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28/09/2018 | FRANCE | N°18/00615

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 28 septembre 2018, 18/00615


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





R.G : N° RG 18/00615





X...



C/

SNC BEYNOST COMMERCIAL

SAS HOLDIS







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOURG EN BRESSE

du 25 Mars 2016

RG : F 14/00383

COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 28 SEPTEMBRE 2018







APPELANTE :



Céline, Morgane X... épouse Y...

née le [...] à NIORT (79000)
r>[...]



Non comparante, représentée par Me Maud Z..., avocat au barreau de LYON





INTIMÉES :



SNC BEYNOST COMMERCIAL venant aux droits de la société BEYNOST BRICO&SPORTS également dénommée BEYNOSTBRICO

Zac des Baterses Centre Commercial ...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : N° RG 18/00615

X...

C/

SNC BEYNOST COMMERCIAL

SAS HOLDIS

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOURG EN BRESSE

du 25 Mars 2016

RG : F 14/00383

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 28 SEPTEMBRE 2018

APPELANTE :

Céline, Morgane X... épouse Y...

née le [...] à NIORT (79000)

[...]

Non comparante, représentée par Me Maud Z..., avocat au barreau de LYON

INTIMÉES :

SNC BEYNOST COMMERCIAL venant aux droits de la société BEYNOST BRICO&SPORTS également dénommée BEYNOSTBRICO

Zac des Baterses Centre Commercial BEYNOST II

[...]

SAS HOLDIS

ZAC des Baterses Centre Commercial BEYNOST II

[...]

Représentées par Me Philippe G... de la SELARL ALCYACONSEIL SOCIAL, avocat au barreau de LYON substitué par Me Fanny A..., avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 20 Juin 2018

Présidée par Michel B..., Président magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Gaétan PILLIE, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ:

- Michel B..., président

- Natacha LAVILLE, conseiller

- Sophie NOIR, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 28 Septembre 2018 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Michel B..., Président et par Gaétan PILLIE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La SAS BRICODIS a exploité jusqu'en 2006 un magasin de bricolage et jardinage à l'enseigne initiale 'Mr BRICOLAGE' implanté sur le même site que l'hypermarché LECLERC dans la [...] (01).

En 2006, l'exploitation de ce magasin a été reprise par la SAS BEYNOSTBRICO, également dénommée BEYNOST BRICO & SPORTS, d'abord sous l'enseigne 'Mr BRICOLAGE' puis sous celle de 'BRICO-LECLERC'.

La SAS BEYNOSTBRICO a embauché le 1er octobre 2012 Céline Y..., née X..., par contrat de travail à durée indéterminée et à temps plein en qualité de vendeuse (niveau 1, degré B, échelon 120).

Cette relation de travail était contractuellement soumise à la convention collective nationale du bricolage.

Le 23 janvier 2013, Céline Y... a été victime d'un accident du travail lui causant une lombalgie qui a nécessité des arrêts de travail continus pendant plusieurs mois, la salariée n'ayant repris son poste que le 26 août 2013.

Le 2 septembre 2013, Céline Y... a toutefois été victime d'une rechute de cet accident du travail. Elle a repris son poste en novembre 2013 à mi-temps thérapeutique.

Le 17 février 2014, elle a de nouveau été arrêtée avec suspension de son mi-temps thérapeutique jusqu'au 3 mars 2014 du fait de l'impossibilité de respecter la limitation de ports de charges prescrite. Elle a repris son poste à temps plein le 1er mai 2014.

Par courrier recommandé du 26 juin 2014, la SAS HOLDIS, exploitante de l'hypermarché LECLERC voisin, a fait part à Céline Y... du transfert de son contrat de travail à compter du 1er juillet 2014 à ladite société HOLDIS, précisant :

« Ce transfert intervient dans le cadre des dispositions d'ordre public de l'article L 1224 '1 du code du travail et implique une reprise de tous les droits liés à l'ancienneté acquise au sein de la société BEYNOSTBRICO.

Vous continuerez à exercer les fonctions de conseiller vendeur, correspondant à un emploi d'employé commercial de niveau II B selon la convention collective nationale du commerce à prédominance alimentaire.

Dans un premier temps, vous serez affectée au rayon D.P.H.

Votre rémunération mensuelle brute de base sera maintenue et vous bénéficierez du dispositif des pauses conventionnelles rémunérées.

À titre indicatif, vos horaires de travail applicable à effet du 15 juillet sont définis en annexe.

Du 1er au 14 juillet, vos horaires resteront identiques à ceux pratiqués au sein de BEYNOSTBRICO. (') »

Par courrier adressé à la SAS HOLDIS du 29 juin 2014, Céline Y... a contesté l'applicabilité en l'espèce de l'article L 1224'1 du code du travail et donc le transfert de son contrat de travail à cette société.

Par courrier recommandé daté du 1er juillet 2014, la société HOLDIS, faisant valoir que la cession du fonds de commerce s'accompagnait d'un maintien de l'identité (développement d'un rayon dédié au bricolage) et d'une poursuite de l'activité bricolage sous l'enseigne E. LECLERC, a réitéré son affirmation selon laquelle le contrat de travail de Céline Y... avait été transféré par application de l'article L 1224'1 du code du travail et a mis en demeure cette salariée de reprendre immédiatement ses fonctions au sein de la société HOLDIS, lui précisant qu'un refus persistant de sa part serait susceptible de caractériser une violation de ses obligations contractuelles pouvant autoriser la société à prendre l'initiative de rompre le contrat de travail sans indemnité.

Par courrier remis en main propre le 2 juillet 2014, douze salariés de la société BEYNOSTBRICO, dont Céline Y... , ont écrit à la direction de la SAS HOLDIS pour maintenir leur contestation du transfert à cette dernière de leurs contrats de travail respectifs, lui faire part de leur souhait de poursuivre l'exécution de leur contrat de travail dans le cadre d'une surface commerciale dédiée au bricolage, et lui notifier leur refus de déférer à la mise en demeure de rejoindre leurs postes au sein de l'hypermarché LECLERC qui leur avait été adressée le 1er juillet 2014.

Par acte huissier du 3 juillet 2014, la SAS HOLDIS a fait délivrer à tous les salariés précités, dont Céline Y... , une sommation d'avoir à reprendre leurs postes de travail respectifs au sein de la SAS HOLDIS sur le champ et au plus tard le vendredi 4 juillet 2014.

Le 4 juillet 2014, le contrat de travail de Céline Y... à de nouveau été suspendu en suite d'un arrêt de travail dans le cadre d'une rechute son accident du travail du 23 janvier 2013. Cet arrêt de travail a été renouvelé jusqu'à la rupture de la relation contractuelle.

Par lettre recommandée AR du 4 juillet 2014, Céline Y... a en effet été convoquée par la SAS HOLDIS à un entretien fixé au 15 juillet 2014, préalable à son éventuel licenciement pour faute grave. Ce même courrier notifiait par ailleurs à la salariée une mise à pied à titre conservatoire dans l'attente de la décision de l'employeur à intervenir.

Céline Y... ne s'est pas présentée à cet entretien et la société HOLDIS lui a notifié par lettre recommandée AR du 22 juillet 2014 son licenciement pour faute grave, en suite de son refus du transfert de son contrat de travail et de la prise de son poste au sein du magasin LECLERC.

Contestant le bien-fondé de ce licenciement, Céline Y... a saisi le conseil de prud'hommes de Bourg-en-Bresse le 22 décembre 2014 d'une action à l'encontre tant de la SAS HOLDIS que de la société BEYNOST COMMERCIAL, qui se présente comme venant aux droits de la société BEYNOST BRICO& SPORTS, également dénommée BEYNOSTBRICO.

Lors de l'audience devant le bureau de jugement, Céline Y... demandait au conseil de prud'hommes :

' constater que l'employeur a manqué aux obligations découlant du contrat de travail :

- en manquant son obligation de sécurité de résultat,

-en omettant de faire procéder aux visites médicales d'embauche de reprise,

' condamner solidairement les sociétés HOLDIS et BEYNOST BRICO & SPORTS à payer à Céline Y... la somme de 6080,28 euros à titre d'indemnité pour exécution déloyale du contrat de travail ;

' constater que les motifs invoqués dans la lettre de licenciement sont dépourvus de tout caractère réel et sérieux et que le licenciement a été notifié à Céline Y... alors même qu'elle était en arrêt de travail suite à un accident du travail ;

' dire et juger que le licenciement de Céline Y... a été prononcé en violation des règles de protection des salariés victimes d'un accident du travail ;

' par conséquent, condamner solidairement les sociétés HOLDIS et BEYNOST BRICO & SPORTS à payer à Céline Y... :

1110,82 euros bruts à titre de rappel de salaire sur mise à pied

1520,07 euro brut à titre d'indemnité de préavis

263,09 euro brut à titre de congés payés sur rappel de salaire et préavis

608,03 euros à titre d'indemnité de licenciement,

18'240,84 euros nets à titre d'indemnité pour licenciement illicite

2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

' condamner solidairement les sociétés HOLDIS et BEYNOST BRICO & SPORTS à remettre à Céline Y... 1 attestation PÔLE EMPLOI rectifiée ainsi qu'un bulletin de paye établis en fonction des condamnations à intervenir et ce, sous astreinte de 100 € par jour de retard et par document ;

' dire et juger que ces sommes porteront intérêt à compter de la saisine du conseil de prud'hommes ;

' condamner solidairement les sociétés HOLDIS et BEYNOST BRICO & SPORTS aux entiers dépens,

' prononcer l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

En défense, les sociétés HOLDIS et BEYNOST COMMERCIAL ont conclu au mal fondé de ces demandes de Céline Y... et à son débouté intégral, sollicitant en outre sa condamnation à leur payer la somme de 2500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 25 mars 2016, le conseil de prud'hommes de Bourg-en-Bresse a :

'dit que la faute grave est constituée ;

' débouté Céline Y... de ses autres demandes,

' débouté la société HOLDIS de sa demande reconventionnelle,

' laissé les dépens à la charge de chaque partie.

Céline Y... a régulièrement interjeté appel de cette décision le 20 avril 2016 à l'encontre d'une part de la SAS HOLDIS et d'autre part de la société BEYNOST COMMERCIAL venant aux droits de la société BEYNOSTBRICO.

*

Au terme de ses dernières conclusions, Céline Y... demande aujourd'hui à la cour d'appel d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de :

1°) ' constater que l'employeur a manqué aux obligations découlant du contrat de travail:

en manquant à son obligation de sécurité de résultat, notamment en omettant d'évaluer les risques et d'établir le document unique d'évaluation des risques,

en omettant de faire procéder aux visites médicales d'embauche de reprise,

en omettant de respecter les minima collectifs applicables,

et en ne maintenant pas le salaire suivant les dispositions conventionnelles lors de l'arrêt de travail pour accident du travail

' par conséquent, condamner solidairement les sociétés HOLDIS et BEYNOST COMMERCIAL, venant aux droits de la société BEYNOST BRICO & SPORTS , à payer à Céline Y... 1 indemnité de 6080,28 euros nets pour manquement aux obligations découlant du contrat de travail et exécution déloyale du contrat de travail ;

2°) ' constater que les motifs invoqués à la lettre de licenciement sont dépourvus de tout caractère réel et sérieux,

' constater que les actifs de la société BEYNOSTBRICO ont été réparti entre les sociétés HOLDIS et BEYNOST COMMERCIAL,

' constater que les salariés ont été affectés à différents rayons de HOLDIS avant le transfert ;

' constater qu'il n'y a pas eu de transfert d'une entité économique autonome qui conserve son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise entre les sociétés BEYNOSTBRICO et HOLDIS ;

' constater que le refus de Céline Y... du transfert de son contrat de travail n'est pas caractérisé, Céline Y... étant de repos les 1er juillet, 2 juillet ainsi que le 3 juillet au matin, et la suspension du contrat de travail consécutive à l'arrêt de travail du 4 juillet 2014 ne lui permettait pas de déféré à la sommation d'avoir à prendre le poste au rayon DPH de HOLDIS ;

' constater que le transfert du contrat de travail de Céline Y... s'accompagner de conditions de travail incompatible avec son état de santé ;

' dire et juger que le licenciement de Céline Y... ne repose ni sur une faute grave, ni sur une cause réelle et sérieuse ;

' constater que le licenciement a été notifié à Céline Y... alors même qu'elle était en arrêt du travail suite à un accident du travail ;

' constater que le licenciement prononcé en violation des dispositions de l'article L 12 26 ' neuf du code du travail est entaché de nullité ;

' dire et juger que le licenciement de Céline Y... a été prononcé en violation des règles de protection d'salariée victime d'un accident du travail, et qu'il est en conséquence entachée de nullité ;

' par conséquent, condamner solidairement les sociétés HOLDIS et BEYNOST COMMERCIAL, venant aux droits de la société BEYNOST BRICO & SPORTS , à payer à Céline Y... :

1110,82 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied

1520,07 euro à titre d'indemnité de préavis,

263,09 euro à titre de congés payés sur rappel de salaire et préavis,

608,03 euros à titre d'indemnité de licenciement,

18'240,84 euros (12 mois de salaire) à titre d'indemnité pour licenciement illicite,

4500 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait du transfert imposé ;

3°) ' condamner solidairement les sociétés HOLDIS et BEYNOST COMMERCIAL, venant aux droits de la société BEYNOST BRICO & SPORTS ,, à remettre à Céline Y... une attestation PÔLE EMPLOI rectifiée ainsi qu'un bulletin de paye établie en fonction des condamnations à intervenir et ce, sous astreinte de 100 € par jour de retard et par document ;

4°) ' dire et juger que ces sommes porteront intérêt à compter de la saisine du conseil de prud'hommes ;

5°) ' condamner solidairement les sociétés HOLDIS et BEYNOST COMMERCIAL, venant aux droits de la société BEYNOST BRICO & SPORTS , à payer à Céline Y... la somme de 2000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

6°) condamner solidairement les sociétés HOLDIS et BEYNOST COMMERCIAL, venant aux droits de la société BEYNOST BRICO & SPORTS, aux entiers dépens.

Aux termes de leurs dernières conclusions, la SAS HOLDIS et la SNC BEYNOST COMMERCIAL, venant aux droits de la SAS BEYNOST BRICO & SPORTS, demandent pour leur part à la cour d'appel de :

'confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Bourg-en-Bresse du 25 mars 2016 en toutes ses dispositions ;

en conséquence,

' dire et juger que le contrat de travail de Céline Y... a été transféré de la société BEYNOST BRICO & SPORTS à la société HOLDIS à effet du 1er juillet 2014 suite à la cession du fonds de commerce, en application de l'article L 1224 '1 du code du travail ;

' constater que Céline Y... a délibérément refusé de se présenter à son poste de travail au sein de la société HOLDIS à compter du 1er juillet 2014 ;

' juger que le licenciement de Céline Y... repose bien sur une faute grave;

' constater l'absence d'exécution déloyale de son contrat de travail ;

' débouter Céline Y... de l'intégralité de ses demandes ;

' la condamner à verser à la société HOLDIS la somme de 2500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

' la condamner aux entiers dépens de l'instance.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées, qu'elles ont fait viser par le greffier lors de l'audience de plaidoiries et qu'elles ont à cette occasion expressément maintenues et soutenues oralement en indiquant n'avoir rien à y ajouter ou retrancher, sauf que le conseil des sociétés intimées a précisé, sur demande de la cour, que ces dernières étaient d'une part la SARL HOLDIS et d'autre part la SNC BEYNOST COMMERCIAL, laquelle vient aux droits de la SAS BEYNOST BRICO & SPORTS, précédemment dénommée BEYNOSTBRICO, par suite d'une fusion ' absorption, comme indiqué par l'appelante dans sa déclaration d'appel.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1. ' Sur la demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail:

L'article L 1222 '1 du code du travail impose aux parties d'exécuter cette convention de bonne foi.

En l'espèce, Céline Y... sollicite la condamnation solidaire des sociétés BEYNOSTBRICO et BEYNOST COMMERCIAL, venant aux droits de la société BEYNOST BRICO & SPORTS, à lui payer la somme de 6080,28 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice né pour elle de l'exécution déloyale du contrat de travail par son employeur, estimant que celui-ci a manqué à ses obligations contractuelles sur les points suivants:

' en violant son obligation de sécurité de résultat, notamment en omettant d'évaluer les risques et d'établir le document unique d'évaluation des risques dans l'entreprise

' en omettant de faire procéder aux visites médicales d'embauche de reprise,

' en omettant de respecter le salaire minimum conventionnel applicable,

' et en omettant de maintenir son salaire suivant les dispositions conventionnelles lors de son arrêt de travail pour accident du travail.

*

Les articles L4121-1 et L41 21-2 du code du travail imposent à l'employeur de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ainsi que de veiller à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendres à l'amélioration des situations existantes.

Dans ce cadre, l'employeur se doit notamment d'évaluer les risques et de les répertorier dans un document unique mis à jour au moins une fois par an et porté à la connaissance des salariés, ce document unique devant servir à orienter l'employeur dans la définition des actions de prévention prioritaires lui permettant de supprimer ou de réduire les risques et facteurs de pénibilité identifiés et d'améliorer les conditions de travail (L 4121-3 du code du travail).

Concernant le document unique d'évaluation des risques, les sociétés intimées contestent tout manquement de la société BEYNOSTBRICO à ses obligations sur ce point et produit un document intitulé 'résultats de l'évaluation des risques professionnels : document unique' établi par la société BRICODIS le 16 août 2005 (pièce commune K de l'employeur).

Force est de constater que ce questionnaire d'auto-évaluation des risques, établi sur une trame de la Fédération des magasins de bricolage, n'a été que très imparfaitement rempli, plusieurs parties du questionnaire étant curieusement restées vierges.

Par ailleurs et surtout, ce document n'a manifestement jamais été réactualisé ni par la société BRICODIS avant 2006, ni par la société BEYNOSTBRICO depuis cette date, et ce en dépit notamment des accidents du travail à répétition subis en particulier en 2012 et 2013 par Céline Y... et sa collègue Maud C....

Or :

' l'article R 4121'2 du code du travail impose dans les entreprises de plus de 11 salariés telles que BEYNOSTBRICO une mise à jour de ce document au moins chaque année,

' et l'employeur ne justifie pas, bien que cela lui incombe, des conditions dans lesquelles il informait les salariés de l'existence de ce document ni des conditions dans lesquelles il le tenait à leur disposition comme à celle des organisations représentatives du personnel (délégués du personnel, et le cas échéant CHSCT).

La négligence dont a ainsi fait preuve la société BEYNOSTBRICO en omettant de compléter et d'actualiser le document unique d'évaluation des risques professionnels établi en 2005 par la société BRICODIS démontre le désintérêt manifeste que portait la direction de cette entreprise à la sécurité au travail, en dépit des risques importants pouvant exister dans une grande surface de vente de produits de bricolage et jardinage.

Ce désintérêt est d'ailleurs confirmé, s'il en était besoin, par la décision prise par la direction du magasin en janvier 2013 concernant l'habillage en bois des têtes de gondole du rayon décoration.

Il résulte en effet des attestations concordantes de Florian D... et Sylvain E..., autres salariés de l'entreprise (pièces salariée 65 et 66) que début 2013, le nouveau directeur du magasin BRICO LECLERC a décidé que les palettes présentant les produits en tête de gondole devraient être 'habillées' de bois pour une présentation plus esthétique. Ces salariés de même que l'appelante, expliquent que ce changement avait pour conséquence que ces palettes ne pouvaient plus être déplacées avec un transpalette et d'imposer aux conseillères ' vendeuses du rayon, Céline Y... et Maud C..., de garnir à la main ces palettes de produits pouvant s'avérer d'un poids considérable, telle que des pots de peinture de 20 litres ou des sacs de ciment, ce qui représentait une manutention particulièrement lourde et éprouvante pour ses salariées. Florian D... indique, sans être contredit, que Maud C... a tenté d'attirer l'attention de sa direction sur cette difficulté, à plusieurs reprises mais vainement.

Les sociétés intimées n'ont d'ailleurs pas jugé opportun dans leurs conclusions d'appel dans le présent dossier de répondre de façon précise aux arguments de Céline Y... sur ce point.

Il est par ailleurs à noter que la société BEYNOST COMMERCIAL, venant aux droits de la société BEYNOSTBRICO, n'établit aucunement que l'une ou l'autre de ces 2 entités juridiques ait jamais remis en cause (ne serait-ce qu'en contestant la prise en charge de l'accident du travail par la CPAM) l'imputabilité de cet accident du travail du 23 janvier 2013 subi par Céline Y... aux manutentions effectuées par elle dans l'entreprise, pas plus que l'imputabilité à des manutentions identiques de l'accident du travail subi le 18 février 2013 par l'autre salariée du rayon, Maud C..., dans des conditions et avec des conséquences tout à fait similaires.

Il est ainsi amplement rapporté la preuve de manquements réitérés de la société BEYNOSTBRICO à son obligation de sécurité posée par l'article L 4121-1 précité, manquements qui ne peuvent dans un tel contexte qu'être volontaires et constituent ainsi des violations du principe d'exécution de bonne foi du contrat de travail par les parties.

*

En ce qui concerne le retard apporté dans l'organisation des visites de Céline Y... chez le médecin du travail, Céline Y... relève à juste titre :

' qu'elle a été embauchée le 1er octobre 2012 et qu'elle aurait donc dû bénéficier de la visite médicale d'embauche chez le médecin du travail avant l'expiration de sa période d'essai le 31 octobre 2012, ce qui n'a pas été le cas ;

' qu'ayant été victime le 23 janvier 2013 d'un accident du travail lui causant une lombalgie post traumatique avec sciatalgie, elle a repris son travail le 26 août 2013 sans que l'employeur mette alors en 'uvre une quelconque visite de reprise auprès de la médecine du travail, et qu'ayant souffert d'une rechute de cet accident du travail elle a dû être à nouveau arrêtée le 2 septembre 2013 et n'a en réalité rencontré le médecin du travail pour la première fois que le 25 octobre 2013 pour une visite qui était à la fois d'embauche et de reprise (pièce 4 de la salariée) au terme de laquelle a été déclaré apte à son poste, avec réserves.

Elle estime que ce manquement de l'employeur à ses obligations est également constitutif d'une exécution déloyale du contrat de travail.

Pour contester ce point, les sociétés intimées soutiennent que la société BEYNOSTBRICO s'est en réalité heurtée à l'indisponibilité du service de médecine du travail, dont les délais d'attente seraient à l'origine de ce retard, et font valoir qu'en tout état de cause Céline Y... ne démontre pas que ces retards lui aient causé un quelconque préjudice.

La cour constate toutefois que l'employeur ne rapporte aucune preuve de ce qu'il aurait à un moment quelconque sollicité le médecin du travail en vue de l'organisation de la visite médicale d'embauche de Céline Y... , si bien que l'argument tiré d'une prétendue surcharge de service de médecine du travail est ici dénué de toute pertinence et ne saurait exonérer l'employeur de sa responsabilité.

Pour autant, la cour retient qu'effectivement Céline Y... ne rapporte en l'état aucune preuve de ce qu'elle a subi un quelconque préjudice à ce titre, si bien que sa demande indemnitaire ne saurait prospérer de ce chef.

*

Céline Y... reproche encore à la société BEYNOSTBRICOd'avoir omis de janvier à avril 2013 de lui verser le complément de salaire auxquelles elle pouvait conventionnellement prétendre pendant cette période où elle était en arrêt de travail, à la suite de l'accident du travail dont elle avait été victime le 23 janvier 2013.

L'article 7.2 de la convention collective nationale du bricolage prévoient que les salariés victimes d'un accident du travail bénéficient du maintien de leur salaire, sans délai de carence et sans condition minimale de présence, soit, en ce qui concernait Céline Y... , 30 jours à 90 % puis 30 jours à 70 %.

En l'espèce, Céline Y... a été en arrêt de travail pour cause d'accident du travail du 23 janvier 2013 au 17 août 2013, et il incombait donc à la société BEYNOSTBRICO de lui verser le complément de salaire en sus des indemnités journalières de sécurité sociale qu'elle percevait par ailleurs, ce qu'elle s'est abstenue de faire.

Pour tenter de justifier cette infraction aux règles conventionnelles, les sociétés intimées soutiennent que cette situation est imputable à Céline Y... qui n'aurait pas adressé à son employeur les relevés d'indemnités journalières.

Il cxonvient toutefois de rappeler que c'est à l'employeur de démontrer qu'il s'est bien acquitté de ses obligations en matière de paiement du salaire, et en l'occurrence la cour constate que les sociétés intimées ne justifient aucunement de ce que cette absence de règlement des compléments de salaire soit imputable à un défaut de communication des relevés des IJSS versées, alors qu'elles pourraient aisément le faire, si tel était le cas, en produisant aux débats les courriers que l'employeur avait le devoir d'adresser à la salariée pour lui réclamer ces documents afin de pouvoir procéder aux versements auxquels il ne pouvait ignorer être tenu.

Dans ce contexte d'accident du travail, la cour estime que cette abstention de l'employeur était nécessairement volontaire et qu'elle est constitutive ici encore d'une violation de l'obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail.

*

Enfin, Céline Y... reproche à l'employeur de ne pas avoir respecté entre avril 2013 et décembre 2013 le salaire minimum conventionnel applicable à son échelon.

Aux termes de l'article 2 de l'accord collectif du 14 janvier 2013 relatif aux salaires minimaux au 1er mars 2013, étendu par arrêté du 17 avril 2013, le salaire minimum conventionnel pour un temps plein (35 heures par semaine) était fixé par les partenaires sociaux à 1435 € bruts par mois pour les employés de niveau 1, degré B coefficient 120 tels que Céline Y... .

Cette dernière fait à juste titre valoir qu'il résulte de ses bulletins de paye qu'elle a continué à être payée sur la base d'un salaire brut à temps plein de 1430,25 euros par mois jusqu'à la fin de l'année 2013 alors que son salaire de base aurait dû être revalorisé pour tenir compte de ce nouveau minimum conventionnel, ce que l'employeur a fini par reconnaître en procédant en janvier et février 2014 à une régularisation de la situation pour les périodes de travail effectif (pièces 7et 8 de la salariée).

En l'absence de toute preuve par Céline Y... de ce qu'elle avait réclamé avant le début de l'année 2014 la régularisation de cette situation, l'intention déloyale de l'employeur n'est pas ici démontrée, si bien que cet incident régularisé ne saurait ouvrir droit pour la salariée à l'octroi de quelconques dommages-intérêts.

*

Dans ce contexte, la cour retient que la société BEYNOSTBRICO s'est livrée à une exécution déloyale du contrat de travail de Céline Y... en violant délibérément son obligation de sécurité et en omettant de verser à l'intéressée les compléments de salaire auxquelles elle avait droit pendant son arrêt maladie consécutif à un accident du travail.

La cour dispose en la cause d'éléments suffisants pour évaluer à la somme de 3500 euros la juste réparation du préjudice né pour Céline Y... de cette exécution déloyale du contrat par son employeur.

La société BEYNOST COMMERCIAL, venant aux droits de la société BEYNOST BRICO & SPORTS , précédemment dénommée BEYNOSTBRICO sera donc condamnée à lui payer cette somme à titre de dommages-intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Par contre, cette demande ne saurait prospérer à l'encontre de la SAS HOLDIS, qui ne s'est impliquée dans la relation de travail qu'à compter de la rupture de celle-ci en juillet 2014.

2.- Sur la rupture du contrat de travail :

2.1- Sur le transfert du contrat de travail de Céline Y... à la société HOLDIS :

Aux termes de l'article L.1224-1 du code du travail, lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise.

Cet article, tel qu'interprété au regard de la directive communautaire n° 2001-23 du 12 mars 2001, s'applique lorsqu'il y a transfert d'une entité économique conservant son identité. Constitue une entité économique un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique essentielle ou accessoire qui poursuit des intérêts propres.

L'article L.1224-1 du code du travail, texte d'ordre public qui s'impose aux salariés comme aux employeurs, est applicable lorsque sont transférés à la fois l'activité et les moyens organisés qui permettent de l'accomplir.

Si tel est le cas, le transfert des contrats de travail prévu par ce texte s'opère de plein droit.

En l'espèce, la société HOLDIS soutient que le contrat de travail de Céline Y... au sein de la société BEYNOSTBRICO a été, par application de cet article L 1224'1 du code du travail, de plein droit transféré au sein de la société HOLDIS par suite de la cession à cette dernière le 1er juillet 2014 du fonds de commerce de magasin de bricolage de cette entreprise.

Céline Y... conteste l'applicabilité en l'espèce de ce texte, soutenant qu'en l'absence de transfert au sein de la société HOLDIS d'une entité économique poursuivant des intérêts propres, son contrat de travail n'a pu être transféré dans les conditions revendiquées par les sociétés intimées.

Au soutien de son argumentation, la société HOLDIS verse aux débats (sa pièce D) un acte daté du 30 juin 2014 portant cession par la SAS BEYNOST BRICO & SPORTS à la SAS HOLDIS de son fonds de commerce de vente d'articles de bricolage, jardinage, matériaux et outils, articles de sport, de pêcher de chasse, location et réparation à titre accessoire dudit matériel situé [...].

L'acquéreur avait en particulier pour obligation (article 5.1) de 'poursuivre à compter de la date d'entrée en jouissance les contrats de travail attachés au fond dont la liste figure en annexe, conformément aux dispositions de l'article L 1224'1 du code du travail, avec tous les droits et obligations y attachées, et de prendre en charge prorata temporis à compter de la date d'entrée en jouissance rémunération, droits à congés payés, 13e mois, droits acquis autres primes et tous autres avantages accordés au salarié et à supporter les charges sociales y liées'.

Pour sa part, le vendeur s'engageait notamment (article 5. 2) 'à payer tous les salaires, primes, congés légaux, indemnités et dommages-intérêts éventuels, charges fiscales et sociales dus jusqu'à la date d'entrée en jouissance.'

Pour contester la réalité du transfert en l'espèce d'une entité économique autonome entraînant un transfert des contrats de travail des salariés du magasin de bricolage, Céline Y... fait essentiellement valoir qu'il n'y a pas eu de maintien de l'activité de l'entreprise BEYNOSTBRICO en suite de ce transfert :

'en l'absence de transmission des éléments nécessaires à cette activité (locaux suffisants, matériel spécifique et possibilité de vendre des produits dédiés aux magasins de bricolage) puisque l'enseigne et le droit au bail n'ont pas été transférés à la société HOLDIS mais conservés par la venderesse, de même que les machines spécifiques destinées à la découpe du bois et aux mélanges des peintures ;

' parce que les salariés transférés n'ont par ailleurs pas été affectés à une activité de bricolage mais répartis les différents rayons du magasin LECLERC (charcuterie, DPH, surgelés').

Pour maintenir son allégation d'un transfert en son sein d'une activité autonome correspondant à celle de la société BEYNOSTBRICO, la société HOLDIS verse aux débats (pièce F) un procès-verbal de constat du huissier en dates des 24 juin, 1er juillet, 2 juillet, 5 juillet, 15 juillet et 25 septembre 2014 établi par Maître F... dont il résulte qu'un certain nombre de produits qui se trouvaient exposés à la vente dans le magasin LECLERC BRICO le 24 juin 2014 ont été transférés et proposés à la vente dans les rayons de l'hypermarché LECLERC en juillet 2014, ce dont la société HOLDIS déduit que l'activité de l'entreprise BEYNOSTBRICO s'est poursuivie dans son hypermarché après son intégration dans les rayons bricolage et jardinage de ce magasin.

Il convient toutefois de relever que ces transferts de marchandises, incontestables, attestent simplement de la reprise des stocks du magasin BEYNOSTBRICO par la société HOLDIS conformément au contrat de cession de fonds de commerce.

Par contre il est constant que l'hypermarché LECLERC disposait déjà avant cette cession de fonds de commerce de rayons jardinage, camping'plein air et bricolage d'une certaine importance puisque leurs chiffres d'affaires respectifs sur l'exercice 2013'2014 étaient de 582'180 €, 604'462 € et 873'204 €.

Il est évident que si la société HOLDIS avait totalement intégré, comme elle le soutient, l'activité de la société BEYNOSTBRICO dans ses rayons à compter du 1er juillet 2014, les chiffres d'affaires de ces mêmes rayons au cours de l'exercice suivant n'auraient pas manqué de progresser dans des proportions très importantes, ce qui n'a pas été le cas puisque ces chiffres d'affaires n'ont été que de 636 766 € pour le jardinage, 494'404 € pour le camping'plein air et 1'040 012 € pour le bricolage, soit des évolutions respectivement de +9,38 %, -19,10 % et +10,78 %.

Bien plus, la simple lecture du procès-verbal de constat précité dressé par Maître F... permet au contraire de constater la décision prise par la société HOLDIS de ne pas laisser perdurer en son sein l'activité de la société BEYNOSTBRICO. Il résulte en effet de ce constat que les produits provenant du stock de ce magasin étaient pour la plupart présentés à la vente dans le cadre d'une opération promotionnelle permettant aux clients titulaires de la carte LECLERC d'obtenir une remise de 50 % de leur valeur en bons d'achat, alors même qu'on se trouvait à l'époque en pleine période de vente aisée de ces produits (par exemple des produits de jardinage: tondeuses à gazon, scarificateurs,' dont il est incontestable qu'ils se vendent facilement au mois de juillet, en pleine période de la saison de jardinage).

Cette pratique commerciale démontre la volonté de la direction de la société HOLDIS à l'époque de se débarrasser rapidement de ces produits spécifiques en les bradant, et donc de ne pas faire continuer en son sein une activité autonome de magasin de bricolage'jardinage.

Par ailleurs, la société HOLDIS revendique elle-même avoir indiqué dans ses différents courriers adressés aux salariés de la société BEYNOSTBRICO qu'ils n'auraient aucun droit acquis à continuer de travailler dans le secteur d'activité bricolage'jardinage qui était le leur jusqu'alors, leur imposant au contraire une totale permutabilité avec les autres salariés de l'hypermarché LECLERC, même affectés à l'épicerie ou à la charcuterie.

Il en résulte directement que, contrairement à ce que soutient aujourd'hui la société HOLDIS, il n'y a pas eu en l'espèce, à l'occasion de cette cession à la société HOLDIS du fonds de commerce de la société BEYNOSTBRICO, de transfert d'une entité économique autonome qui a conservé son identité et dont l'activité, constituée d'un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels poursuivant un objet économique propre, a été poursuivie ou reprise.

Dès lors, les conditions de mise en 'uvre de l'article L 1224'1 du code du travail n'étaient pas en l'espèce réunies et c'est à juste titre que Céline Y... soutient que son contrat de travail n'a pas été à l'époque transféré de plein droit à la société HOLDIS.

2.2 ' sur le licenciement de Céline Y... :

Nonobstant l'inapplicabilité en l'espèce des dispositions de l'article L 1224'1 du code du travail, il résulte des conclusions des parties que celles-ci sont aujourd'hui toutes d'accord pour considérer que le contrat de travail de Céline Y... a été rompu par la lettre de licenciement que la société HOLDIS a adressé à l'intéressée le 22 juillet 2014.

Par application de l'article L. 1232'1 du code du travail, tout licenciement individuel doit reposer sur une cause réelle et sérieuse.

Selon l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles; si un doute subsiste, il profite au salarié.

Par ailleurs, il résulte des articlesL.1234-1 et L.1234-9 du code du travail que, lorsque le licenciement est motivé par une faute grave, le salarié n'a droit ni à un préavis ni à une indemnité de licenciement.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis.

L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve qui doit reposer sur des faits précis et matériellement vérifiables, qu'il doit reprendre dans la lettre de licenciement prévue par l'article L1232-6 du code du travail, cette lettre fixant ainsi les limites du litige.

En l'espèce, la lettre de licenciement pour faute grave adressé le 22 juillet 2014 par la société HOLDIS à Céline Y... est expressément motivée par le refus de cette salariée du transfert de son contrat de travail et de prendre son poste au sein de la société HOLDIS, en dépit des dispositions de l'article L 1224'1 du code du travail.

Comme mentionné ci-dessus, cet article n'était aucunement applicable de plein droit en l'espèce, si bien que la décision de le mettre en 'uvre prise par la société BEYNOSTBRICO et le repreneur de son fonds de commerce, la SAS HOLDIS, ne pouvait être imposée à Céline Y... et supposait son accord.

En l'espèce, la cour ne peut que constater l'attitude fautive de la société HOLDIS qui a répondu aux légitimes interrogations et demandes de renseignements des salariés de BEYNOSTBRICO, dont Céline Y..., par la seule affirmation aussi péremptoire qu'erronée du fait que leurs contrats de travail respectifs avaient été transférés de plein droit et qu'ils n'avaient pas de choix en la matière.

De surcroît, ce transfert s'accompagnait en l'occurrence d'une modification à tout le moins de deux éléments essentiels du contrat de travail puisqu'il emportait notamment pour Céline Y... :

'd'une part la possibilité d'être affecté dans n'importe lequel des rayons de l'hypermarché LECLERC de Beynost, alors que ce salarié avait fait le choix d'intégrer une grande surface spécialisée uniquement dans le bricolage et le jardinage,

'et d'autre part une modification importante de ses horaires et l'obligeaient à ce titre à travailler plus tôt le matin et surtout à travailler fréquemment le dimanche, le privant ainsi de son droit au repos dominical, ce que ne conteste d'ailleurs pas la société HOLDIS.

Il en résulte que le licenciement ainsi prononcé à l'encontre de Céline Y... ne repose ni sur une faute grave de la salariée, ni sur une cause réelle et sérieuse.

L'appelante fait de surcroît à juste titre valoir qu'à la date où la procédure de licenciement a été diligentée, son contrat de travail était suspendu, puisqu'elle avait été placée en arrêt maladie à compter du 4 juillet 2014 (pièce 3 de la salariée), arrêt prolongé par le médecin le 19 juillet 2014 jusqu'au 16 août 2014 (pièce 15 de la salariée).

Or il résulte des dispositions de l'article L1226-9 du code du travail qu'au cours des périodes de suspension du contrat de travail consécutives un accident du travail, l'employeur ne peut, à peine de nullité du licenciement, rompre ce contrat que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie.

Or en l'espèce, l'employeur ne justifie ni d'une faute grave de Céline Y... , ni d'une impossibilité de maintenir son contrat de travail, si bien que ce licenciement notifié le 22 juillet 2014 à la salariée doit être déclaré nul et produire à ce titre les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

2.3- sur les demandes indemnitaires consécutives à la nullité du licenciement :

Au jour de la rupture de son contrat de travail, Céline Y... avait dans l'entreprise BEYNOSTBRICO une ancienneté d'un an et neuf mois (soit 1,75 ans).

Son salaire mensuel moyen doit être calculé sur la base de ses 3 derniers mois d'activité (avril à juin 2014) et s'établit donc à la somme de 1279,15 euros, étant précisé que l'intéressée était encore en avril 2014 à temps partiel thérapeutique et qu'elle percevait en dernier lieu (en juin 2014), un salaire de 1669,38 euros bruts

Il résulte des pièces du dossier, et en particulier des clauses de l'acte de cession du fonds de commerce précité, que la société HOLDIS et la société BEYNOST BRICO & SPORTS, également dénommée BEYNOSTBRICO, qui appartiennent au même groupe d'entreprises, se sont entendues pour tenter d'imposer aux salariés de la société BEYNOSTBRICO, dont Céline Y... , un transfert de leur contrat de travail par application de l'article L 1224'1 du code du travail alors que les conditions d'application de ce texte n'étaient pas réunies.

Cette tentative était manifestement motivée par le souhait de ce groupe d'entreprises d'éviter les conséquences financières liées à la cessation pure et simple d'activité de la société BEYNOSTBRICO, et en particulier au licenciement économique qui aurait pu intervenir dans ce contexte.

Par voie de conséquence, Céline Y... est parfaitement fondée à réclamer aujourd'hui la condamnation in solidum de la société HOLDIS et de la société BEYNOST COMMERCIAL, qui vient aux droits de la société BEYNOSTBRICO & SPORTS, précédemment dénommée BEYNOSTBRICO, à lui payer les sommes suivantes auxquelles elle a droit en suite de la rupture abusive de son contrat de travail.

Indemnité compensatrice de préavis

Le licenciement étant dépourvu de cause réelle et sérieuse, Florian D... peut prétendre au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis équivalente à unmois de salaire calculée sur la base de la rémunération que la salariée aurait perçue si elle avait travaillé pendant la durée du préavis, soit la somme de 1669,38 euros.

Céline Y... ne sollicitant ce titre que la somme de 1520,07 euros bruts, outre 152,01 euros de congés payés y afférents, il sera simplement fait droit à sa demande de ce chef.

Indemnité légale de licenciement

Aux termes de l'article L.1234-9 du code du travail, le salarié titulaire d'un contrat à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte une année d'ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement calculée en fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait avant la rupture du contrat de travail.

Pour l'évaluation du montant cette indemnité, il convient de tenir compte du nombre d'années de service à l'expiration du contrat de travail, soit à la fin du délai-congé.

Selon l'article R 1234-2 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, le montant de l'indemnité légale de licenciement ne peut être inférieure à un cinquième de mois de salaire par année d'ancienneté auquel s'ajoutent deux quinzièmes de mois par année au-delà de dix ans d'ancienneté.

Cette indemnité légale de licenciement, qui est plus favorable à la salariée que celle prévue par la convention collective du bricolage applicable à la relation de travail, est égale à:

1279,15 euros x 1,75 ans x 1/5 = 447,70 euros.

Les sociétés intimées seront donc condamnées in solidum à lui payer cette somme.

Rappel de salaire au titre des jours de mise à pied conservatoire

Le licenciement litigieux n'étant pas fondé sur une faute grave, la mise à pied conservatoire infligée à Céline Y... s'avère infondée, et l'intéressée est fondée à revendiquer ici le paiement des salaires qui lui sont dus au titre de cette mise à pied injustifiée, qu'elle évalue sans être contredite sur ce point à la somme de 1110,82 euros, outre 111,08 euros au titre des congés payés y afférents. Il sera donc fait droit à cette demande.

Dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Aux termes de l'article L.1235-5 du code du travail, ne sont pas applicables au licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté les dispositions relatives à l'absence de cause réelle et sérieuse prévues à l'article L.1235-3 du même code selon lequel il est octroyé au salarié qui n'est pas réintégré une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois, et, en cas de licenciement abusif, le salarié peut prétendre à une indemnité correspondant au préjudice subi.

Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances très particulières de la rupture, du montant de la rémunération versée à Céline Y... (1669,38 euros, de son âge au jour de son licenciement (26 ans), de son ancienneté à cette même date (1,75 ans), de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels que ces éléments résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu de lui allouer, en application de l'article L.1235-5 du code du travail, une somme de 6000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Les sociétés HOLDIS et BEYNOSTBRICO seront donc condamnées in solidum à payer cette somme à Céline Y... .

Sur les intérêts légaux :

Par application de l'article 1153 du code civil dans sa rédaction applicable au litige, les condamnations ici prononcées portant sur des sommes à caractère salarial (indemnité de licenciement, indemnité compensatrice de préavis, rappel de salaire pour mise à pied conservatoire injustifiée, congés payés y afférents) porteront intérêt au taux légal à compter de la réception par l'employeur le 24 décembre 2014, date de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes de Lyon, valant première mise en demeure dont il soit justifié.

Par contre, les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse porteront intérêts, par application de l'article 1153-1 du code civil dans sa rédaction applicable au litige, à compter du présent arrêt.

3.' Sur la demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait du transfert imposé:

Céline Y... sollicite à ce titre la condamnation solidaire des sociétés intimées à lui payer la somme de 4500 €.

Il convient toutefois de rappeler que le transfert de son contrat de travail à la société HOLDIS n'a jamais eu lieu, les conditions de l'article L 1224'1 du code du travail n'étant pas réunies, si bien que la cour ne voit pas en quoi cette salariée aurait subi à ce titre un préjudice qui soit distinct de celui né de son licenciement abusif et qui ne soit pas déjà réparé par les dommages-intérêts alloués par ailleurs à ce titre.

Cette demande sera donc rejetée comme mal fondée.

4.'Sur la remise des documents de fin de contrat :

Vu les données du litige, Céline Y... est fondée à solliciter la condamnation in solidum des sociétés HOLDIS et BEYNOST COMMERCIAL à lui délivrer les documents de fin contrat rectifiés pour tenir compte du présent arrêt, dans des conditions qui seront précisées au dispositif.

Compte tenu de la mauvaise volonté évidente apportée à la résolution du présent litige par les sociétés intimées, il y a lieu d'assortir cette obligation d'une astreinte provisoire de 100 € par jour de retard et par document non remis, la cour n'entendant pas se réserver la liquidation de cette astreinte.

5.'Sur les demandes accessoires :

Parties perdantes, les sociétés HOLDIS et BEYNOST COMMERCIAL seront condamnées in solidum aux dépens de première instance et d'appel.

Céline Y... a dû pour la présente instance exposer tant en première instance qu'en appel des frais de procédure et honoraires non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser intégralement à sa charge.

Les sociétés HOLDIS et BEYNOST COMMERCIAL seront donc condamnées in solidum à lui payer la somme de 2000 euros qu'elle réclame en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions

et, STATUANT à nouveau,

CONDAMNE la SNC BEYNOST COMMERCIAL, venant aux droits de la société BEYNOST BRICO & sports, précédemment dénommée BEYNOSTBRICO, à payer à Céline Y... la somme de 3500 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

DIT que le contrat de travail de Céline Y... n'a pas été transféré à la SAS HOLDIS par application de l'article L 1224'1 du code du travail ;

DÉCLARE nul le licenciement litigieux de Céline Y..., qui ne repose ni sur une faute grave, ni sur une cause réelle et sérieuse ;

En conséquence, CONDAMNE in solidum la SAS HOLDIS et la SNC BEYNOST COMMERCIAL à payer à Céline Y... les sommes suivantes :

' 1520,07 euros bruts, outre 152,01 euros de congés payés y afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 24 décembre 2014,

' 447,70 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, avec intérêts au taux légal à compter du 24 décembre 2014,

' 1110,82 euros, outre 111,08 euros de congés payés y afférents, au titre du rappel de salaire pour mise à pied conservatoire non justifiée, avec intérêts au taux légal à compter du 24 décembre 2014,

' 6000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait du licenciement abusif litigieux, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

DIT que les sommes allouées par le présent arrêt supporteront, s'il y a lieu, les cotisations et contributions prévues par le code de la sécurité sociale ;

CONDAMNE in solidum la SAS HOLDIS et la SNC BEYNOST COMMERCIAL à délivrer à Céline Y... dans les 6 semaines du prononcé du présent arrêt les documents de fin de contrat dûment rectifiés pour tenir compte de cette décision, à savoir un bulletin de salaire récapitulatif, un certificat travail, une attestation destinée à Pôle Emploi, et un solde de tout compte avec son reçu ;

CONDAMNE in solidum la SAS HOLDIS et la SNC BEYNOST COMMERCIAL, en cas de non respect de cette obligation, à payer à Céline Y... une astreinte provisoire de 100 € par jour de retard et par document non remis, la durée de cette astreinte étant toutefois limitée à 4 mois ;

CONDAMNE in solidum la SAS HOLDIS et la SNC BEYNOST COMMERCIAL aux dépens de première instance et d'appel ;

CONDAMNE in solidum la SAS HOLDIS et la SNC BEYNOST COMMERCIAL à payer à Céline Y... la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le GreffierLe Président

Gaétan PILLIEMichel B...


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 18/00615
Date de la décision : 28/09/2018

Références :

Cour d'appel de Lyon SB, arrêt n°18/00615 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-09-28;18.00615 ?
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