AFFAIRE SÉCURITÉ SOCIALE
RAPPORTEUR
R.G : 17/03712
CAF DU RHÔNE
C/
X...
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LYON
du 11 Avril 2017
RG : 20150624
COUR D'APPEL DE LYON
Sécurité sociale
ARRÊT DU 03 JUILLET 2018
APPELANTE :
CAF DU RHÔNE
[...]
représenté par Mme Muriel NOUAR, conseiller juridique munie d 'un pouvoir
INTIME :
Nordine X...
[...]
représenté par Maître Kris Y..., avocat au barreau de LYON, dispensé de comparaître
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2017/023705 du 28/09/2017 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 22 Mai 2018
Présidée par Elizabeth D..., Président, magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE:
- Elizabeth D..., président
- Laurence BERTHIER, conseiller
- Thomas CASSUTO, conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 03 Juillet 2018 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Elizabeth D..., Président, et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
********************
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Monsieur Nordine X... a bénéficié de l'Allocation de Logement à caractère social à compter du mois de juillet 2010.
Suite à un contrôle effectué le 8 janvier 2014, l'agent assermenté de la Caisse d'Allocations Familiales du Rhône (CAF) a constaté que, depuis le mois d'avril 2011, Monsieur X... ne remboursait plus deux prêts d'accession à la propriété et que l'intéressé n'avait pas déclaré l'intégralité de ses revenus sur les déclarations trimestrielles de ressources pour le RSA.
La Caisse a donc notifié le 4 septembre 2014 à Monsieur X... un indu de 7 666,53 € correspondant à l'Allocation de Logement Social et au RSA perçus à tort du 01 septembre 2011 au 31 janvier 2014, dont le solde s'élevait à 6 934,24 €.
Saisie d'une contestation de Monsieur X... relative à l'Allocation de Logement Social, la Commission de Recours Amiable, dans sa décision du 14 novembre 2014, notifiée le 27 novembre 2014, a rejeté la requête de l'assuré "tendant à ce que lui soit accordé le bénéfice de l'Aide au Logement à compter du 1er avril 2011".
Par requête en date du 24 mars 2015, Monsieur Nordine X... a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de LYON d'un recours à l'encontre de la décision de rejet.
Par jugement du 11 avril 2017, le tribunal des affaires de sécurité sociale a :
- Déclaré recevable le recours de Monsieur Nordine X... ;
- Annulé la procédure de contrôle diligentée par la CAF du Rhône concernant la situation de Monsieur X... et ayant donné lieu au rapport du 20 janvier 2014 ;
- Annulé la notification de dette en date du 4 septembre 2014 au titre de l'Allocation de Logement Social perçue par Monsieur X... du 1er septembre 2011 au 31 janvier 2014;
- Annulé la décision de la Commission de Recours Amiable en date du 14 novembre 2014 ;
- Rejeté la demande reconventionnelle en remboursement de la CAF du Rhône ;
- Rejeté la demande de Monsieur X... au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
La CAF du RHONE a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 18 MAI 2017;
Elle demande à la Cour, en l'état de ses dernières écritures reprises oralement lors de l'audience:
* de dire que Monsieur X... ne peut prétendre au bénéfice de l'allocation logement pour la période de septembre 2011 à décembre 2013,
* de le condamner reconventionnellement à rembourser à la CAF du RHONE la somme de 6446,28 euros au titre du solde de sa dette intiale d'allocation logement de 7216 euros,
* de le débouter de l'ensemble de ses demandes.
Selon conclusions qu'il soutient oralement à l'audience de ce jour, Monsieur X... demande à la Cour de confirmer la décision déférée et de rejeter la requête de la CAF, à titre subsidiaire, d'annuler les décision de rejet prise par la CAF relatives à l'indu et à la fin de droit de l'ALS et de me décharger de l'obligation de rembourser l'indu prétendu d'ALS, de rejeter la requête de la CAF.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont soutenues lors de l'audience.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La CAF soutient d'abord que Monsieur X... était forclos à saisir le tribunal en application des dispositions des articles R 142-1 et R 142-18 du code de sécurité sociale, n'ayant saisi en effet la juridiction que le 26 mars 2015, soit plus de deux mois après avoir déposé sa demande d'aide juridictionnelle.
Monsieur X... ne répond pas sur ce point.
Il apparaît que le premier juge a par des motifs pertinents que la cour adopte retenu:
* que la décision de la Commission de Recours Amiable contestée par Monsieur X... a été prise le 14 novembre 2014 et notifiée à l'assuré le 27 novembre 2014;
*que Monsieur X... a déposé une demande d'aide juridictionnelle le 14 janvier 2015, soit dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision de la Commission de Recours Amiable ;
* que par décision du 21 janvier 2015, le Bureau d'Aide Juridictionnelle a accordé l'aide juridictionnelle totale à Monsieur X... et désigné Maître Y... pour assister l'intéressé ;
* que la date de notification de la décision d'admission du 21 janvier 2015 étant inconnue, aucun délai ne peut courir et la décision d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle est ainsi devenue définitive le 21 mars 2015 ;
* que le délai de deux mois dont Monsieur X... disposait pour contester la décision de la Commission de Recours Amiable expirait dès lors le 21 mai 2015 ;
* que le recours de Monsieur X..., formé le 24 mars 2015, n'était donc pas atteint par la forclusion et doit dès lors être déclaré recevable ;
La CAF soutient ensuite que le principe du contradictoire a été respecté par elle dans le déroulement du contrôle du 20 janvier 2014 en ce que Monsieur X... a pu discuter avec l'agent de contrôle les éléments de fait et constats recueillis etqu'il a été informé dès la fin de l'entretien à domicile des éléments pris en compte par le contrôleur .
Monsieur X... soutient qu'aucun élément de débat n'ont été échangés avec lui et qu'il n'a pu être en mesure de présenter des observations pour contredire le rapport .
En l'espèce, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations prévoit que les décision individuelles n'interviennent
" qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales";
Or, Monsieur X... a fait l'objet d'un contrôle par un agent assermenté de la CAF qui s'est déroulé le 17 décembre 2013 à son domicile, à l'issue duquel un rapport a été établi le 20 janvier 2014, concluant que l'allocataire ne remboursait pas de prêt immobilier depuis avril 2011 ;
Ce rapport indique, s'agissant des informations données à l'allocataire, que celui-ci "a été informé de son droit d'apporter toute précision, modification ou rectification par tous moyens ou de contester le rapport', ainsi que " des suites du contrôle et/ou des pièces à fournir", oralement lors de l'entretien et qu'il sera informé par écrit .
Il résulte du dossier de la Caisse ( pièce 5) que Monsieur X... a pu connaître le contenu du rapport d'enquête et les constatations de l'agent assermenté et a donc été en mesure de présenter ses observations avant de recevoir la notification de dette que lui a adressée la Caisse le 4 septembre 2014 : en effet par courrier du 11 juin 2014 certes rédigé par Mme DI MARCO conseillère en économie sociale et familiale mais que Monsieur X... a lu et approuvé, ce dernier a pu présenter des observations et verser des pièces pour justifier les éléments qu'il jugeait non conformes dans le rapport.
Au vu de ces éléments, que le tribunal n'avait manifestement pas eu en sa possession, il apparaît que le principe du contradictoire a été respecté par la CAF dans le déroulement du contrôle de la situation de Monsieur X... et que ce contrôle n'est donc pas entaché d'irrégularité , de sorte que l'annulation de la notification de dette du 4 septembre 2014 au titre de l'Allocation de Logement Social du 1er septembre 2011 au 31 janvier 2014 ni celle de la décision de la Commission de Recours Amiable du 14 novembre 2014 ne sont encourues.
Il convient en conséquence de réformer la décision déférée.
Monsieur X... soutient au surplus que la preuve d'une assermentation et d'un agrément de l'agent de contrôle n'est pas établie et que cette qualité est contestée, de sorte qu'aucun rapport d'enquête ne fait foi ici jusqu'à preuve contraire et ne peut servir de fondement à la répétition des indus prétendus.
La CAF fait valoir que conformément à l'article L 114-10 du code de la sécurité sociale, tous les agents de contrôle employés par la CAF du RHONE sont assermentés et agréés dans es conditions légales et bénéficient d'une délégation permanente du Directeur à effet de réaliser des contrôles au domicile des allocataires ou au guichet de la CAF et de réclamer tous justificatifs, de rédiger et signer les rapports de contrôle.
Elle produit concernant le contrôle du 20 janvier 2014, l'habilitation de Rajaa Z... pour établir un rapport d'enquête faisant foi ainsi que celle de Monsieur Bruno A... concernant le rapport du 14 novembre 2014.
En l'espèce, il apparaît que concernant tant Monsieur B... que Mme Z..., sont versés la décision d'agrément les concernant en qualité d'agent de contrôle des prestations familiales à effet pour le premier du 17 mars 1998 et pour la seconde du 28 août 2012 ainsi que les procès-verbaux leur donnant acte de leurs prestations de serment, que les attestations de Monsieur C... directeur de la CAF du RHONE viennent confirmer qu'ils ont délégation permanente depuis leur prise de fonction en qualité de contrôleurs allocataires pour réalise les contrôles à domicile ou au guichet de la CAF, réclamer les justificatifs et rédiger et signer les rapports, que ces attestations certes rédigées récemment ne font que confirmer les décisions prises par le Préfet du RHONE les autorisant à exercer leurs fonctions d'agent de contrôle en matière de prestations familiales à la CAF de LYON et viennent ainsi démontrer, contrairement à ce que soutient Monsieur X... l'assermentation et l'agrément des agents ayant procédé aux contrôles des 20 janvier et 14 novembre 2014.
Sur la décision confirmative d'indus et la preuve de la réalité du montant de la créance d'ASL, la CAF fait valoir que, suite au contrôle du 20 janvier 2014, il était apparu que Monsieur X... ne remboursait pas de prêt d'accession immobilière, constatation qui a été confirmée lors du contrôle du 14 novembre 2014.
Le directeur de la CAF a donc prononcé une pénalité estimant qu'il existait une manoeuvre frauduleuse aux fins de percevoir l'allocation logement .
La CAF ajoute qu' une notification de dette explicative a été adressée à Monsieur X... le 4 septembre 2014 incluant le trop perçu d'allocation logement pour la somme de 7216,48 euros et le trop perçu de RSA pour la somme de 450,05 euros et qu'actuellement, ce trop perçu est de 6446,28 euros, suite au reversement des retenues faites.
Elle produit sur ce point un décompte actualisé et explicatif ( sa pièce 17)
Par ailleurs, elle fait valoir que Monsieur X... a bien eu communication des deux rapports de contrôle le 12 mai 2014 pour le premier et le 10 octobre 2017 pour le second.
Monsieur X... estime que la décision confirmative d'indus est mal fondée, dès lors que la CAF n'apporte pas la preuve de la réalité du montant de la créance d'ALS.
Il soutient n'avoir jamais reçu de notification claire des indus d'ALS qui lui sont réclamés et de leur montant respectif au regard des périodes de versement, ainsi que l'exige l'article R 133-9-2 du code de la sécurité sociale.
Il soutient également qu'il n'a jamais dissimulé de ressources et rembourse toujours un emprunt relatif à l'acquisition de son logement.
Enfin, il soutient n'avoir jamais reçu aucun rapport de contrôle.
Conformément à l'article R 133-9-2 du code de la sécurité sociale,
'L'action en recouvrement de prestations indues s'ouvre par l'envoi au débiteur par le directeur de l'organisme compétent d'une notification de payer le montant réclamé par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception. Cette lettre précise le motif, la nature et le montant des sommes réclamées et la date du ou des versements donnant lieu à répétition. Elle mentionne l'existence d'un délai de deux mois imparti au débiteur pour s'acquitter des sommes réclamées et les modalités selon lesquelles les indus de prestations pourront être récupérés, le cas échéant, par retenues sur les prestations à venir. Elle indique les voies et délais de recours ainsi que les conditions dans lesquelles le débiteur peut, dans le délai mentionné au deuxième alinéa de l'article R 142-1 présenter ses observations écrites ou orales.
A l'expiration du délai de forclusion prévu à l'article R. 142-1 ou après notification de la décision de la commission instituée à ce même article, le directeur de l'organisme créancier compétent, en cas de refus du débiteur de payer, lui adresse par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception une mise en demeure de payer dans le délai d'un mois qui comporte le motif, la nature et le montant des sommes demeurant réclamées, la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement, les voies et délais de recours et le motif qui, le cas échéant, a conduit à rejeter totalement ou partiellement les observations présentées.'
En l'espèce, la notification de dette du 4 septembre 2014 explique à Monsieur X...:
* le motif des sommes réclamées à savoir le fait qu'il ne rembourse plus les prêts d'accession à la propriété depuis avril 2011, fait que Monsieur X... a du reste reconnu dans son courrier du 11juin 2014,
* la nature du montant réclamé c'est à dire la perception à tort de l'ALS du 1er septembre 2011 au 31 janvier 2014,
* le montant réclamé soit 6934,24 euros ( en ce compris la dette de RSA),
* les modalités selon lesquelles les indus pourront être récupérés, en lui indiquant qu'il pourra formuler une proposition mensuelle minimum de 48 euros de remboursement.
Ce notification a été adressée à Monsieur X... par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 septembre 2014.
Par ailleurs, il est établi que Monsieur X... a bien eu communication des deux rapports de contrôle.
Ainsi, l'indu est bien jusitifié par la CAF .
Par ailleurs Monsieur X... a régulièrement reçu notification d'une fraude le 27 mars 2015 et d'une pénalité administrative de 700 euros eu regard de manouevres frauduleuses reprochées du fait du bénéfrice de l'ALS alors qu'il ne rembourse plus ses prêts d'accession à la propriété depuis avril 2011.
Il apparaît par ailleurs du décompte des paiements au titre de l'ASL que le solde de la dette est actuellement de 6446,28 euros.
Enfin, Monsieur X... ne peut aujourd'hui invoquer une irrégularité de la décision rendue par la Commission de recours amiable pour méconnaissance des dispositions de l'article R 142-2 du code de la sécurité sociale et de l'arrêté du 19 juin 1969 relatif à la désignation des membres des CRA et des assesseurs de première instance du contenieux de la sécurité sociale ainsi que du fonctionnement des commissions de recours gracieux: en effet, le commission de recours amiable de la CAF n'est pas une juridiction et ses décisions sont susceptibles d'un recours devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, juridiction compétente pour statuer sur les demandes des allocataires qui contestent les décisions de la Caisse, recours que Monsieur X... a exercé, de sorte qu'il ne peut dans ces conditions arguer d'une irrégularité de la décision rendue par la CRA à raison de sa composition et de la régularité de la désignation de ses membres.
Il convient en conséquence de réformer la décision déférée, de dire que Monsieur X... Nordine ne peut prétendre au bénéfice de l'allocation logement pour la période de septembre 2011 à décembre 2013 et de le condamner en conséquence à rembourser à la CAF du RHONE la somme de 6446,28 euros, représentant le solde de la dette initiale au titre de l'allocation logement de 7216,48 euros.
La procédure étant gratuite et sans frais devant les juridictions de la sécurité sociale en vertu de l'article R 144-10 du code de la sécurité sociale, la demande relative aux dépens est dénuée d'objet.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré,
Réforme la décision déférée,
Statuant à nouveau,
Dit que la procédure de contrôle du 20 janvier 2014 a été menée de manière contradictoire,
Dit que les procédures de contrôle ont été menées par des agents assermentés et agréés,
Dit que l'indu notifié à Monsieur Nordine X... est bien fondé,
Dit que Monsieur Nordine X... ne peut prétendre au bénéfice de l'allocation logement pour la période de septembre 2011 à décembre 2013,
Le condamne en conséquence à rembourser à la CAF du RHONE la somme de 6446,28 euros correspondant au solde de la dette initiale d'allocation logement de 7216,48 euros,
Dit n'y avoir lieu à dépens ou à paiement de droit en application de l'article R144-10 du code de la sécurité sociale.
LA GREFFIÈRE LA PRESIDENTE
Malika CHINOUNE Elizabeth D...