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27/10/2017 | FRANCE | N°16/03926

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 27 octobre 2017, 16/03926


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





R.G : 16/03926





[O]

[L]



C/

Société DISTRIBUTION CASINO FRANCE







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 25 Avril 2016

RG : F 14/3855











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 27 OCTOBRE 2017







APPELANTS :



[C] [O]

né le [Date naissance 1] 1953 à [Lo

calité 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]



représenté par Me Adrien RENAUD, avocat au barreau de GRENOBLE



[M] [L]

née le [Date naissance 2] 1957 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Localité 2]



représentée par Me Adrien RENAUD, avocat au barreau de GRENOBLE







INTIMÉE...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : 16/03926

[O]

[L]

C/

Société DISTRIBUTION CASINO FRANCE

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 25 Avril 2016

RG : F 14/3855

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 27 OCTOBRE 2017

APPELANTS :

[C] [O]

né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par Me Adrien RENAUD, avocat au barreau de GRENOBLE

[M] [L]

née le [Date naissance 2] 1957 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Adrien RENAUD, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMÉE :

Société DISTRIBUTION CASINO FRANCE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Yann BOISADAM, avocat au barreau de LYON substitué par Me Aurore TALBOT, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 14 Septembre 2017

Présidée par Thomas CASSUTO, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Emmanuelle BONNET, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Elizabeth POLLE-SENANEUCH, président

- Laurence BERTHIER, conseiller

- Thomas CASSUTO, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 27 Octobre 2017 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président et par Emmanuelle BONNET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

Monsieur [C] [O] et Madame [M] [L] ont régularisé le 20 décembre 2004, avec la société distribution Casino France (ci-après DCF) un contrat de cogérance non-salariée en vue d'assurer la gestion l'exploitation d'une succursale Petit Casino à [Localité 3].

La rémunération des cogérants reposait sur une commission fixe de 6 % sur l'ensemble des ventes réalisées. Il relevait alors de l'application du statut de gérant non-salarié dans le principe et les modalités sont fixées par les articles L7222'1 et suivants du code du travail et par un accord collectif national du 18 juillet 1963.

Courant 2007, la société DCF affectait, sur leur demande, Monsieur [C] [O] et Madame [M] [L] à la gestion de magasins en remplacement des gérants titulaires absents durant leurs congés.

À cette occasion, le 8 janvier 2007, la société DCF concluait un nouveau contrat de cogérance intérimaire avec Monsieur [C] [O] et Madame [M] [L] qui prévoyait que le gérant accepte conjointement et solidairement le mandat d'assurer à titre tout à fait précaire la gestion et l'exploitation notamment « des magasins de vente au détail, pendant la période de congés des co-gérants titulaires dont le programme leur sera communiqué chaque début d'année sous réserve de modifications ultérieures dont ils seront informés, avec un délai de prévenance d'au moins 10 jours ou d'un de ses magasins de vente au détail dans l'attente ou l'acceptation dudit magasin par un couple de co-gérants ».

Ainsi, Monsieur [C] [O] et Madame [M] [L], étaient considérés par la société DCF comme des « gérants non salariés intérimaires ». Ils intervenaient à ce titre en remplacement des gérants titulaires absents suivant une « chaîne d'intérim » selon un planning déterminé par la société DCF.

Le 14 juin 2013, Monsieur [C] [O] et Madame [M] [L] ont saisis le conseil de prud'hommes de Lyon aux fins d'obtenir la requalification de leur contrat de gérance non salariée en contrat travail salarié et la résiliation judiciaire de celui-ci aux torts de la société DCF et sollicité la condamnation de la société DCF à verser à chacun des demandeurs les sommes de :

' 20 000 euros au titre de la requalification de leur contrat de cogérance non-salariée intérimaires en contrat travail salarié à durée indéterminé,

' 60 000 € à titre de dommages intérêts pour rupture imputable à la société DCF,

' 6 800 € au titre de l'indemnité de préavis,

' 680 € au titre des congés payés afférents,

' 6 120,91 € au titre de l'indemnité de licenciement,

' 21 890,15 € bruts à titre de rappel de rémunération, ainsi que 2 189 € au titre des congés payés afférents pour l'année 2008,

' 21 086,69 € bruts à titre de rappel de rémunération,

' 2108,20 € au titre des congés payés afférents pour l'année 2009,

' 14 906,85 € à titre de rappel de rémunération,

' 1 490,70 € au titre des congés payés afférents pour l'année 2010,

' 19 974,84 € bruts à titre de rappel de rémunération, outre 1 997,50 € au titre des congés payés afférents pour l'année 2011,

' 24 499,78 € bruts à titre de rappel de rémunération, outre 2 450 € au titre des congés payés afférents pour l'année 2012,

' 22 920,60 € bruts de rappel de rémunération,

' 2 292 € au titre des congés payés afférents pour l'année 2013,

' 20 000 € à titre de dommages-intérêts au titre de la nullité de la clause de non-concurrence,

' 10 000 € à titre de dommages-intérêts pour violation de l'obligation de formation,

' 30 000 € en réparation du préjudice subi du fait de la privation du logement de fonction,

' 5 000 € au titre du prêt de main-d''uvre illicite lié à l'exercice de l'activité CDISCOUNT,

' 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 25 avril 2016, le conseil de prud'hommes de Lyon a débouté Monsieur [C] [O] et Madame [M] [L] de l'intégralité de leurs demandes et débouté CDF de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration date du 20 mai 2016 reçu le 23 mai 2016, Monsieur [C] [O] et Madame [M] [L] ont relevé appel de cette décision.

Par ordonnance en date du 27 octobre 2007, la procédure a été orientée en médiation.

Le 27 janvier 2017, un procès-verbal d'échec de la médiation a été établi par le médiateur désigné.

Vu les conclusions soutenues à l'audience du 14 septembre 2017 par Monsieur [C] [O] et Madame [M] [L] qui demandent à la cour par voie de réformation du jugement de :

SUR LA REQUALIFICATION DE LA RELATION CONTRACTUELLE

DIRE ET JUGER que Monsieur [O] et Madame [L] ont exercé leur travail sous la subordination de la société DCF, en l'absence de toute indépendance dans la gestion du magasin et de toute autonomie dans la détermination de leurs conditions de travail ;

PRONONCER pour chacun des demandeurs la requalification du contrat de cogérance non salariée intérimaire en contrat de travail salarié à durée indéterminée.

DIRE ET JUGER que la société DCF n'a pas exécuté le contrat de bonne foi.

CONDAMNER la société DCF à verser à chacun des demandeurs la somme de 20 000 € en réparation du préjudice subi du fait de l'exécution déloyale du contrat, outre intérêts de droits à compter de la demande.

SUR LA RUPTURE DU CONTRAT

DIRE ET JUGER que la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE a violé les dispositions légales et conventionnelles relatives au statut de gérant non salarié.

DIRE ET JUGER que la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE n'a pas exécuté le contrat de bonne foi.

DIRE ET JUGER que la demande de résiliation judiciaire du contrat de Gérance non salariée de Monsieur [O] et Madame [L] aux torts exclusifs de la société DISTRIBUTION CASINO France était fondée, et rend la rupture du contrat de Madame [L] notifiée ultérieurement sans cause réelle et sérieuse.

En conséquence, CONDAMNER la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à verser à Madame [L] la somme de 60.000 € à titre de dommages et intérêts, outre intérêts de droits à compter de la demande.

CONDAMNER la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à verser à Madame [L] la somme de 2 960,54 € bruts au titre de l'indemnité de préavis, outre 296 € au titre des congés payés afférents, avec intérêts de droits à compter de la demande.

DIRE ET JUGER que Monsieur [O] conserve la faculté de demander réparation du préjudice résultant des manquements de la société DISTRIBUTION CASINO France.

En conséquence, CONDAMNER la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à verser à Monsieur [O] la somme de 60 000 € à titre de dommages et intérêts, outre intérêts de droits à compter de la demande.

A titre subsidiaire

REQUALIFIER la rupture du contrat de Madame [L] pour inaptitude en rupture sans cause réelle et sérieuse.

CONDAMNER la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à verser à Madame [L] la somme de 60 000 € à titre de dommages et intérêts, avec intérêts de droits à compter de la demande.

CONDAMNER la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à verser à Madame [L] la somme de 2 960,54 € bruts au titre de l'indemnité de préavis, outre 296 € au titre des congés payés afférents, avec intérêts de droits à compter de la demande.

En tout état de cause

CONDAMNER la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à verser les sommes suivantes, avec intérêts de droits à compter de la demande :

à Monsieur [O] :

- 21.890,15 € bruts à titre de rappels de rémunération, outre 2189 € au titre des congés payés afférents pour l'année 2008.

- 21.086,69 € bruts à titre de rappels de rémunération, outre 2108,20 € au titre des congés payés afférents pour l'année 2009.

- 14.906,85 € bruts à titre de rappels de rémunération, outre 1490,70 € au titre des congés payés afférents pour l'année 2010.

- 19.974,84 € bruts à titre de rappels de rémunération, outre 1997,50 € au titre des congés payés afférents pour l'année 2011.

- 24 499,78 € bruts à titre de rappels de rémunération, outre 2450 € au titre des congés payés afférents pour l'année 2012

- 22 920,60 € bruts à titre de rappels de rémunération, outre 2292 € au titre des congés payés afférents pour l'année 2013

- 21 689,24 € bruts à titre de rappels de rémunération, outre 2169 € au titre des congés payés afférents pour l'année 2014

- 20 000 € à titre de dommages et intérêts au titre de la nullité de la clause de non- concurrence ;

- 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de formation ;

- 30 000 € en réparation du préjudice subi du fait de la privation de logement de fonction ;

- 5 000 € au titre du prêt de main d'oeuvre illicite lié à l'exercice de l'activité CDISCOUNT;

- 3000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile;

à Madame [L] :

- 21 890,15 € bruts à titre de rappels de rémunération, outre 2189 € au titre des congés payés afférents pour l'année 2008 ;

- 21 086,69 € bruts à titre de rappels de rémunération, outre 2108,20 € au titre des congés payés afférents pour l'année 2009 ;

- 14 906,85 € bruts à titre de rappels de rémunération, outre 1490,70 € au titre des congés payés afférents pour l'année 2010 ;

- 19 974,84 € bruts à titre de rappels de rémunération, outre 1997,50 € au titre des congés payés afférents pour l'année 2011 ;

- 24 499,78 € bruts à titre de rappels de rémunération, outre 2450 € au titre des congés payés afférents pour l'année 2012 ;

- 22.920,60 € bruts à titre de rappels de rémunération, outre 2292 € au titre des congés payés afférents pour l'année 2013 ;

- 21 664,63 € bruts à titre de rappels de rémunération, outre 2166 € au titre des congés payés afférents pour l'année 2014 ;

- 20 000 € à titre de dommages et intérêts au titre de la nullité de la clause de non-concurrence ;

- 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de formation ;

- 30 000 € en réparation du préjudice subi du fait de la privation de logement de fonction ;

- 5 000 € au titre du prêt de main d'oeuvre illicite lié à l'exercice de l'activité CDISCOUNT;

- 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Ils soutiennent que les gérants non-salariés se voient appliquer la législation sociale applicable aux salariés. Par ailleurs, si le statut de gérant non salarié doit répondre à trois critères, celui de « gérant non salarié intérimaire » constitue une application dévoyée du l'article L 7322-2 du code du travail du fait que ces gérants se trouvent en situation de subordination économique et juridique de la société DSF et qu'en particulier, ils sont contraints à des sujétions exclusives de toute notion d'indépendance en particulier s'agissant du temps de travail.

Ils sollicitent la résiliation judiciaire de leur contrat de gérance aux torts de l'employeur du fait de la violation par la société DCF du statut de gérant non salarié et l'absence d'indépendance des cogérants dans la gestion de leur travail, de la législation relative au repos et à la durée légale du travail et du non respect de l'obligation de formation.

A titre subsidiaire, Madame [L] soutient que la rupture du contrat pour inaptitude est sans cause réelle et sérieuse et que cette inaptitude n'est que la conséquence des conditions de travail auxquelles elle a été confrontée et qui n'ont pas été soumises à la médecine du travail. Elle met en avant que les carences de la société DCF sont constitutives d'un manquement à son obligation d'exécuter de bonne foi le contrat ainsi qu'à son obligation de sécurité de résultat et démontre qu'elle n'a pas pris toutes les mesures pour protéger les travailleurs. Bien au contraire, les consorts [O]-[L] soulignent qu'ils ont été soumis à une charge de travail croissante ayant abouti à leur arrêt de travail, Madame [L] étant déclarée inapte en application de la procédure de « danger immédiat ».

Les consorts [O]-[L] sollicitent également le paiement d'heures supplémentaires au taux du SMIC qui sont comprises dans leur statut de gérants non-salariés. Ils évaluent à 25 % le temps de travail supplémentaire réalisé hors horaires d'ouverture du magasin. Ils mettent encore en avant le fait que leur rémunération était inférieure au SMIC.

Les consorts [O]-[L] sollicitent en outre le paiement des frais de logement inhérent à leur fonction de gérants intérimaires et en contre partie de la suppression du logement de fonction octroyé aux gérants salariés titulaires, cette indemnité ne pouvant, selon eux se confondre avec les indemnités de déplacement propres au changement du lieu d'exercice des missions intérimaires.

Par ailleurs, ils estiment que la clause de non-concurrence qui leur est appliquée est nulle faute de contrepartie financière et que l'obligation de formation n'a pas été respectée.

Enfin, ils considèrent que l'activité de point relais pour le compte de la société CDISCOUNT constitue un prêt illicite de main d''uvre au bénéfice de cette société et caractérise l'infraction de travail illégal.

Vu les conclusions soutenues l'audience du 14 septembre 2007 par la société Casino qui demande à la cour de confirmer le jugement et ainsi de débouter Monsieur [O] et Madame [L] de l'intégralité de leurs demandes et de les condamner, chacun, au paiement de la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société CSF soutient que les conditions de travail des consorts [O]-[L] sont conformes avec le statut de gérants mandataires non- salariés. Elle rappelle que depuis 2008, les gérants non salariés sont soumis au Titre II du Livre III de la 7ème partie du code du travail relatif aux « gérants de succursales», certaines dispositions se trouvant ainsi exclues pour les gérants non salariés. Elle développe les conditions d'application du statut des gérants non-salariés des succursales de commerce de détail alimentaire et les garanties bénéficiant aux gérants mandataires non-salariés. Elle considère que le statut du gérant non salarié intérimaire ne diffère pas du statut de gérant titulaire et qu'en toute hypothèse ils bénéficient des mêmes règles relatives à la rémunération, à la garantie d'embauche de salariés et à la liberté de fixer leurs propres conditions de travail.

La société CSF soutient que les dispositions relatives au temps de travail ne s'appliquaient pas aux gérants non salariés et en particulier en ce qui concerne les heures supplémentaires et sont incompatibles avec ce statut dès lors que la société CSF n'est pas à même de contrôler le temps de travail des gérants non salariés. Elle soutient que les consorts [O]-[L] étaient libres de fixer leurs horaires de travail.

S'agissant des règles régissant la rupture du contrat de gérance non-salariée, la société CSF soutient que chacune des parties doivent pouvoir mettre un terme à ce type de contrat dans les formes prévues par la loi et l'article 14 de l'Accord Collectif National du 18 juillet 1963 et doit en particulier être précédée d'un entretien et reposer sur un « motif réel et sérieux», la rupture n'étant pas liée à une règle de priorité d'emploi. Par ailleurs, elle soutient que le contrat ayant déjà été rompu par le départ à la retraite de Monsieur [O] et par l'inaptitude de Madame [L], la demande de résiliation judiciaire est sans objet. Elle estime qu'elle n'a pas fait obstacle à l'exercice de la médecine du travail, que l'inaptitude de Madame [L] ne peut être imputée à un manquement à une obligation de sécurité de résultat qui n'est pas démontrée par les appelants.

Elle prétend que la clause de non concurrence d'un contrat de gérant salarié ne suppose pas une contrepartie financière, que les consorts [O]-[L] ont bénéficié d'une formation continue, que la demande d'indemnité de logement n'est pas fondée compte tenu du renoncement contractuel à cet avantage et que l'activité de point relais colis CDISCOUNT ne caractérise par un prêt illicite de main d''uvre.

S'agissant de la résiliation judiciaire du contrat, la société CSF estime que le contrat a été rompu d'une part du fait du départ à la retraite de Monsieur [O] et d'autre part de l'inaptitude de Madame [L].

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont soutenues oralement lors de l'audience.

MOTIVATION

Sur le statut de gérant non salarié.

Il apparaît d'abord que la société DCF soutient que depuis le 1er mai 2008, l'article L 782-7 du code du travail a été abrogé, de sorte que les consorts [O]-[L] ne peuvent se prévaloir de tous les avantages accordés aux salariés par la législation sociale, la nouvelle codification des articles L 7322-1 à L 7322-6 du code du travail concernant le statut légal des gérants non salariés n'étant pas intervenue à droit constant.

Il apparaît toutefois sur ce point que la modification rédactionnelle apportée à l'article L 7322-1 du code du travail, tel qu'il résultait de l'ordonnance du 12 mars 2007, avait été uniquement motivée par le souci d'apporter une clarification de rédaction, de sorte que la recodification s'est effectuée à droit constant et qu'en conséquence, l'abrogation d'une loi à la suite de sa codification à droit constant, ne modifie ni la teneur ni la portée des dispositions transférées.

Dans ces conditions, il apparaît que, contrairement à ce qu'affirme la société DCF, les gérants non salariés bénéficient de tous les avantages accordés aux salariés par la législation sociale. C'est dans ces conditions qu'ils sont inscrits au régime général de sécurité sociale, bénéficient d'une adhésion à une mutuelle et des prestations sociales au même titre que les salariés et bénéficie d'un régime d'épargne salariale.

L'article L 7322-2 du code du travail, applicable à l'espèce, dispose en son alinéa 1er : « Est gérant non salarié toute personne qui exploite, moyennant des remises proportionnelles au montant des ventes, les succursales des commerces de détail alimentaire ou des coopératives de consommation, lorsque le contrat intervenu ne fixe pas les conditions de son travail et lui laisse toute latitude d'embaucher des salariés ou de se faire remplacer à ses frais et sous son entière responsabilité. »

Dans son préambule, l'accord collectif national du 18 juillet 1963 mis à jour le 1er mars 2008, rappelle que ce statut spécifique de gérant mandataire résulte du fait que vis-à-vis de la clientèle, il se comporte comme un commerçant, ce qui implique indépendance du gérant dans la gestion de l'exploitation du fonds, c'est-à-dire autonomie dans l'organisation de son travail et intéressement direct à l'activité du magasin par des commissions calculées sur le montant des ventes, tout en bénéficiant, dans le cadre de ce mandat d'intérêt commun liant le propriétaire du fonds au gérant qui jouit d'une indépendance, partage les risques de l'exploitation mais bénéficie d'un statut social légal et conventionnel.

Le contrat de travail est constitué dès lors que se trouvent réunies trois conditions cumulatives: l'état de subordination juridique vis-à-vis de l'employeur, le versement d'une rémunération et la fourniture d'une prestation de travail; le lien de subordination juridique se caractérise par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

Cette subordination juridique ne se confond ni avec la subordination économique ni avec l'intégration dans un service organisé.

La qualification d'une relation de travail ne dépend ni de la dénomination donnée par les parties à leur convention ni de la volonté qu'elles ont pu exprimer, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité.

En l'espèce, le contrat initial de cogérance conclu par les consorts [O]-[L] régularisé le 20 décembre 2004 est a été modifié à la date du 29 juin 2007 à la demande des consorts [O]-[L] et prévoyait que ceux-ci acceptaient conjointement et solidairement le mandat d'assurer à titre tout à fait précaire la gestion et l'exploitation notamment des magasins de vente au détail, pendant la période de congés des cogérants titulaires dont le programme leur sera communiqué chaque début d'année sous réserve de modifications ultérieures dont ils seront informés avec un délai de prévenance d'au moins 10 jours, ou d'un de ses magasins de vente au détail dans l'attente ou l'acceptation dudit magasin par un couple de cogérants.

Selon avenant de même date, la rémunération à la commission est fixée à 6,20 % soit un taux supérieur à celui prévu par l'Accord Collectif National du 18 juillet 1963. En outre, le montant du « forfait de commission» versé mensuellement aux consorts [O]-[L], correspondant au rappel du minimum mensuel garanti, a été réparti, conformément à leur demande, à égalité entre eux, soit 50 % chacun.

En vertu de l'accord collectif du 18 juillet 1963, les consorts [O]-[L] ne sont pas fondés à solliciter un rappel du minimum mensuel garanti chacun.

Le contrat liant les parties précisait également que les consorts [O]-[L] étaient libres d'organiser la gestion du magasin dans lequel ils assuraient le remplacement, sous réserve de se conformer à la réglementation et aux usages locaux, sans recevoir toutefois de directives de la société DCF quant à l'organisation de leur travail et pouvant procéder comme ils l'entendaient pour parvenir à une chiffre d'affaires optimal sur lequel leur rémunération était calculée.

Il incombe donc aux appelants de démontrer, que contrairement aux clauses prévues au contrat de gérance, ils ont été soumis à des ordres, directives et au contrôle de la société CASINO dans l'organisation de l'exercice de leur propre travail, démontrant ainsi l'existence d'un lien de subordination juridique, différent de la subordination économique et de l'organisation d'un service organisé et permettant de requalifier ledit contrat en contrat de travail.

Les consorts [O]-[L] soutiennent d'abord que le statut de cogérance non salariée intérimaire auquel ils étaient soumis n'a aucune existence légale et porte en lui-même la démonstration du lien de subordination dont ils invoquent l'existence; ainsi cette création par la société CDF lui permet d'affecter des gérants où bon lui semble, sur des périodes qu'elle détermine et selon une « chaîne d'intérims » sur laquelle ces derniers n'ont aucun pouvoir de modification.

Sur ce point, il convient de rappeler que préalablement à la conclusion de ce contrat, les consorts [O]-[L], après avoir exercé conjointement pendant plusieurs années la gérance non salariée d'un commerce, ont de leur propre initiative demandé à établir une nouvelle relation contractuelle avec la société DCF en qualité de gérants non salariés intérimaires, ce qu'ils ont fait ainsi pendant de nombreuses années.

Il est par ailleurs démontré par la société DCF que, pour la bonne gestion des magasins CASINO, elle a mis en place une organisation de chaîne d'intérims, sans caractère contraignant pour les gérants mandataires non salariés titulaires dans des magasins et libres de se faire remplacer pendant leurs congés, ce système n'ayant pour but que d'apporter à ces gérants une aide dans la gestion de leur remplacement, sans qu'ils aient à s'en préoccuper, en recherchant eux-mêmes leur remplaçants.

Les consorts [O]-[L] ne peuvent ainsi s'emparer de cette création de chaîne d'intérims, qui répond manifestement dans les termes du contrat au statut défini à l'article L 7322-1 du code du travail et qu'ils ont librement acceptée d'intégrer, pour venir prétendre démontrés le défaut d'autonomie et le lien de subordination qu'ils allèguent.

La requalification qu'ils demandent ne peut donc être prononcée sur ce seul motif.

Par ailleurs, les consorts [O]-[L] produisent aux débats des décisions de juridictions du fond et de la Cour de Cassation, ayant procédé à la requalification en contrat de travail de contrats de cogérance non salariés.

Ces décisions démontrent toutefois uniquement qu'il appartient à la cour de céans de rechercher concrètement l'existence du lien de subordination allégué, c'est-à-dire de définir si, dans l'exercice de la relation mandant-mandataire, il existe des contraintes telles qu'elle seraient précisément incompatibles avec le statut défini à l'article L 7322-1 du code du travail.

Concernant les clauses du contrat de cogérance, il apparaît d'abord que, conformément à l'article 9 de leurs contrats de cogérance et à l'article 6 de l'accord collectif du 18 juillet 1963, les consorts [O]-[L] ont été rémunérés par le biais de commissions correspondant à 6 % du montant des ventes qu'ils ont réalisées et réparties entre eux à hauteur de 50/50, dans le dernier état des relations contractuelles.

Il n'est par ailleurs pas contesté que les consorts [O]-[L] avaient, conformément au statut, toute latitude pour embaucher des salariés ou se faire remplacer à leurs frais et sous leur propre responsabilité.

Ensuite, il convient d'examiner si, comme le soutiennent les consorts [O]-[L], les diverses clauses contenues dans leur contrat les privaient de toute indépendance en les soumettant à de nombreuses sujétions qui les plaçaient de fait dans une situation de subordination.

Sur l'obligation de servir de point de retrait de colis Cdiscount et de service postal, ils estiment qu'il s'agissait de tâches imposées supplémentaires, très contraignantes et non prévues au contrat, lesquelles étaient en outre rémunérées de manière très dérisoire.

Toutefois, ces obligations étaient attachées aux magasins dans lesquels les consorts [O]-[L] assuraient le remplacement des gérants absents ou non encore arrivés, il s'agissait au surplus de tâches annexes, dont les appelants ne démontrent pas qu'elles auraient été aussi prenantes qu'ils l'allèguent, de sorte que leur accomplissement ne peut en soi démontrer l'absence d'indépendance alléguée.

Il apparaît toutefois d'abord que ces éléments tels que fixés au contrat de cogérance, sont conformes à l'article L 7322-2 du code du travail et à l'article 34 de l'accord collectif national en ce qu'il s'agit de modalités commerciales, sans incidence sur la nature du contrat et visant essentiellement à harmoniser les pratiques sur l'ensemble des points de vente et apporter aux gérants les informations utiles sur la réglementation applicable.

S'agissant des horaires de livraison, les consorts [O]-[L] soutiennent qu'il n'ont pas eu d'autre choix que de se conformer aux horaires et aux heures de livraisons pratiquées par les gérants titulaires. Ils ne démontrent toutefois pas que ces horaires, nécessairement liés à l'activité du magasin et aux contraintes affectant le processus de livraison. De plus, les commandes relevant de la responsabilité des gérants, les consorts [O]-[L] ne peuvent reprocher à la société CSF les modalités propre à l'organisation de ces livraisons qui lui échappent.

Concernant les horaires et les vacances, les époux [O]-[L] soutiennent que les horaires des magasins dans lesquels ils assuraient des remplacements leur étaient imposés ainsi que les jours de fermeture, que de même, qu'ils ne pouvaient poser leurs congés à leur convenance.

Les consorts [O]-[L] ne démontrent pas toutefois, au moyen des plannings qu'ils versent aux débats qu'ils auraient été contraints à des modifications des plannings imposées par la société DCF ainsi qu'aux horaires d'ouverture des magasins des gérants titulaires, pas plus qu'ils ne démontrent ne pas avoir été libres de prendre leurs congés à leur guise.

En effet, les plannings et fiches de congés produits démontrent au contraire que, manifestement, les consorts [O]-[L] bénéficiaient d'une autonomie dans l'organisation des horaires d'ouverture, sous réserve des coutumes locales et des habitudes de la clientèle (article 1er du contrat de gérance) et pouvaient prendre leurs congés à leur convenance.

Du reste, en ce qui concerne le respect des horaires d'ouverture, il doit être observé que la société DCF n'a jamais fait des remarques aux consorts [O]-[L] concernant des manquements au respect de cette clause dont la société DCF peut être amenée à tirer les conséquences de tels manquements contraires tant au contrat qu'à l'impératif commercial de rentabilité du commerce dont les gérants non salariés ont la gestion.

Il convient également d'ajouter que les consorts [O]-[L] pouvaient en tout état de cause, selon délai de prévenance prévu au contrat, refuser la gestion de succursales, comme le démontre la société DCF.

Sur la reprise des salariés employés par les gérants titulaires, les consorts [O]-[L] soutiennent qu'il étaient tenus de reprendre temporairement les contrats de travail des salariés embauchés par les gérants titulaires. Ils estiment que cette situation démontre l'absence de liberté dans l'organisation de leur gérance intérimaire, ce que vient conforter le fait qu'ils remboursaient les salaires aux gérants titulaires.

Cette analyse est toutefois erronée. En effet, la reprise des contrats de travail attachés à un établissement est d'ordre public. En outre les consorts [O]-[L] ne démontrent pas qu'ils auraient été privés du pouvoir d'embaucher des salariés, y compris dans le cadre de leur gérance intérimaire. En outre, ces contrats étaient neutres puisque assumés par les gérants titulaires, sauf à légitimement être pris en charge temporairement par les gérants intérimaires, le temps de leur mission.

Dans ces conditions, il n'apparaît pas que les consorts [O]-[L] démontrent à l'appui de leur demande de requalification, que le contrat de cogérance non salarié, faisait peser sur eux des sujétions incompatibles avec le statut ci-dessus rappelé et les plaçaient dans une situation de subordination juridique vis-à-vis de la société DCF, de sorte que la décision déférée sera confirmée de ce chef.

Sur la rupture du contrat de Monsieur [O].

Monsieur [O] estime que la rupture qui lui été notifiée est abusive en ce que le départ en retraite d'un cogérant ne constitue pas un motif juridiquement admissible pour motiver la rupture d'un contrat de travail. Il demande donc des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, cette demande étant la conséquence de la requalification en contrat de travail sollicitée.

Toutefois, cette demande ne peut être accueillie dès lors que le contrat de gérance n'a pas été requalifié en contrat de travail.

Sur la rupture du contrat de Madame [L],

Madame [L] estime avoir été licenciée pour inaptitude. Elle demande donc des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, cette demande étant la conséquence de la requalification en contrat de travail sollicitée.

Il n'est pas contesté qu'en qualité de co-gérant non salariées, Madame [L] bénéficie de l'accès à la médecine du travail. Toutefois, au regard de son statut, il lui appartenait de prendre ses dispositions pour en bénéficier.

Ainsi, cette demande ne peut être accueillie dès lors que le contrat de gérance n'a pas été requalifié en contrat de travail. Madame [L] n'est pas fondée à critiquer la société DCF de l'avoir privée d'un tel accès.

Sur le logement de fonction.

Les consorts [O]-[L] demandent des dommages et intérêts pour privation du logement de fonction, or, le bénéfice de ce logement de fonction n'était pas applicable au gérant non salarié intérimaire, lequel recevait toutefois en contrepartie, des frais de déplacements et de séjours engagés lors des différentes gestions.

Dans ces conditions, les consorts [O]-[L] ne viennent pas démontrer le préjudice qu'ils allèguent dans le fait de ne pas avoir pu bénéficier du logement de fonction.

Sur le prêt de main d''uvre illicite.

Les époux [Z] sollicitent le versement de dommages et intérêts pour prêt de main d''uvre illicite lié aux activités Colis CDISCOUNT et service postal outre le versement d'une rémunération pour cette activité à hauteur du taux contractuel de 6 % prévu au contrat de gérance, il convient de rappeler d'abord que ces services n'ont pas été imposés mais proposés aux gérants par la société DCF, étant précisé en outre que ces activités ne constituaient pas une charge de travail supplémentaire, un commissionnement par colis ayant en outre été mis en place et enfin, les consorts [O]-[L] ayant été informés, en acceptant la gestion de telle ou telle supérette, à titre intérimaire, qu'ils auraient également à prendre en compte ces activités .

Sur le non respect de l'obligation de formation,

Les consorts [O]-[L] estime que la société DCF était contractuellement tenue de leur assurer une formation continue, qu'ils n'en ont toutefois pas bénéficier. Ils estiment que cette situation est constitutive d'une faute.

Néanmoins, la société DCF rapporte la preuve que les consorts [O]-[L] ont bénéficié d'une formation initiales, ils ont été destinataires de documents d'information propre assurer la mise à jour de leur connaissance. Enfin, il est démontré que les consorts [O]-[L] ont bénéficier à leur demande d'une formation continue en 2013. Ainsi, ils ne peuvent critiquer la société DCF de ne pas avoir mis en 'uvre un droit dont ils avaient la seule et libre initiative.

Sur la clause de non-concurrence.

Il est de principe que pour être valable, une clause de non-concurrence doit respecter des conditions cumulatives suivantes :

'être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise,

'être limitée dans le temps et dans l'espace,

'tenir dompte des spécificités de l'emploi du salarié,

'constater l'obligation pour l'employeur de verser une contrepartie financière.

En l'espèce, la clause de non-concurrence telle que rédigée ne comporte aucune contrepartie financière, de sorte qu'elle encourt nullité.

Les consorts [O]-[L] estiment par ailleurs que compte-tenu de l'absence de contrepartie financière, ils ont subi une préjudice, de sorte que la somme de 15 000 euros doit leur être allouée à chacun à titre de dommages et intérêts, l'existence d'une clause de non-concurrence nulle leur ayant causé nécessairement préjudice.

Il apparaît toutefois que l'existence d'une clause de non-concurrence nulle ne dispense pas les appelants de démontrer le préjudice subi. En l'espèce, il n'apparaît pas que les consort [O]-[L] viennent démontrer l'existence d'un quelconque préjudice indemnisable de ce chef, alors que Monsieur [O], qui a fait valoir ses droits à retraite, et que Mme [L], qui a subi la rupture de son contrat du fait de son inaptitude, ne démontrent pas avoir été empêchés de retrouver un emploi du fait de l'application de la clause, de sorte qu'ils seront déboutés de leur demande de dommages et intérêts, par confirmation de la décision déférée.

Sur les rappels de rémunérations.

Les consorts [O]-[L] se fondant sur l'article L 7322-1 du code du travail qui précise que l'entreprise propriétaire de la succursale est responsable de l'application au profit des gérants non salariés des dispositions du livre Ier le la troisième partie relative à la durée du travail, au repos et aux congés, ainsi que de celles de la quatrième partie relatives à la santé et à la sécurité du travail, lorsque les conditions de travail, de santé et de sécurité au travail dans l'établissement, ont été fixées par elle et soumises à son accord et sur l'article L 7322-3 du même code qui insiste sur le caractère individuel du contrat de gérant non salarié, estiment qu'il est anormal que leur rémunération ait été inférieure au SMIC et que dans ces conditions, l'écart entre la rémunération qu'ils ont perçu et celle qui aurait dû leur être versée sur la base du SMIC doit être mise à la charge de la société DCF.

Les dispositions du code du travail applicables aux salariés doivent en effet trouver application en ce qui concerne la rémunération revenant individuellement à chacun des cogérants, de sorte qu'il convient de dire que la rémunération devant être garantie à chacun est, comme ils le demandent la rémunération calculée sur la base du SMIC.

Dès lors, conformément à ce qui est établi, il convient d'allouer à chacun des consorts [O]-[L], l'écart entre la rémunération qu'ils ont perçu et celles résultant de l'application du SMIC, de sorte que par réformation de la décision déférée, il convient de faire droit à leur demande de ce chef.

Sur les heures accomplies.

Les consorts [O]-[L] affirment que, conformément à l'article L 3121-10 qui devait leur bénéficier, leur durée légale de travail était fixée à 35 heures par semaine civile.

Conformément à l'article L 7322-1 alinéa 2 du code du travail : l'entreprise propriétaire de la succursale est responsable de l'application au profit des gérants non salariés des dispositions du livre Ier le la troisième partie relative à la durée du travail, au repos et aux congés, ainsi que de celles de la quatrième partie relatives à la santé et à la sécurité du travail, lorsque les conditions de travail, de santé et de sécurité au travail dans l'établissement, ont été fixées par elle et soumises à son accord.

Il apparaît que la société DCF soutient que depuis le 1er mai 2008, l'article L 782-7 du code du travail a été abrogé, de sorte que les époux [Z] ne peuvent se prévaloir de tous les avantages accordés aux salariés par la législation sociale, la nouvelle codification des articles L 7322-1 à L 7322-6 du code du travail concernant le statut légal des gérants non salariés n'étant pas intervenue à droit constant.

Il apparaît toutefois sur ce point que la modification rédactionnelle apportée à l'article L 7322-1 du code du travail, tel qu'il résultait de l'ordonnance du 12 mars 2007, avait été uniquement motivée par le souci d'apporter une clarification de rédaction, de sorte que la recodification s'est effectuée à droit constant et qu'en conséquence, l'abrogation d'une loi à la suite de sa codification à droit constant, ne modifie ni la teneur ni la portée des dispositions transférées.

Dans ces conditions, il apparaît que, contrairement à ce qu'affirme la société DCF, les gérants non salariés bénéficient de tous les avantages accordés aux salariés par la législation sociale.

C'est ainsi qu'ils sont inscrits au régime général de sécurité sociale , bénéficient d'une adhésion à une mutuelle et des prestations sociales au même titre que les salariés et bénéficie d'un régime d'épargne salariale.

La société DCF affirme également qu'elle n'a jamais imposé les horaires d'ouverture et que l'exercice d'un contrôle ou d'un décompte de la durée du travail est en effet incompatible avec la statut de gérant non-salarié et la libre détermination de leurs conditions de travail, de sorte que la charge de la preuve des heures supplémentaires incomberait exclusivement aux gérants non salariés.

Par ailleurs, elle estime qu'il n'est pas démontré que l'amplitude horaire d'ouverture du magasin se confonde avec le temps de travail effectif réalisé par chacun d'eux.

Il apparaît, toutefois, d'abord que la société DCF, si elle n'impose pas les conditions de travail, de sorte que le lien de subordination juridique caractérisant l'existence d'un contrat de travail n'a pas été ici retenu, demande aux gérants non salariés, concernant les horaires d'ouverture et de fermeture des succursales, de se conformer aux habitudes de la clientèle et aux coutumes locales et fait connaître les horaires d'ouverture sur son site internet, de sorte qu'elle exerce bien une vérification du respect de l'amplitude horaire dans le cadre du service organisé de succursales qu'elle dirige.

Dans ces conditions, il apparaît que le respect de l'amplitude horaire était soumis à son accord.

Il apparaît ensuite que, contrairement à ce qu'affirme la société DCF, la charge de la preuve des heures accomplies dans le cadre de cette amplitude horaire ne saurait peser sur les seuls appelants mais également sur l'intimé .

Les consorts [O]-[L] établissent par les pièces qu'ils produisent, que dans les différentes succursales dans lesquelles ils ont travaillé pour la période allant de 2007 à 2011, ils ont dû respecter des horaires d'ouverture du magasin 6 jours par semaine, du mardi au jeudi de 7 heures30 à 12 heures 30 et de 14 heures 30 ou 15 heures à 19 heures 30 ou 20 heures du lundi au samedi et le dimanche matin de 7h30 ou 8 heures à 12h30 soit 48 heures et demi d'ouverture, auxquelles ils démontrent que s'ajoutaient 25 % de temps supplémentaires en moyenne supplémentaires par semaine du fait des livraisons matinales quotidiennes, de la mise à jour des prix et étiquettes, du rangement, du nettoyage, des opérations de caisse et comptables et des commandes, de sorte qu'ils effectuaient en moyenne chacun 60 heures de travail par semaine.

Il est en effet établi que, au regard des tâches multiples incombant aux gérants, il n'existait pas pour eux de possibilité de fonctionner en alternance.

La société DCF ne verse du reste aucun élément objectif de contestation sur les éléments produits par les consorts [O]-[L], si ce n'est en indiquant que l'amplitude horaire ne se confond pas avec le temps de travail effectif des consorts [O]-[L], ceux-ci ne prenant pas en compte les périodes d'inactivité qu'ils ont nécessairement alternativement rencontrées dans le cadre des horaires d'ouverture du magasin, thèse qui ne peut être retenue, au regard de la multiplicité des tâches devant être effectuées et que les cogérants devaient ainsi réaliser de manière concomitante.

Dans ces conditions, par réformation du jugement déféré, il convient d'accorder aux consorts [O]-[L] des rappels d'heures accomplies sur la base de 35 heures par semaine, en tenant compte des majorations de 25 % pour les 8 premières heures supplémentaires et de 50 % pour les suivantes, de sorte qu'il convient d'allouer à Monsieur [O] la somme de 146 968,15 € bruts outre 14 696 € au titre des congés payés afférents et à Madame [L] la somme de 146 943,24 € bruts outre 14 694 € au titre des congés payés afférents.

Il serait inéquitable de laisser à la charge des consorts [O]-[L] leurs frais non recouvrables.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement par décision contradictoire, après en avoir délibéré,

CONFIRME la décision déférée en ce qu'elle a débouté Monsieur [O] et Madame [L] :

- de leur demande de requalification du contrat de gérant non salarié en contrat de travail de droit commun à temps complet,

- de leur demande de dommages et intérêts pour préjudice subi du fait de la violation du statut,

- de leur demande de dommages et intérêts pour privation du logement de fonction,

- de leur demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé et rémunération de l'activité C DISCOUNT,

- de leur demande de dommages et intérêts au titre de la clause de non-concurrence sans contrepartie financière,

- de la demande tendant à dire la rupture du contrat de Monsieur [O] et de Madame [L] sans cause réelle et sérieuse et lui allouer des dommages et intérêts de ce chef,

LA REFORME sur le surplus,

Statuant à nouveau :

CONDAMNE la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à payer à Monsieur [C]

[O] :

la somme de 146 968,15 € bruts au titre des heures accomplies outre 14696 euros au titre des congés payés afférents avec intérêts de droit à compter de la demande,

CONDAMNE la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à payer à Madame [M] [L] la somme de 146 943,24 € bruts au titre des heures accomplies outre 14 694 € au titre des congés payés afférents

CONDAMNE la société DCF à payer à Monsieur [C] [O] et Madame [M] [L] pour chacun d'eux la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

LA CONDAMNE aux dépens d'appel.

Le GreffierLe président

Emmanuelle BONNETElizabeth POLLE-SENANEUCH


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 16/03926
Date de la décision : 27/10/2017

Références :

Cour d'appel de Lyon SC, arrêt n°16/03926 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-10-27;16.03926 ?
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