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16/05/2018 | FRANCE | N°17/02960

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 16 mai 2018, 17/02960


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 17/02960





[X]



C/

société HOP !







Saisine sur renvoi de la cour de cassation :



jugement du conseil de prud'hommes de LYON du

27 mars 2014

RG : F 12/01522



arrêt de la cour d'appel de LYON du 23 septembre 2015

RG : 14/02759



arrêt de la Cour de Cassation de PARIS

du 02 Mars 2017

RG : 272 F-D











COUR D'APPEL DE LYON


r>CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 16 MAI 2018













APPELANT :



[E] [X]

né le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



représenté par Me Jacques GRANGE de la SELAS LLC ET ASSOCIES - BUREAU DE LYON, avocat au barreau...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 17/02960

[X]

C/

société HOP !

Saisine sur renvoi de la cour de cassation :

jugement du conseil de prud'hommes de LYON du

27 mars 2014

RG : F 12/01522

arrêt de la cour d'appel de LYON du 23 septembre 2015

RG : 14/02759

arrêt de la Cour de Cassation de PARIS

du 02 Mars 2017

RG : 272 F-D

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 16 MAI 2018

APPELANT :

[E] [X]

né le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Jacques GRANGE de la SELAS LLC ET ASSOCIES - BUREAU DE LYON, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

société HOP !

venant aux droits de la Société HOP BRIT AIR

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Laurent FEBRER, avocat au barreau de PARIS

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 30 Janvier 2018

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Joëlle DOAT, Président

Didier PODEVIN, Conseiller

Evelyne ALLAIS, Conseiller

Assistés pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 16 Mai 2018, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Joëlle DOAT, Président, et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

Suivant contrat de travail à durée déterminée du 8 février 1996, modifié par avenant du 31 juillet 1996, Monsieur [E] [X] a été embauché par la société BRIT AIR du 12 février 1996 au 11 mai 1997, en qualité de personnel navigant technique sur la base de LILLE.

Par accord conclu le 17 avril 1997 entre les parties, ce contrat a été transformé en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 12 mai 1997.

Monsieur [X] a obtenu le poste d'officier pilote de ligne CRJ sur la base de [Localité 2] le 8 août 1997.

Suivant avenant au contrat de travail du 18 avril 2003, il a été promu commandant de bord CRJ à compter du 5 avril 2003 sur la même base.

Monsieur [X] a saisi le conseil de prud'hommes de LYON le 16 avril 2012 aux fins de voir rectifier une erreur commise dans son classement professionnel, condamner la société BRIT AIR à le nommer en qualité de commandant de bord sur appareil de grande capacité avec toutes les conséquences attachées à la reconnaissance de cette fonction ainsi qu'à lui payer le salaire correspondant, la régularisation afférente, des dommages et intérêts et une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Il a sollicité en outre la rectification de ses bulletins de paie, une mesure d'astreinte ainsi que l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

Par jugement en date du 27 mars 2014, le conseil de prud'hommes a :

-débouté Monsieur [X] de toutes ses demandes,

-condamné Monsieur [X] à payer à la société BRIT AIR la somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné Monsieur [X] aux dépens.

Le 3 avril 2014, Monsieur [X] a interjeté appel de la décision.

Par arrêt du 23 septembre 2015, la cour d'appel de LYON a :

-infirmé le jugement entrepris,

statuant à nouveau,

-dit que l'action de Monsieur [X] tendant à être crédité d'un certain nombre de points en application de l'annexe 7 de l'accord d'entreprise applicable au 1er avril 1998 n'était pas prescrite,

-dit que la demande d'indemnisation s'analysait en fait en une demande de rappel de salaires,

-déclaré prescrites les demandes pécuniaires pour la période antérieure au 17 avril 2007,

-constaté que par mauvaise application de l'annexe 7 'liste de classement professionnel' de l'accord d'entreprise applicable au 1er avril 1998, il manquait 216 points à Monsieur [X] au 31 décembre 2002,

-constaté que ce manque de points avait été reconduit chaque année jusqu'au jour de l'arrêt,

-dit que le compte de Monsieur [X] devait être crédité de 216 points et que son rang dans la liste de classement professionnel devait être modifié en conséquence,

-constaté que Monsieur [X] n'apportait pas la preuve d'avoir subi un retard dans sa carrière consécutif au rang de classement,

-débouté en conséquence Monsieur [X] de ses demandes pécuniaires,

-dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné Monsieur [X] aux dépens.

Statuant sur le pourvoi formé par Monsieur [X], la cour de cassation, par arrêt en date du 2 mars 2017, a :

-cassé et annulé la décision de la cour d'appel mais seulement en ce qu'elle avait débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts à titre de réparation des préjudices subis du fait de la violation par son employeur de la disposition de l'accord d'entreprise applicable sur l'attribution de points supplémentaires,

-renvoyé la cause et les parties sur ce point devant la cour d'appel de LYON, autrement composée,

-condamné la société HOP !, venant aux droits de la société HOP! BRIT AIR, anciennement dénommée BRIT AIR, à payer à Monsieur [X] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné la société HOP ! aux dépens.

La cour de cassation a dit qu'en retenant que sous le couvert d'une demande de dommages et intérêts 'toutes causes confondues'destinée à compenser le retard pris par le salarié dans l'évolution de sa carrière tant en ce qui concernait son passage aux fonctions de commandant de bord en 2003, qu'à l'évolution de sa carrière de commandant de bord quant au pilotage d'avion d'une plus grande capacité, il s'agissait en fait d'une demande de rappel de salaires, qu'or, il était constant que l'on ne pouvait s'affranchir des règles gouvernant la prescription des salaires, sous le couvert d'une demande de dommages et intérêts sauf exception liée à la discrimination, la cour d'appel, en statuant ainsi, alors que le salarié demandait l'indemnisation d'une perte de chance liée à l'impossibilité de se porter candidat à certains postes du fait de l'insuffisance du nombre de points attribués, avait modifié l'objet du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile.

Par déclaration enregistrée au greffe le 20 avril 2017, Monsieur [X] a saisi la cour d'appel de LYON.

Dans ses conclusions soutenues oralement à l'audience, Monsieur [X] demande à la Cour de :

-condamner la société HOP ! à lui payer les sommes suivantes:

200.000 € à titre de dommages et intérêts, toutes causes de préjudices confondues,

- 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [X] fait valoir :

-que compte tenu de l'application erronée de l'accord d'entreprise quant à son classement professionnel, il a été crédité de moins de points que ceux auxquels il pouvait prétendre et a donc figuré sur la liste de classement professionnel à une moins bonne place que celle à laquelle il aurait dû être classé ; que ce moins bon classement a eu pour effet :

de retarder son accession au poste de commandant de bord du mois de janvier 2002 au mois de janvier 2003,

de faire échec à son évolution professionnelle en tant que commandant de bord, en l'empêchant de candidater à des appels d'offres pour être affecté à des appareils de plus grande capacité avec les augmentations de salaire correspondantes,

-que s'il avait été crédité des 216 points, reconnus comme manquants par l'arrêt de la cour d'appel du 23 septembre 2015, il aurait eu une meilleure place dans la liste de classement professionnel et aurait pu être nommé comme commandant de bord dès l'appel d'offres de janvier 2002; qu'il n'a pas postulé sur un tel poste plus tôt, étant trop mal classé pour pouvoir y prétendre,

-que ce mauvais classement a perduré jusqu'à l'arrêt du 23 septembre 2015 et l'a empêché de postuler à des postes de commandant de bord plus rémunérateurs, alors qu'il aurait pu le faire s'il avait été crédité de 216 points supplémentaires;

-qu'il a subi une perte de chance de progression professionnelle résultant uniquement de l'erreur commise quant à son classement professionnel; qu'en effet, il a été promu commandant de bord, dès qu'il a eu le nombre de points suffisants; qu'en outre, ses compétences techniques et professionnelles lui auraient permis de réussir sans difficulté les examens nécessaires pour devenir commandant de bord d'appareils de plus grosse capacité et bénéficier ainsi d'une rémunération plus importante; que son préjudice est à la fois financier et professionnel.

Dans ses conclusions soutenues oralement à l'audience, la société HOP! demande à la Cour de :

-déclarer les demandes de Monsieur [X] relatives à la période postérieure au 17 avril 2007 irrecevables,

-en tout état de cause, débouter Monsieur [X] de l'ensemble de ses demandes,

-condamner Monsieur [X] à lui payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

A l'appui de ses prétentions, la société HOP ! fait valoir :

-que la cour de cassation n'a pas remis en cause la décision de la cour d'appel en ce qu'elle a déclaré prescrites les demandes pécuniaires pour la période antérieure au 17 avril 2007 et constaté pour la période postérieure au 17 avril 2007 que Monsieur [X] n'apportait pas la preuve d'avoir subi un retard dans sa carrière consécutif à son rang de classement ; que dès lors, les demandes de Monsieur [X] pour la période postérieure au 17 avril 2007 doivent être déclarées irrecevables en application de l'autorité de la chose jugée,

-qu'à défaut de pièces suffisantes, Monsieur [X] ne prouve pas l'existence du préjudice qu'il invoque; qu'en tout état de cause, ce préjudice est moins important que celui invoqué; qu'en effet, Monsieur [X] n'a pas modifié le montant des dommages et intérêts sollicités alors qu'il a été nommé commandant de bord d'un avion de plus grosse capacité depuis le 7 février 2016 et que l'arrêt du 23 septembre 2015 n'a reconnu qu'un manque de 216 points et non de 222 points dans le cadre du classement professionnel du salarié; qu'au surplus, la nomination de Monsieur [X] aux postes dont il fait état était soumise à ce qu'il réponde aux appels d'offres correspondants, ce qu'il ne justifie pas avoir fait, et qu'il réussisse les formations et examens correspondants, lesquels ne consistaient pas en de simples formalités.

MOTIFS DE LA DECISION :

sur l'exception d'irrecevabilité des demandes de Monsieur [X]:

Conformément à l'article 624 du code de procédure civile, la censure qui s'attache à un arrêt de cassation est limitée à la portée des moyens qui constituent la base de cassation et laisse subsister les dispositions non attaquées par le pourvoi, sauf dans les cas d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.

La cour de cassation a cassé l'arrêt de la cour d'appel de LYON du 23 septembre 2015, au motif que celle-ci avait modifié l'objet du litige, en considérant que la demande de dommages et intérêts de Monsieur [X] s'analysait comme une demande de rappels de salaires alors qu'elle consistait en fait en une demande d'indemnisation d'une perte de chance liée à l'impossibilité de se porter candidat à certains postes du fait de l'insuffisance du nombre de points attribués.

Les dispositions de l'arrêt de la cour d'appel de LYON ayant constaté la prescription des demandes pécuniaires pour la période antérieure au 17 avril 2007 et débouté Monsieur [X] de ses demandes pour la période postérieure au 17 avril 2007 résultent de ce que la cour d'appel a considéré à tort que ces demandes consistaient en des demandes de rappels de salaires, moyen constituant la base de la cassation.

Aussi, l'effet de la cassation s'attache aux dispositions susvisées ainsi qu'aux dispositions par lesquelles l'arrêt de la cour d'appel de LYON a constaté que Monsieur [X] ne rapportait pas la preuve d'avoir subi un retard dans sa carrière consécutif à son rang de classement, ces dernières dispositions étant indivisibles de celles cassées.

Il convient donc de rejeter l'exception d'irrecevabilité pour autorité de la chose jugée soulevée par la société HOP ! quant à la demande d'indemnisation de Monsieur [X] pour la période postérieure au 17 avril 2007

sur la demande d'indemnisation de Monsieur [X]:

Monsieur [X] fait partie du personnel navigant technique, qui comprend les officiers pilotes de ligne (OPL) et les commandants de bord (CB) de la compagnie.

Les relations contractuelles des parties étaient soumises à un accord d'entreprise du personnel navigant technique en date du 29 janvier 1998, applicable à compter du 1er avril 1998, lequel a été modifié par plusieurs avenants, jusqu'au 22 mai 2014, date à laquelle cet accord a été remplacé par la convention d'entreprise du personnel navigant technique de HOP! BRIT AIR.

La cour de cassation n'a pas prononcé la cassation des dispositions par lesquelles l'arrêt de la cour d'appel de LYON a :

-constaté que par mauvaise application de l'annexe 7 'liste de classement professionnel' de l'accord d'entreprise applicable au 1er avril 1998, il manquait 216 points à Monsieur [X] au 31 décembre 2002,

-constaté que ce manque de points a été reconduit chaque année jusqu'au jour de l'arrêt.

Ces dispositions sont donc irrévocables et établissent la méconnaissance fautive par l'employeur de l'accord d'entreprise quant au classement professionnel de Monsieur [X].

L'annexe VII de l'accord d'entreprise du 29 janvier 1998, intitulée 'liste de classement professionnel' précise dans son article V le fonctionnement de cette liste (dénommée LCP) pour les personnels navigants techniques (PNT) de la manière suivante:

'V.Fonctionnement de la LCP:

Les points sont attribués en fonction des critères retenus, les PNT sont classés dans la LCP par ordre décroissant des points.

A la suite d'un appel d'offre de la compagnie concernant un acte de carrière, les désignations s'effectuent dans l'ordre de la LCP parmi les volontaires.

En l'absence de volontaires, la désignation s'effectue dans l'ordre inverse de la liste d'ancienneté.

Le fait de refuser une proposition ne donne pas droit à une priorité et ne modifie pas l'ordre de la LCP.

Les instructeurs figurent de plein droit dans la LCP, mais la fonction n'apporte aucun point supplémentaire.

Les personnels sous contrat de travail à durée déterminée conservent le bénéfice de leurs points acquis même après l'obtention d'un contrat de travail à durée indéterminée.'

Les actes de carrière visés par l'article V sont notamment la nomination en qualité de commandant de bord.

Par ailleurs, l'article XV de la même annexe précise que :

'en cas d'égalité de points, le choix s'effectue en tenant compte des paramètres complémentaires dans l'ordre suivant:

date d'origine du contrat PNT dans la compagnie,

le plus âgé des deux'.

Les modalités de désignation des PNT susvisées n'ont pas été modifiées par les avenants successifs à l'accord du 29 janvier 1998 ni par l'accord du 22 mai 2014.

Les LCP produites par Monsieur [X] pour la période de 1998 à 2011 font apparaître que le nombre de points de celui-ci a augmenté chaque année de la manière suivante:

147 au 31 octobre 1998,

193 en décembre 1999,

242 en décembre 2000,

293 en décembre 2001,

375 au 12 décembre 2002,

480 au 2 novembre 2003

613 au 10 décembre 2004,

734 au 14 décembre 2005,

823 au 18 septembre 2006,

952 au 10 octobre 2007,

1084 au 15 novembre 2008,

1204 au 15 novembre 2009,

1306 au 21 septembre 2010,

1449 au 1er décembre 2011.

Messieurs [A], [N] et [Y], qui étaient officiers pilotes de ligne et avaient respectivement 307,306 et 299 points sur la LCP 2001, figurent sur la LCP 2002 comme commandants de bord sur la base de [Localité 2] avec 422,421 et 398 points Ils ont donc été promus commandants de bord en 2002, sur la base de la LCP de 2001, ce que la société HOP ! ne conteste pas.

Monsieur [X] n'a été promu commandant de bord qu'à compter d'avril 2003, ayant seulement 293 points sur la LCP 2001. Or, si Monsieur [X] avait été crédité sur la LCP 2001 du nombre total de points auquel il avait droit à cette date, soit 509 points (293+216) au regard de l'arrêt de la cour d'appel de LYON du 23 septembre 2015, il aurait été beaucoup mieux classé que les trois OPL précités et aurait pu prétendre à une promotion comme commandant de bord sur la base de [Localité 2] dès 2002 à la place de l'un d'entre eux.

Le fait que Monsieur [X] ne justifie pas s'être porté volontaire sur les postes auxquels ses collègues ont été nommés n'a eu aucune incidence sur son absence de désignation, compte tenu de qu'il ne pouvait prétendre à ces postes du fait de son rang de classement. Par ailleurs, Monsieur [X] a été promu dès avril 2003, alors qu'il avait 375 points sur la LCP 2002, ce qui révèle qu'il aurait eu sans difficulté cette promotion dès 2002, si son nombre réel de points avait été mentionné sur la LCP 2001.

Monsieur [X] a donc subi une perte de chance d'être promu comme commandant de bord dès 2002 au lieu de 2003.

Les parties sont d'accord pour reconnaître que la société BRIT AIR était composée de deux catégories d'avions :

-une catégorie d'avions d'une capacité supérieure, constituant le secteur FOKKER 100, remplacé par le secteur CRJ 1000,

-une catégorie d'avions d'une capacité inférieure, constituant le secteur CRJ100/700.

Si Monsieur [X] avait été crédité des 216 points auxquels il pouvait prétendre, il aurait eu 1300 points sur la LCP 2008 au lieu de 1084 points, soit un nombre supérieur à celui de 1234 points, détenu par Monsieur [D], nommé commandant de bord d'un FOKKER 100 sur la base de [Localité 2] en 2009.

Toutefois, les explications de Monsieur [X] au vu uniquement de la LCP 2008 sont trop sibyllines pour prouver qu'il aurait pu être promu comme commandant de bord d'un CRJ 1000 dès 2009 après rectification de ses points.

Le 20 septembre 2011, 5 candidatures à des postes de commandants de bord secteur CRJ 1000 base [Localité 2] ouverts le 25 juillet 2011 ont été retenues.

Le 23 mars 2012, 8 candidatures à des postes de commandants de bord secteur CRJ 1000 base [Localité 2] ouverts le 9 février 2012 ont été retenues,

Le 16 janvier 2014, 6 candidatures à 4 postes de commandants de bord 'ETP' secteur CRJ 1000 base [Localité 2] ont été retenues.

Messieurs [H], [K], [F], [U] et [W], commandants de bord CRJ100/700 avaient respectivement 1571, 1558, 1529,1505 et 1503 points sur la LCP 2010 avant leur nomination en 2011 comme commandants de bord secteur CRJ 1000 base [Localité 2]. Si Monsieur [X] avait été crédité du nombre de points auxquels il pouvait prétendre , il aurait eu 1522 points (1306+216) sur la LCP 2010 et aurait pu être promu commandant de bord dès 2011, étant mieux classé que Messieurs [U] et [W].

De même, Monsieur [X] aurait eu 1665 points (1449+216), sur la LCP 2011, soit un nombre de points supérieur à celui de tous les candidats retenus le 23 mars 2012 pour les 8 postes de commandants de bord secteur CRJ 1000 base [Localité 2] , le nombre de points de ces candidats étant compris entre 1538 et 1613.

Comme il a été vu ci-dessus, le fait que Monsieur [X] ne justifie pas s'être porté volontaire sur les postes auxquels ses collègues ont été nommés n'a eu aucune incidence sur son absence de désignation.

Les parties sont d'accord pour reconnaître que la prise en main d'un avion CRJ 1000 nécessite une formation initiale puis un maintien des compétences du pilote de cet avion. Si la société HOP ! soutient que 5 candidats sur les 6 qui avaient été retenus en octobre 2014 pour pourvoir des postes de commandants de bord CRJ 1000 ont échoué aux examens nécessaires pour piloter cet avion, elle n'en justifie par aucune pièce.

Le détail de la formation initiale considérée montre que celle-ci consiste en un stage de prise en main de l'appareil CRJ 1000 d'une durée de 10 h 30. Aussi, au vu des évaluations élogieuses de Monsieur [X] notamment pour la période de 2010 à 2012, la société HOP ! ne prouve pas que Monsieur [X] n'aurait pas pu remplir ses fonctions si sa candidature avait été retenue.

Monsieur [X] a donc également perdu une chance d'être promu comme commandant de bord CRJ 1000 de 20 septembre 2011 au 7 février 2016, date à partir de laquelle il a été nommé à cet emploi, suivant avenant du 3 mars 2016.

La réparation d'une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée.

Les éléments afférents à la carrière de Monsieur [X] montrent néanmoins que celui-ci a réalisé ses avancements dès que son classement sur la LCP le lui permettait. Aussi, le retard dans sa nomination comme commandant de bord puis dans sa nomination comme commandement de bord CRJ 1000 résulte principalement de la minoration de son nombre de points, de telle sorte que Monsieur [X] a subi par la faute de la société HOP ! une perte de chance d'accéder à bonne date aux postes considérés qu'il convient de fixer à

95 %.

Les grilles de rémunération PNT et les fiches de paie produites par Monsieur [X] font apparaître que :

- si celui-ci avait été nommé commandant de bord dès 2001, date à laquelle il aurait eu une ancienneté de 5 ans, il aurait perçu une rémunération mensuelle brute de 7.064 € au lieu de 4.977 €, soit une différence mensuelle brute de 2.087 € en sa défaveur pendant un an,

-si celui-ci avait été nommé commandant de bord CRJ 1000 dès 2011, date à laquelle il aurait eu une ancienneté de 15 ans, il aurait bénéficié d'une rémunération mensuelle brute de 9.892 € au lieu de 8.959 €, soit une différence mensuelle brute de 933 € en sa défaveur, laquelle a perduré jusqu'en 2016, date de sa nomination comme commandant de bord CRJ 1000,

-il n'a pas bénéficié des congés payés et du 13ème mois afférents aux rémunérations plus importantes auxquelles il pouvait prétendre et il n'a également pas pu cotiser en fonction de rémunérations plus importantes pour ses droits à la retraite.

Le manque à gagner résultant du retard subi par Monsieur [X] dans sa progression professionnelle devant être évalué à la somme de 95.000 euros au regard notamment des éléments ci dessus, le préjudice constitué par la perte de chance sera fixé à la somme de 90.250 € (95.000 € x95 %). Monsieur [X] a également subi un préjudice moral et professionnel qu'il y a lieu de réparer par l'allocation d'une somme de 10.000 euros.

Il convient en conséquence de condamner la société HOP! à payer à monsieur [X] une somme de 100.250 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice, le jugement étant infirmé en ce qu'il a rejeté ce chef de demande.

La société HOP ! , partie perdante, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Elle sera également condamnée à payer à Monsieur [X] la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles tant en première instance qu'en appel. Le jugement sera dès lors infirmé quant aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement, dans la limite de la déclaration de la saisine,

DECLARE recevable la demande d'indemnisation de Monsieur [X] pour la période postérieure au 7 avril 2007.

INFIRME le jugement en ce qu'il a débouté Monsieur [X] de sa demande de dommages et intérêts à titre de réparation des préjudices subis du fait de la violation par son employeur de la disposition de l'accord d'entreprise applicable sur l'attribution de points supplémentaires, l'a condamné à payer à la société HOP ! la somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

CONDAMNE la société HOP ! à payer à Monsieur [X] la somme de 100.250 euros à titre de dommages et intérêts ;

CONDAMNE la société HOP ! à payer à Monsieur [X] la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société HOP ! aux dépens de première instance et d'appel, comprenant ceux de l'arrêt cassé.

Le greffierLe Président

Sophie MASCRIERJoëlle DOAT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 17/02960
Date de la décision : 16/05/2018

Références :

Cour d'appel de Lyon SA, arrêt n°17/02960 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-05-16;17.02960 ?
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