La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/11/2017 | FRANCE | N°15/07174

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 02 novembre 2017, 15/07174


R.G : 15/07174









Décision du tribunal de grande instance de Lyon

Au fond du 1er juillet 2015



1ère chambre



RG : 13/04641



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRET DU 02 Novembre 2017





APPELANTE :



[Q] [D] prise en son nom personnel et en qualité d'unique héritière de [D] [D] décédé le [Date décès 1] 1999

née le [Date naissance 1] 1980 à

[Localité 1] (RHONE)

[Adresse 1]

[Localité 2]



représentée par Maître Nathalie ROSE, avocat au barreau de LYON

assistée de Maître François CORNUT, avocat au barreau de LYON







INTIMES :



[I] [A]

né le [Date ...

R.G : 15/07174

Décision du tribunal de grande instance de Lyon

Au fond du 1er juillet 2015

1ère chambre

RG : 13/04641

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 02 Novembre 2017

APPELANTE :

[Q] [D] prise en son nom personnel et en qualité d'unique héritière de [D] [D] décédé le [Date décès 1] 1999

née le [Date naissance 1] 1980 à [Localité 1] (RHONE)

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Maître Nathalie ROSE, avocat au barreau de LYON

assistée de Maître François CORNUT, avocat au barreau de LYON

INTIMES :

[I] [A]

né le [Date naissance 2] 1961 à [Localité 3] (RHONE)

[Adresse 2]

[Localité 2]

représenté par la SELARL ALAGY BRET ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

[M] [Q]

né le [Date décès 2] 1952 à [Localité 4] (RHONE)

[Adresse 3]

[Localité 5]

représenté par la SELARL ALAGY BRET ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

SCI [D]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par la SELARL ALAGY BRET ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

******

Date de clôture de l'instruction : 08 novembre 2016

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 21 septembre 2017

Date de mise à disposition : 02 novembre 2017

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Jean-Louis BERNAUD, président

- Françoise CLEMENT, conseiller

- Vincent NICOLAS, conseiller

en présence d'Aurélie TARDY, avocat stagiaire

assistés pendant les débats de Leïla KASMI, greffière placée

A l'audience, Jean-Louis BERNAUD a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Signé par Jean-Louis BERNAUD, président, et par Leïla KASMI, greffière placée, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

Monsieur [D] [D], qui exerçait la profession de gérant de sociétés, est décédé le [Date décès 1] 1999 à [Localité 6].

Il a laissé pour lui succéder en qualité d'unique héritière sa fille, [Q] [D].

Selon déclaration déposée le 3 avril 2000 au tribunal de grande instance de Lyon Madame [Q] [D] a accepté la succession de son père sous bénéfice d'inventaire.

Elle conteste la validité des cessions de parts sociales que son père aurait consenties dans les jours qui ont précédé son décès :

'' le 29 octobre 1999, par deux actes du même jour, cession de 125 parts d'une SARL ATLANTIC à Monsieur [I] [A] et de 125 parts à Monsieur [X], alors que son père se trouvait ce jour-là à [Localité 6], que l'acte ne mentionne pas le lieu de signature et qu'il n'existe aucune preuve du paiement du prix,

'' le 13 novembre 1999 cession de 2094 parts sociales d'une SCI [D] à Monsieur [I] [A] moyennant le prix de 167 250 Fr, alors que son père était hospitalisé dans un état comateux depuis le 1er novembre 1999, que la signature du cédant a été imitée et qu'il n'existe aucune preuve du paiement du prix de cession.

Par acte d'huissier du 8 décembre 2000 Madame [Q] [D] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Lyon Monsieur [I] [A], en sa qualité de cessionnaire, Monsieur [M] [Q], en sa qualité de second associé de la SCI [D], ainsi que cette dernière, à l'effet d'entendre prononcer la nullité de ces cessions de parts, la condamnation des défendeurs à lui payer une indemnité provisionnelle de 150 000 € et l'instauration d'une expertise aux fins d'évaluation de son préjudice financier définitif.

Le 1er mars 2002 elle a déposé une plainte avec constitution de partie civile des chefs de faux, usage de faux et escroquerie.

Par ordonnance du 11 novembre 2002 le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Lyon a sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale.

Après avoir ordonné une expertise graphologique la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, par arrêt du 29 novembre 2012, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue le 2 mai 2007 par le juge d'instruction de Lyon.

Par jugement du 1er juillet 2015 le tribunal de grande instance de Lyon a déclaré Madame [Q] [D] en son nom propre irrecevable en ses demandes, l'a déboutée de l'ensemble de ses prétentions en sa qualité d'ayant droit de Monsieur [D] [D] et l'a condamnée au paiement de diverses sommes à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et frais irrépétibles.

Le tribunal a considéré en substance :

'' que Madame [D] n'avait pas qualité pour agir en son nom propre en annulation de la cession des parts de la SCI [D] du 13 novembre 1999, qui n'avait été contestée ni par la société elle-même, ni par son père de son vivant,

'' qu'en sa qualité d'ayant droit de Monsieur [D] [D] Madame [D] n'était pas fondée en sa demande d'annulation de la cession des parts de la société [D], alors qu'il ne résultait ni de la procédure pénale, ni de l'expertise graphologique, que la signature du cédant, qui avait clairement manifesté son intention de céder ses parts, aurait été imitée,

que la demande en annulation de la cession de parts de la société ATLANTIC au profit de Monsieur [X] était irrecevable, à défaut pour le cessionnaire d'avoir été appelé dans la cause,

'' que l'action en annulation de la cession de parts de la société ATLANTIC au profit de Monsieur [A] était prescrite en application de l'article 1304 du code civil.

Madame [Q] [D] a relevé appel de cette décision selon déclaration reçue le 17 septembre 2015.

Par ordonnance du 5 juillet 2016 le conseiller de la mise en état a rejeté la demande d'expertise graphologique formée par Madame [Q] [D].

Vu les dernières conclusions récapitulatives signifiées et déposées le 28 septembre 2016 par Mme [Q] [D] qui demande à la cour, par voie de réformation du jugement :

'' d'annuler l'acte de cession de parts de la SCI [D] du 13 novembre 1999, ainsi que toutes cessions ultérieures,

'' d'annuler l'acte de cession de parts de la SARL ATLANTIC du 29 octobre 1999,ainsi que toutes cessions ultérieures,

'' de dire et juger qu'en sa qualité d'unique héritière de Monsieur [D] [D] elle est seule propriétaire des parts sociales de la SCI [D] numérotées de 11 à 2850 et qu'elle doit ainsi rentrer en possession desdites parts,

'' de condamner la SCI [D], Monsieur [M] [Q] et Monsieur [I] [A] à lui payer la somme provisionnelle de 150 000 €,

'' d'ordonner une expertise aux fins d'évaluation de son préjudice financier définitif résultant notamment de l'absence de perception de dividendes et d'une perte de chance de revente des parts,

'' de condamner solidairement la SCI [D], Monsieur [M] [Q] et Monsieur [I] [A] à lui payer une indemnité de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions signifiées et déposées le 8 février 2016 par la SCI [D], Monsieur [M] [Q] et Monsieur [I] [A] qui demandent à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré Madame [Q] [D] irrecevable en toutes ses demandes pour défaut de qualité et d'intérêt à agir et en raison de la prescription de l'action et en ce qu'il a débouté au fond la demanderesse de l'ensemble de ses prétentions, et qui sollicitent reconventionnellement la condamnation de l'appelante à payer à Monsieur [M] [Q] et à Monsieur [I] [A], chacun, une somme de 15 000 € à titre de dommages et intérêts pour acharnement procédural et dénigrement fautif et à payer à la SCI [D], à Monsieur [M] [Q] et à Monsieur [I] [A], chacun, une indemnité de procédure de 10 000 €.

*

* *

MOTIFS DE L'ARRET

Sur la demande d'annulation des cessions de parts de la SARL ATLANTIC :

Il est soutenu par les intimés que Madame [D] est irrecevable à agir en nullité de la cession des parts sociales de la SARL ATLANTIC alors :

'' que ni la société ATLANTIC, ni Monsieur [X] ne sont dans la cause,

'' que n'étant pas associée ni partie aux actes attaqués Mme [D] ne peut agir à titre personnel,

'' que Madame [D] est également irrecevable à agir en sa qualité d'héritière comme n'ayant pas reçu par succession le droit de contester la cession, puisque son père avait clairement manifesté son intention de céder ses parts et avait ainsi nécessairement renoncé à toute contestation,

'' que la demande est prescrite puisque ce n'est que par conclusions de reprise d'instance du 25 mars 2013 que pour la première fois la nullité de la cession des parts de la société ATLANTIC a été demandée.

Madame [Q] [D] réplique :

'' qu'ayant accepté la succession de son père elle est devenue propriétaire des parts sociales et est donc titulaire des actions de son auteur,

'' que Monsieur [D] [D] n'ayant pas signé les actes de cession de parts, elle a qualité pour se prévaloir d'un défaut de consentement,

'' qu'elle n'a découvert la cause de la nullité qu'avec le dépôt du rapport d'expertise dans le cadre de la procédure pénale, ce qui exclut toute prescription.

Sur ce

Madame [Q] [D] sollicite l'annulation de la cession de 125 parts sociales de la SARL ATLANTIC à Monsieur [G] [X] qui a été réalisée par acte sous-seing privé du 29 octobre 1999.

Pas plus devant la cour que devant le tribunal elle n'a toutefois attrait dans la cause le cessionnaire, de sorte que sa demande est nécessairement irrecevable, ainsi qu'en ont justement décidé les premiers juges.

S'agissant de la cession de 125 parts sociales à Monsieur [I] [A] par acte du même jour, il sera tout d'abord constaté que la société ATLANTIC n'a pas davantage été appelée en cause.

Surtout, la demande en nullité de la cession des parts sociales de la SARL ATLANTIC a été formée pour la première fois par conclusions de reprise d'instance du 25 mars 2013 au-delà du délai de prescription de cinq ans de l'article 1304 ancien du code civil.

Madame [D] ne peut, en effet, sérieusement prétendre qu'elle n'aurait découvert la cause de nullité qu'après le dépôt du rapport de l'expert graphologue, alors que déjà dans sa plainte pénale avec constitution de partie civile du 1er mars 2002 elle avait argué de faux les actes de cession du 29 octobre 1999 et que dans sa déclaration de succession du 29 décembre 2005 elle avait intégré à l'actif la valeur des 250 parts de la SARL ATLANTIC, sous réserve de l'instance en cours, ce qui atteste de la connaissance qu'elle avait de la cause de nullité.

L'action en nullité de la cession des parts sociales de la SARL ATLANTIC sera par conséquent déclarée irrecevable.

Sur la demande d'annulation des cessions de parts de la SCI [D] :

1) La recevabilité de l'action :

Il est soutenu par les intimés que Madame [D] est irrecevable à agir en nullité de la cession des parts sociales de la SCI [D] alors,

'' que n'étant pas associée ni partie aux actes attaqués elle ne peut agir à titre personnel,

'' qu'en sa qualité d'héritière elle est prescrite en son action en application de l'article 1304 du code civil, puisque ce n'est qu'en cause d'appel qu'elle a prétendu agir en cette qualité,

'' qu'elle n'a pas reçu par succession le droit de contester la cession, puisque son père avait clairement manifesté son intention de céder ses parts et avait ainsi nécessairement renoncé à toute contestation.

Madame [Q] [D] réplique :

'' qu'ayant accepté la succession de son père elle est devenue propriétaire des parts sociales et est donc titulaire des actions de son auteur,

'' que Monsieur [D] [D] n'ayant pas signé les actes de cession de parts, elle a qualité pour se prévaloir d'un défaut de consentement.

Sur ce

Aux termes de l'assignation qu'elle a fait délivrer le 8 décembre 2000 à la SCI [D], ainsi qu'à Messieurs [I] [A] et [M] [Q], Madame [Q] [D], après avoir rappelé qu'elle était l'unique héritière de Monsieur [D] [D] dont elle avait accepté la succession sous bénéfice d'inventaire, a contesté la validité de la cession des parts de la SCI [D] à Monsieur [I] [A], qui serait intervenue le 13 novembre 1999, et a en conséquence expressément revendiqué la propriété de ces parts en qualité « d'unique héritière du de cujus ».

Elle s'est donc prévalue de cette qualité dès l'introduction de l'instance, ce qui est de nature à exclure toute prescription de l'action sur le fondement de l'article 1304 ancien du code civil, puisque l'instance a été engagée un peu plus d'une année après la cession litigieuse et que l'interruption de la prescription produit ses effets jusqu'à l'extinction de l'instance, peu important qu'un sursis à statuer en ait suspendu le cours.

Monsieur [D] [D] est décédé ab intestat le [Date décès 1] 1999. À compter de cette date sa fille unique était saisie de plein droit de ses biens, droits et actions, de sorte qu'elle a recueilli dans la succession de son père le droit de contester la validité de l'acte de cession de parts sociales du 13 novembre 1999, peu important que le défunt n'ait pas engagé l'action de son vivant, ni que selon divers témoignages il ait clairement manifesté son intention de céder ses participations, puisqu'il n'est en rien justifié d'une renonciation expresse à toute action en nullité avec la connaissance de tous les vices pouvant affecter la validité de l'acte.

Madame [Q] [D] sera par conséquent déclarée recevable en sa demande en annulation de l'acte de cession des parts sociales de la SCI [D].

2) Le bien-fondé de l'action :

Madame [Q] [D] fait valoir que la cession des parts de la SCI [D] est frappée de nullité à défaut pour l'acte de comporter la signature de son père, en l'absence de date et en l'absence d'agrément des autres associés.

Elle soutient en substance que la procédure pénale a clairement démontré que Monsieur [D] [D] n'était pas le signataire des actes.

Les intimés font valoir au contraire que l'expertise graphologique a permis d'établir que les signatures pouvaient être celles de Monsieur [D] [D] et qu'il est établi par d'autres éléments, notamment par témoignages, que ce dernier a pleinement consenti à la cession.

Sur ce

En application des dispositions des articles 287 et suivants du code de procédure civile lorsque l'une des parties dénie l'écriture qui lui est attribuée ou déclare ne pas reconnaître celle qui est attribuée à son auteur,il appartient au juge de procéder à la vérification d'écriture au vu des éléments dont il dispose.

Il résulte des conclusions de l'expert graphologue, qui a été désigné dans le cadre de la procédure pénale, que « la physionomie » de la signature inscrite sur la cession des parts de la SCI [D] n'est pas incompatible avec celle de Monsieur [D], mais qu'il ne peut pas être établi que ce dernier est l'auteur de cette signature.

Si l'expert a estimé que ne pouvait être écartée « l'hypothèse », selon laquelle un seul et même scripteur a imité la signature de Monsieur [D] sur l'ensemble des actes analysés, dont notamment les statuts de la SARL [Q], la cession des parts sociales de la SCI [D] et les cessions de parts sociales de la SARL ATLANTIC, il n'a pas exclu que Monsieur [D] soit l'auteur des signatures, paraphes et mentions manuscrites figurant sur les actes argués de faux par sa fille.

Ainsi que l'a retenu la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon dans son arrêt de non lieu du 29 novembre 2012, ces conclusions d'expertise doivent être appréciées avec prudence compte tenu du nombre restreint de documents de comparaison analysés.

La grave maladie, qui devait emporter Monsieur [D] [D] quelques jours seulement après la cession litigieuse, a pu en outre altérer sa calligraphie, ce que le témoin [K] [L] laisse entendre lorsqu'elle affirme au cours de son audition par les services de police que se sentant physiquement diminué son ami avait fait appel à ses services pour la rédaction de l'acte.

Il n'est donc nullement établi que la signature du cédant apposée sur l'acte de cession de parts litigieux a été imitée, étant observé qu'il n'est versé au dossier aucun élément de comparaison supplémentaire de nature à conforter la thèse de l'imitation soutenue par Madame [Q] [D].

Les témoignages recueillis au cours de l'instruction pénale ont permis par ailleurs d'établir la volonté certaine du cédant de consentir à la cession litigieuse. En effet, au-delà de leurs contradictions et divergences, les témoins sont unanimes et n'ont pas varié sur le fait que Monsieur [D] [D] avait clairement exprimé son intention de céder les parts qu'il détenait dans la SCI [D].

La preuve de cette volonté résulte notamment du témoignage de Madame [K] [L], qui n'étant nullement intéressée à l'affaire, a déclaré aux enquêteurs que bien que physiquement diminué, Monsieur [D] [D], qui disposait de toutes ses facultés intellectuelles, lui avait demandé de rédiger sous sa dictée un acte de cession de parts.

L'avocat de Monsieur [D] [D], Monsieur [F] [I], a déclaré pour sa part que son client était venu lui apporter une cession de parts de la SCI [D] au profit de Monsieur [I] [A].

Le témoin [L] [T] a confirmé que Monsieur [D] [D] lui avait demandé de rapporter les actes de cession, qui avaient été établis en blanc au moment de la constitution des sociétés et qu'il souhaitait régulariser au profit de Monsieur [I] [A] après les avoir fait compléter sous sa dictée par Madame [K] [L]. Ce témoin a par ailleurs attesté que les cessions avaient été signées par Monsieur [D] [D].

L'appelante n'offre pas d'établir enfin que dans les jours qui ont précédé son décès son père était dans l'impossibilité de consentir librement à la cession en raison d'un état comateux ou était physiquement dans l'impossibilité d'apposer sa signature sur l'acte de cession du 13 novembre 1999, le seul certificat médical du centre hospitalier de [Localité 6] qu'elle verse au dossier attestant seulement du transfert du patient dans un service de réanimation de [Localité 4], mais ne comportant aucune description de son état.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la preuve n'est pas rapportée de ce que Monsieur [D] [D] ne serait pas le signataire de l'acte de cession des parts de la SCI [D] au profit de Monsieur [I] [A] et n'aurait pas consenti à cette transmission.

N'ayant pas qualité pour se prévaloir d'un défaut d'agrément, qui ne peut être invoqué que par les autres associés ou la société elle-même, Mme [Q] [D] a par conséquent justement été déboutée de sa demande en annulation de l'acte de cession de parts de la SCI [D] en date du 13 novembre 1999 et par voie de conséquence de ses demandes en paiement d'une somme provisionnelle de 150 000 € et en désignation d'un expert aux fins d'évaluation de son préjudice financier définitif.

Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts :

Les intimés soutiennent qu'ils sont victimes d'un acharnement procédural depuis plus de 15 ans et que le dénigrement fautif dont ils sont l'objet leur a causé un préjudice moral important.

La plainte avec constitution de partie civile de Madame [Q] [D] a conduit toutefois à une longue instruction pénale, au cours de laquelle en raison des charges pesant sur eux MM [Q] et [A] ont été mis en examen, et qui ne s'est définitivement achevée par une décision de non-lieu qu'après deux suppléments d'information ordonnés par la chambre de l'instruction.

Ainsi, l'accusation de faux, usage de faux et escroquerie portée par la plaignante ne peut-elle être considérée comme étant à l'origine inspirée par la malveillance ou manifestement dénuée de tout fondement, puisque ce n'est qu'à l'issue de multiples investigations que la juridiction d'instruction a considéré qu'il n'y avait lieu à suivre contre les mis en examen.

Ce n'est donc pas abusivement de façon particulièrement téméraire ou avec l'intention de nuire que Madame [D] a engagé dans un premier temps une action civile en annulation des actes de cession contestés, dont l'issue a été retardée, non pas de son fait, mais en raison de la durée de l'instruction pénale.

Dès lors que l'expertise graphologique n'a pas permis d'attribuer avec certitude au défunt la signature apposée sur l'acte de cession litigieux du 13 novembre 1999 et que les témoignages recueillis ont fait apparaître des divergences et des contradictions qu'elle a cru pouvoir exploiter, l'appelante n'a pas davantage commis de faute en poursuivant son action civile malgré le non-lieu prononcé.

La cour estime ainsi d'une part que Madame [Q] [D] n'a pas abusé de son droit d'agir en justice et qu'elle ne s'est pas rendue coupable d'un acharnement procédural en relevant appel du jugement l'ayant déboutée de ses demandes, et d'autre part qu'elle n'a pas dénigré fautivement les intimés, à défaut pour ces derniers d'établir qu'elle aurait eu pleinement conscience de la fausseté des accusations portées contre eux.

Par voie de réformation du jugement sur ce point les intimés seront par conséquent déboutés de leur demande reconventionnelle en dommages et intérêts.

Ni l'équité, ni la situation économique respective des parties ne commande enfin de faire application en cause d'appel de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre d'entre elles, la condamnation prononcée de ce chef en première instance étant toutefois confirmée.

*

* *

PAR CES MOTIFS

La Cour,

statuant contradictoirement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Déclare Madame [Q] [D] irrecevable en sa demande en nullité de la cession des parts sociales de la SARL ATLANTIC,

Déclare en revanche Madame [Q] [D], prise en sa qualité d'héritière de Monsieur [D] [D], recevable en sa demande en nullité de la cession des parts sociales de la SCI [D],

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté Madame [Q] [D] de sa demande en nullité de l'acte de cession des parts de la SCI [D] en date du 13 novembre 1999 au profit de Monsieur [I] [A], ainsi que de ses demandes subséquentes en paiement d'une provision et en désignation d'un expert aux fins d'évaluation définitive de son préjudice financier, et condamné la demanderesse au paiement d'une indemnité de procédure au profit de chacun des défendeurs,

Réforme le jugement déféré pour le surplus et statuant à nouveau en y ajoutant :

'' Dit n'y avoir lieu à dommages intérêts pour procédure abusive ou dénigrement fautif,

'' Dit n'y avoir lieu en cause d'appel à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties,

Condamne Madame [Q] [D] aux entiers dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SELARL d'avocats ALAGY BRET& Associés.

LA GREFFIERELE PRESIDENT

LEÏLA KASMI JEAN-LOUIS BERNAUD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 15/07174
Date de la décision : 02/11/2017

Références :

Cour d'appel de Lyon 01, arrêt n°15/07174 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-11-02;15.07174 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award