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24/11/2017 | FRANCE | N°16/04097

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 24 novembre 2017, 16/04097


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 16/04097





SARL STPEM



C/

[X]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de lyon

du 29 Avril 2016

RG : F 15/02643

COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 24 NOVEMBRE 2017





APPELANTE :



SARL STPEM

[Adresse 1]

[Adresse 2]



Représentée par Me Philippe ROUSSELIN-JABOULAY de la SELARL ALCYACONSEIL

SOCIAL, avocat au barreau de LYON





INTIMÉE :



[R] [X] née [I]

née le [Date naissance 1] 1962 à PARIS 17e (75017)

[Adresse 3]

[Adresse 4]



Comparante en personne, non assistée







DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 05 Octobre...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 16/04097

SARL STPEM

C/

[X]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de lyon

du 29 Avril 2016

RG : F 15/02643

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 24 NOVEMBRE 2017

APPELANTE :

SARL STPEM

[Adresse 1]

[Adresse 2]

Représentée par Me Philippe ROUSSELIN-JABOULAY de la SELARL ALCYACONSEIL SOCIAL, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

[R] [X] née [I]

née le [Date naissance 1] 1962 à PARIS 17e (75017)

[Adresse 3]

[Adresse 4]

Comparante en personne, non assistée

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 05 Octobre 2017

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Michel SORNAY, Président

Didier JOLY, Conseiller

Natacha LAVILLE, Conseiller

Assistés pendant les débats de Gaétan PILLIE, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 24 Novembre 2017, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Michel SORNAY, Président, et par Gaétan PILLIE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

[R] [X] née [I] travaillait comme recruteur de personnes susceptibles de participer à des études qualitatives de marché, sous forme d'entretiens individuels ou de réunion de groupe, dans une optique de marketing.

Elle exerçait plus particulièrement cette activité dans le domaine médical.

[R] [X] a été employée par :

- la société EPISENS qui lui a délivré 94 bulletins de paie entre 2000 et 2010, mais ne lui a proposé aucun contrat de travail écrit (médiation judiciaire en cours devant la Cour d'appel de Versailles),

- la société ABC+ en 2005 et 2006 (jugement du Conseil de prud'hommes de [Localité 1] du 14 avril 2016 constatant la prescription),

- la société SENZO de 2002 à 2007, dans le cadre de 31 contrats à durée déterminée et à temps partiel (jugement du Conseil de prud'hommes de [Localité 1] du 17 juin 2015),

- la société REPERES de 2003 à 2009 (arrêt de la Cour d'appel de Paris du 9 février 2017),

- la société PHILOMARQUE en 2005 (arrêt rendu le 22 février 2017 par la Cour d'appel de Paris, saisie sur renvoi après cassation),

- la société MIX FACTORY de 2009 à 2011,

- la société SKY CONSULTING en 2012 et 2013 (saisine du Conseil de prud'hommes de [Localité 2]).

Le 15 juillet 2016, les sociétés EPISENS, ABC+, PHILOMARQUE, MIX FACTORY et SKY CONSULTING ont saisi le procureur de la république de [Localité 1] d'une plainte contre [R] [X] du chef d'escroquerie au jugement, reprochant à celle-ci de présenter devant diverses juridictions des demandes identiques, mais incompatibles entre elles, dans le but d'obtenir des condamnations pécuniaires indues.

Cette plainte a été classée sans suite le 10 janvier 2017.

Le 8 juillet 2015, [R] [X] a saisi le Conseil de prud'hommes de Lyon de demandes dirigées contre la société STPEM.

En juin 2016, elle avait saisi le Conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt de demandes dirigées contre la S.A.S. A+A, société mère de la société STPEM, et dérivant des mêmes contrats de travail.

La S.A.R.L. STPEM est spécialisée dans le secteur d'activité des études qualitatives de marché dans le domaine médical. Elle applique la convention collective nationale des bureaux d'études .

La société A+A, qui a le même dirigeant, élabore les étapes de la mission qui lui a été confiée (détermination du budget, élaboration des critères de sélection des patients et médecins, réalisation des entretiens avec les "cibles", traitement et analyse de l'information obtenue), mais elle sous-traite la recherche de l'échantillon humain à la société STPEM.

Employée à compter de 2009 en qualité "d'enquêteur", selon les mentions de ses bulletins de paie, [R] [X] devait sélectionner et recruter sous les directives de la société A+A des consommateurs de médicaments spécifiques et des médecins spécialistes des maladies dont les premiers étaient atteints.

Selon la société STPEM, [R] [X] a réalisé les études suivantes :

étude n°3854 du 1er février au 3 mars 2009,

étude n°3999 du 20 février au 2 mars 2009,

étude n°4816 du 10 mai au 31 mai 2010,

étude n°5958 du 25 novembre au 2 décembre 2011, concernant l'évolution de la profession de dentiste,

étude n°6195 du 21 février au 1er mars 2012, ayant pour thème "vécu du myélome et de son traitement par les patients",

étude n°6328 du 2 au 19 avril 2012 (bronchite chronique ou BPCO)

étude n°6835 du 15 novembre au 11 décembre 2012 sur le thème "perception des patients et prise en charge du diabète".

[R] [X] objecte que le détail des missions présenté par la société STPEM est incomplet au vu du nombre de courriels et d'appels téléphoniques reçus.

Les bulletins de paie communiqués portent mention des rémunérations ci-après :

mars 2009 : 293,35 € pour 33,68 heures de travail,

avril 2009 : 42,50 € pour 4,88 heures de travail,

décembre 2009 : rappel de salaire de 4,05 €,

juin 2010 : 163,59 € pour 17,84 heures de travail,

novembre 2011 : 99,22 € pour 10,60 heures de travail,

mars 2012 : 62,84 € pour 6,56 heures de travail,

avril 2012 : 439,63 € pour 45,89 heures de travail,

novembre 2012 : 253,20 € pour 26,43 heures de travail,

auxquelles s'ajoutaient sur chacun des bulletins une indemnité compensatrice de congés payés et une prime de précarité.

Selon [R] [X], les périodes d'emploi figurant sur les bulletins de paie ne correspondent pas aux jours réellement travaillés par la salariée.

Par courriel du 12 mars 2010, [R] [X] s'est étonnée de n'avoir encore reçu aucun contrat de travail. Le chargé de terrain de la société A+A lui a répondu : "Nous travaillons trop dans l'urgence. Nous ne pourrons pas faire de contrats".

La relation de travail a pris fin en mai 2013 selon l'employeur, le 30 juin ou mi-juillet 2013 selon la salariée, pour des raisons sur lesquelles les parties sont contraires.

Par jugement du 29 avril 2016, le Conseil de prud'hommes de Lyon (section activités diverses) a :

- dit et jugé que la demande in limine litis de la société STPEM portant le défaut du droit d'agir sur la rupture du contrat de travail n'est pas recevable en application de l'article L 1471-1 du code du travail,

- dit et jugé que la demande in limine litis de la société STPEM portant le défaut du droit d'agir et concernant la prescription à 3 ans sur l'action en paiement et de répétition des salaires n'est pas recevable en application de l'article L 3245-1 du code du travail,

- requalifié le contrat de travail de Madame [R] [X] en contrat à durée indéterminée et à temps complet,

- dit et jugé que la rupture du contrat de travail est aux torts de la société STPEM et est sans cause réelle et sérieuse,

- en conséquence, condamné la société STPEM à payer à Madame [R] [X] les sommes suivantes :

1 452,99 €, soit un mois de salaire, à titre d'indemnité de requalification,

8 717,94 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

2 906,98 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

290,69 € au titre des congés payés afférents,

1 635,00 € à titre d'indemnité de licenciement,

5 134,94 € à titre de rappel de salaire pour la période d'août 2011 à juillet 2013,

513,29 € au titre des congés payés afférents,

100,00 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la mensualisation du salaire,

100,00 € à titre de dommages-intérêts pour absence de visite médicale d'embauche,

100,00 € à titre de dommages-intérêts pour non-déclaration préalable à l'embauche,

1 452,99 € à titre de dédommagement des frais pour accomplir son travail,

- rappelé que les intérêts de droit courent de plein droit au taux légal à compter de la mise en demeure de la partie défenderesse devant le bureau de conciliation en ce qui concerne les créances de nature salariale et à compter du prononcé du jugement pour les autres sommes allouées,

- rappelé les dispositions de l'article R 1454-28 du code du travail concernant l'exécution provisoire de droit et fixé la moyenne brute des salaires des trois derniers mois à la somme de 1 452,99 €,

- débouté [R] [X] de ses autres demandes,

- débouté la société STPEM de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société STPEM aux entiers dépens de l'instance, y compris les frais d'exécution forcée du jugement.

La société STPEM a interjeté appel de cette décision le 27 mai 2016.

*

* *

LA COUR,

Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales à l'audience du 5 octobre 2017 par la société STPEM qui demande à la Cour de :

1°) confirmer le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de LYON du 29 avril 2016 en ce qu'il a débouté Madame [X] de ses demandes relatives à :

- l'indemnité de sujétion du domicile à des fins professionnelles,

- l'indemnité forfaitaire de local, matériel et téléphone,

- le remboursement de l'achat de matériel informatique, mobilier de bureau et téléphone,

- l'indemnité de travail dissimulé ;

2°) réformer le jugement entrepris dans ses autres dispositions et ce faisant :

A titre principal :

- déclarer irrecevables les demandes de Madame [X] au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail en raison de leur prescription,

- déclarer irrecevables les demandes de Madame [X] au titre du rappel de salaire en raison de leur prescription pour la période antérieure à juillet 2012,

- débouter Madame [X] de sa demande de requalification de ses contrats de travail d'enquêteur vacataire en contrat de travail à durée indéterminée,

- la débouter de sa demande de requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet,

- la débouter de sa demande de rappel de salaire et de congés payés afférents,

- la débouter de ses autres demandes,

A titre subsidiaire :

Si la Cour requalifiait la relation de travail en contrat à durée indéterminée :

- fixer le montant du salaire mensuel moyen à 35,71 euros, correspondant à la moyenne mensuelle perçu sur la période des relations contractuelles,

- limiter le quantum de l'indemnité de requalification de son contrat en contrat à durée indéterminée à 1 mois de salaire, soit la somme de 35,71 euros,

Si la Cour jugeait le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse :

- limiter le quantum des dommages intérêts à 1 mois de salaire, soit la somme de 35,71 euros,

A titre infiniment subsidiaire :

Si la Cour requalifiait la relation de travail en contrat à durée indéterminée :

- fixer le montant du salaire mensuel moyen à 76,20 euros, correspondant à la moyenne mensuelle perçu sur les douze derniers mois de la relation contractuelle au titre de l'année 2012,

- limiter le quantum de l'indemnité de requalification de son contrat en contrat à durée indéterminée à 1 mois de salaire, soit la somme de 76,20 euros ;

Si la Cour jugeait le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse :

- limiter le quantum des dommages intérêts à 1 mois de salaire, soit la somme de 76,20 euros,

En tout état de cause :

- la condamner au paiement de la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens de l'instance ;

Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales à l'audience du 5 octobre 2017 par [R] [X] née [I] qui demande à la Cour de :

- déclarer Madame [R] [X] recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,

- requalifier le contrat de travail de Madame [R] [X] en un contrat de travail à durée indéterminée ;

- dire que le licenciement est sans cause réelle ni sérieuse et que la procédure de licenciement n'a pas été respectée ;

En conséquence,

- condamner la société STPEM à verser à Madame [R] [X] la somme de 1.452,99 euros à titre d'indemnité de requalification,

- condamner la société STPEM à verser à Madame [R] [X] la somme de 8.717,94 euros pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

- condamner la société STPEM à verser à Madame [R] [X] la somme de 1.452,99 euros pour non-respect de l'article R4624-10 du Code du travail, défaut de visite médicale,

- condamner la société STPEM à verser à Madame [R] [X] la somme de 1.452,99 euros pour non-respect de l'article L3242-1 du Code du travail, défaut de mensualisation du salaire,

- condamner la société STPEM à verser à Madame [R] [X] la somme de 5.811,96 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

- condamner la société STPEM à verser à Madame [R] [X] la somme brute de 2.905,98 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- condamner la société STPEM à verser à Madame [R] [X] la somme brute de 290,59 euros correspondant à l'indemnité de congés payés afférente audit préavis,

- condamner la société STPEM à verser à Madame [R] [X] la somme de 1.452,99 euros correspondant à l'indemnité en application des dispositions de l'article L. 8223-1 du Code du travail, défaut de DPAE,

- condamner la société STPEM à verser à Madame [R] [X] la somme de 65.194,47 euros à titre de rappel de salaires,

- condamner la société STPEM à verser à Madame [R] [X] la somme de 6.519,44 euros au titre des congés payés afférents,

- condamner la société S1PEM à verser à Madame [R] [X] la somme de 1.452,99 euros correspondant à l'indemnité de sujétion, occupation du domicile à des fins professionnelles,

- condamner la société STPEM à verser à Madame [R] [X] la somme de 18.297,36 euros correspondant à l'indemnité forfaitaire de local, matériel et téléphone,

- condamner la société STPEM à verser à Madame [R] [X] la somme de 2.000 euros correspondant à l'achat de matériel informatique, mobilier de bureau et téléphones,

- dire que la société STPEM a dissimulé volontairement l'activité salariée réelle de Madame [R] [X].

En conséquence,

- condamner la société STPEM à verser à Madame [R] [X] la somme de 8.717,94 euros,

- ordonner à la société STPEM la remise d'un certificat de travail conforme et de l'attestation Pôle Emploi.

- condamner la société STPEM aux entiers dépens ;

Sur la qualification de la relation contractuelle :

Attendu que [R] [X] revendique la qualité de travailleuse à domicile définie par l'article L 7412-1 du code du travail exclusivement pour se prévaloir du délai de prescription de l'article L 7423-1 ; que, sur le fond, ses demandes impliquent qu'elle n'avait pas la qualité de travailleuse à domicile puisque :

elle sollicite des dommages-intérêts pour non-respect de la mensualisation du salaire, pourtant exclue par l'article L 3242-1 du code du travail dans le cas d'un travail à domicile,

le rappel de salaire qu'elle sollicite ne tient pas compte des modalités de fixation du salaire prévues par les articles L 7422-6 et L 7422-7,

l'indemnité demandée pour l'occupation de son domicile à des fins professionnelles ignore les dispositions de l'article L 7422-11 relatives aux frais d'atelier ;

Que [R] [X] travaillait non à domicile, mais à partir de son domicile, exerçant une activité de relations toute entière tournée vers l'extérieur, à l'aide des moyens de communication modernes ; que sa situation s'apparentait à celle d'un télé-travailleur ; que les parties n'ont jamais envisagé de se placer sous le statut légal du travailleur à domicile ; que l'emploi d'enquêteur mentionné sur les bulletins de paie renvoie à l'annexe 'enquêteurs' résultant de l'accord du 16 décembre 1991 attaché à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques ; que cet accord définit le statut de deux types d'enquêteurs assurant leur tâche de manière intermittente :

- les enquêteurs vacataires (EV) qui sont des enquêteurs occasionnels, dont l'emploi est par nature temporaire, dans les conditions définies par les articles L. 122-1 et D. 121-2 du code du travail devenus L 1242-1 et D 1242-1,

- les chargés d'enquête intermittents à garantie annuelle (CEIGA) dont l'activité s'exerce dans le cadre du travail intermittent tel qu'il est défini aux articles L. 212-4-8 et suivants du code du travail devenus L 3123-31 et suivants ;

Que la société STPEM a entendu se placer sous l'empire des dispositions des articles 44 et 45 de l'accord du 16 décembre 1991 ; qu'il ressort, en effet, des pièces communiquées qu'elle adressait à [R] [X] une proposition écrite fixant les modalités et instructions de réalisation des prestations demandées et le délai maximum imparti pour l'exécution de la vacation ainsi que le prescrit l'article 45 ; que même si la proposition ne contenait pas l'énoncé de ce que l'enquêteur vacataire était libre de ne pas accepter ce qui lui était proposé, la pièce 8 de l'appelante démontre qu'en fait, [R] [X] avait la faculté de refuser, ce qui s'accorde avec le caractère non exclusif de son engagement envers la société STPEM ;

Que les tâche confiées à [R] [X] n'entraient pourtant pas dans le champ d'application de l'accord du 16 décembre 1991 dont l'article 43 définit l'enquêteur vacataire comme celui qui réalise des enquêtes par sondage à la vacation ; que selon l'employeur, [R] [X] était en charge de la première phase de l'enquête consistant à sélectionner les cibles visées par l'organisateur de la mission ; qu'on ne saurait mieux dire que la salariée ne réalisait pas elle-même d'enquête puisqu'elle n'assistait pas aux réunions auxquels étaient conviés ensuite les médecins et patients qu'elle avait sélectionnés pour participer à l'enquête ;

Qu'aucun des statuts proposés par les parties n'est donc applicable à la relation de travail ;

Sur la rupture de la relation de travail :

Attendu que lorsque les parties s'accordent, comme en l'espèce, pour considérer que le contrat de travail est rompu, cette rupture s'impose au juge à qui il appartient de fixer la date de cette rupture si elle est contestée ainsi que sa qualification ;

Qu'après avoir écrit pages 4 et 5 que le contrat de travail était toujours en cours, le Conseil de prud'hommes de Lyon a jugé page 6 que l'employeur avait mis fin à la relation de travail sans aucune formalité, ce qui caractérisait un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'il n'a pas fixé la date de la rupture ; qu'il est vrai que la rupture du contrat de travail n'a jamais été formalisée ; que selon la société STPEM, le dernier contrat d'enquêteur de [R] [X] a pris fin le 11 décembre 2012, la salariée n'ayant plus effectué aucun travail après cette date ; que dans un courriel du 19 février 2013 à [J] [H], de la société A+A, [R] [X] a pourtant demandé à travailler davantage ; que [J] [H] lui a répondu le même jour qu'il la recontacterait au plus vite, même si l'activité était 'un peu calme', car il y avait des projets en cours ; qu'une proposition a effectivement été adressée le 29 mai 2013 à la salariée qui, selon l'appelante, n'a pas donné suite ; que [R] [X] ne s'explique pas clairement sur ce point et ne produit aucun courriel de réponse à cette proposition d'étude ; qu'elle affirme, sans en rapporter la preuve, qu'elle a encore effectué en juin 2013 des recrutements pour lesquels elle n'a pas été rémunérée ; que l'historique des courriels de recrutement qui constitue la pièce 31 de la salariée s'achève le 29 mai 2013 ; qu'après cette date, la société STPEM ne justifie d'aucune proposition de mission, alors que le refus supposé de l'étude proposée fin mai ne constituait que l'exercice d'un droit, dans la perspective qui était alors celle de l'employeur, et n'impliquait aucune intention de démissionner ; que la société appelante préférait recourir désormais à d'autres circuits de recrutement ; que la rupture sera fixée au 30 mai 2013, date après laquelle les parties ont cessé toute relation à l'exception d'une carte de voeux sans signification particulière ; qu'à cet égard, la Cour relève que les pièces 24 et 38 de [R] [X] sont quasiment identique ; qu'en effet, l'intimée communique à nouveau sous le numéro 24 le courriel de [J] [H] évoqué ci-avant, daté non plus du 19 février 2013 (pièce 38), mais du 22 juillet 2013 (pièce 24) ; que sur la pièce 24, le destinataire n'est plus identifiable ; que cette anomalie ne permet pas de tenir pour établi que [J] [H] a encore communiqué avec la salariée en juillet 2013 ;

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription :

Attendu que selon l'article L 1471-1 du code du travail, dans sa rédaction résultant de la loi n°2013-504 du 14 juin 2013, toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit ; que la loi n°2013-504 contient cependant une disposition transitoire aux termes de laquelle les dispositions nouvelles s'appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de la loi (16 juin 2013), sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure (cinq ans depuis la loi n°2008-561 du 17 juin 2008) ; que [R] [X] ayant saisi le Conseil de prud'hommes le 8 juillet 2015, la prescription est acquise ;

Attendu que selon l'article L 3245-1 du code du travail, dans sa rédaction résultant de la loi n°2013-504 du 14 juin 2013, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que la demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat ; que les dispositions nouvelles s'appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de la loi (16 juin 2013), sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ; que le délai antérieur à la loi n°2013-504 était ici de cinq ans ; que [R] [X] ne peut solliciter un rappel de salaire sur les trois années précédant la rupture dès lors qu'elle n'a pas saisi le Conseil de prud'hommes dans le délai de deux ans à compter de la promulgation de la loi du 14 juin 2013 ; que la demande ne peut porter que sur les trois années précédant la saisine du Conseil de prud'hommes ; que les années 2009 à 2011 et le premier semestre 2012 sont couverts par la prescription ;

Sur la demande de rappel de salaire portant sur les mois de juillet 2012 à mai 2013 :

Attendu que [R] [X] sollicite un rappel de salaire sur les périodes intercalaires séparant ses différentes missions d'études ; qu'elle n'établit ni avoir fourni un travail dont le salaire est la contrepartie, ni s'être trouvé dans une situation en imposant le versement par l'employeur ; qu'en effet, la salariée, qui avait d'autres employeurs exerçant une activité comparable à celle de la société appelante, et qui avait la faculté, dont elle a usé, de refuser les propositions d'études de la société STPEM, ne peut prétendre qu'elle se tenait en permanence à la disposition de celle-ci pour l'exécution d'une prestation de travail ; qu'à suivre [R] [X], celle-ci se serait tenue en permanence à la disposition de ses différents employeurs pour l'exécution de prestations de travail concurrentes et inconciliables entre elles sur une même période de temps, ce qui lui ouvrirait droit au paiement cumulé de salaires correspondant à un travail à temps complet par plusieurs sociétés ; que [R] [X] sera donc déboutée de ce chef de demande ;

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Infirme le jugement rendu le 29 avril 2016 par le Conseil de prud'hommes de Lyon (section activités diverses),

Statuant à nouveau :

Fixe la date de la rupture du contrat de travail conclu entre [R] [X] et la société STPEM au 30 mai 2013,

Déclare [R] [X] irrecevable en ses demandes par l'effet de la prescription, à l'exception de sa demande de rappel de salaire portant sur les mois de juillet 2012 à mai 2013,

Déboute [R] [X] de sa demande de rappel de salaire et d'indemnité de congés payés afférente sur les mois de juillet 2012 à mai 2013,

Condamne [R] [X] aux dépens de première instance et d'appel,

Déboute la société STPEM de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Le GreffierLe Président

Gaétan PILLIEMichel SORNAY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 16/04097
Date de la décision : 24/11/2017

Références :

Cour d'appel de Lyon SB, arrêt n°16/04097 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-11-24;16.04097 ?
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