être débouté de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur, les manquements qu'il lui impute n'étant pas avérés

' qu'un changement de statut ne peut être octroyé à la seule lecture de diplômes, mais dépend des fonctions réellement exercées par le salarié, qu'à titre subsidiaire le préjudice éventuel de Monsieur [X] du chef de l'absence de cotisations au régime complémentaire sur la base d'une table de mortalité de 20 ans s'élève à la somme maximale de 15'000 euros

' que les demandes de Monsieur [X] fondées sur une exécution déloyale du contrat de travail, un harcèlement et un manquement à l'obligation de sécurité de résultat doivent être rejetées

' que Monsieur [X] ne démontre pas l'existence d'un lien entre l'inaptitude prononcée et ses conditions de travail

' que Monsieur [X] n'a pas fourni d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés par lui, afin de permettre à l'employeur d'y répondre, que le document manuscrit versé aux débats par Monsieur [X] ne vise que des exemples datés, mais que les dates visées dans ce document ne sont étayées d'aucune pièce, que les heures supplémentaires ne sont pas décomptées avec précision , qu'on ne comprend pas à quoi correspondent les dates relevées, qu'on ne retrouve pas dans les mails versés aux débats par Monsieur [X] ceux qui sont évoqués dans le document manuscrit, que les attestations produites ne détaillent pas le temps de travail de Monsieur [X] et ne le prouvent pas, que rien ne démontre que Monsieur [X] a lui-même rédigé les 20 guides qu'il a versés aux débats et que la seule production de ces guides ne permet pas en tout état de cause de démontrer que Monsieur [X] était à son poste de travail en dehors de ses horaires contractuels

' que l'article L7113-1 du code du travail invoqué à titre subsidiaire est inapplicable au cas d'espèce, car il a pour objet de permettre aux journalistes professionnels de voir reconnaître leurs droits patrimoniaux sur les articles qu'ils auraient rédigés pour leurs éditeurs et qui n'auraient pas été publiés ou qui auraient été publiés sans que leur auteur en ait été rémunéré.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 septembre 2018.

SUR CE :

Sur la convention collective applicable à M. [X]

Pour dire que Monsieur [X] exerçait la fonction de journaliste professionnel et qu'à ce titre, il devait se voir reconnaître le statut correspondant et se voir appliquer la convention collective des journalistes, le conseil de prud'hommes a retenu que la société CLASSE EXPORT exerçait une activité d'enteprise de presse pour une partie de son activité et qu'à tout le moins, la publication du magazine CLASSE EXPORT, organe d'information économique reconnu et consacré au commerce international, équivalait à la publication d'un organe de presse spécialisé.

Sauf application volontaire ou adhésion de l'employeur à la convention ou à l'accord, une convention ou un accord professionnel ou interprofessionnel est applicable dans les entreprises qui entrent dans son champ d'application territorial et professionnel, ce dernier étant déterminé en fonction de son activité effective principale.

La convention collective nationale des journalistes est applicable aux journalistes professionnels, salariés des entreprises tels qu'ils sont définis aux articles L7111-3 et L 7112- 1 du code du travail.

L'article L7111-3 du code du travail énonce qu'est journaliste professionnel toute personne qui a pour activité principale, régulière et rétribuée l'exercice de sa profession dans une ou plusieurs entreprises de presse, publications quotidiennes et périodiques ou agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources.

Le statut de journaliste professionnel implique dès lors l'exercice de l'activité dans une entreprise de presse.

Selon son extrait d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés de LYON, la société CLASSE EXPORT exerce l'activité suivante : communication, création de salons et manifestations axés sur l'international (hors activités commissionnées de transport et de restauration) édition-formation-relations publiques.

La convention collective nationale des bureaux d'études techniques s'applique aux entreprises ayant une activité principale d'ingenierie, de conseil, de services informatiques, cabinets d'ingénieurs-conseils et entreprises d'organisation de foires et salons.

La société CLASSE EXPORT édite un magazine bimestriel publié cinq fois par an, intitulé CLASSE EXPORT le magazine francophone du commerce international, dont la mise en distribution est gratuite et qui, par exemple en 2014-2015 (juillet 2014 à juin 2015), a été tiré à 29 124 exemplaires.

La société CLASSE EXPORT produit son bilan et son compte de résultat pour l'exercice 2015 faisant apparaître que son chiffre d'affaires net s'est élevé à 1.628.571 euros, dont :

- 171.000 euros de partenariat

- 295.000 euros environ de vente de stands de salon

- 68.000 euros de prestations SWAP

- 354.000 euros de ventes abonnements BAO

- 194.556 euros d'exportations ventes diverses

- 307.000 euros de gestion de projets

- 224.400 euros d'accélérateur

- 58.567 euros d'abonnements au magazine CLASSE EXPORT et 85.644 euros de vente d'encarts publicitaires en France

-69.683 euros d'exportation de magazines CLASSE EXPORT et 750 euros de vente d'encarts publicitaires à l'exportation.

Pour l'exercice 2014, le chiffre d'affaires net s'était élevé à 1.736.318 euros, dont 58.762 euros d'abonnements au magazine CLASSE EXPORT, 161.493 euros d'encarts publicitaires et 23.074 euros d'encarts publicitaires à l'exportation.

Dès lors, le magazine étant édité par une société qui n'est pas une entreprise de presse, mais une entreprise de communication et d'organisation de salons, tandis que la part de chiffre d'affaires réalisée par la vente du magazine en France et à l'étranger atteint seulement 10 à 11 % du chiffre d'affaires global de la société CLASSE EXPORT, Monsieur [X] ne peut revendiquer la qualité de journaliste professionnel, ni le bénéfice de la convention collective nationale des journalistes même si la fonction exercée par lui, telle que stipulée à son contrat de travail, est bien celle de journaliste, secrétaire de rédaction, puis chef d'édition, qu'il rédige des articles signés de son nom dans le magazine et dans les guides édités par la société et qu'il participe à l'élaboration du magazine, dans les conditions décrites par son contrat de travail, à savoir :

- assurer la veille d'information et la préparation des dossiers rédactionnels du magazine

- assurer la rédaction des brèves et des pages d'actualité

- gérer le calendrier rédactionnel en anticipant sur les bouclages des magazines

- rédiger tout ou partie des dossiers rédactionnels ou publirédactionnels

- assister à des conférences de presse, réaliser des interviews

- planifier et s'assurer de la bonne exécution et de la planification des tâches du studio pour le magazine en tenant compte des contraintes de chacun des services

- être force de proposition dans son travail de sujets d'articles, de contenu technique permettant l'enrichissement du magazine ou la veille d'informations rédactionnelles ou commerciales utiles à la société

-rendre compte directement à la direction qui doit lui donner les grandes lignes de son travail.

Par ailleurs, dans la mesure où l'indépendance éditoriale se définit notamment comme celle de la rédaction d'un journal par rapport à son propriétaire et que le directeur de publication et le rédacteur en chef de ce magazine sont Monsieur [M] [R], président et associé de la société CLASSE EXPORT, et Mme [L] [R], associée de cette société, sous la responsabilité directe de laquelle Monsieur [X] exerce ses fonctions, le critère d'indépendance éditoriale n'est pas rempli, le magazine étant rédigé par et sous le contrôle de son propriétaire, dans le cadre de son activité principale qui n'est pas celle d'une entreprise de presse, et ayant pour objet d'apporter une information pratique, économique, commerciale et financière aux sociétés exportatrices, clientes de la société CLASSE EXPORT, avec lesquelles cette dernière souscrit des contrats de partenariat commercial.

Sur ce dernier point, le billet de la rédaction commentant la certification OJD reçue par le magazine CLASSE EXPORT confirme qu'il s'agit d'un outil au service du commerce extérieur français et des entreprises exportatrices.

Enfin, l'article L7111-4 du code du travail invoqué par Monsieur [X] ne s'applique pas non plus à sa situation puisque ce ne sont pas ses fonctions de rédacteur qui sont contestées, mais le fait qu'il n'est pas salarié d'une entreprise de presse.

Dans ces conditions, c'est à tort que le conseil de prud'hommes a dit que la convention collective applicable au contrat de travail de Monsieur [X] était la convention collective nationale des journalistes.

Monsieur [X] sera débouté de ses demandes en paiement fondées sur l'application de la convention collective des journalistes.

Sur la revendication du statut de cadre

Dans la convention nationale des journalistes, il n'existe pas de statut cadre, ladite convention contenant uniquement une grille de classification des emplois pour les journalistes de la presse et prévoyant des salaires minimaux pour chacune des catégories de journalistes (presse hebdomadaire parisienne, presse d'information spécialisée, presse périodique, presse périodique régionale, presse quotidienne départementale, presse quotidienne nationale, presse quotidienne régionale, journalistes de la radiodiffusion).

En tout état de cause, il convient de se référer à la convention collective du SYNTEC telle que stipulée au contrat de travail et applicable à l'emploi de Monsieur [X].

Il est mentionné sur les derniers bulletins de salaire de Monsieur [X] qu'il occupe la fonction d'employé, au coefficient 355, 2.3, laquelle relève de la catégorie ETAM, correspondant à des fonctions d'études/préparations.

La convention collective prévoit que, pour les métiers de l'internet, soit des métiers pouvant être comparés à celui qu'exerce Monsieur [X], par exemple concepteur multimedia, webplanner ou responsable marketing multimédia, consultant internet-intranet-extranet, chef de projet web ou internet, la position de départ se situe en ETAM 2.2.

La classification des ingénieurs et cadres comprend, par ordre croissant, les collaborateurs débutants assimilés à des ingénieurs ou cadres techniques ou administratifs, les collaborateurs débutants avec diplôme, des ingénieurs ou cadres ayant au moins 2 ans de pratique de la profession, des ingénieurs d'étude ou de recherche, etc...

Monsieur [X] a été embauché en 2003, moyennant un salaire mensuel but de 1.800 euros qui devait passer à 1.970 euros bruts par mois à compter de juin 2004.

Au 1er août 2013, le salaire minimum des ETAM coefficient 355 était de 1.845,55 euros et celui du cadre (coefficient 95 position 1) était de 1.919,95 euros.

Les bulletins de salaire produits aux débats font apparaître qu'en 2015, le salaire de Monsieur [X] s'élevait à 3.300 euros bruts et qu'il était chef d'édition.

Monsieur [X], outre sa fonction intellectuelle de journaliste et de rédacteur, assumait ainsi des responsabilités dans l'édition du magazine, des suppléments et guides qu'il verse aux débats, et il accomplissait également la tâche de relire et corriger des travaux exécutés par des pigistes.

Monsieur [X] possédant une licence de sciences économiques, le diplôme de journalisme et le diplôme de l'Institut d'Etudes Politiques de [Localité 1], son niveau de formation était équivalent à celui d'un ingénieur, au sens de l'article L1446-1 du code du travail, comme l'a justement relevé le conseil de prud'hommes.

Il est ainsi fondé revendiquer le statut de cadre de la convention collective du SYNTEC, depuis qu'il exerce la fonction de chef d'édition, à une date que la cour ne peut déterminer, les bulletins de salaire antérieurs à l'année 2015 n'ayant été produits par aucune des deux parties.

Monsieur [X] demande la réparation du préjudice que lui a causé l'absence de cotisations à une caisse de retraite des cadres pendant 15 ans(à effet de son embauche, le 1er décembre 2003), qu'il évalue à la somme de 30.000 euros, sans justifier de la méthode de calcul utilisée pour parvenir à ce chiffre.

La société CLASSE EXPORT a elle-même effectué le calcul et explique que si Monsieur [X] avait occupé le statut de cadre, il aurait bénéficié de la garantie minimum de points (GMP), soit la cotisation forfaitaire dûe à l'AGIRC pour les salariés cadres et assimilés dont le revenu ne dépasse pas un certain seuil de salaire (3.611,48 euros par mois en 2017), ce qui représente 120 points par an et une valeur annuelle de 783,36 euros (ou 15.000 euros sur une période de 15 ans).

Il convient en conséquence de condamner la société CLASSE EXPORT à payer à Monsieur [X], à titre de dommages et intérêts, la somme de 783,36 euros multipliée par le nombre d'années pendant lesquelles il a exercé la fonction de chef d'édition, cette créance ne pouvant être fixée dans sa globalité par le présent arrêt pour le motif exposé ci-dessus.

Sur les heures supplémentaires

L'article L. 3171-4 du code du travail énonce en son premier alinéa qu' en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié et en son second alinéa qu'au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande , le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

La preuve des heures de travail effectuées n'incombant spécialement à aucune des parties, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments pouvant être établis unilatéralement par ses soins, mais suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés, pour permettre à l'employeur qui assure le contrôle des heures de travail accomplies de répondre en fournissant ses propres éléments.

Seules les heures supplémentaires accomplies à la demande ou pour le compte de l'employeur, ou au moins avec son accord implicite, donnent lieu à rémunération.

Il en est ainsi lorsque le salarié accomplit régulièrement des heures supplémentaires au vu et au su de l'employeur qui ne s'y est pas opposé.

Le contrat de travail de Monsieur [X] prévoit que son horaire hebdomadaire de travail sera de 35 heures selon l'horaire en vigueur dans l'établissement.

Monsieur [X] affirme que l'horaire de l'entreprise était le suivant : 9 heures-12 heures, 14 heures-18 heures, mais qu'il était sur son lieu de travail dès 8 heures le matin, et en partait tard le soir ou travaillait à son domicile pendant la soirée.

Il demande un rappel de salaire sur la base de 10 heures supplémentaires accomplies par semaine ,sur la période non prescrite comprise entre le 1er décembre 2012 et le 1er décembre 2015, faisant valoir que son employeur lui a imposé de rédiger, en plus de sa mission contractuelle, des articles dans un nouveau magazine, CLASSE EXPORT WALLONIE, et de nombreux guides ou hors-séries, des newsletters diffusées à 35'000 exemplaires et des articles sur le site web, tous documents qu'il produit aux débats.

Il produit en outre les éléments suivants :

- un récapitulatif manuscrit établi par ses soins, reprenant les heures auxquelles il a envoyé des messages à Madame [L] [R] et Monsieur [M] [R],ou à l'étranger, en 2010, 2012, 2013, 2014, 2015, faisant apparaître des heures d'envoi comprises entre 8 heures 07 et 8 heures 45 le matin, et le soir, notamment, les heures d'envoi suivantes: 20 heures 40, 20 heures 45, 21 heures 35 (26 mai 2015, 11 novembre 2013, 11 juin 2013), 19 heures 12 (24 novembre 2013), 17 heures 58 (20 octobre 2014)18 heures 44 et 18 heures 46 (6 mars 2015 et 18 avril 2014), des heures tardives d'envoi de mails pour la préparation d'un plateau télévision en Allemagne les 22, 23, 24 et 25 novembre 2013 (19 heures, 20 heures 50, 22 heures 04), des heures tardives d'envoi de mails le 11 novembre 2013 (de 20 heures 48 à 21 heures 04), le 13 novembre 2013 (18 heures 31 et 18 heures 42), le 19 novembre 2013 (21 heures 20 et 21 heures 23), le 20 novembre 2013 (18 heures 59, 21 heures 20, 21 heures 25, 23 heures 16, 23 heures 18), le 18 novembre 2013 (21 heures 09), le 11 novembre 2013 (20 heures 43), le 22 janvier 2014 (20 heures 03)

- les courriels reçus et envoyés par Monsieur [X] permettant pour certains d'entre eux de corroborer les horaires ci-dessus mentionnés

- les attestations de Madame [T], responsable communication de la société CLASSE EXPORT de mars 2008 à décembre 2008, Madame [N], assistante de production, ayant travaillé dans la société pendant plus de 20 ans, Monsieur [U], maquettiste de presse dans la société CLASSE EXPORT et Monsieur [C] qui a travaillé comme secrétaire de rédaction de la société de janvier à décembre 2007, dont il ressort que les salariés étaient soumis à un rythme de travail soutenu, largement au-delà des 35 heures hebdomadaires, sans paiement des heures supplémentaires, que Monsieur [X] ne ménageait ni sa peine, ni son temps, qu'il arrivait souvent à l'équipe de dépasser le quota d'heures inscrites sur le contrat de travail, qu'il arrivait aux salariés de rester tard ou de venir le week-end et les jours fériés pour assurer le bouclage des différentes éditions, que l'édition des nombreux guides thématiques et vademecum nécessitaient un important travail supplémentaire de recherche d'informations, d'écriture et de 'rewriting'.

La dernière page des guides pratiques et des cahiers de la mobilité internationale édités par la société CLASSE EXPORT contient le nom de Monsieur [X] en qualité de journaliste, de secrétaire de rédaction ou de chef d'édition.

Le guide ALLEMAGNE-FRANCE quel modèle de partenariat' s'ouvre sur un éditorial signé par Monsieur [X] et reproduit la photographie de ce dernier avec la légende suivante : '[X] [X], auteur du guide.'

Monsieur [X] a signé des articles pour la publication CLASSE EXPORT WALLONIE et il a collaboré aux news letters.

Il est établi que ces activités rédactionnelles s'ajoutaient à celles qui sont décrites dans le contrat de travail de Monsieur [X].

Ces éléments sont suffisamment précis et concordants pour laisser présumer que Monsieur [X] a accompli des heures supplémentaires.

La société CLASSE EXPORT admet que l'horaire collectif de travail est bien celui qui est indiqué par Monsieur [X].

Elle se contente de critiquer le caractère probant des éléments apportés par Monsieur [X], mais elle ne produit de son côté aucun élément de nature à démontrer que, compte-tenu de la charge de travail dont il justifie, de la nature et de l'importance de ce travail (notamment rédaction de guides et d'articles, recherche d'informations, coordination de la rédaction, interviews, conférences, édition, imprimerie), et au regard des pièces ci-dessus décrites, le travail demandé à Monsieur [X] pouvait être effectué à l'intérieur des horaires collectifs journaliers, du lundi au vendredi, et que Monsieur [X] n'a pas accompli les 10 heures supplémentaires hebdomadaires qu'il invoque.

Dans ces conditions, il y a lieu d'accueillir la demande de Monsieur [X] et de condamner la société CLASSE EXPORT à lui payer les sommes qu'il sollicite, à savoir 45.762, 47 euros, outre 4.576,24 euros à titre d'indemnité de congés payés afférents, ces sommes étant augmentées des intérêts au taux légal à compter du 16 décembre 2015, date de signature de l'accusé de réception de la convocation devant le conseil de prud'hommes par la société CLASSE EXPORT.

Les intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article 1154 ancien du code civil.

Sur le travail dissimulé

En application de l'article L8221-1 du code du travail, est interdit le travail totalement ou partiellement dissimulé, défini et exercé dans les conditions prévues aux articles L 8221 -3 et L 8221-5.

L'article L8221-5 de ce code énonce qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur, soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L1221-10 relatif à la déclaration préalable à l'embauche, soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L3243-2 relatif à la délivrance d'un bulletin de paie ou de de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre 1er de la troisième partie, soit de ses soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci.

En l'espèce, le caractère intentionnel d'une dissimulation d'emploi salarié résultant de la non-rémunération par l'employeur d'heures supplémentaires , dans la mesure où celles-ci n'avaient pas été déclarées en tant que telles par Monsieur [X], n'est pas démontré.

Les autres éléments invoqués par Monsieur [X] ne sont pas susceptibles de caractériser l'infraction de travail dissimulé.

Il y a lieu de débouter ce dernier de sa demande tendant au paiement d'une indemnité pour travail dissimulé, le jugement étant confirmé sur ce point, par substitution de motifs.

Sur l'exécution du contrat de travail

Monsieur [X] fait valoir que l'employeur a commis des fautes constitutives à la fois d'une exécution déloyale du contrat de travail, d'un harcèlement et d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de préserver la santé de son salarié.

Il invoque à ces trois titres les faits suivants :

- depuis le mois de mars 2015, il est payé seulement sur la base d'acomptes et avec un retard systématique, ce qui lui cause notamment des difficultés avec sa banque qui lui facture des agios

- les bulletins de salaire sont des faux grossiers puisqu'ils indiquent que le salaire est payé sous forme de virement alors qu'il l'était par acompte et par chèque

- la perte au-delà d'une période de trois ans des primes d'ancienneté et du 13ème mois dont il aurait dû bénéficier en application de la convention collective des journalistes

- la perte du bénéfice de l'affiliation à une caisse de retraite des cadres pendant 13 ans

- l'absence de cotisation auprès de l'organisme collecteur de fonds pour la formation professionnelle depuis plus de deux ans

- l'absence de paiement des cotisations à la Mutuelle alors que la part correspondante est déduite de son salaire

- la mise à sa disposition d'un matériel obsolète, alors que d'autres salariés et dirigeants de l'entreprise qui en ont moins besoin disposent de matériel neuf, ce qui constitue une discrimination

- le très grave préjudice moral qu'il subit du fait des affirmations injurieuses proférées à son encontre par son employeur dans ses conclusions

- la convocation à un entretien préalable en vue d'un licenciement postérieurement à l'audience de jugement, alors que l'employeur n'avait rien à lui reprocher, s'agissant d'une manoeuvre pour le contraindre à démissionner

- des menaces proférées à son encontre par mails du 14 février 2015, et par lettre du 15 février 2017

- l'arrêt de travail du 16 février 2017, puis l'inaptitude prononcée le 16 mars 2017

- le fait qu'il n'apparaît plus dans l'ours de CLASSE EXPORT de mars et avril 2017.

Il apparaît qu'à la date du 15 octobre 2015, le salaire de septembre de Monsieur [X] n'avait pas encore été versé dans son intégralité. Ce n'est que dans son courrier du 23 octobre 2015 que la société CLASSE EXPORT a expliqué qu'elle avait informé son personnel en mars 2015 qu'elle allait procéder au versement d'acomptes et que le salaire de septembre de Monsieur [X] était entièrement réglé.

Monsieur [X] ne justifie pas toutefois du préjudice qu'il invoque à ce titre, le montant des acomptes versés n'étant au demeurant pas précisé, et la société semble avoir régularisé définitivement la situation, puisqu'aucune plainte n'est intervenue postérieurement au mois d'octobre 2015.

Le 'faux grossier' ne peut résulter de la mention incriminée par Monsieur [X], laquelle, en tout état de cause, ne saurait caractériser une exécution déloyale du contrat de travail par l'employeur.

Aucune faute de la société n'a entraîné pour Monsieur [X] la perte de primes ou de 13ème mois, le présent arrêt ayant dit que la convention collective des journalistes ne lui était pas applicable.

La perte du bénéfice de l'affiliation à la caisse de retraite des cadres pendant la période au cours de laquelle Monsieur [X] a occupé l'emploi de chef d'édition a été réparée par la condamnation ci-dessus prononcée.

Le courriel du responsable juridique de la FAFIEC en date du 20 juillet 2016 qui confirme que l'entreprise n'est plus à jour de ses cotisations depuis 2013 et l'attestation de Madame [E], opticienne, relative au cas de Monsieur [U], ne suffisent pas à prouver que Monsieur [X] a personnellement été contraint d'effectuer des dépenses qui auraient dû être prises en charge par la Mutuelle.

L'absence d'accès de Monsieur [X] à la formation et le fait qu'il serait le seul salarié de l'entreprise à utiliser un matériel obsolète ne sont pas établis par les pièces 72, 73 et 76 qu'il produit à cet effet.

Les conclusions de l'employeur, certes teintées d'une ironie inappropriée et surtout inutile à la résolution du litige, n'ont rien à voir avec l'exécution du contrat de travail.

Le 17 octobre 2016, la société CLASSE EXPORT a convoqué Monsieur [X] à un entretien préalable à une sanction disciplinaire. Selon l'attestation rédigée par Monsieur [K], conseiller du salarié, le président de la société, Monsieur [R], a dit que la présence de celui-ci lors de l'entretien préalable n'était pas conforme à l'article L1332-2 du code du travail et a refusé qu'il assiste Monsieur [X] , si bien que l'entretien n'a pas eu lieu. La société n'a pas prononcé de sanction.

Monsieur [X] qui avait lui-même saisi le conseil de prud'hommes d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail ne peut soutenir que l'entreprise voulait le voir démissionner.

Les courriels de l'employeur cités par Monsieur [X], en date du 14 février 2017, et la lettre recommandée avec accusé de réception du 15 février 2017 ne peuvent être analysés comme des menaces, s'agissant de faits précis que la société reproche à Monsieur [X] et sur lesquels ce dernier s'est expliqué par lettre recommandée en réponse.

Enfin, si le nom de Monsieur [X] a été retiré de l'ours des parutions de mars et avril 2017, c'est à une date à laquelle son contrat de travail se trouvait suspendu.

Il convient en conséquence de rejeter la demande de dommages et intérêts, la preuve des fautes alléguées à l'encontre de la société CLASSE EXPORT n'étant pas rapportée et aucun lien entre l'arrêt de travail de Monsieur [X], puis l'inaptitude constatée un mois plus tard, et le comportement de l'employeur n'étant établi.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a accueilli la demande formée par Monsieur [X] de ce chef.

Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail

Aux termes de l'article 1184 ancien du code civil, la condition résolutoire est toujours sous entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts. La résolution doit être demandée en justice et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.

Il appartient au salarié qui sollicite la résiliation judiciaire de rapporter la preuve de manquements suffisamment graves par l'employeur à ses obligations contractuelles pour empêcher la poursuite du contrat de travail et ainsi justifier la rupture à ses torts.

A l'appui de sa demande de résiliation judiciaire, Monsieur [X] invoque les griefs qui ont été ci-dessus énoncés dont le bien-fondé n'a pas été démontré.

Pour le surplus, à l'exception du grief relatif au non-paiement des heures supplémentaires, la matérialité des autres manquements allégués (retards systématiques dans le paiement de salaires, obligation de travailler pendant un arrêt-maladie sur la demande expresse de son employeur, exécution de travail dissimulé) n'est pas établie.

L'absence d'entretien d'évaluation pendant 15 ans soulevée en cause d'appel n'était manifestement pas de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.

Dans la mesure où, avant l'introduction de la procédure judiciaire, Monsieur [X] n'avait pas formulé de réclamation en ce qui concerne ses horaires de travail, ni sollicité le paiement d'heures supplémentaires, que, dans son courrier du 15 octobre 2015 à la suite duquel il a saisi le conseil de prud'hommes, Monsieur [X] se plaignait principalement d'un retard dans le paiement de la totalité de son salaire en septembre 2015, des mentions erronées sur les bulletins de paie ci-dessus mentionnées et de la non application à son bénéfice de la convention collective des journalistes, griefs qui ont été soit régularisés, soit écartés par le présent arrêt, et que la condamnation de l'employeur au paiement d'un rappel d'heures supplémentaires n'est prononcée que par le présent arrêt infirmant sur ce point le jugement, le non-paiement par l'employeur de ces heures supplémentaires ne pouvait à lui seul constituer un manquement suffisamment grave pour empêcher toute poursuite du contrat de travail.

Dès lors, la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail formée par Monsieur [X] n'est pas fondée.

Le jugement qui a rejeté cette demande sera confirmé.

Il a été dit plus haut que l'inaptitude de Monsieur [X] ne trouvait pas sa cause dans le comportement de l'employeur, lequel n'était pas constitutif de harcèlement, ni de manquement à l'obligation de sécurité.

Dans ces conditions, le licenciement de Monsieur [X] prononcé pour inaptitude et impossibilité de reclassement est fondé sur une cause réelle et sérieuse et les demandes en paiement consécutives à la rupture du contrat de travail doivent être rejetées.

Monsieur [X] obtenant partiellement gain de cause en ses demandes, le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'indemnité de procédure et la société CLASSE EXPORT sera condamnée aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer à Monsieur [X] une somme de 1.500 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement :

CONFIRME le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, les demandes en paiement consécutives et la demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé, ainsi qu'en ses dispositions relatives aux dépens et à l'indemnité de procédure

L'INFIRME pour le surplus

STATUANT à nouveau,

REJETTE les demandes de Monsieur [X] fondées sur l'application de la convention collective nationale des journalistes

DIT que Monsieur [X] relève du statut de cadre de la convention collective des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs conseils et sociétés de conseils depuis qu'il exerce la fonction de chef d'édition

CONDAMNE la société CLASSE EXPORT à payer à Monsieur [X], à titre de dommages et intérêts, la somme de 783,36 euros multipliée par le nombre d'années pendant lesquelles il a exercé la fonction de chef d'édition

CONDAMNE la société CLASSE EXPORT à payer à Monsieur [X] la somme de 45.762, 47 euros à titre de rappels d'heures supplémentaires pour la période du 1er décembre 2012 au 1er décembre 2015, outre la somme de 4.576,24 euros à titre d'indemnité de congés payés afférents, ces sommes étant augmentées des intérêts au taux légal à compter du 16 décembre 2015

DIT que les intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article 1154 ancien du code civil

REJETTE la demande de dommages et intérêts fondée sur l'exécution déloyale du contrat de travail, le harcèlement et le manquement à l'obligation de sécurité

Y AJOUTANT,

DIT que le licenciement de Monsieur [X] pour inaptitude et impossibilité de reclassement est fondé sur une cause réelle et sérieuse

REJETTE les demandes en paiement consécutives à la rupture du contrat de travail

CONDAMNE la société CLASSE EXPORT aux dépens d'appel

CONDAMNE la société CLASSE EXPORT à payer à Monsieur [X] la somme de 1.500 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Manon FADHLAOUI Joëlle DOAT

Le greffier La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 17/01369
Date de la décision : 03/04/2019

Références :

Cour d'appel de Lyon SA, arrêt n°17/01369 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-04-03;17.01369 ?
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