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30/06/2017 | FRANCE | N°15/01703

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 30 juin 2017, 15/01703


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 15/01703





[L]

UNION LOCALE CGT DE VILLEURBANNE



C/

CIC LYONNAISE DE BANQUE







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de prud'hommes - Formation de départage de LYON

du 20 Mai 2014

RG : F 11/05184











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 30 JUIN 2017













APPELANTES :



[G] [L]

née le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]



comparante en personne, assistée de Me Florent JOUBERT, avocat au barreau de LYON



UNION LOCALE CGT DE VILLEURBANNE

[Adresse 2]

[Localité 2]



non comparante







INTIMÉE :



CIC LYONNAISE DE BAN...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 15/01703

[L]

UNION LOCALE CGT DE VILLEURBANNE

C/

CIC LYONNAISE DE BANQUE

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de prud'hommes - Formation de départage de LYON

du 20 Mai 2014

RG : F 11/05184

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 30 JUIN 2017

APPELANTES :

[G] [L]

née le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

comparante en personne, assistée de Me Florent JOUBERT, avocat au barreau de LYON

UNION LOCALE CGT DE VILLEURBANNE

[Adresse 2]

[Localité 2]

non comparante

INTIMÉE :

CIC LYONNAISE DE BANQUE

[Adresse 3]

[Localité 3]

comparante en personne, assistée de Me Marie-laurence BOULANGER de la SCP FROMONT BRIENS, avocat au barreau de LYON substituée par Me Xavier VINCENT, avocat au barreau de LYON, M. [Q] [V] (Responsable RH) en vertu d'un pouvoir général

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 31 Mars 2017

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président

Marie-Christine DE LA SALLE, Conseiller

Ambroise CATTEAU, Vice-Président placé

Assistés pendant les débats de Carole NOIRARD, Greffier placé.

ARRÊT : REPUTE CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 09 juin 2017 puis prorogé au 30 Juin 2017, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président, et par Géraldine BONNEVILLE, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Mme [L] [G], après trois mois d'interim a été embauchée par la banque CIC LYONNAISE DE BANQUE selon contrat à durée indéterminée, à compter du 1er mai 2001, en qualité de Chargée de clientèle, au statut de Technicien des métiers de la banque, niveau E.

De 2006 à fin 2008, madame [L] a fait l'objet de plusieurs arrêts maladies, de mi-temps thérapeutiques et de mutations à l'agence de [Localité 4], puis à [Localité 5] et enfin en novembre 2008 à la direction du service des saisies de la Banque du CIC.

Au mois de mars 2009, Mme [L] a été désignée déléguée syndicale CGT sur le périmètre du secteur Rhône jusqu'en juin 2010, puis à compter du 15 décembre 2009, elle a été désignée, déléguée du personnel suppléante jusqu'en décembre 2012.

En septembre 2009, elle a été affectée aux fonctions de chargée de service clientèle, à l'agence de [Localité 6], puis elle a été mutée en dernier lieu à l'agence [Localité 7] en novembre 2012 comme conseiller accueil à la direction juridique.

Mme [L] travaillait, en raison d'un mi-temps thérapeutique pour 75,83 heures mensuelles avec un salaire brut de base de 1 052.83 euros.

Mme [L] a été nommée conseiller du salarié, depuis novembre 2012, sur la liste CGT.

Mme [L] et l'Union locale CGT de Villeurbanne ont saisi le conseil de prud'hommes de LYON le 4 juin 2010 en sollicitant un rappel de salaire et des indemnités pour harcèlement moral, discrimination et exécution déloyale.

Le 14 juin 2012, Madame [L] saisissait la formation de référé du conseil de prud'hommes afin d'obtenir la communication de documents intitulés journées comptables pour des périodes de travail de 2001 à 2011.

Par décision du 8 août 2012, le conseil de prud'hommes statuant en référé a fait droit partiellement à sa demande en ordonnant la production de documents pour les années 2008 à 2011 non prescrites.

Par jugement de départage du 20 mai 2014, le conseil de prud'hommes a :

- dit que Mme [L] n'a été victime d'aucun harcèlement moral, ni de discrimination syndicale,

- débouté Mme [L] de ses demandes indemnitaires à ce titre,

- débouté Mme [L] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

- condamné la société CIC à payer à Mme [L] la somme de 1.389,32 euros à titre de rappel de salaires pour heures supplémentaires (pour les années 2008 à 2011), outre la somme de 138,93 euros au titre des congés payés afférents,

- rejeté le surplus de la demande et de toutes autres demandes plus amples ou contraires,

- déclaré recevable l'intervention de l'Union locale CGT,

- débouté l'Union locale CGT de l'intégralité de ses demandes,

Mme [L] a interjeté appel le 27 mai 2014.

L'affaire a été radiée à l'audience du 20 février 2015 puis réinscrite au rôle.

Mme [L] demande à la Cour la réformation du jugement entrepris et statuant à nouveau sur de nouvelles demandes :

- de dire qu'elle a été victime d'agissements caractérisant la discrimination syndicale et le harcèlement moral

subsidiairement,

- de dire qu'elle a été victime d'une violation du principe d'égalité de traitement et d'une exécution déloyale du contrat de travail

à titre principal, avant-dire droit

- ordonner à la société LYONNAISE DE BANQUE (CIC) de lui communiquer la liste des salariés embauchés entre 2000 et 2002 au niveau E, en précisant pour chacun :

- à l'embauche : la qualification, le salaire de base sur 13 mois et la rémunération brute effectivement perçue,

- les évolutions successives de qualification et de classification et la date à laquelle, elles sont intervenues,

- la rémunération de base sur 13 mois et la rémunération annuelle brute effectivement versée pour chaque année depuis 2001,

- tous les bilans sociaux depuis 2001,

- dire que cette condamnation sera assortie d'une astreinte de 150 € par jour de retard et par document courant dans le mois suivant la notification de l'arrêt,

- dire que la cour d'appel se réservera la liquidation de l'astreinte,

- ordonner la réouverture de débats afin qu'il soit statué sur les demandes de rappels de salaire et de dommages et intérêts de madame [L],

subsidiairement,

- condamner la société LYONNAISE DE BANQUE (CIC) à lui payer :

- 20 313.75 € (à parfaire) à titre de rappel de salaire sur la période courant de juin 2005 à la dernière échéance de paie précédant la clôture des débats devant la cour outre congés payés afférents,

- 20 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice matériel et moral,

- ordonner à la société LYONNAISE DE BANQUE (CIC) sous astreinte de 3 000 € par infraction constatée à compter de la notification de l'arrêt :

- de porter à compter de la première échéance de paie suivant la clôture des débats, la rémunération mensuelle de base de madame [L] à une somme ne pouvant être inférieure à 1 325 € bruts pour un emploi à mi-temps.

En tout état de cause, de condamner la société LYONNAISE DE BANQUE (CIC) à lui payer à titre de rappel sur heures complémentaires et supplémentaires :

- pour l'année 2005 : 5 123.88 € outre 512.39 € au titre des congés payés afférents

- pour l'année 2006 : 7 359.53 € outre 735.95 € au titre des congés payés afférents

- pour l'année 2008 : 387.45 € outre 38.75 € au titre des congés payés afférents

- pour l'année 2009 : 241.20 € outre 24.12 € au titre des congés payés afférents

- pour l'année 2010 : 274.56 € outre 27.46 € au titre des congés payés afférents

- pour l'année 2011 : 186.17 € outre 18.62 € au titre des congés payés afférents

outre intérêts au taux légal

- ordonner la remise de bulletins de salaire rectifiés sous astreinte de 150 € par jour de retard

- dit que la cour se réservera la liquidation de l'astreinte

- condamner la société LYONNAISE DE BANQUE (CIC) au paiement de la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

***

Par conclusions régulièrement visées et communiquées, madame [L] fait notamment valoir qu'elle a régulièrement effectué des heures supplémentaires dès 2001, que le CIC, outre un accord implicite, a parfaitement eu connaissance du temps de travail réellement accompli, notamment via les "journées comptables" qu'il a été obligé de verser aux débats en exécution de l'ordonnance de référé, et que le CIC refuse toujours de produire les "journées comptables" de la période non prescrite de 2005 et 2006.

Sur l'exécution déloyale du contrat de travail, elle soutient que le CIC l'a privée de formations, pourtant demandées à plusieurs reprises, qu'elle a été maintenue volontairement à son poste d'origine, le CIC l'empêchant d'évoluer alors qu'elle effectuait des missions de niveaux supérieurs à son niveau E.

Sur la discrimination syndicale, elle excipe que le CIC a entravé l'exercice de ses mandats, que le CIC a bloqué le déroulement de sa carrière en la laissant sur le même poste pendant 13 ans alors que la moyenne sur ce poste est de 5 ans, malgré des évaluations pleinement satisfaisantes, qu'elle a été privée d'augmentation individuelle de salaire depuis octobre 2013 qu'elle n'a pas bénéficié de tickets restaurant ni de jours supplémentaires de repos en raison de son temps partiel, qu'elle n'a plus d'entretien annuel depuis 2005, ni de formation depuis 2009, qu'elle a été mise à l'écart à partir de sa reprise d'activité du 5 novembre 2012.

Sur le harcèlement moral ou le manquement à l'obligation de sécurité de résultat madame [L] fait valoir que de nombreuses promotions lui ont été refusées sans explication, qu'à partir de 2005, une dégradation des conditions de travail apparaît, notamment par son éviction unilatérale de certains dossiers, une multiplication des reproches à son encontre, des mutations successives contre son gré alors que les mutations préalablement sollicitées lui étaient refusées, que ces éléments ont fortement dégradé son état de santé.

Par conclusions régulièrement visées et communiquées, le CIC demande la confirmation du jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné le CIC LYONNAISE DE BANQUE à verser à Madame [L] la somme de 1389,32 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires outre les congés payés.

Le CIC sur les demandes de rappels de salaire, sollicite que les demandes antérieures au 4 juin 2005 soient déclarées prescrites et irrecevables et conclut au débouté du surplus des demandes d'heures supplémentaires sur les autres périodes réclamées (de 2005 à 2011).

En ce qui concerne les heures supplémentaires pour la période de 2008/2011, le CIC rappelle que sur cette période Madame [L] était à mi-temps, conformément aux prescriptions du médecin du travail et travaillait ainsi 17,30 heures hebdomadaires, et que sa demande d'heures complémentaires est infondée, faute de demande expresse ou d'accord implicite de l'employeur. Elle fait valoir par ailleurs que les documents intitulés 'journées comptables ', obtenues par référé ne font état que de l'heure de déconnexion de la session de madame [L] et ne permettent pas de connaître ses heures d'arrivées, ni de pause et sont donc inopérants.

Sur la prétendue exécution déloyale du contrat de travail, la banque relève que le niveau G revendiqué par Madame [L] correspond à un niveau d'embauche après période probatoire pour les titulaires d'un diplôme de niveau bac + 4 auprès de l'institut technique de la banque et que le niveau F correspond au niveau du titulaire d'un diplôme professionnel certifié conseiller patrimonial agence, que Madame [L] n'est que titulaire d'un bac G et n'avait aucune expérience dans les métiers de la banque, qu'elle a tenu strictement des missions d'un chargé du service clientèle et qu'elle ne justifie pas bénéficier du

repositionnement au niveau F ni a fortiori au niveau G .

Le CIC fait valoir que c'est Madame [L] qui ne souhaitait pas évoluer et voulait occuper un poste d'assistante et ce n'est qu'à partir de 2007 que son état de santé va entraîner de longs et nombreux arrêts maladie et qu'ainsi après prise en considération de ses desiderata et des préconisations du médecin du travail, il lui a été proposé des mutations avec des formations.

Le CIC relève que la discrimination syndicale dont fait état Madame [L], n'est justifiée par aucune inégalité de traitement avec des salariés placés dans une situation comparable à la sienne et que la salariée ne justifie pas d'un lien entre cette inégalité de traitement à la connaissance par l'employeur de son activité syndicale, que les problèmes d'imprimante, de badge, d'absence d'évolution professionnelle, d'absence d'augmentation individuelle, de privation des tickets restaurant, de privation des jours de repos supplémentaires, d'absence de formation, d'impossibilité de consulter le registre des délégués du personnel ne sont pas avérées.

En ce qui concerne le prétendu harcèlement moral ou à tout le moins le manquement à l'obligation de résultat, le CIC répond que Madame [L] refusait d'accéder à des demandes de promotion qu'elle ne justifie pas de la dégradation de ses conditions de travail, ni des reproches allégués et que les mutations ne résultent que de ses demandes et des préconisations du médecin du travail.

L'union locale CGT de Villeurbanne qui n'a pas interjeté appel, n'a ni conclu ni comparu.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens des parties, aux conclusions écrites des parties qui ont été soutenues oralement lors de l'audience de plaidoiries.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les heures supplémentaires

Aux termes de l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié'; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

Pour étayer sa demande, le salarié doit produire des éléments factuels suffisamment précis quant au volume de travail effectué en heures supplémentaires pour mettre l'employeur en mesure de répondre en fournissant ses propres éléments.

En l'espèce, madame [L] ayant saisi le conseil de prud'hommes le 4.06.2010, les demandes de rappel de salaires antérieures au 4 juin 2005 sont prescrites.

Sur la période du 5 juin 2005 au 31 décembre 2007, Madame [L] ne justifie par aucun document, de ses heures quotidiennes d'arrivée et de départ et n'énumère nullement les tâches qui auraient justifié les dépassements d'horaire.

Il convient de relever que le CIC LYONNAISE DE BANQUE applique à ses salariés de la catégorie de Madame [L], un horaire collectif de 1575 heures annuelles et qu'il est expressément prévu que les heures supplémentaires doivent faire l'objet d'une validation expresse de la hiérarchie.

Or Madame [L] ne peut justifier d'aucune demande formelle et validée par la hiérarchie d'effectuer des heures supplémentaires.

Elle n'apporte donc aucun commencement de preuve à ses allégations d'avoir travaillé forfaitairement 50 heures par semaine durant cette période.

Sur la période du premier semestre 2008, de septembre 2009 à juillet 2010, et du premier semestre 2011, période pendant laquelle Madame [L] travaillait à mi-temps, et effectuait ainsi 17,30 heures hebdomadaires. Elle était affectée sur des postes de travail aménagés au sein d'unités de travail en sureffectif et se voyait confier une charge de travail allégée, validée par le médecin du travail.

Or Madame [L] ne peut également justifier d'aucune demande formelle et validée par la hiérarchie d'effectuer des heures complémentaires sur cette période.

En outre, les documents intitulés 'les journées comptables', versées aux débats par la salariée, ne font état que de l'heure de déconnexion de la session du poste informatique de Madame [L] et ne permettent pas précisément de connaître ses horaires de travail, en l'absence d'indications de ses heures d'arrivées et de ses temps de pause qui ne sont pas renseignés.

Ces documents sont donc inopérants et ne permettent pas de déterminer le nombre d'heures de travail effectuées par jour par la salariée.

Madame [L] ne justifie donc d'aucun élément factuel suffisamment précis quant au volume de travail effectué sur cette période.

En conséquence, madame [L] n'étayant pas sa demande d'heures supplémentaires sera déboutée de sa demande à ce titre et le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur la demande avant-dire droit de Madame [L] de communication de pièces

Madame [L] a saisi le conseil de prud'hommes le 4 juin 2010, puis elle a saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes le 14 juin 2012 afin d'obtenir la communication de documents intitulés journées comptables pour des périodes de travail de 2001 à 2011 et ce n'est que par conclusions déposées au greffe le 26.12.2016 par son nouveau conseil qu'elle sollicite avant-dire droit que la société LYONNAISE DE BANQUE (CIC) lui communique la liste des salariés embauchés entre 2000 et 2002 au niveau E en précisant pour chacun la rémunération annuelle brute effectivement versée et perçue, les évolutions successives de qualification et de classification et les bilans sociaux depuis 2003 avec la rémunération moyenne des salariés de la même catégorie ou des catégories supérieures et ce, sous astreinte de 150 € par jour de retard et par document.

Cependant, la société LYONNAISE DE BANQUE a versé aux débats la pièce numéro 73 intitulée 'études RH CIC LYONNAISE DE BANQUE' qui fait une étude comparative des salariés embauchés en 2001 avec comparaison d'évolution de leurs salaires en 2015 avec celui de madame [L].

Or d'une part Madame [L], toujours salariée de la société LYONNAISE DE BANQUE (CIC) qui, bien que relevant que 'le panel' retenu par l'entreprise ne soit pas cohérent, ne conteste pas les éléments chiffrés de cette étude, s'appuie même sur celle-ci pour étayer ses demandes.

Par ailleurs, Madame [L] ne saurait invoquer un traitement inégalitaire en se comparant à l'ensemble des salariés du niveau E, fondé sur une moyenne, ce qui ne permet pas d'établir si les salariés auxquels elle se compare se trouvent dans une situation identique à la sienne, notamment en termes d'ancienneté et de qualification.

En outre, les bilans sociaux ne sont pas pertinents en ce qu'ils ne permettent pas de tenir compte des niveaux de rémunération de chacun en fonction de la nature des tâches, des diplômes et n'intègrent pas de façon concrète les évolutions professionnelles de chacun.

En conséquence, madame [G] [L] ne justifie pas du bien fondé de sa demande de communications de pièces avant-dire droit, après plus de 6 ans de procédure.

Elle sera déboutée de sa demande à ce titre.

- Sur la demande principale de discrimination syndicale et de harcèlement moral

-Sur le harcèlement moral

Selon les dispositions de l'article L1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'article L1154-1 du même code dans sa version applicable au présent litige, prévoit qu'en cas de litige, le salarié concerné doit établir des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe alors à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Au sens de ces textes il appartient donc d'abord au salarié d'établir la réalité de faits répétés, qui pris individuellement ou dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral.

Sur les absences d'entretien d'évaluation, de formation, d'évolution professionnelle et salariale

En l'espèce, Madame [G] [L] se plaint qu'elle n'a bénéficié d'aucun entretien d'évaluation bi-annuel entre le mois d'avril 2005 et février 2015, contrairement à la convention collective induisant une absence d'évolution de carrière pendant plus de 15 ans.

Elle fait valoir que le comportement de son employeur a détérioré son état de santé, qu'elle a été placée en poste à temps partiel par le médecin du travail et qu'elle a été arrêtée plusieurs fois pour un syndrome dépressif sévère.

Si effectivement, madame [L] n'a pas bénéficié d'entretiens bi-annuels depuis 2005, il ressort des éléments du dossier que celle-ci a bénéficié d'un grand nombre d'échanges avec la direction des ressources humaines, pour discuter sur sa situation et son évolution professionnelle et cela, en concertation avec le médecin du travail, l'union locale CGT et l'inspection du travail.

Elle a ainsi régulièrement pu faire part au CIC de ses aspirations en termes d'évolution professionnelle et de progression salariale.

Ainsi le CIC justifie que Madame [L] a pu bénéficier en 2005 d'une formation en fiscalité de 5 jours, en 2006 d'une formation de 30 heures sur la maîtrise des outils et méthodes, corrélativement àla modification du système informatique de l'entreprise, puis ultérieurement d'une formation TRACFIN, d'une formation déontologique, en 2015 d'une formation sur la sécurité prévention des incendies et enfin d'une formation relative aux garanties, environnement juridique et secret bancaire.

En outre de 2008 à 2011, madame [L] était absente des formations proposées.

Madame [L] pouvait par ailleurs s'autoformer en fonction des besoins ressentis en utilisant les outils de l'e-learning en libre accès mis en place par le CIC.

Par ailleurs Madame [L] ne justifie d'aucune demande de formation d'adaptation qui n'aurait pas été satisfaite en lien avec ses projets d'évolution professionnelle ou avec son emploi et le poste de Madame [L] n'a pas connu de transformation justifiant son adaptation par une formation spécifique.

Ainsi Madame [L] ne démontre pas que son employeur a commis une violation à l'obligation de formation en l'absence de nécessité d'adaptation de son poste et en l'absence de demande de la salariée.

Quant au défaut d'évolution professionnelle et salariale, il convient de rappeler que Madame [G] [L] a été embauchée le 23 avril 2003 selon un contrat à durée indéterminée dans un premier temps pour un poste de secrétaire à la direction de la gestion privée puis dans un second temps en qualité de « technicien des métiers de la banque » niveau E pour une rémunération brute annuelle de 140'000 F, soit 1 778.58 € environ par mois.

Sa rémunération nette en novembre 2016 alors qu'elle occupait un poste à mi-temps en tant que technicien d'exploitation s'élevait, selon sa fiche de paye, à 1 162.46 euros imposables, soit ramenée à temps plein à environ 2 324.92 € nets par mois.

Ce qui correspond à une augmentation de 30 % en 13 ans.

Dès 2007, Madame [L] faisait valoir qu'elle ne souhaitait pas évoluer vers un poste à vocation commerciale plus rémunérateur, mais préférait au contraire occuper un poste d'assistante.

D'ailleurs, dans son compte rendu d'activité de février 2007 (pièce numéro 59) Madame [L] a clairement indiqué qu'elle avait sciemment opter pour « un poste moins qualifiant ».

Puis à partir de 2007, l'état de santé de Madame [L] va entraîner de longs et nombreux arrêts maladie auxquels ont succédé des périodes de temps partiel médical.

Ainsi le CIC LYONNAISE DE BANQUE a proposé à Madame [L] d'évoluer conformément à ses souhaits en adéquation avec les préconisations du médecin du travail lié à ses difficultés de santé et son travail en se concentrant sur des tâches exclusivement administratives, Madame [L] ne souhaitant pas être affectée à des activités commerciales.

Tous ces éléments ont incontestablement réduit les possibilités d'évolution de Madame [L] qui ne peut le reprocher à son employeur.

En outre, il ressort de l'étude RH (ressources humaines) réalisés par le CIC LYONNAISE DE BANQUE :

- que Madame [L] a été embauchée à un niveau de salaire et de classification supérieurs à ceux dont ont bénéficié des personnes ayant également le bac général, mais avec une certaine expérience,

- que Madame [L] se situe dans la moyenne des rémunérations versées aux salariés de la classe E alors même que ses collègues ont des fonctions commerciales et gèrent des portefeuilles clients,

- qu'enfin, l'évolution salariale annuelle de Madame [L] de 2002 à 2015 est supérieure à l'augmentation moyenne des classes C,D, E, F et G sur la même période.

D'ailleurs interrogé par l'inspection du travail, le CIC a transmis des éléments relatifs au positionnement de Madame [L] au regard de la classification conventionnelle, ce qui n'a pas entraîné de réponse de la DIRRECTE.

Par ailleurs, l'employeur exerce au sein de l'entreprise un pouvoir de direction, lequel comporte un pouvoir d'individualisation des rémunérations l'autorisant à déterminer librement des rémunérations différentes pour tenir compte des compétences respectives de chacun de ses salariés.

Ainsi, outre le fait que la différence de rémunération n'est pas avérée, l'employeur justifie que le maintien de la classification E de madame [L] résulte d'éléments objectifs étrangers à toute discrimination ou harcèlement moral ou rupture d'égalité de traitement ou exécution déloyale du contrat.

Madame [L] a connu plusieurs et longues périodes d'arrêt maladie, le dernier en date courant depuis le 30 juillet 2011, cependant il ressort du certificat médical du docteur [I] [R] du 22 juillet 2011 que si madame [L] attribue la cause de certains troubles (insomnies, anxiété, pleurs, effondrement de son estime, repli social, dépression et burn-out) au harcèlement moral qu'elle soutient subir à son travail, elle développe par ailleurs trois maladies auto-immunes (un diabète, une maladie de Basedow et un érythème noueux migrants récidivant ayant nécessité également plusieurs hospitalisations).

Au vu de tous ces éléments, pris individuellement ou dans leur ensemble, Madame [L] ne démontre pas avoir subi une présomption de différence notable de traitement injustifié.

Elle sera en conséquence déboutée de sa demande de porter sa rémunération mensuelle de base à une somme ne pouvant être inférieure à 1 325 € bruts pour un emploi à mi-temps.

- Sur les mutations refusées et les mutations imposées avec des tâches subalternes

Madame [L] soutient également qu'elle a subi un harcèlement moral en raison des cinq demandes de mutations qui lui ont été refusées et des six mutations qui lui ont été imposées sans être formalisées.

Elle ajoute que lorsqu'elle a été réaffectée au siège en 2012, il lui a été confié des tâches subalternes sans rapport avec celles prévues par sa fiche de poste et sa classification et qu'elle a fait l'objet de reproches injustifiés.

Or il ressort des pièces versées au débat que la demande de mutation en novembre 2006 n'a pu être faite en raison de l'absence de vacance du poste et du fait que madame [L] n'occupait son poste à l'agence République que depuis quelques mois, qu'en 2015 et 2016, elle a fait acte de candidature sur des emplois pour lesquels une autre candidature interne a été retenue par l'employeur (par exemple en 2016 : monsieur [J], 30 ans d'ancienneté et possédant un BP banque, un BTS comptabilité gestion et ayant suivi l'enseignement de l'institut [Établissement 1] au [Établissement 2]) et que les autres candidatures de madame [L] n'ont pas abouti par décision de la direction de ne pas procéder au remplacement de la personne partant en retraite.

En ce qui concerne les mutations effectuées par madame [L], il ressort tant des éléments versés au débat par la salariée que l'employeur que celles-ci ont été faites en fonction des préconisations du médecin du travail et avec l'assentiment de la salariée.

Ainsi il ressort du mail de madame [L] du 27 juillet 2006 qu'elle prend bonne note que le poste proposée d'hôtesse localisé à l'agence République est à pourvoir dès fin août.

Par ailleurs elle a été affectée à la direction juridique en novembre 2012 conformément aux préconisation du médecin du travail sur un poste adapté à son mi-temps thérapeutique, d'autant qu'à cette date elle avait déjà saisi le conseil des prud'hommes.

Enfin, elle ne justifie d'aucun courrier ou intervention manifestant son opposition à ses mutations.

Par ailleurs, madame [L] ne peut se fonder sur les dispositions de la convention collective de la Banque concernant le niveau E pour faire croire à une diminution de ses responsabilités alors même qu'elle n'exerçait pas auparavant de telles responsabilités, n'ayant qu'une expérience d'assistante et ayant manifesté à plusieurs reprises se cantonner à des tâches administratives à l'exclusion de fonction commerciale.

Madame [L] ne démontre pas que son installation au rez-de-chaussée, alors qu'elle était chargée du courrier du service juridique situé au 4ème étage n'a pas été faite dans un souci de rationalisation, relevant du pouvoir de direction de l'employeur.

Enfin les six reproches qu'elle affirme avoir subis de 2003 à 2016 et qui n'ont fait l'objet d'aucune sanction, relèvent du pouvoir de direction de l'employeur et ne peuvent caractériser une situation de harcèlement moral ou de discrimination ou de rupture d'égalité de traitement

En conséquence, au vu de tous ces éléments, Madame [L] n'établit pas la réalité de faits concernant les absences d'entretien d'évaluation, de formation, d'évolution professionnelle et salariale et concernant les mutations refusées et imposées, qui pris individuellement ou dans leur ensemble ne permettent pas de présumer de l'existence d'un harcèlement moral.

C'est donc à juste titre que le juge départiteur a débouté madame [L] de sa demande de harcèlement moral.

- Sur la discrimination syndicale

Aux termes de l'article L 1142 et suivants du code du travail, il est interdit à l'employeur de prendre en considération l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d'avancement, de rémunération et d'octroi d'avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail.

Le principe de non discrimination ne fait pas obstacle aux différences de traitement lorsqu'elles répondent à une exigence professionnelle essentielle et déterminante et pour autant que l'object soit légitime et l'exigence proportionnée;

Ainsi qu'il l'a été démontré ci-dessus, Madame [L] n'a subi aucune différence notable de traitement injustifié qui caractériserait une violation du principe d'égalité de traitement que ce soit en raison de l'absence d'entretiens d'évaluation, de formation et d'évolution professionnelle et salariale et elle ne justifie pas du moindre élément permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral.

Or les griefs d'absence d'entretien d'évaluation et de formation, de stagnation de sa carrière, et de sa rémunération qu'elle formule à l'encontre de son employeur, remontent bien avant 2009, date à laquelle elle a été désignée pour la première fois, déléguée syndicale.

Plus spécifiquement, concernant l'entrave à l'exercice de ses mandats, madame [L] relève que l'employeur ne peut invoquer ses absences dues à son mandat syndical pour arrêter une décision à son encontre et notamment mettre fin à son affectation temporaire au sein du service juridique.

Mais cette décision était motivée par le fait que madame [L] ne parvenait pas à mettre en place un binôme (attestations de [S] [T] et mail du 4.03.09 de celui-ci faisant état du fait qu'elle n'arrivait pas à finir ses 61 dossiers, alors que sa collègue pouvait en traiter normalement 82 par jour).

Madame [L] évoque principalement des difficultés d'accès aux locaux du siège, un problème de papier et de cartouche d'encre de l'imprimante, un problème de tickets restaurant qui ne relèvent que de problèmes de logistiques qui ont été solutionnées par l'employeur.

Le CIC a régularisé rétroactivement les deux jours de repos supplémentaires alloués aux salariés travaillant à temps partiel.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, madame [L] ne démontre pas l'existence supposée d'une discrimination directe ou indirecte et sera donc déboutée de sa demande de dommages et intérêts à ce titre.

- sur la demande subsidiaire de violation du principe d'égalité de traitement et d'une exécution déloyale du contrat de travail

Sur la violation du principe d'égalité de traitement

A moins de justifier de raisons objectives et de considérations d'ordre professionnel, l'employeur doit assurer une égalité de rémunération à tous les salariés placés dans une situation identique.

Or comme il l'a déjà été démontré ci-dessus, Madame [L] n'a subi aucune différence notable de traitement injustifié qui caractériserait une violation du principe d'égalité de traitement que ce soit en raison de l'absence d'entretiens d'évaluation, de formation et d'évolution professionnelle et salariale.

D'ailleurs, après 6 ans de procédure, madame [L] qui travaille toujours dans l'entreprise ne produit aucun commencement de preuve d'élément de comparaison qui permettrait de présumer que ses collègues placés dans une situation identique ont une rémunération supérieure à la sienne.

Sur l'exécution déloyale du contrat de travail

Il appartient en droit à celui qui se prévaut d'une violation des dispositions de l'article L 1222-1 du code du travail et d'une exécution déloyale du contrat de travail de prouver l'existence de manquement fautif de son cocontractant à ses obligations.

Or comme il l'a été également indiqué ci-dessus, madame [G] [L] ne démontre aucun manquement fautif de son employeur.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

L'équité commande d'allouer au CIC LYONNAISE DE BANQUE la somme de 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile

PAR CES MOTIFS

LA COUR

statuant par arrêt réputé contradictoire par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société CIC -LYONNAISE DE BANQUE à payer à madame [G] [L] la somme de 1 389.32 € à titre de rappel de salaires pour heures supplémentaires outre la somme de 138.93 € au titre des congés payés afférents.

Statuant à nouveau,

Déboute madame [G] [L] de sa demande avant-dire droit de production de pièces.

Déboute madame [G] [L] de sa demande de rappel de salaires pour heures supplémentaires.

Déboute madame [G] [L] du surplus de ses demandes.

Confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions.

Y ajoutant,

Condamne madame [G] [L] à payer à la société CIC- LYONNAISE DE BANQUE, la somme de 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne madame [G] [L] aux dépens de l'instance.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

Géraldine BONNEVILLE Elizabeth POLLE SENANEUCH


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 15/01703
Date de la décision : 30/06/2017

Références :

Cour d'appel de Lyon SC, arrêt n°15/01703 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-06-30;15.01703 ?
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