La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/03/2018 | FRANCE | N°16/07987

France | France, Cour d'appel de Lyon, Sécurité sociale, 20 mars 2018, 16/07987


AFFAIRE DE SÉCURITÉ SOCIALE



COLLÉGIALE



RG : 16/07987





ASSOCIATION MAISON DES AVEUGLES



C/

URSSAF RHÔNE ALPES







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LYON

du 27 Octobre 2016

RG : 20122583











COUR D'APPEL DE LYON



Sécurité sociale



ARRÊT DU 20 MARS 2018

















APPELANTE :



ASSOCIATION

MAISON DES AVEUGLES

[Adresse 1]

[Localité 1]



représentée par Me Valérie DEMICHEL, avocat au barreau de LYON







INTIMÉE :



URSSAF RHÔNE ALPES

[Adresse 2]

[Localité 2]



représenté par monsieur [X] [D], muni d'un pouvoir









DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 30 Janvier...

AFFAIRE DE SÉCURITÉ SOCIALE

COLLÉGIALE

RG : 16/07987

ASSOCIATION MAISON DES AVEUGLES

C/

URSSAF RHÔNE ALPES

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LYON

du 27 Octobre 2016

RG : 20122583

COUR D'APPEL DE LYON

Sécurité sociale

ARRÊT DU 20 MARS 2018

APPELANTE :

ASSOCIATION MAISON DES AVEUGLES

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Valérie DEMICHEL, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

URSSAF RHÔNE ALPES

[Adresse 2]

[Localité 2]

représenté par monsieur [X] [D], muni d'un pouvoir

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 30 Janvier 2018

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président

Laurence BERTHIER, Conseiller

Thomas CASSUTO, Conseiller

Assistés pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 20 Mars 2018 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

L'association Maison des Aveugles (ci-après désignée comme l'association) est un établissement de soins et d'hébergement accueillant des déficients visuels avec handicaps associés.

Cet établissement fonctionne avec une tarification établie par la Métropole de Lyon et l'Agence Régionale de Santé Rhône Alpes.

L'association a conclu avec l'organisme APICIL un contrat de mutuelle pour ses salariés.

L'inspecteur du recouvrement de l'URSSAF a opéré une vérification de l'application de la législation de la Sécurité Sociale au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 au sein de l'association et lui a adressé une lettre d'observations , lui notifiant un rappel de cotisations et contributions de sécurité sociale , d'assurance chômage et cotisations de transport et AGS pour un montant total de 46 553 euros, concernant les cotisations patronales et salariales finançant le contrat de mutuelle .

Une mise en demeure a été notifiée à l'association le 18 septembre 2012.

L'association a saisi la commission de recours amiable de l'URSSAF par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 octobre 2012.

Suite au rejet implicite de ce recours, l'association a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de LYON le 20 décembre 2012.

Par jugement du 27 octobre 2016, le tribunal a confirmé le redressement opéré par l'URSSAF et condamné l'association au paiement de la somme de 42 881 euros.

L'association a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 10 novembre 2016;

Elle demande à la Cour , en l'état de ses dernières écritures reprises oralement lors de l'audience d'infirmer le jugement déféré.

Elle considère en effet à titre principal que le redressement notifié n'est pas fondé en droit et que la contribution au financement du régime de mutuelle contracté auprès de l'APICIL doit être exclue de l'assiette des cotisations de sécurité sociale dans la mesure où cette participation revêt bien un caractère collectif et obligatoire au sens des articles L 242-1 et D 242-1 du code de la sécurité sociale.

A titre subsidiaire, elle demande que le redressement soit limité aux seules catégories exclues du contrat de mutuelle et qu'il soit en conséquence réduit à la somme de 21 171,93 euros représentant les cotisations sociales sur la contribution patronale concernant les trois catégories professionnelles exclues pour les années 2009 à 2011.

En tout état de cause, elle demande la condamnation de l'URSSAF RHONE ALPES au paiement de la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

L'URSSAF demande à la Cour , en l'état de ses dernières écritures reprises oralement lors de l'audience de confirmer la décision déférée et de condamner l'association au paiement de la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont soutenues lors de l'audience.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'article L 242-1 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 19 décembre 2008 au 22 décembre 2010 c'est-à-dire applicable au redressement opéré prévoit que :

« Sont exclues de l'assiette des cotisations mentionnées au premier alinéa les contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires de retraite et de prévoyance versées par les organismes régis par les titres III et IV du livre IX du présent code ou le livre II du code de la mutualité, par des entreprises régies par le code des assurances ainsi que par les institutions mentionnées à l'article L. 370-1 du code des assurances et proposant des contrats mentionnés à l'article L. 143-1 dudit code, à la section 9 du chapitre II du titre III du livre IX du code de la sécurité sociale ou au chapitre II bis du titre H du livre II du code de la mutualité, lorsqu'elles revêtent un caractère collectif et obligatoire déterminé dans le cadre d'une des procédures mentionnées à l'article L. 911-1 du présent code :

1° Dans des limites, fixées par décret, pour les contributions au financement d'opérations de retraite déterminées par décret ; l'abonnement de l'employeur à un plan d'épargne pour la retraite collectif exonéré aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 443-8 du code du travail est pris en compte pour l'application de ces limites ;

2° Dans des limites fixées par décret, pour les contributions au financement de prestations complémentaires de prévoyance, à condition, lorsque ces contributions financent des garanties portant sur le remboursement ou l'indemnisation de frais occasionnés par une maladie, une maternité ou un accident, que ces garanties ne couvrent pas la participation mentionnée au H de l'article L. 322-2 ou la franchise annuelle prévue au III du même article.'

L'article L 242-1 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 22 décembre 2010 au 23 décembre 2011 c'est-à-dire applicable au redressement opéré prévoit que :

« Sont exclues de l'assiette des cotisations mentionnées au premier alinéa les contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires de retraite et de prévoyance versées au bénéfice de leurs salariés, anciens salariés et de leurs ayants droit par les organismes régis par les titres III et IV du livre IX du présent code ou le livre II du code la mutualité, par des entreprises régies par le code des assurances ainsi que par les institutions mentionnées à l'article L. 370-1 du code des assurances et proposant des contrats mentionnés à l'article L. 143-1 dudit code, à la section 9 du chapitre II du titre III du livre IX du code de la sécurité sociale ou au chapitre II bis du titre II du livre II du code de la mutualité lorsque ces garanties entrent dans le champ des articles L. 911-1 et L. 911-2 du présent code, revêtent un caractère obligatoire et bénéficient à titre collectif à l'ensemble des salariés ou à une partie d'entre eux sous réserve qu'ils appartiennent à une catégorie établie à partir de critères objectifs déterminés par décret en Conseil d'Etat :

1° Dans des limites fixées par décret, pour les contributions au financement d'opérations de retraite déterminées par décret ; abonnement de l'employeur à un plan d'épargne pour la retraite collectif exonéré aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 443-8 du code du travail est pris en compte pour l'application de ces limites ;

2° Dans des limites fixées par décret, pour les contributions au financement de prestations complémentaires de prévoyance, à condition, lorsque ces contributions financent des garanties portant sur le remboursement ou l'indemnisation de frais occasionnés par une maladie, une maternité ou un accident, que ces garanties ne couvrent pas la participation mentionnée au II de l'article L. 322-2 ou la franchise annuelle prévue au III du même article'.

Dès lors, à partir de 2011, le législateur a ouvert une possibilité de déroger au caractère collectif du contrat de prévoyance pour les salariés qui appartiennent à une catégorie établie à partir de critères objectifs déterminés par décret pris en conseil d'Etat.

L'article D 242-1 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 30 septembre 2007 au 7 janvier 2012 c'est-à-dire applicable au redressement opéré énonce que :

« Les contributions des employeurs au financement de prestations complémentaires de prévoyance mentionnées au huitième alinéa de l'article L. 242-1 sont exclues de l'assiette des cotisations de sécurité sociale propre à chaque assuré, pour une fraction n'excédant pas un montant égal à la somme de 6 % du montant du plafond de la sécurité sociale et de 1,5 % de la rémunération soumise à cotisations de sécurité sociale en application de l'article

L.242-1, déduction faite de la part des contributions des employeurs destinées au financement de prestations complémentaires de retraite et de prévoyance soumise à cotisations de sécurité sociale, sans que le total ainsi obtenu puisse excéder 12 % du montant du plafond de la sécurité sociale ».

La circulaire ministérielle N°DSS/5B/2009/32 du 30 janvier 2009 (relative aux modalités d'assujettissement aux cotisations et contributions de sécurité sociale des contributions des employeurs destinées au financement de prestations de retraite supplémentaire et de prévoyance complémentaire) donne des précisions sur le caractère collectif du contrat de prévoyance ou de mutuelle (fiche n 5) compte tenu de l'inexistence de précisions légales ou réglementaires sur cette notion. La circulaire est ainsi libellée :

« III - Des garanties ne pouvant reposer sur des critères relatifs à la durée du travail, à la nature du contrat, à l'âge ou à l'ancienneté

A - Durée du travail

L'accès au système de garanties ne peut reposer sur des critères relatifs à la durée de travail: temps plein, temps partiel.

B - Nature du contrat

L'accès au système de garanties ne peut reposer sur des critères relatifs à la nature du contrat : contrat à durée indéterminée (CDI) ou déterminée (CDD).

Il ne peut non plus être mis en place au profit des seuls apprentis (article L. 6221-1 du code du travail) ou des travailleurs intermittents (article L. 3123-31 du même code). En effet, un tel mécanisme reviendrait à utiliser le critère du contrat de travail.

NB : ces règles s'entendent sans préjudice de la faculté donnée à certains salariés de choisir de ne pas cotiser (cf fiche n 6, paragraphe I-B-3 et 4 ) ».

L'association estime que cette circulaire ne peut avoir pour objet de réglementer, son objet devant se limiter à interpréter les textes qu'elle vise. Elle estime toutefois que cette circulaire a ajouté aux textes du code de la sécurité sociale susvisés des conditions qui n'y existaient pas, ce que le tribunal des affaires de sécurité sociale des Hauts de Seine a retenu par jugement du 8 avril 2010.

L'URSSAF indique au contraire que la circulaire du 30 janvier 2009 n'a fait qu'apporter des éclaircissements sur les dispositions de l'article L 242-1 alinéa 6 du code de sécurité sociale, notamment sur la notion de caractère collectif et précise en outre que le jugement dont se prévaut l'association a été infirmé par la cour d'appel de Versailles par arrêt du 14 juin 2012.

L'URSSAF indique en outre que si la circulaire n'est pas opposable aux juridictions de l'ordre judiciaire, elle oblige en revanche les organismes de sécurité sociale qui doivent en faire une stricte application.

En l'espèce, il apparaît d'abord que la circulaire de 2009 susvisée vient seulement donner à l'administration, des précisions aux fins d'analyser, dans le cadre d'un redressement, le caractère collectif et obligatoire du régime institué .

Cette circulaire ne s'impose donc pas au juge, auquel il appartient, au regard des textes sus visés applicables au redressement opéré, de déterminer, pour l'appréciation de l'exclusion de l'assiette des cotisations sociales, si les critères de classification présentés par l'employeur pour permettre à certains de ses salariés d'entrer dans la catégorie des bénéficiaires du régime de retraite complémentaire sont suffisamment précis et ne relèvent pas d'une appréciation arbitraire.

Par ailleurs, le caractère collectif est reconnu à un régime qui bénéficie de façon générale et impersonnelle à l'ensemble du personnel salarié ou à certaines catégories objectives de personnel.

Par conséquent, l'association ne peut , au seul motif que le caractère obligatoire et collectif a été déterminé par l'inspecteur chargé du contrôle en se référant aux précisions données par la circulaire de 2009, avancer que le contrôle opéré ne serait pas fondé.

Il convient donc d'apprécier si, au regard du contrat de prévoyance souscrit, l'association a respecté le caractère collectif de celui-ci.

Le contrat de prévoyance a été institué en 2003. Un avenant de 2005 a prévu que le dispositif du régime de prévoyance excluait :

* le personnel en contrat à durée déterminée,

* les cadres en contrat à durée indéterminée dont le temps n'excède pas 10 heures par semaine,

* les veilleurs de nuit étudiants dont le nombre d'heures n'excède pas un mi-temps.

Or, ces exclusions démontrent que le caractère collectif du contrat n'a pas été respecté en ce que les critères appliqués ont trait tant à la durée du contrat ( en précisant une durée arbitrairement fixée à 10 heures ) qu'à sa nature ( CCD ou veilleurs de nuit étudiants) , de sorte que le premier juge a justement apprécié que le défaut de caractère collectif du dispositif de prévoyance fondait le redressement opéré.

En cause d'appel, l'association soutient à titre subsidiaire que le redressement doit être limité aux salariés exclus du régime frais de santé et ce au regard de l'équité, les exclusions du contrat ne concernant qu'un effectif moyen de 80 salariés sur les exercices 2009 à 2011 , au sein d'un établissement qui assure un service continu auprès des résidents 7 jours sur 7, 24 heures sur 24, de sorte qu'elle demande que les cotisations dues sur la contribution patronale des salariés exclus du bénéfice de la mutuelle soient réduites à la somme de 21 171,93 euros.

Si ce principe d'équité a en effet été repris par la loi du 21 décembre 2015 qui ne peut s'appliquer au présent litige, il apparaît toutefois que l'association démontre que les erreurs limitées qu'elle a commises pour l'appréciation du caractère collectif du dispositif de prévoyance ont été rectifiées, de sorte qu'il convient, en cause d'appel, de limiter le redressement, sur la période considérée, aux seules catégories de salariés exclus du bénéfice de la mutuelle soit à la somme de 21 171,93 euros.

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge des parties leurs frais non recouvrables.

La procédure étant gratuite et sans frais devant les juridictions de la sécurité sociale en vertu de l'article R 144-10 du code de la sécurité sociale, la demande relative aux dépens est dénuée d'objet.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré,

Confirme la décision déférée sauf sur le montant du redressement,

Statuant à nouveau de ce chef,

Dit que le redressement doit être limité aux seules catégories exclues du contrat de mutuelle,

Réduit en conséquence le redressement opéré pour les années 2009 à 2011 à la somme de 21 171,93 euros,

Y ajoutant,

Déboute l'association Maison des Aveugles et l'URSSAF RHONE ALPES de leurs demandes respectives formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu à dépens ou à paiement de droit en application de l'article R144-10 du code de la sécurité sociale.

Déclare la demande de l'association Maison des Aveugles relative aux dépens sans objet.

LA GREFFIÈRE LA PRESIDENTE

Malika CHINOUNE Elizabeth POLLE-SENANEUCH


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 16/07987
Date de la décision : 20/03/2018

Références :

Cour d'appel de Lyon 51, arrêt n°16/07987 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-03-20;16.07987 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award