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20/12/2018 | FRANCE | N°17/00337

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 20 décembre 2018, 17/00337


N° RG 17/00337 N° Portalis DBVX - V - B7B - KZLK









Décision du tribunal de commerce de Lyon

Au fond du 14 décembre 2016



RG : 2016J199





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRET DU 20 Décembre 2018







APPELANTE :



SAS MAXILOC

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 1]



représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE

NOUVELLET, avocat au barreau de LYON

assistée de la SELARL BDLG SOFIGES, avocat au barreau de VIENNE









INTIMEE :



SARL DECREMPS BTP

[Adresse 2]

[Localité 2]



représentée par Maître Olivier GONNET, avocat au barreau de LYON, s...

N° RG 17/00337 N° Portalis DBVX - V - B7B - KZLK

Décision du tribunal de commerce de Lyon

Au fond du 14 décembre 2016

RG : 2016J199

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 20 Décembre 2018

APPELANTE :

SAS MAXILOC

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON

assistée de la SELARL BDLG SOFIGES, avocat au barreau de VIENNE

INTIMEE :

SARL DECREMPS BTP

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Maître Olivier GONNET, avocat au barreau de LYON, substituée par Maître Corinne PEYRONNARD, avocat au barreau de LYON

******

Date de clôture de l'instruction : 10 octobre 2017

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 08 novembre 2018

Date de mise à disposition : 20 décembre 2018

Audience tenue par Françoise CLEMENT, conseiller faisant fonction de président, et Vincent NICOLAS, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,

assistés pendant les débats de Marion COUSTAL, greffier

A l'audience, Françoise CLEMENT a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Aude RACHOU, président

- Françoise CLEMENT, conseiller

- Vincent NICOLAS, conseiller

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Aude RACHOU, président, et par Marion COUSTAL, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

Pour les besoins de son activité professionnelle, la société Decremps BTP a loué à la société Maxiloc, à compter du 2 septembre 2014, une pelle compact Hitachi de 25 tonnes.

Le 26 septembre 2014, la société Decremps BTP a eu un accident avec cette pelle qui a été endommagée ; une déclaration de sinistre a alors été régularisée auprès de son assureur Smabtp qui a indemnisé la société Maxiloc au titre des frais de réparation du matériel loué, sous déduction du montant de la franchise et du carburant réglés directement par le locataire.

La société Maxiloc a ensuite réclamé paiement à la société Decremps BTP et à son assureur, d'une somme de 18 638,64 euros au titre de l'indemnisation d'une perte d'exploitation.

Face au refus de garantie émis par l'assureur, la société Maxiloc a fait citer par acte d'huissier du 27 juillet 2016, la société Decremps BTP devant le tribunal de commerce de Lyon, en paiement des sommes de 18 017,35 euros au titre de sa perte de loyers et 13 124,22 euros au titre de son préjudice financier complémentaire, sollicitant en outre le versement d'une somme de 2 500 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et d'une indemnité de procédure de 3 000 euros.

La société Decremps BTP a soulevé l'incompétence territoriale du tribunal de commerce de Lyon, concluant par ailleurs au rejet des demandes présentées à son encontre en sollicitant le paiement à titre reconventionnel d'une somme de 788,40 euros au titre de la location de la seconde pelle et l'octroi d'une indemnité de procédure de 2 000 euros.

Par jugement rendu le 14 décembre 2016, le tribunal de commerce de Lyon s'est déclaré compétent et a débouté les parties de leurs demandes, condamnant la société Maxiloc aux dépens et à payer à la société Decremps BTP une indemnité de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Selon déclaration du 13 janvier 2017, la société Maxiloc a formé appel à l'encontre de ce jugement.

Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 10 juillet 2017 par la société Maxiloc qui conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de la société Decremps BTP et à son infirmation pour le surplus en demandant à la cour de condamner la société Decremps à lui payer les sommes de 18 017,35 euros au titre de sa perte de loyers et 13 124,22 euros au titre de son préjudice financier complémentaire, 2 500 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et une indemnité de procédure de 6 000 euros, en demandant à la cour de dire irrecevable et en tous cas mal fondée la demande reconventionnelle en paiement d'une somme de 788,40 euros,

Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 16 mai 2017 par la société Decremps qui conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté la société Maxiloc de l'intégralité de ses demandes et à sa réformation pour le surplus, sollicitant la condamnation de la société Maxiloc à lui payer les sommes de 788,40 euros au titre de la location de la seconde pelle et une indemnité de procédure de 6 000 euros,

Vu l'ordonnance de clôture de la procédure en date du 10 octobre 2017.

MOTIFS ET DECISION

Le jugement frappé d'un appel total ne fait l'objet d'aucune critique s'agissant du rejet de l'exception d'incompétence territoriale présentée par la société Decremps BTP ; il mérite dès lors d'être confirmé de ce chef.

I. Sur les demandes de la société Maxiloc en paiement des sommes de 18 017,35 euros au titre de sa perte de loyers et 13 124,22 euros au titre de son préjudice financier complémentaire :

La société Maxiloc soutient que le tribunal a confondu responsabilité et assurance en considérant que dans la mesure où la société Decremps BTP n'était pas assurée au titre du risque perte d'exploitation, elle ne devait pas indemniser sa cocontractante ; elle soutient que la responsabilité de cette dernière n'est pas discutable, peu important les obligations d'assurance prévues au titre des conditions générales, l'obligation pour le locataire d'indemniser les pertes d'exploitation du preneur n'ayant pas à être spécifiquement prévue pour être appliquée, alors même qu'aucune limitation de responsabilité et/ou garantie n'est prévue.

Elle conteste être débitrice d'une obligation de renseignement et de mise en garde au titre de la couverture de son contrat d'assurance.

S'agissant de l'indemnisation qu'elle réclame, elle considère que la perte de chance de louer sa pelle est démontrée ainsi que le préjudice financier complémentaire subi dans le cadre du contrat de crédit-bail souscrit pour l'acquisition du matériel endommagé.

La société Decremps BTP soutient quant à elle que la société Maxiloc a manqué à ses obligations de renseignement et de mise en garde en n'alertant pas sa cocontractante sur l'étendue restreinte de la couverture d'assurance aux termes des conditions générales ; elle ajoute que la société Maxiloc ne rapporte ni la preuve de la perte de chance qu'elle invoque ni la preuve de l'existence d'un lien entre le paiement des loyers dans le cadre du contrat de crédit-bail et la location de la pelle.

Sur ce :

A compter de la prise de possession du matériel loué, la garde en est transférée au locataire qui en supporte tous les risques et devient responsable pendant toute la durée de la location, de tous les dommages matériels ou immatériels causés à des tiers et de tous les dommages matériels causés à l'engin et dommages immatériels consécutifs ou non, quelle qu'en soit la cause.

Les conditions générales s'appliquant au contrat des parties prévoient en leur paragraphe 5, une obligation d'assurance, tant au titre de la responsabilité civile pour les véhicules terrestres à moteur ou autres matériels en ce qui concerne les dommages causés aux tiers, qu'au titre des dommages causés au matériel loué (bris, incendie, vol...) ; il est précisé à ce dernier titre, que le locataire est responsable des dommages causés au matériel loué qui peuvent être couverts de 3 manières différentes : soit par la souscription d'un contrat d'assurance dont le locataire doit informer de l'existence et du contenu le loueur, soit par le locataire qui accepte la renonciation à recours du loueur sous réserve de conditions d'étendue, d'exclusion et de tarification de la garantie listées, soit enfin par le locataire qui reste son propre assureur sous réserve de l'acceptation du loueur.

Si aucune disposition des conditions générales ni aucune clause spéciale du contrat de location particulier conclu entre les parties n'a prévu une obligation d'assurance concernant les dommages immatériels consécutifs ou non aux dommages causés à la chose louée, aucune limitation de responsabilité ou de garantie n'a pour autant été convenue entre les parties et la société Decremps BTP est donc inopérante à invoquer l'absence de garantie de l'assureur en la matière.

L'attestation d'assurance requise par les conditions générales au titre des dommages causés au matériel loué, souscrite par la société Decremps BTP qui en connaissait donc nécessairement les limites expressément listées aux termes du document, tant en ce qui concerne les dommages garantis que les limites de garantie et franchise, a par ailleurs été remise au loueur sans qu'aucune obligation de mise en garde ne puisse être reprochée à ce dernier concernant l'étendue de la garantie, la cour rappelant que l'obligation de mise en garde dont est débitrice la société de location, professionnelle de la location d'engins, consiste seulement dans la mise à disposition d'un engin de chantier adapté aux besoins de sa cliente et en bon état de marche.

Aucune circonstance ne permet dès lors de retenir l'absence ou la limitation de la responsabilité et obligation d'indemnisation par le locataire des préjudices immatériels causés au loueur, à la suite de l'endommagement, en cours d'utilisation par le locataire, de l'engin loué.

La société Decremps BTP doit en conséquence être déclarée responsable du préjudice subi en la matière par la société Maxiloc, infirmant en cela le jugement critiqué.

L'accident a eu lieu le 26 septembre 2014 alors que le contrat de location avait été conclu pour une durée de deux mois allant du 2 septembre au 31 octobre 2014, moyennant un prix de location journalier de 294 euros HT.

La pelle a été réparée et restituée à la société Maxiloc le 9 janvier 2015 selon facture de la société Terramat et attestation de l'expert-comptable de l'entreprise.

Les documents de gestion produits par la société Maxiloc permettent à la cour de fixer, moyennant un taux de location de la pelle endommagée de 71 % pour la période en jours ouvrés allant du 1er novembre 2014 au 9 janvier 2015, soit 47 jours dont doivent être retirés 7 jours en période de fêtes de fin d'année, et un prix moyen de location de 258,87 euros HT, à la somme de 10 354,80 euros le montant de la perte de chance subie par la société Maxiloc, de pouvoir louer l'engin de chantier.

La société Decremps BTP prétend à tort que l'indemnisation revenant à la société de location doit être diminuée du montant de la location de la pelle de substitution louée en supplément par elle-même de façon à assurer la fin du chantier ; il s'avère en effet que la location invoquée concerne un tout autre chantier que celui de [Localité 3] concerné par la pelle endommagée et qu'aucune déduction ne doit donc être appliquée à ce titre.

Il s'avère enfin que la pelle endommagée louée à la société Decremps BTP a été acquise le 22 avril 2013 par la société Maxiloc au moyen d'un contrat de crédit-bail au titre duquel cette dernière devait s'acquitter de 48 loyers mensuels de 3 741,42 euros HT ainsi qu'il ressort du contrat correspondant produit au dossier.

Au cours de la période d'indisponibilité, la société Maxiloc a versé la somme de 10 101,83 euros HT sans bénéficier de la contrepartie prévue au titre de la location et cette somme doit en conséquence lui être allouée à titre d'indemnisation complémentaire.

II. Sur la demande reconventionnelle de la société Maxiloc en paiement d'une somme de 788,40 euros au titre de la location d'une seconde pelle :

La société Decremps BTP fait valoir qu'elle a trop payé une somme de 788,40 euros au titre de la location d'une pelle dont le coût de location accepté était inférieur à celui facturé et payé.

La société Maxiloc soutient que cette demande est irrecevable comme n'ayant pas de lien suffisant avec la demande principale au sens de l'article 70 du code de procédure civile ; elle ajoute qu'en tout état de cause, la société Decremps BTP a accepté les conditions de location sur lesquelles elle ne peut revenir à posteriori.

Sur ce :

La demande reconventionnelle ainsi présentée a manifestement un lien suffisant avec la demande principale au sens de l'article 70 du code de procédure civile en ce qu'elle concerne un contrat de location concomitant au contrat litigieux susvisé ; elle doit en conséquence être déclarée recevable.

Le coût de location de la pelle litigieuse a été expressément accepté par la société Decremps BTP au titre du contrat signé le 30 septembre 2014 entre les parties et elle ne peut sérieusement revenir en cours de procédure, sur les conditions tarifaires ayant fait la loi des parties.

La demande reconventionnelle de la société Decremps BTP doit en conséquence être rejetée, confirmant en cela la décision du tribunal.

III. Sur la demande en dommages-intérêts pour résistance abusive présentée par la société Maxiloc :

L'abus dans son refus de paiement invoqué par la société Maxiloc à l'encontre de la société Decremps BTP n'est pas justifié en l'état des éléments du dossier et la demande en dommages-intérêts présentée à ce titre par l'intéressée doit être rejetée, confirmant encore la décision critiquée.

IV. Sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile :

L'équité et la situation économique des parties commandent enfin l'octroi à la société Maxiloc, d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, à la charge de la société Decremps BTP qui doit être déboutée en sa demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant contradictoirement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Déclare recevable la demande reconventionnelle en paiement de la somme de 788,40 euros présentée par la société Decremps BTP,

Confirme le jugement rendu le 14 décembre 2016 par le tribunal de commerce de Lyon en ce qu'il s'est déclaré compétent et a débouté la société Decremps BTP de sa demande reconventionnelle en paiement de la somme de 788,40 euros et la société Maxiloc de sa demande en paiement d'une somme de 2 500 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,

Infirmant pour le surplus et y ajoutant,

Condamne la société Decremps BTP à payer à la société Maxiloc les sommes de :

- 10 354,80 euros à titre de dommages-intérêts au titre de la perte de chance de pouvoir donner en location la pelle accidentée,

- 10 101, 83 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice financier,

- 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les demandes supplémentaires des parties,

Condamne la société Decremps BTP aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, par ceux des mandataires des parties qui en ont fait la demande.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 17/00337
Date de la décision : 20/12/2018

Références :

Cour d'appel de Lyon 01, arrêt n°17/00337 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-12-20;17.00337 ?
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