R.G : 17/02690
Décision du tribunal de commerce de Lyon
Au fond du 10 mars 2017
RG : 2015J1626
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile A
ARRET DU 26 Octobre 2017
DEMANDERESSE AU CONTREDIT :
SA TYP AG
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Adresse 1] -
représentée par la SELARL LEVY ROCHE SARDA, avocat au barreau de LYON
assistée de la SELARL CABINET D'AVOCATS PAUPER & ASSOCIES, avocat au barreau de l'ESSONNE
DEFENDERESSE AU CONTREDIT :
SAS KIS
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par la SELARL BISMUTH AVOCATS, avocat au barreau de LYON
assistée de Maître Jean-David GUEDJ, avocat au barreau de PARIS
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Date des plaidoiries tenues en audience publique : 29 juin 2017
Date de mise à disposition : 12 octobre 2017, prorogée au 26 octobre 2017, les avocats dûment avisés conformément à l'article 450 dernier alinéa du code de procédure
Audience tenue par Jean-Louis BERNAUD, président et Françoise CLEMENT, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,
assistés pendant les débats de Claire MONTINHO-VILAS-BOAS, greffière placée
A l'audience, Françoise CLEMENT a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Composition de la Cour lors du délibéré :
- Jean-Louis BERNAUD, président
- Françoise CLEMENT, conseiller
- Vincent NICOLAS, conseiller
Signé par Jean-Louis BERNAUD, président, et par Leïla KASMI, greffière placée, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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La société KIS, qui fabrique et distribue des matériels d'impression photographique, a commandé à la société de droit suisse TYP AG la fabrication en série de cylindres non collants selon trois commandes prévisionnelles des 3 février 2010, 22 décembre 2010 et 1er septembre 2011 (sous les n°ARE005, TYP02 et TYP03).
Prétendant avoir reçu des commandes fermes et définitives la société TYP AG a fabriqué les pièces commandées, dont la société KIS, qui a soutenu que ces commandes n'étaient que prévisionnelles, n'a toutefois pas pris livraison et n'a pas payé le prix.
Aucun règlement amiable du litige n'étant intervenu, la société TYP AG a fait assigner le 6 août 2015 la société TYP AG devant le tribunal de commerce de Lyon en paiement de diverses sommes au titre des pertes subies et de la rupture du marché sans préavis, et en désignation d'un expert chargé d'évaluer les pièces en stock.
La société KIS a soulevé l'incompétence du tribunal de commerce en invoquant la clause compromissoire contenue dans ses conditions générales d'achat donnant compétence à un arbitre unique désigné conformément au règlement de l'association française d'arbitrage.
Par jugement du 10 mars 2017 le tribunal de commerce a :
- dit recevable l'exception d'incompétence ;
- s'est déclaré incompétent au profit d'un arbitre unique désigné conformément au règlement de l'association française d'arbitrage ;
- invité les parties à mieux se pourvoir.
La société TYP AG a formé contredit contre ce jugement selon déclaration reçue au greffe du tribunal de commerce de Lyon le 27 mars 2017 et transmise à la cour le 30 mars 2017.
Vu ses conclusions transmises le 29 juin 2017, par lesquelles elle demande à la cour de :
- constater que la clause compromissoire lui est inopposable ;
- rejeter l'exception d'incompétence soulevée par la société KIS ;
- dire que le tribunal de commerce de Lyon est compétent pour statuer sur ses demandes ;
- condamner la société KIS à lui payer la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu les conclusions écrites de la société KIS reprises oralement à l'audience, par lesquelles elle demande à la cour de confirmer le jugement du tribunal de commerce et de condamner la société TYP AG à lui payer la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR QUOI, LA COUR :
Attendu que pour conclure à l'infirmation du jugement, la société TYP AG fait valoir que :
- la société KIS n'établit pas avoir porté à sa connaissance ses conditions générales d'achat, et par voie de conséquence, la clause compromissoire, lors de l'envoi de ses trois commandes en date des 3 février 2010, 22 décembre 2010 et 1er septembre 2011 ;
- en effet, l'ensemble des documents contractuels qui ont été échangés ont été transmis par email et les bons de commande envoyés par ce moyen ne comportaient aucun verso relatifs à ces conditions générales ;
- les appels de livraison fournis par la société KIS pour faire cette preuve concernent d'autres marchés ;
- les confirmations de commande qu'elle adressait à la société KIS comportaient la mention selon laquelle ses propres conditions générales de vente étaient applicables au contrat ;
- la société KIS ne démontre pas en outre qu'elle a accepté cette clause compromissoire ;
Attendu que selon cette dernière, cette clause est opposable à la société TYP AG, motifs pris de ce que :
1. Au verso des commandes prévisionnelles des 3 février 2010, 22 décembre 2010 et 1er septembre 2011 figurent ses conditions générales d'achat, et la société TYP AG, en signant et en acceptant ces commandes, a accepté la clause compromissoire ;
2. La société TYP AG a eu connaissance de ses conditions d'achat sur les appels de livraison fermes valant convention principale, qu'elle a signés et acceptés, qui font référence à la clause compromissoire, dans les termes suivants : 'l'acceptation de cette commande entraîne automatiquement l'acceptation de nos conditions générales d'achat (comme indiqué au verso) et en particulier de articles X (garanties) et XIV (clause compromissoire) nonobstant les conditions de vente générales du fournisseur ' ; que la société TYP AG en a eu aussi connaissance dans leurs échanges de mail;
3. Au vu de leurs relations d'affaires suivies et des précédents marchés, la société TYP AG n'a jamais contesté ses conditions d'achat, ce qui établit son adhésion à la clause compromissoire ;
Attendu, cependant, qu'en matière d'arbitrage international, la clause compromissoire par référence à un document qui la stipule est valable lorsque la partie à laquelle on l'oppose en a eu connaissance au moment de la conclusion du contrat et qu'elle a, fût-ce par son silence, accepté cette référence ; qu'en l'espèce, les documents constatant les marchés prévisionnels n°ARE005, TYP02 et TYP03 émanant de la société KIS, ne reproduisent pas sur leur première page la clause compromissoire prévue par l'article XIV des conditions générales d'achat, et n'y font pas référence ; que la société KIS, qui ne conteste pas l'allégation de la société TYP AG selon laquelle les documents contractuels lui ont été transmis par la voie électronique, n'établit pas lui avoir envoyé avec la page 1 des marchés prévisionnels les conditions générales d'achat figurant selon elle à leur verso ;
Attendu ensuite qu'à supposer même que les contrats aient été définitivement formés entre la société TYP AG et la société KIS lors des appels de livraison, les bons de commande envoyés par celle-ci matérialisant ces appels ne font pas davantage la preuve de la connaissance par celle-la de la clause compromissoire au moment de la conclusion des contrats, même s'ils font référence à cette clause sur leur recto ; qu'en effet, une telle référence ne fait pas présumer à elle seule que la société TYP AG a été en mesure de prendre connaissance du contenu de la clause compromissoire lors de cette conclusion ; que les échanges de mail en 2013 entre les parties ne peuvent faire cette preuve, dès lors qu'ils sont postérieurs aux contrats, et qu'ils ne prouvent en rien la connaissance par la société TYP AG de la teneur de la clause compromissoire lors de la souscription de ses engagements ;
Attendu enfin qu'il n'est pas établi que les sociétés KIS et TYP AG avaient l'habitude, dans le cadre de leurs relations d'affaires, de se référer au document contenant la clause compromissoire ; que les confirmations de commande renvoyées par la société TYP AG démontrent le contraire, dans la mesure où elles stipulent que ses conditions générales de vente sont applicables au contrat ;
Attendu dans ces conditions que la preuve de l'acceptation par la société TYP AG de la clause compromissoire lors de la conclusion des contrats n'étant pas établie, c'est à tort que le tribunal de commerce de Lyon s'est déclarée incompétent ;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Et statuant à nouveau,
Rejette l'exception d'incompétence soulevée par la société KIS ;
Renvoie l'affaire devant le tribunal de commerce de Lyon ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Condamne la société KIS aux dépens du contredit.
LA GREFFIERELE PRESIDENT
LEÏLA KASMI JEAN-LOUIS BERNAUD