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05/04/2018 | FRANCE | N°17/04650

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 05 avril 2018, 17/04650


R.G : 17/04650









Décision : ordonnance du juge des référés du tribunal de commerce de Lyon en date du 13 juin 2017



RG : 2017R480

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRET DU 05 Avril 2018







APPELANTE :



SNC VUE MONT BLANC

[Adresse 1]

[Adresse 1]



représentée par Maître Véronique GIRAUDON, avocat au barreau de LYON






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INTIMEE :



EURL MENUISERIE CHARPENTE JC GACHET

[Adresse 2]

[Adresse 2]



représentée par la SCP D'AVOCATS CHAVRIER-MOUISSET- THOURET-TOURNE, avocat au barreau de LYON

assistée de la SELARL MARC PETERS, avocat au barreau de BONNE...

R.G : 17/04650

Décision : ordonnance du juge des référés du tribunal de commerce de Lyon en date du 13 juin 2017

RG : 2017R480

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 05 Avril 2018

APPELANTE :

SNC VUE MONT BLANC

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Maître Véronique GIRAUDON, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

EURL MENUISERIE CHARPENTE JC GACHET

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par la SCP D'AVOCATS CHAVRIER-MOUISSET- THOURET-TOURNE, avocat au barreau de LYON

assistée de la SELARL MARC PETERS, avocat au barreau de BONNEVILLE

******

Date de clôture de l'instruction : 06 février 2018

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 14 février 2018

Date de mise à disposition : 05 avril 2018

Audience tenue par Aude RACHOU, président et Vincent NICOLAS, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,

assistés pendant les débats de Audrey PERGER, greffier placé

A l'audience, Aude RACHOU a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Aude RACHOU, président

- Françoise CLEMENT, conseiller

- Vincent NICOLAS, conseiller

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Aude RACHOU, président, et par Audrey PERGER, greffier placé, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

La SNC Vue Mont Blanc est maître d'ouvrage d'un chalet situé à [Localité 1].

La société Chatron Michaud architectes est en charge de la maîtrise d'oeuvre d'exécution et la société Megève design, architecte d'intérieur, suit les travaux de second oeuvre.

Selon contrat du 19 mai 2015, l'EURL Menuiserie charpente JC Gachet (la société Gachet) est titulaires de deux marchés de travaux de construction d'un montant de 552 000 euros TTC pour le lot charpente-couverture-menuiserie extérieure et de 675 489,90 euros TTC pour le lot menuiserie intérieure.

La réception des travaux avec réserves a eu lieu le 13 février 2017 pour le lot menuiserie intérieure et le 24 février 2017 pour le lot charpente-couverture-menuiserie extérieure.

N'étant pas payée, la société Gachet a saisi le juge des référés du tribunal de commerce de Lyon.

Par ordonnance du 13 juin 2017, le juge des référés a condamné sous astreinte la société Vue Mont Blanc à payer à la société Gachet la somme de 403 275,600 euros à titre provisionnel ainsi que la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et ordonné à la société Gachet de procéder à la levée des réserves dans un délai de vingt jours ouvrables suivant l'encaissement de la somme.

La société Vue Mont Blanc a régulièrement interjeté appel de cette décision le 23 juin 2017 et a sollicité l'arrêt de l'exécution provisoire.

Par ordonnance du 18 juillet 2017, le premier président a rejeté la demande en arrêt de l'exécution provisoire.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 11 janvier 2018, la SNC Vue Mont Blanc demande à la cour l'infirmation de l'ordonnance et la condamnation de la société Gachet à lui rembourser la somme de 407 939,14 euros perçue en exécution de l'ordonnance de référé.

Elle sollicite par ailleurs la désignation d'un expert et l'autorisation de faire procéder à la levée des réserves figurant sur le procès-verbal de réception dès que l'expert aura constaté la réalité des dites réserves, outre 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 11 décembre 2017, la société Gachet demande à la cour la confirmation de la décision, le débouté de la société Vue Mont Blanc de l'ensemble de ses demandes et sa condamnation à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu l'ordonnance de clôture du 6 février 2018 ;

Sur ce :

Attendu que la SNC Vue Mont Blanc fait valoir que s'agissant d'un marché de travaux à forfait, aucune révision du prix n'était possible en l'absence d'avenant et d'accord du maître de l'ouvrage sur des travaux supplémentaires ;

qu'elle est bien fondée à faire valoir l'exception d'inexécution nonobstant les dispositions de la loi du 16 juillet 1971 réglementant le régime des retenues de garantie ;

que la société Gachet n'ayant pas livré l'ouvrage dans les délais convenus, elle est redevable de pénalités de retard ;

que la société Paget éco, économiste de la construction, qui a établi un décompte des travaux a été mandaté par la société Gachet et non par elle ;

qu'elle est encore dans le délai prévu à la norme AFNOR P03-001 pour contester le décompte définitif ;

que ces éléments s'analysent en des contestations sérieuses relevant du juge du fond ;

qu'enfin, elle est bien fondée en sa demande d'expertise eu égard aux désordres constatés ;

qu'en dernier lieu, le délai de reprise des réserves est expiré sans que pour autant la société Gachet y ait satisfait ;

Attendu que la société Gachet conclut à la confirmation de la décision, la SNC Vue Mont Blanc ayant pratiqué des retenues de garantie indues sur le marché charpente couverture et menuiserie extérieure au vu de la caution bancaire qui avait été fournie ;

qu'il en est de même pour le marché menuiserie intérieure qui a entièrement été exécuté ;

que la société Paget éco, mandatée par la SNC Vue Mont Blanc, a établi le décompte des travaux

qu'enfin et en toute hypothèse, la SNC n'a pas contesté dans les délais le décompte définitif des travaux de telle sorte qu'il est réputé définitif ;

qu'elle ajoute que les prestations ont été correctement exécutées dans les délais requis et que les réserves sont en cours de traitement ;

que la SNC est à l'origine des difficultés survenues sur le chantier n'ayant de cesse de modifier ses desiderata et ne validant que tardivement les éléments nécessaires à l'avancée du chantier ;

qu'elle a dressé une liste de prétendues malfaçons invérifiables et injustifiées ;

Attendu que la SNC Vue Mont Blanc conteste en premier lieu la compétence du juge des référés au regard des difficultés sérieuses soulevées et en second lieu sollicite une mesure d'expertise ;

Sur la compétence du juge des référés :

Attendu que l'entrepreneur dispose d'un délai de trente jours pour faire connaître ses réserves sur le décompte général définitif (DGD) qui lui est adressé, son silence valant présomption irréfragable d'accord ;

Attendu que le maître d'ouvrage dispose alors d'un délai de trente jours pour faire connaître ses éventuelles observations ;

Attendu que faute de respecter ce délai, son silence vaut acceptation tacite des observations de l'entrepreneur ;

Attendu que le décompte général devenu définitif est indivisible, lie les parties et est intangible ; que ce caractère définitif constitue une fin de non recevoir ;

Attendu qu'il résulte d'un courrier du conseil de la société Gachet que celle ci conteste le DGD qui lui a été adressé le 3 mars 2017 ;

Attendu que la société Gachet a signifié à la SNC Vue Mont Blanc par acte d'huissier du 30 mars 2017 son désaccord sur le DGD ;

Attendu qu'elle soutient qu'en l'absence de réponse dans les trente jours de la SNC Vue Mont Blanc, le DGD est réputé définitif et que les sommes dont elle demande paiement sont dues ;

Attendu que la SNC Vue Mont Blanc conclut à tort que la signification faite par la société Gachet ne contient aucune explication, motif ou contestation et ne peut valoir réclamation ;

qu'en effet, la société Gachet a signifié au maître de l'ouvrage un certificat de paiement de la situation n° 9 accompagné du DGD relatif au lot charpente couverture menuiserie extérieure dans lequel est repris le montant des sommes dues selon la société ainsi qu'une facture supplémentaire et un DGD relatif au lot menuiserie intérieure avec le mémoire de travaux établi par la société Paget eco aux termes duquel elle réclame paiement de la somme de 767 965,32 euros TTC ; qu'ainsi la société Gachet a bien fait connaître son opposition à la proposition faite par le maître d'oeuvre ;

Attendu que la SNC Vue Mont Blanc ne peut davantage soutenir avoir répondu dans les délais à la société Gachet dans les conclusions établies par son conseil lors de l'instance opposant les parties devant le juge des référés du tribunal de commerce de Lyon, la notification de ces conclusions faites par son conseil au conseil de la société Gachet ne pouvant valoir réponse aux observations faites par l'entrepreneur, d'autant qu'il s'agit d'une procédure orale ;

Attendu qu'en conséquence, la société Vue Mont Blanc étant irrecevable à contester les DGD qui lui ont été signifiés par la société Gachet le 30 mars 2017, la décision déférée qui l'a condamnée à payer la somme de 403 275,600 euros à titre provisionnel doit être confirmée ;

Sur la demande d'expertise :

Attendu qu'il n'est pas contesté par les parties que la levée définitive des réserves n'a pas eu lieu ;

Attendu que le maître de l'ouvrage produit des pièces de nature à établir l'existence de vices pouvant être de nature décennale ; que des comptes restent à faire entre les parties de ce chef ;

Attendu qu'il convient en conséquence d'infirmer la décision en ce qu'elle a ordonné à la société Gachet de procéder à la levée des réserves dans un délai de vingt jours ouvrables suivant l'encaissement de la somme et de faire droit à la demande d'expertise sollicitée avec mission définie dans le dispositif de la décision ;

Attendu qu'il n'est pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais irrépétibles engagés et d'infirmer la décision qui a alloué à la société Gachet la somme de 2 500 euros à ce titre ;

Par ces motifs

La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort

Confirme la décision en ce qu'elle a condamné la SNC Vue Mont Blanc à payer à l'EURL Menuiseries charpente Gachet la somme de 403 275,600 euros à titre provisionnel,

L'infirme pour le surplus,

et statuant à nouveau,

Ordonne une mesure d'expertise confiée à confiée à M. [M] [F], expert, [Adresse 3], tél : XXXXXXXXXX - port : XXXXXXXXXX,

Lequel prendra connaissance des documents de la cause, recueillera contradictoirement les explications des parties et de tout sachant, dans les formes de l'article 278 du code de procédure civile,

Avec pour mission de :

1°) prendre connaissance des conventions intervenues entre les parties et donner tous éléments techniques de nature à permettre au juge de déterminer les missions confiées à l'EURL Menuiseries charpente Gachet,

2°) visiter en présence des parties ou celles-ci dûment convoquées l'ouvrage situé à [Adresse 4]; Le décrire,

3°) fournir tous renseignements sur la réception de l'ouvrage et les réserves effectuées,

4°) dire si les défauts de finitions, malfaçons, désordres tels qu'allégués par la SNC Vue Mont Blanc et visés dans l'assignation et dans les conclusions ultérieures ou tous autres documents de renvoi existent ; Dans l'affirmative les énumérer et les décrire,

5°) dire si les travaux réalisés l'ont été dans la conformité des règles de l'art et des conventions ; Dans la négative, énumérer et indiquer s'ils présentent une simple défectuosité, un vice de construction, une malfaçon, une non-conformité contractuelle, une non-conformité aux règles de l'art, et s'ils compromettent la stabilité et la solidité de l'ouvrage ou le rendent impropre à l'usage auquel il est destiné,

6°) dire quelles sont les causes de ces désordres.

* Déterminer notamment s'ils sont imputables à une erreur de conception, à une faute d'exécution, à la mauvaise qualité des matériaux mis en oeuvre, à une erreur d'utilisation de l'ouvrage, à un défaut d'entretien par son propriétaire, à une mauvaise coordination entre les artisans ou à toute autre cause qui sera indiquée,

7°) rechercher et donner tous éléments techniques motivés permettant d'établir les responsabilités de chacun,

8°) dire quels travaux sont nécessaires pour remettre l'ouvrage en conformité à sa destination ou le rendre conforme aux prescriptions du marché conclu entre les parties ;

* Evaluer le coût et la durée de leur exécution,

9°) indiquer les acomptes qui ont été versés par la SNC Vue Mont Blanc,

10°) dire si, après l'exécution des travaux de remise en état l'ouvrage restera affecté d'une moins-value et donner son avis en ce cas sur son importance,

11°) donner tous éléments motivés permettant de dire si des préjudices autres ont été subis,

12°) répondre à tous les dires et observations des parties auxquelles seront communiquées préalablement, soit lors d'une réunion de synthèse tenue avant le dépôt du rapport, soit le cas échéant par une note écrite, toutes les informations sur l'état de ses investigations relatives à l'ensemble des chefs de mission et tous les documents relatifs aux devis et propositions chiffrées concernant les diverses évaluations (travaux de réparation, préjudices etc..),

13°) plus généralement donner toutes informations utiles de nature à apporter un éclaircissement sur les questions à examiner.

Rappelle à l'expert qu'il doit donner son avis sur tous les points pour l'examen desquels il a été nommé et qu'il ne peut répondre à d'autres questions, sauf accord écrit des parties ou autorisation du juge.

Dit que les parties devront transmettre leur dossier complet directement à l'expert, et ce au plus tard le jour de la première réunion d'expertise.

Rappelle à l'expert qu'il pourra recueillir l'avis d'un autre technicien mais dans une spécialité distincte de la sienne, à charge, pour lui, de joindre son avis au rapport.

Rappelle à l'expert qu'il doit répondre à tous les dires et observations des parties après leur avoir communiqué préalablement, soit lors d'une réunion de synthèse tenue avant le dépôt du rapport, soit, le cas échéant, par une note écrite, toutes les informations sur l'état de ses investigations relatives à l'ensemble des chefs de mission et tous les documents relatifs aux devis et propositions chiffrées concernant les diverses évaluations (travaux de réparations, préjudices,...),

Dit que la SNC Vue Mont Blanc devra consigner à la régie d'avances et de recettes du tribunal de grande instance de Lyon une provision de 2.000 euros avant le 28 mai 2018.

Rappelle qu'à défaut de consignation dans ce délai, la désignation de l'expert sera caduque selon les modalités de l'article 271 du code de procédure civile.

Dit que lors de la première ou au plus tard de la deuxième réunion des parties, l'expert dressera un programme de ses investigations et évaluera de manière aussi précise que possible le montant prévisible de ses honoraires et de ses débours, qu'il communiquera à la cour et aux parties le montant de cette évaluation et sollicitera s'il l'estime nécessaire la consignation d'une provision complémentaire.

Dit que conformément à l'article 282 du code de procédure civile, l'expert devra justifier de l'envoi aux parties d'un exemplaire de son rapport accompagné de sa demande d'honoraires par lettre recommandée avec accusé de réception, en précisant la date de cet envoi dans son courrier adressé au tribunal de grande instance.

Dit que l'expert, après avoir donné aux parties un délai, devra déposer au greffe du tribunal de grande instance de Lyon un rapport détaillé de ses opérations avant le 30 novembre 2018, sauf prorogation demandée au juge par l'expert.

Désigne le magistrat chargé du suivi des opérations d'expertise au greffe du tribunal de grande instance de Lyon pour suivre le déroulement des opérations d'expertise.

Dit qu'en cas de refus ou d'empêchement de l'expert commis, il sera procédé à son remplacement par ordonnance sur requête.

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la SNC Vue Mont Blanc aux dépens.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

AUDREY PERGER AUDE RACHOU


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 17/04650
Date de la décision : 05/04/2018

Références :

Cour d'appel de Lyon 01, arrêt n°17/04650 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-04-05;17.04650 ?
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