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24/01/2019 | FRANCE | N°18/06910

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 24 janvier 2019, 18/06910


N° RG 18/06910 - N° Portalis DBVX-V-B7C-L6ND









Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond

du 29 août 2018

4ème chambre



RG : 18/07589







SCI TOUSSIARDE



C/



SARL AVENIR ET LOISIRS ASSURANCES - ALEADE

Société HUBENER





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRÊT DU 24 Janvier 2019



APP

ELANTE :



SCI TOUSSIARDE

Les portes du Dauphiné

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représentée par la SAS TUDELA ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

Assistée par l'AARPI CAA JURIS EUROPAE, avocat au barreau de PARIS





INTIMÉES :



SARL AVENIR ET LOISIR...

N° RG 18/06910 - N° Portalis DBVX-V-B7C-L6ND

Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond

du 29 août 2018

4ème chambre

RG : 18/07589

SCI TOUSSIARDE

C/

SARL AVENIR ET LOISIRS ASSURANCES - ALEADE

Société HUBENER

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRÊT DU 24 Janvier 2019

APPELANTE :

SCI TOUSSIARDE

Les portes du Dauphiné

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par la SAS TUDELA ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

Assistée par l'AARPI CAA JURIS EUROPAE, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉES :

SARL AVENIR ET LOISIRS ASSURANCES - ALEADE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Société HUBENER

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentées par Me Marie BELLOC, avocat au barreau de LYON

Assistées par la SELARL BIRD, avocat au barreau de PARIS

******

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 29 Novembre 2018

Date de mise à disposition : 24 Janvier 2019

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Aude RACHOU, président

- Françoise CLEMENT, conseiller

- Vincent NICOLAS, conseiller

assistés pendant les débats de Marion COUSTAL, greffier

A l'audience, Aude RACHOU a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Aude RACHOU, président, et par Marion COUSTAL, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

La SCI Toussiarde est propriétaire de deux bâtiments situés sur la commune de Saint Pierre de Chandieu (69780). L'un des deux bâtiment (le bâtiment n°1) est divisé en plusieurs parties qui étaient données à bail commercial à la société ABSL exerçant une activité de pizzeria et à la société DC qui y exploitait un établissement de nuit.

Suite à la cessation du bail de la société DC, la SCI Toussiarde a prévu l'installation de nouveaux locataires : une association ayant pour objet l'organisation de brocantes et vides grenier à compter du 1er janvier 2018 et une association 'Why not' ayant pour objet un 'cercle privé pour adultes uniquement - Club de rencontre et de loisirs (uniquement pour adultes)'.

Le 21 décembre 2017, la SCI Toussiarde a souscrit une police d'assurance propriétaire non occupant auprès la SARL Avenir et loisirs assurances - Aleade (la société Avenir), courtier grossiste, le risque étant assuré auprès de la société Hübener Versicherungs AG. Les activités commerciales déclarées étaient alors : 'Pizzeria avec salle de réception, boutique accessoires et pièces motos autos brocantes, association'.

Le 10 janvier 2018, un incendie a gravement endommagé le bâtiment n°1. Le même jour, la SCI Toussiarde a déposé plainte contre X et a déclaré le sinistre à l'assureur.

Le 9 février 2018, l'assureur a refusé la prise en charge du sinistre au motif qu'une activité de club de nuit libertin n'avait pas été déclaré lors de la souscription de la police de même qu'un précédent sinistre survenu en 2015.

Le 11 avril 2018, le maire de la commune a pris un arrêté de péril par lequel la SCI Toussiarde a été mise en demeure de mettre fin au péril résultant de l'état dangereux du bâtiment sinistré dans le délai d'une année.

Par exploits d'huissier en date des 27, 28 et 29 juin 2018, la SCI Toussiarde a assigné à jour fixe la société Avenir et la société Hübener Versicherungs AG devant le tribunal de grande instance de Lyon pour voir dire la garantie incendie du contrat acquise. Les défendeurs concluaient à titre reconventionnel à la nullité du contrat pour fausse déclaration intentionnelle.

Par jugement en date du 29 août 2018, le tribunal a :

Déclaré l'assignation délivrée à la société Hübener Versicherungs AG recevable,

Prononcé la nullité du contrat d'assurance,

Débouté la SCI Toussiarde,

Condamné la SCI Toussiarde à payer à la société Hubener Versicherungs AG et à la société Avenir la somme de 1 200 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Débouté la société Hübener Versicherungs AG et la société Avenir pour le surplus,

Condamné la SCI Toussiarde aux dépens.

Par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel de Lyon le 3 octobre 2018, la SCI Toussiarde a interjeté appel du jugement en ce qu'il a :

Prononcé la nullité du contrat,

Débouté la SCI Toussiarde,

Condamné la SCI Toussiarde à payer à la société Hübener Versicherungs AG et à la société Avenir la somme de 1 200 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner la SCI Toussiarde aux dépens

et a été autorisée à assigner à jour fixe les sociétés Hübener Versicherungs AG et la société Avenir par ordonnance en date du 15 octobre 2018.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 19 octobre 2018, la SCI Toussiarde demande à la cour :

Infirmer le jugement prononcé le 29 août 2018 en ce qu'il a :

Prononcé la nullité du contrat d'assurance (N°HVIM1801-04850-69) souscrit le 28 novembre 2017 par la SCI Toussiarde auprès de la société Hübener Versicherungs AG,

Débouté la SCI Toussiarde,

Condamné la SCI Toussiarde à payer à la société Hübener Versicherungs AG et à la société Avenir la somme de 1.200 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamné la SCI Toussiarde aux dépens.

Statuant à nouveau de ces seuls chefs :

Dire et juger que la garantie incendie de la société Hübener Versicherungs AG est acquise à la SCI Toussiarde au titre du sinistre survenu le 10 janvier 2018, dans les termes de la police multirisques immeuble,

Condamner la société Hübener Versicherungs AG et la société Avenir in solidum à payer à la SCI Toussiarde :

la somme de 210 000 euros au titre de l'indemnisation de la valeur économique du bâtiment sinistré,

la somme de 22 500 euros au titre de l'indemnisation des frais de déblaiement et d'enlèvement des décombres,

la somme de 27 200 euros au titre de l'indemnisation des honoraires d'architecte,

la somme de 8 000 euros au titre de l'indemnisation des frais de destruction du bâtiment sinistré ordonnée par les pouvoirs publics,

Statuer ce que de droit sur la franchise de 3 840,40 euros,

Condamner la société Hübener Versicherungs AG et la société Avenir in solidum à indemniser la SCI Toussiarde des loyers perdus entre le 10 janvier 2018, date du sinistre, et la date de fin des travaux de reconstruction, dans la limite de 17 860 euros conformément à la police,

Donner acte à la SCI Toussiarde qu'elle réserve expressément ses droits à garantie à l'encontre de la société Hübener Versicherungs AG et de la société Avenir :

au titre du solde l'indemnisation auquel elle a droit, en cas de reconstruction du bâtiment sinistré, dans le cadre de la garantie « valeur à neuf » souscrite,

dans l'hypothèse où la Société ABSL - locataire d'une partie des locaux sinistrés et qui y exerçait une activité de pizzeria ' devait engager sa responsabilité pour ne pas avoir fait procéder aux réparations nécessaires après sinistre,

A titre subsidiaire, si une déclaration inexacte devait être retenue à l'encontre de la SCI Toussiarde :

Faire application des dispositions de l'article L. 113-9 du code des assurances avec réduction de l'indemnité en proportion du taux des primes par rapport au taux des primes qui auraient été dues, si les risques avaient été complètement et exactement déclarés, ce sur justification avérée du taux de prime qui aurait été appliquée avec nomination d'un expert si nécessaire,

A titre infiniment subsidiaire, si le contrat devait être annulé :

Dire et juger que la société Avenir aurait engagé sa responsabilité à l'encontre de la SCI Toussiarde,

Dire et juger que le préjudice en résultant pour la SCI Toussiarde serait la perte de chance de bénéficier d'une indemnité d'assurance,

Condamner la société Avenir à verser à la SCI Toussiarde des dommages et intérêts qui ne sauraient être inférieurs à 98% de l'indemnité d'assurance qu'aurait pu percevoir la SCI Toussiarde,

En tout état de cause :

Condamner la société Hübener Versicherungs AG et la société Avenir in solidum à payer à la SCI Toussiarde la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts,

Condamner la société Hübener Versicherungs AG et la société Avenir in solidum à payer à la SCI Toussiarde la somme de 8.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner la société Hübener Versicherungs AG et la société Avenir in solidum aux entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers étant distraits au profit de la SAS Tudela & associés, avocats, sur son affirmation de droit.

Au soutien de ses demandes, la SCI Tussiarde indique que :

L'assignation délivrée à la société Hübener Versicherungs AG est recevable dès lors qu'elle a été adressée par l'huissier de justice français à l'autorité allemande de signification avant le 30 juin 2018, délai fixé par l'ordonnance autorisant l'assignation à jour fixe. Par ailleurs la société Hübener Versicherungs AG ne démontre pas que la prétendue tardiveté lui aurait causé un grief.

Conformément à la déclaration de risque, les locaux assurés n'ont fait l'objet d'aucun sinistre sur les cinq années précédents la souscription du contrat. L'incendie survenu en 2015 ne concernait pas les locaux objet du contrat.

L'association ''Why not' n'est pas un club libertin échangiste, ni un établissement de nuit mais un club de rencontre pour adultes réservé à ses adhérents.

En indiquant comme activités exercées dans les locaux assurées '(...) association', la SCI Toussiarde a exactement répondu aux demandes de l'assureur, à savoir connaître l'usage et/ou les activités précises exercées, la simple indication portant sur l'usage associatif des locaux étant suffisante en présence de critères alternatifs et non cumulatifs.

L'assureur ne rapporte pas la preuve de l'intention frauduleuse de la SCI Toussiarde de cacher l'activité réelle ou supposée de l'association. La production d'une copie écran du site internet du locataire ne prouve pas que le bailleur avait connaissance de l'activité de son locataire.

La nullité du contrat pour fausse déclaration intentionnelle suppose qu'elle ait entraîné un changement de l'objet du risque et modifié l'opinion que l'assureur pouvait se faire du risque. Or la société Hübener Versicherungs AG assure les risques spéciaux et la société Avenir les 'clubs privés'. Ainsi rien ne démontre que, mieux informés, ils auraient modifié leur appréciation du risque, d'autant plus qu'en 2015 un établissement de nuit était présent dans les locaux assurés par la société Hübener Versicherungs AG.

Si toutefois le caractère inexact de la déclaration devait être retenu, l'absence de mauvaise fois de la SCI Toussiarde suppose non la nullité du contrat mais l'application d'une règle proportionnelle de prime.

Les stipulations contractuelles accordaient un délai d'un mois à l'assuré à compter de la date d'effet de la garantie pour transmettre les certificats Q18 et Q4, soit jusqu'au 1er février 2018. La sanction du non respect de cette obligation, à savoir la suspension de la garantie, démontre bien que celle-ci était effective dès le 1er janvier 2018, et donc acquise au jour du sinistre.

La société Avenir engage sa responsabilité en tant que mandataire de la société Hübener Versicherungs AG pour refus de garantie injustifié. Surtout, il lui appartenait d'attirer l'attention de la SCI Toussiarde sur les imprécisions de la déclaration de risques. A défaut elle a causé un préjudice de perte de chance de bénéficier d'une assurance couvrant la perte de son bâtiment.

Dans le calcul du préjudice, la société Hübener Versicherungs AG ne peut faire application d'une coefficient de vétusté en l'absence de production d'un rapport d'expertise.

Le refus de garantie injustifiée a causé à la SCI Toussiarde un préjudice grave qui doit être indemnisé, à savoir le retard dans la mise en oeuvre des travaux de démolition et reconstruction.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 21 novembre 2018, les sociétés Hübener Versicherungs AG et Avenir demandent à la cour de :

A titre principal :

Confirmer le jugement en ce qu'il a jugé que la police était nulle pour fausse déclaration intentionnelle de risque,

Débouter purement et simplement la SCI Toussiarde de ses demandes d'indemnités,

A titre subsidiaire :

Dire et juger que le sinistre ne peut être couvert pour non-respect d'une condition de garantie,

A titre infiniment subsidiaire :

Dire et juger de ce que la police limite l'indemnisation à la valeur d'usage du bâtiment, d'un montant de 175 000 euros,

Dire et juger de ce que les justificatifs ont été réalisés unilatéralement,

Dire et juger de ce que les indemnités doivent être réglées hors taxe,

Dire et juger que les indemnités pour pertes de loyer sont limitées à une année, soit 17.860 euros, tel qu'accepté par la SCI Toussiarde,

Débouter la SCI Toussiarde de sa demande de dommages et intérêts,

Dire et juger que toute indemnité sera limitée à 189 020 euros, soit 192 860 euros moins la franchise de 3 810 euros,

En tout état de cause :

Condamner la SCI Toussiarde à payer la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile à la société Hübener Versicherungs AG ainsi qu'à la société Avenir, outre les dépens de l'instance.

Les sociétés Hübener Versicherungs AG et Aleade expliquent que :

La question de l'irrecevabilité de l'assignation à jour fixe relève de la première instance et n'est plus d'actualité devant la cour d'appel.

La SCI Toussiarde a fait une fausse déclaration en laissant croire que seule deux activités seraient exercés dans ses locaux. Or s'y trouvait une troisième activité, à savoir un établissement de nuit accueillant du public.

L'utilisation seule du terme 'association ' ne permet pas de caractériser l'activité ou l'usage envisagée.

La SCI Toussiarde est de mauvaise foi puisqu'elle avait connaissance de l'activité réelle qui allait être exercée dans ses locaux. Effectivement d'une part elle connaissait très bien sa locataire, d'autre part il est indiqué dans le bail conclu avec l'association ' Why not ' que celle-ci était un club privé.

L'activité d'établissement de nuit modifie l'opinion de la société Hübener Versicherungs AG sur le risque puisqu'elle n'aurait pas proposé une police d'assurance propriétaire non occupant mais une police d'assurance spécifique. Par ailleurs si elle aurait eu connaissance que les locaux accueilleraient un établissement de nuit, elle aurait imposée l'installation d'alarmes ou la présence d'un gardien. Ce dernier aurait d'ailleurs pu éviter la survenance du sinistre.

L'article de presse produit aux débats laisse apparaître qu'un sinistre a bien concerné le bâtiment assuré dans la période de cinq années précédent la souscription du contrat litigieux.

La condition de la garantie incendie, à savoir la production des certificats Q4 et Q18 par la SCI Toussiarde, n'a jamais été remplie.

La société Avenir est un courtier grossiste et n'était donc pas tenu à un devoir d'information et de conseil à l'égard de la SCI Toussiarde.

Conformément à la police d'assurance, l'indemnité éventuelle devra être limitée à la valeur économique du bâtiment tant qu'il n'est pas reconstruit, et ce à l'exclusion de toute autre indemnité. En outre, le calcul ne saurait inclure le montant de la TVA.

Le refus de garantie étant fondé sur des moyens sérieux, il ne saurait être reproché à la la société Hübener Versicherungs AG une faute pour réclamer des dommages et intérêts.

Sur ce :

Sur la nullité du contrat :

Attendu que les intimées reprochent à la SCI Toussiarde d'avoir déclaré de mauvaise foi une des activités exercées dans ses locaux ;

qu'en effet, elle aurait omis de préciser que l'activité déclarée d'association recouvrait en réalité l'activité de club de nuit libertin ;

Attendu que la SCI Toussiarde a répondu le 28 novembre 2017 à un questionnaire d'évaluation du risque en renseignant les paragraphes relatifs au descriptif du risque, à l'état du bâtiment, au voisinage et à la situation géographique, à la protection contre l'incendie, à la protection du risque (vol, vandalisme ...), aux antécédents du risque, notamment incendie ;

Attendu qu'au § descriptif du risque, la SCI a répondu à la question

' Etat, usage et/ou ACTIVITES PRECISES EXERCEES ' de la manière suivante :

' Bât.1 [...] Association, pizzeria avec salle de réception

Boutique pièce détachée auto/moto avec brocante

Bât. 3 VIDE ' ;

Attendu qu'in fine du questionnaire il est indiqué :

'Si vous avez complété intégralement ce questionnaire cliquez sur le bouton ci-contre Envoyer pour le soumettre à nos souscripteurs en vue la tarification, le devis sera adressé à l'adresse [...]

En cas de présence d'un risque aggravant dans le(s) bâtiment(s) compléter impérativement l'annexe 1 (page suivante)

ANNEXE 1 complétée, cochez cette case.' ;

Attendu que l'annexe 1 prévoit la nécessité d'un certain nombre de protections supplémentaires comme notamment les mesures de prévention contre l'incendie ;

qu'elle définit le risque aggravant comme suit :

' On entend par risque aggravant : discothèque, restaurant à thème ou avec piste de danse, bowling, cabaret, clubs et autres loisirs de nuit mais aussi d'une manière générale toute établissement dont l'activité aggrave le risque incendie [...]' ;

Attendu que la SCI n'a pas rempli l'annexe 1 à compléter en présence d'un risque aggravant dans les bâtiments alors qu'elle en a eu connaissance ainsi que cela résulte du paraphe apposé par ses soins sur l'annexe ;

Attendu que la proposition d'assurance établie le 28 novembre 2017 par la société Avenir en qualité de mandataire de la société Hübener Versicherung reprend les déclarations relatives au risque assuré en notant

'Activités commerciales déclarées PIZZERIA AVEC SALLE DE RECEPTION, BOUTIQUE ACCESSOIRES ET PIECES MOTOS AUTOS BROCANTE, ASSOCIATION

Occupation par risque aggravant : NON ' ;

Attendu qu'est dans le débat l'exactitude de la déclaration faite par l'assuré au regard des documents sus visés et le point de savoir si la SCI louait à un établissement de nuit accueillant du public ;

Attendu qu'au regard de ces deux documents, il apparaît que la SCI a certes déclaré deux activités au questionnaire mais que trois activités ont été répertoriées sur la proposition d'assurance ;

qu'au surplus, aucune conséquence ne peut être tirée du fait que la déclaration du risque pouvait laisser penser que l'association se rapportait à l'activité de pizzeria, eu égard à la virgule placée entre les deux termes d'association et de pizzeria ;

qu'aucune irrégularité ne peut donc lui être reprochée de ce chef ;

Attendu que le projet de bail signé le 21 décembre 2017 entre la SCI Toussiarde et l'association Brocante-vide grenier Saint Pierre alors en cours d'immatriculation mentionne que les locaux loués sont à usage de :

' brocante, vide-grenier, dépôt vente et location d'emplacement pour dépôt vente et un usage de Club-Privé pour le local (ex Discothèque DC/ONE SET/ LE DIAMANT)' ;

Attendu que le 22 décembre 2017, l'association Why not a été déclarée en préfecture avec pour objet 'cercle privé pour adultes uniquement, club de rencontre et de loisirs ( uniquement pour adultes)' ;

Attendu qu'il appartient à l'assuré de répondre à une question précise de l'assureur ;

que la sincérité et l'exactitude de ses déclarations doivent s'apprécier en fonction des questions posées ;

qu'en l'espèce, si la réponse à la question portant sur les activités exercées correspondait à celles ci, il n'en reste pas moins que la SCI a répondu de manière inexacte à la demande relative à la présence d'un risque aggravant, le club privé relevant sans ambiguïté de celui ci ;

Attendu que l'assureur conclut à juste titre à la mauvaise foi de l'assuré qui avait connaissance de par le bail conclu quasi concomitamment de l'activité qui allait s'exercer dans les locaux loués et qui indique dans ses écritures devant la cour avoir indiqué au courtier et à l'assureur que les locaux seraient occupés notamment par une association ;

qu'il en veut pour preuve le mail envoyé à M.[Courriel 1] ainsi rédigé :

' Bonjour Monsieur [N]

j'ai une bonne nouvelle à vous annoncer il n'y aura pas de discothèque à assurer dans mes locaux

A la place du Club 100 s'ouvrira un magasin de pièces détachées moto et un peu de brocante

A la place du One Set une association devrait ouvrir un club sans entrée et sortie de public réservé à ses adhérents [...] ' ;

qu'il résulte de ces éléments que la SCI, qui s'était adressée à une société spécialisée dans l'assurance des risques comme les discothèques et autres établissements de cette nature et qui avait déjà loué à des établissements similaires, l'association litigieuse succédant à la discothèque One Set, a fait une fausse déclaration en ne complétant pas la case relative aux risques aggravants et en ne déclarant pas ce risque à l'annexe 1 ;

Attendu que ces déclarations inexactes faites en toute connaissance de cause sont de nature à changer l'objet du risque ou d'en diminuer l'opinion pour l'assureur, eu égard à la nature de l'activité exercée, peu important que le club soit réservé à des adhérents, s'agissant d'un établissement recevant du public dans le cadre d'une activité réservée uniquement aux adultes et qui de ce fait a vocation à ouvrir également la nuit conformément à sa dénomination 'cercle privé pour adultes uniquement, club de rencontre et de loisirs ( uniquement pour adultes)' ;

que l'annexe 1 prévoit pour l'assurance de ces locaux spécifiques un certain nombre de dispositifs supplémentaires comme notamment les mesures de prévention contre le risque d'incendie avec descritiptif de l'installation électrique, présence d'extincteurs, de détection-extinction automatique à l'eau, de robinets incendie armes RIA ... ;

Attendu qu'en conséquence que la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a prononcé la nullité du contrat d'assurance sans qu'il soit nécessaire de s'attarder davantage sur la réalité de l'existence de l'incendie antérieur non déclaré ni sur la prise en charge du sinistre du fait de l'exclusion de garantie encourue pour non respect des exigences contractuelles, cette demande étant présentée à titre subsidiaire pour le cas où la cour ne retiendrait pas la nullité du contrat ;

Attendu qu'enfin la SCI conclut à la responsabilité de la société Avenir qui a manqué à ses obligations en établissant et adressant la lettre formalisant le refus de garantie qui est injustifié au regard des dispositions de l'article L. 113-2 du code des assurances et en n'attirant pas son attention sur le fait que le terme 'association' était insuffisant, en rédigeant le questionnaire de manière inadéquate et en demandant qu'une seule activité soit remplie par case ;

Mais attendu que la société Hübener et la société Avenir concluent à juste titre que cette dernière n'est pas débitrice à l'égard de la SCI d'une obligation de conseil dans la mesure où elle est un courtier grossiste qui a fourni au courtier direct, M.[N], une assistance technique ;

que le mail du 28 novembre 2017 de [P] [F] à M.[N] (agents Allianz FR) avec pour objet 'RE Formulaire renvoyé : QUESTIMMO.pdf SCI LA TOUSSIARDE' et rédigé comme suit :

Bonsoir M.[N],

Nous faisons suite à votre demande de projet pour le risque en référence et vous prions de bien vouloir trouver notre offre jointe. [...] ',

établit sans ambiguïté que la SCI était en relation avec M. [N] ;

que le questionnaire d'évaluation du risque a été proposé à la SCI par M.[N] ;

que le devis établi l'a été sur la base de la proposition du questionnaire que selon le document 'vous avez bien voulu faire compléter à votre client : SCI Toussiarde' ;

qu'aucun élément du dossier ne permet d'établir que le courtier grossiste a assisté le courtier direct se rendant ainsi débiteur d'un devoir d'information et de conseil ;

Attendu en conséquence que la SCI Toussiarde sera également déboutée de ses demandes de ce chef et le jugement confirmé y compris sur le rejet de la demande en dommages et intérêts l'assureur n'ayant pas commis de faute en refusant la prise en charge du sinistre ;

Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge des sociétés Hübener et Avenir les frais irrépétibles engagés ; qu'il convient de leur allouer la somme de 5 000 euros à chacune d'entre elles, la décision étant réformée sur ce point ;

Par ces motifs

La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort

Confirme la décision déférée sauf en ce qu'elle a condamné la SCI Toussiarde à payer à chacune des sociétés Hübener et Avenir et loisirs assurances exerçant sous l'enseigne Aleade la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

et statuant à nouveau de ce chef

Condamne la SCI Toussiarde à payer à chacune des sociétés Hübener et Avenir et loisirs assurances exerçant sous l'enseigne Aleade la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne la SCI Toussiarde aux dépens et accorde aux avocats de la cause qui peuvent y prétendre le droit de recouvrement conforme aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 18/06910
Date de la décision : 24/01/2019

Références :

Cour d'appel de Lyon 01, arrêt n°18/06910 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-01-24;18.06910 ?
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