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26/09/2018 | FRANCE | N°16/05715

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 26 septembre 2018, 16/05715


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





R.G : N° RG 16/05715





X...



C/

SARL CENTURIONS







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 24 Juin 2016

RG : F 15/00162











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 26 SEPTEMBRE 2018







APPELANT :



Réda X...

né le [...] à CASABLANCA (MAROC)

[...]

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comparant en personne, assisté de Me Mouad Y..., avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2017/023257 du 28/09/2017 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)





INTIMÉE :



SARL CENTURIONS

[...]



représ...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : N° RG 16/05715

X...

C/

SARL CENTURIONS

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 24 Juin 2016

RG : F 15/00162

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 26 SEPTEMBRE 2018

APPELANT :

Réda X...

né le [...] à CASABLANCA (MAROC)

[...]

comparant en personne, assisté de Me Mouad Y..., avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2017/023257 du 28/09/2017 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

INTIMÉE :

SARL CENTURIONS

[...]

représentée par Me Xavier Z... de la SELARL PACHOUD - Z... & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 14 Mai 2018

Présidée par Didier PODEVIN, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ:

- Joëlle DOAT, président

- Didier PODEVIN, conseiller

- Evelyne ALLAIS, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 26 Septembre 2018 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Joëlle DOAT, Président et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Suivant contrat à durée indéterminée, la société CENTURIONS a engagé Monsieur Réda X... en qualité d'agent de sécurité qualifié à compter du 18 février 2008.

La relation de travail était régie par la convention nationale des entreprises de prévention et de sécurité.

Au dernier état de la relation de travail, la rémunération mensuelle brute s'établissait à la somme de 2293,47 euros.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 30 juillet 2014, la société CENTURIONS a convoqué Monsieur X... pour le 18 août 2014 en vue d'un entretien préalable à son licenciement, décalé au 25 août 2014, par lettre recommandée du 13 août 2014, en raison de l'arrêt de travail du salarié du 30 juillet au 22 août 2014

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 28 août 2014, la société CENTURIONS a notifié à Monsieur X... son licenciement dans les termes suivants:

« Compte tenu du comportement particulièrement inacceptable que vous avez eu, et délibérément maintenu, au cours de ces dernières semaines, nous vous avions convoqué à un entretien préalable fixé lundi 25 août et auquel vous ne vous êtes pas présenté.

Nonobstant votre absence, nous sommes contraints de vous notifier, par la présente, votre licenciement pour cause réelle et sérieuse.

En effet, en dépit des nombreuses remarques, observations, mise en garde et avertissements qui vous ont été régulièrement adressés, vous n'avez cessé d'agir avec la plus grande désinvolture, en violation pure et simple de vos obligations professionnelles.

Nous vous avons plusieurs fois alerté et demandé d'adopter un comportement conforme aux missions qui vous incombent en vertu de votre contrat de travail, et en adéquation avec les règles de discipline en vigueur dans l'entreprise.

Malheureusement, force est de constater que vous avez persévéré dans votre attitude négligente et irrespectueuse.

A ce titre, vous avez, au cours de ces dernières semaines, refusé 2 interventions pour le compte de notre client EPS, alors d'une part, qu'il vous appartenait d'intervenir conformément à vos attributions, et d'autre part, qu'aucun motif légitime ne justifiait un tel refus.

Ainsi, le tableau de bord récapitulatif des interventions sécuritaires transmis par la société EPS fait état de vos manquements, que nous déplorons, et vous rappelons :

- le 4 juillet 2014 à 6h22 : vous avez refusé la demande d'intervention chez Monsieur A... Christian à Cailloux sur Fontaine, alors que vous étiez présent au bureau de 06h26 à 08h30, et donc là encore parfaitement à même de réaliser cette mission.

- le 16 juillet 2014 à 16h36: vous avez également refusé une intervention chez Monsieur E... B... à Saint André de Carey, pour rentrer chez vous, comme l'atteste le relevé GPS de votre véhicule, ce qui est inacceptable !

De la même manière, le 30 juillet dernier à 07h54, vous avez reçu une demande d'intervention de notre client IMT.

Une fois n'est pas coutume, vous avez eu l'audace de la rejeter, de votre propre chef et sans autorisation en ce sens, sous prétexte que votre service se finissant dans 20 minutes plus tard (à 8h30 en réalité), vous ne pouviez pas l'assumer.

Or, à l'occasion d'un incident similaire, nous vous avions déjà rappelé que les demandes d'intervention qui arrivent plus de 15 minutes avant l'heure de la relève doivent être prises en charge par l'agent en poste, ce qui était le cas en l'occurrence : cette intervention aurait donc due être gérée par vous et non par votre collègue.

Nous avons donc le regret de constater que nos instructions, même régulièrement réitérées, ne sont pas suivies d'effet : vous faites donc preuve d'une mauvaise volonté manifeste .

Ce manque de professionnalisme récurrent, consistant à agir à votre guise et au mépris des consignes qui vous sont données, est inadmissible, et ce, d'autant qu'il a eu des répercutions particulièrement négatives auprès de notre clientèle.

Pour illustration, l'entreprise IMT a fait appel à un autre prestataire pour effectuer la mission que vous aviez refusée, ce qui a nécessairement nui à la crédibilité de CENTURIONS et à la fidélisation de la clientèle que nous nous efforçons de construire.

Vous ne pouvez ignorer qu'un tel comportement non seulement perturbe le bon fonctionnement du service mais, de toute évidence, nuit sérieusement à l'image de notre entreprise, ce que nous ne pouvons tolérer plus longtemps.

Aussi, votre conduite incorrecte, reflet d'un manque de professionnalisme et de savoir-faire, est devenue incompatible avec nos attentes légitimes et constitue donc une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Votre préavis d'une durée de deux mois débutera à la date de présentation de cette lettre. ( ...)'

Le 16 janvier 2015, Monsieur X... a saisi le conseil de prud'hommes de LYON en lui demandant de déclarer son licenciement sans cause réelle et sérieuse, de condamner en conséquence la société CENTURIONS à lui payer des dommages-intérêts pour licenciement abusif, ainsi que pour non respect de l'obligation de sécurité et une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement rendu le 24 juin 2016 , le conseil de prud'hommes a débouté Monsieur X... de l'intégralité de ses demandes.

La cour est saisie de l'appel interjeté le 20 juillet 2016 par Monsieur X....

Par conclusions régulièrement communiquées, visées par le greffier et développées oralement à l'audience du 14 mai 2018, auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé, Monsieur X... demande à la Cour d'infirmer le jugement déféré et de condamner en conséquence la société CENTURIONS au paiement des sommes suivantes :

* 23.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation au titre de la surveillance médicale renforcée,

* 2.000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique dont distraction à Maître Mouad Y..., avocat au barreau de Clermont-Ferrand.

Par conclusions régulièrement communiquées, visées par le greffier et développées oralement à l'audience du 14 MAI 2018, auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé, la société CENTURIONS demande à la Cour de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Monsieur X... de l'intégralité de ses demandes et de le condamner au paiement de la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont soutenues oralement lors de l'audience.

MOTIVATION.

Sur le licenciement.

Il résulte des articles L.1232-1 et L 1232-6 du code du travail que le licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse et résulte d'une lettre de licenciement qui en énonce les motifs.

En vertu de l'article 1235-1 du code du travail, le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure de licenciement suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles; que si un doute subsiste, il profite au salarié.

La lettre de licenciement fixe les limites du litige.

En l'espèce, aux termes de la lettre de licenciement ci-dessus reproduite, il est reproché à Monsieur X..., en dépit de préalables rappels à l'ordre, d'avoir refusé des interventions à trois reprises durant le mois de juillet 2014.

Monsieur X... s'oppose aux allégations de l'employeur et fait valoir :

* qu'il a accepté de nombreuses interventions inopinées de dernières minutes lorsque d'autres agents ne pouvaient les assumer,

* que concernant le client EPS , ce n'est qu'à compter du 29 juillet 2014 que les consignes ont changé, de sorte qu'auparavant, il était possible de refuser une intervention,

* que concernant le client ITM, le lieu d'intervention n'est pas spécifié, de sorte qu'il est impossible de vérifier le périmètre géographique en question.

Il apparaît des éléments produits aux débats que le contexte disciplinaire allégué par l'employeur n'apparaît pas véritablement caractérisé avant fin 21013, puisque Monsieur X..., embauché en 2008, a fait l'objet d'une simple remontrance le 5 juin 2013 puis d'un avertissement le 28 octobre 2013, enfin d'un blâme le 17 mars 2014, annulé par l'employeur le 6 mai 2014 .

Il n'est par ailleurs pas justifié d'un mécontentement relatif aux prestations de travail de Monsieur X... de la part des clients avant cette période, même si une prestation effectuée pendant la durée d'exécution du préavis, chez Mme C..., amenait une dispense d'effectuer le préavis, restant encore à courir sur quelques jours, du fait de la négligence de Monsieur X... dans l'exécution de ses tâches de surveillance.

Concernant les prestations EPS, il apparaît établi et non contesté par les parties que jusqu'au 29 juillet 2014, les consignes d'intervention EPS étaient les suivantes : 'Acceptez la mission si vous êtes immédiatement disponible. Si ce n'est pas le cas, annoncez à l'opérateur le délai prévisible et laissez-le choisir de confirmer ou non la mission'.

Or, il est établi que le 4 juillet 2014, comme le 16 juillet 2014, Monsieur X... a refusé deux interventions demandées à 6h22 et à 16h36 et ce alors qu'il était d'astreinte d'une part de 23h59 à 8h29 et d'autre part de 15h30 à 24h00.

Il est donc clair que Monsieur X... n'était pas en droit de refuser l'intervention mais devait, en cas d'indisponibilité immédiate, annoncer le délai prévisible d'attente à l'opérateur, lui laissant ainsi le choix de confirmer la mission ou de choisir un autre intervenant.

Quel que soit ainsi l'endroit où il se trouvait au moment où ces interventions ont été

demandées, il est donc établi que Monsieur X... n'a pas suivi les consignes d'intervention EPS telles qu'existantes avant le 29 juillet 2014, puisqu'il a refusé les interventions, sans annoncer à l'opérateur le délai prévisible d'intervention. Il ne démontre donc pas avoir annoncé à l'opérateur un délai prévisible d'intervention et ne peut donc, à postériori, soutenir, sans du reste le démontrer, que le délai prévisible d'intervention aurait été supérieur à 30 minutes, entraînant, sans aucun doute, le choix d'un autre intervenant.

Concernant le client ITM, il est reproché à Monsieur X..., d'avoir, sans justification, refusé le 30 juillet 2014 à 7h54, une intervention.

Le planning de Monsieur X... permet d'abord de retenir qu'il était en poste de 23h59 le 29 juillet à 8h29 le 30 juillet et l'attestation de Mme D... permet de retenir ensuite qu'il a refusé l'intervention, alors qu'il était présent au siège de la société CENTURIONS, le 30 juillet à 8h00.

Or, dans la mesure où il était en fonction jusqu'à la fin de la plage horaire de travail, il ne pouvait refuser la prestation sous le prétexte que son horaire de travail s'achevait 29 mn plus tard et ce d'autant plus que des heures supplémentaires pouvaient alors lui être comptabilisées.

Ce point lui avait d'ailleurs été rappelé dans le courrier du 6 mai 2014, annulant le blâme mais rappelant au salarié notamment que les demandes d'intervention qui arrivent entre 0 et 15 minutes avant la relève doivent être effectivement à transmettre à l'agent de relève, celles arrivant avant ce délai devant être gérées par l'agent en poste.

Il résulte de ces éléments que le licenciement intervenu est justifié par une cause réelle et sérieuse, de sorte que Monsieur X... sera débouté de sa demande de ce chef ainsi que de la demande de dommages et intérêts en découlant, par confirmation du jugement déféré.

Sur le non-respect de l'obligation de sécurité.

Monsieur X... reproche à son employeur de ne pas avoir respecté son obligation de surveillance médicale renforcée s'agissant du travail de nuit et posée par les articles L 3122-42 applicable en l'espèce ( abrogée postérieurement le 10 août 2016) et par l'article R 3122-42 du même code.

Il demande la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts de ce chef.

La société CENTURIONS soutient qu'elle a respecté la réglementation en la matière et souligne que Monsieur X... convoqué le 13 juin 2014 ne s'est pas rendu à la visite et a dû être reconvoqué le 15 septembre 2014. Elle estime qu'il ne justifie, en tout état de cause, d'aucun préjudice.

Il est justifié par l'employeur que les visites périodiques, tous les 6 mois, ont été organisées en 2009, 2011 et 2012, une seule visite ayant eu lieu en 2010 et 2013 et une visite organisée en 2014, au regard de la date du licenciement.

Monsieur X... a donc bénéficié d'un suivi médical renforcé conforme à la loi alors applicable en 2009, 2011, 2012 et 2014.

Concernant le manque d'une visite en 2010 et 2013, Monsieur X... ne démontre pas toutefois l'existence d'un préjudice en résultant pour lui, notamment sur sa santé, et justifiant l'allocation de dommages et intérêts à son profit.

Il convient en conséquence de confirmer la décision déférée de ce chef .

Sur l'article 37 §2 de la loi du 10 juillet 1991

Monsieur X... succombant dans son recours, il sera condamné aux dépens d'appel et sa demande tendant à l'application des dispositions de l'article 37 §2 de la loi du 10 juillet 1991 au profit de son avocat doit être rejetée.

Il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Monsieur X..., en raison de sa situation économique,

les frais irrépétibles d'appel supportés par la société CENTURIONS.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement:

Confirme la décision déférée en toutes ses dispositions,

Déboute Monsieur Réda X... de sa demande au titre des dispositions de l'article 37 §2 de la loi du 10 juillet 1991,

Déboute la société CENTURIONS de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel

Condamne Monsieur Réda X... aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRESIDENTE

Malika CHINOUNE Joëlle DOAT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 16/05715
Date de la décision : 26/09/2018

Références :

Cour d'appel de Lyon SA, arrêt n°16/05715 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-09-26;16.05715 ?
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