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30/03/2017 | FRANCE | N°16/00206

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 30 mars 2017, 16/00206


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





R.G : 16/00206





[M]



C/

SAS AGNES DECANAUD SPORTS ET LOISIRS







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de prud'hommes - Formation de départage de LYON

du 15 Décembre 2015

RG : F 13/00776











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 30 MARS 2017







APPELANTE :



[V] [M] épouse [F]

née le [Date naissance 1] 195

3 à [Localité 1] (ALGERIE)

[Adresse 1]

[Adresse 1]



représentée par Me Mélanie CHABANOL de la SCP ANTIGONE AVOCATS, avocat au barreau de LYON substituée par Me Elodie CHARLES, avocat au barreau de LYON







INTIMÉE :



SAS A. D. SPORTS ET LOISIRS

[Adresse...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : 16/00206

[M]

C/

SAS AGNES DECANAUD SPORTS ET LOISIRS

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de prud'hommes - Formation de départage de LYON

du 15 Décembre 2015

RG : F 13/00776

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 30 MARS 2017

APPELANTE :

[V] [M] épouse [F]

née le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 1] (ALGERIE)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Mélanie CHABANOL de la SCP ANTIGONE AVOCATS, avocat au barreau de LYON substituée par Me Elodie CHARLES, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

SAS A. D. SPORTS ET LOISIRS

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Olivier DESPLACES, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 02 Février 2017

Présidée par Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Christine SENTIS, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Elizabeth POLLE-SENANEUCH, président

- Marie-Christine DE LA SALLE, conseiller

- Ambroise CATTEAU, Vice-Président placé, faisant fonction de conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 30 Mars 2017 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président et par Carole NOIRARD, Greffier placé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES.

Madame [V] [F] a été embauchée par la société la GRANDE BRADERIE le 2 Juillet 1990. Son contrat a été transféré à la société AD SPORTS ET LOISIRS le 2 Septembre 2002. Son ancienneté a été reprise au 2 Juillet 1990.

Le 5 Mars 2009 Madame [V] [F] a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande de paiement de rappels de salaire après avoir constaté des irrégularités dans le paiement de ses salaires et pour exécution déloyale du contrat de travail.

Par arrêt du 3 Avril 2012, la Cour d'appel de Lyon a réformé le jugement rendu par le conseil de prud'hommes, qui avait fait droit à la demande de la salariée.

Postérieurement à cette décision, la relation de travail s'est poursuivie.

Suite à des faits survenus le 14 Décembre 2012, l'employeur a convoqué la salarié à un entretien préalable à son licenciement, fixé au 28 Décembre 2012.

A compter du 14 Décembre 2012, Madame [V] [F] a été mise en arrêt de travail pendant une durée de 18 jours. Suite à cet arrêt de travail, elle n'a jamais repris son activité.

Mme [F] a estimé que l'incident survenu le 14 décembre 2012 entre elle et Monsieur [N], son supérieur hiérarchique constituait un accident du travail, ce que ce dernier a contesté. Elle a sollicité la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE et déposé plainte.

Le 10 Janvier 2013, la salariée a fait l'objet d'une mise à pied disciplinaire d'une durée de trois jours, motif pris de son insubordination en date du 14 décembre 2012.

Le 21 Février 2013 Madame [V] [F] a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur.

Le 25 Mars 2013, la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE a notifié à Madame [V] [F] son refus de prise en charge de l'incident du 14 décembre 2012 au titre de la législation professionnelle. Elle a fait un recours contre cette décision le 22 Mai 2013.

Le 22 Août 2014 le médecin du travail a rendu un avis d'inaptitude totale sans proposition de reclassement dans l'établissement.

Le 3 Septembre 2014 Madame [V] [F] a été convoquée à un entretien préalable à son éventuel de son licenciement, fixé au 13 Septembre 2014.

Madame [V] [F] a formé un recours contre l'avis d'inaptitude, qui a fait l'objet d'un rejet implicite.

Madame [V] [F] a été licencié pour inaptitude le 9 Février 2015.

Par jugement du 15 Décembre 2015, le conseil de prud'hommes de Lyon, présidé par le juge départiteur, a :

- débouté Madame [V] [F] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de son employeur ainsi que ses demandes financières subséquentes, de sa demande de rappel de salaires sur compléments salariaux sur prévoyance,de sa demande indemnitaire pour exécution fautive du contrat de travail, de ses demandes d'annulation de la mise à pied conservatoire du 9 Janvier 2013 ainsi qu'au titre du rappel de salaire correspondant,

- débouté la société AD SPORTS ET LOISIRS de sa demande indemnitaire pour procédure abusive

- rejeté les demandes d'indemnité de procédure

- condamné Madame [V] [F] aux dépens de l'instance

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire sur les dispositions du jugement n'en étant pas assorties de plein droit.

Madame [V] [F] a régulièrement interjeté appel du jugement déféré le 11 Janvier 2016.

Dans ses conclusions régulièrement visées, communiquées et reprises oralement lors de l'audience, Madame [V] [F] demande à la Cour de :

- Infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Lyon le 15 Décembre 2015

En conséquence,

- Prononcer l'annulation de la sanction disciplinaire notifiée le 10 Janvier 2013

- Dire et juger que l'employeur a manqué à l'obligation d'exécuter loyalement ses obligations à compter du 3 Avril 2012,

- Dire et juger bien fondé la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame [F] aux torts de la société AD SPORTS ET LOISIRS et sans effet le licenciement notifié le 9 Février 2015

- Dire et juger que la date de la rupture est fixée à la date d'envoi de la lettre de licenciement ultérieure

- Dire et juger que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause et réelle et sérieuse

A titre subsidiaire,

- Dire et juger que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement et que le licenciement notifié le 9 Février 2015, postérieurement au jugement déféré, est dépourvu de cause réelle et sérieuse

- Condamner en toute hypothèse la société AD SPORTS ET LOISIRS à payer à Madame [F] diverses sommes au titre des indemnités de rupture.

- Condamner la société AD SPORTS ET LOISIRS à payer la somme de 3000€ en application de l'article 700 du code du procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Dans ses conclusions régulièrement visées, communiquées et reprises oralement lors de l'audience, la société AD SPORTS ET LOISIRS, demande à la Cour :

- A titre principal, de confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle de la société AD SPORTS ET LOISIRS

- Dire et juger que les demandes principales et subsidiaires formées par Madame [F] ne sont ni fondées, ni justifiées

En conséquence,

- Débouter Madame [F] de l'ensemble de ses chefs de demande tant dans leur principe que dans leur quantum,

En statuant à nouveau,

- Constater l'existence d'un abus manifeste dans l'action judiciaire engagée

- Condamner Madame [F] à payer à la société AD SPORTS ET LOISIRS la somme de 10000€ à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- Le cas échéant, ordonner la compensation judiciaire entre la créance de la défenderesse et toute somme qui pourrait être due par cette dernière à Madame [F],

En toutes hypothèses,

- Condamner Madame [F] à payer à la société AD SPORTS ET LOISIRS la somme de 3000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner Madame [F] aux éventuels dépens.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont soutenues oralement lors de l'audience.

MOTIVATION.

Sur la demande de résiliation judiciaire aux torts de l'employeur.

Mme [F] soutient que cette demande est justifiée par les éléments suivants :

- l'exécution déloyale du contrat de travail du 3 Avril jusqu'à l'agression: la salariée souligne que les agissements de l'employeur n'ont pas changé à son égard, et ce en dépit de la condamnation pour exécution déloyale du contrat de travail.

Jusqu'à l'agression physique survenue le 14 Décembre 2012, l'inexécution déloyale du contrat de travail s'est manifestée par des sanctions prononcées à tort contre la salariée.

- Les violences physiques du 14 Décembre 2012: la salarié soutient qu'elle a été victime de violence physique de la part de Monsieur [N], son supérieur hiérarchique. Cette violence lui a occasionné des lésions physiques et morales. Ensuite, elle soutient que les attestations versées aux débats sont de nature à étayer la réalité des agissements subis .

- Sur la déloyauté de l'employeur suivant l'agression jusqu'au licenciement, la salariée soutient qu'il s'est manifesté par un versement tardif des salaires après son inaptitude du 22 Août 2014 et par son licenciement qui est intervenu tardivement par rapport à la date d'engagement de la procédure de licenciement, d'autant plus que la société a intenté un recours purement dilatoire à l'encontre de son avis inaptitude, ce qui a eu comme effet de retarder le licenciement.

L'employeur soutient que les faits invoqués au titre de l'exécution déloyale par la salariée sont antérieurs à la première procédure. Or en vertu de la règle de l'unicité de l'instance cette argumentation ne peut prospérer.

Ensuite, la société soutient que Madame [F] ne rapporte pas la preuve de l'inexécution déloyale du contrat par l'employeur.

Sur les faits du 14 Décembre 2012 et la prétendue «'agression'» dont Madame [F] aurait été victime, la société soutient que les dires de celle-ci ne sont pas corroborés par des témoins ayant assisté à la scène.

Par une série de témoignages de salariés de l'entreprise, la société soutient que la salariée s'est rendue coupable d'insubordination d'une part, et que les faits relatés par cette dernière ne sont pas avérés, d'autre part .

Elle ajoute qu'il a été médicalement constaté que la salariée ne présentait aucune lésion. Ensuite, la société soutient que l'avis d'arrêt de travail établi était fallacieux.

En l'espèce, il incombe au salarié, qui demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail, d'apporter la preuve de manquements suffisants graves commis par son employeur rendant impossible la poursuite de la relation contractuelle.

Lorsqu'un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement pour d'autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat était justifiée. C'est seulement dans le cas contraire qu'il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur.

Lorsque le salarié n'est plus au service de son employeur au jour où il est statué sur la demande de résiliation judiciaire, cette dernière prend effet, si le juge la prononce, au jour du licenciement.

Mme [F] prétend que, depuis l'arrêt du 3 avril 2012, l'employeur a multiplié les sanctions injustifiées à son égard d'une part, et l'a privé d'autre part du paiement de deux demi-heures travaillées ainsi que de diverses heures dues au titre de la rémunération.

Force est cependant de constater qu'elle n'apporte aucun élément permettant de mettre en évidence les manquements graves qu'aurait commis son employeur à son encontre, de nature à justifier la résiliation judiciaire à ses torts et ce pour la période allant de l'arrêt du 3 avril 2012 au 14 décembre 2012 .

Concernant les faits du 14 décembre 2012, Mme [F] indique qu'elle a été agressée verbalement et physiquement par Monsieur [N], le responsable du magasin, qui l'aurait lors d'un briefing, bousculé sans raison et attrapée par le bras, la secouant violemment et la menaçant d'un avertissement et d'un licenciement.

Elle produit un certificat médical du 14 décembre 2012 faisant état d'un traumatisme dos et épaule et d'une échographie du 17 décembre faisant état d'une douleur à l'épaule droite, sans objectiver toutefois une lésion.

Suite à la plainte de Mme [F] à l'encontre de Monsieur [N], ce dernier a été entendu et a confirmé qu'une altercation avait eu lieu le 14 décembre 2012 entre lui et la salariée, celle-ci refusant, comme l'ordre lui en avait été donné, de faire du rangement dans les rayons, puis refusant également de suivre le responsable dans son bureau. Monsieur [N] indiquait alors qu'il avait fait barrage à Mme [F] pour l'empêcher de repartir dans le magasin en positionnant sa main sur son bras droit.

Les attestations produites par Mme [F] ne permettent pas à la Cour d'être plus éclairé sur le traumatisme de l'épaule qu'elle impute au geste de Monsieur [N],

En revanche, les attestations produites par la société AD SPORTS ET LOISIRS tendent à démontrer que le jour des faits, Mme [F] avait refusé de suivre les consignes de son supérieur hiérarchique, le témoin [D] indiquant que ce n'était pas la première fois qu'elle avait ce comportement d'opposition.

Dans le cadre de la procédure d'inaptitude, il n'apparaît pas plus que le comportement déloyal que Mme [F] allègue soit démontré: ainsi, elle ne justifie pas d'un retard pris dans le versement du salaire après la procédure d'inaptitude ni d'un retard dilatoire à la mise en 'uvre de la mesure de licenciement.

Ainsi, il est démontré que dès que l'avis définitif d'inaptitude a été rendu par le médecin du travail le 7 juillet 2014, l'employeur a convoqué Mme [F] en vue de son licenciement pour le 13 septembre 2014, une recherche de reclassement étant au parallèle menée.

Elle ne peut toutefois reprocher à l'employeur d'avoir exercé une voie de recours à l'encontre de l'avis d'inaptitude, alors qu'elle a elle-même exercé diverses voies de recours notamment aux fins de voir qualifier, en vain, les faits du 14 décembre 2012, d'accident du travail. Du reste, faute de réponse de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE, la contestation concernant l'avis d'inaptitude était réputée rejetée à la date du 13 décembre 2014 et le 9 février 2015, la société AD SPORTS ET LOISIRS notifiait à Mme [F] son licenciement pour inaptitude définitivement constatée par le médecin du travail avec impossibilité de reclassement.

Ainsi, Mme [F] qui ne démontre pas l'existence de manquements graves commis par son employeur à son égard, doit être déboutée de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail par confirmation du jugement entrepris ainsi que des demandes indemnitaires liées à la résiliation et de celles liées à l'exécution déloyale du contrat par l'employeur.

Sur le licenciement .

A titre subsidiaire, sur l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement notifié le 9 Février 2015, la salariée fait valoir que la demande est justifiée car l'inaptitude est imputable aux agissements de l'employeur, et que ce dernier a manqué à son obligation de reclassement puisqu'il n'a pas cherché à la reclasser ni à opérer un aménagement de poste à ce titre.

Sur l'annulation de la mise à pied du 10 Janvier 2013, la salariée estime que cette sanction n'est pas motivée, puisque les faits reprochés ne sont pas avérés, et ils ne sont pas étayés par l'employeur.

L'employeur soutient au contraire que l'origine du licenciement ne peut être lui imputable puisque qu'il n'est pas démontré qu'il a eu des agissements de nature à dégrader les conditions de travail de la salariée.

Ensuite, la société estime qu'elle n'a pas manqué à son obligation de reclassement, puisqu'elle a été dans l'impossibilité de reclasser la salariée dans l'établissement et qu'elle a fait une recherche en questionnant le médecin du travail, mais n'a obtenu aucune réponse de sa part.

En l'espèce, il apparaît établi d'abord que la mise à pied prononcée concernant Mme [F] le 10 janvier 2013, pour une durée de trois jours était justifiée par l'insubordination dont la réalité est établie par l'employeur, alors que les violences physiques que lui imputait la salariée ne sont pas démontrées.

La décision entreprise sera donc confirmée sur ce point et la demande de rappel de salaire rejetée.

Ensuite, il n'apparaît pas établi par la salariée que l'inaptitude médicalement constatée, ayant motivé son licenciement, et qui résidait dans un syndrome anxio-dépressif, trouve sa source dans l'attitude violente et provocatrice de l'employeur, cette violence physique et verbale n'étant pas démontrée.

Il existait un climat tendu entre les parties depuis le litige initié par Mme [F] en 2009 et qui s'est achevé par l'arrêt du 3 avril 2012, climat qui peut être à l'origine du syndrome anxio-dépressif dont souffrait Mme [F], alors qu'elle ne démontre pas l'attitude violente qu'elle impute à son employeur et particulièrement, à Monsieur [N] son supérieur hiérarchique.

Du reste, en avril 2013, lors d'un examen pratiqué par le médecin du travail, celui-ci évoquait le syndrome anxio-dépressif lié, d'après les déclarations de Mme [F], à un conflit avec son directeur de magasin depuis 3 ans et indiquait par ailleurs qu'elle présentait une tendinopathie du supra-épineux droit, une maladie de Crohn évolutive.

L'ensemble de ces éléments ne permet pas en conséquence d'imputer l'inaptitude médicalement constatée à l'attitude de l'employeur.

Sur l'obligation de reclassement, il convient de rappeler qu'en application des dispositions de l'article L 1226-2 du code du travail, il appartient à l'employeur, après que le salarié a été déclaré inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, de proposer à ce dernier un autre emploi approprié à ses capacités, en prenant en compte les conclusions du médecin du travail et les indications formulées, et en proposant un emploi aussi comparable que possible à celui précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagements du temps de travail.

Les recherches aux fins de reclassement doivent être sérieuses, loyales et personnalisées, et s'effectuer au sein de l'entreprise mais aussi du groupe auquel elle appartient parmi les entreprises entre lesquelles une permutation en tout ou partie du personnel est possible.

En l'espèce, le médecin du travail a exclu que Mme [F] soit reclassée dans le même magasin, ce qui rendait impossible une adaptation du poste.

Toutefois, concernant les recherches de reclassement, la société AD TRANSPORTS ET LOISIRS ne fait état d'aucune recherche sérieuse au sein du groupe et ne peut s'exonérer en prétendant simplement que le médecin du travail ne lui a pas répondu, de sorte que le licenciement intervenu se trouve dépourvu de cause réelle et sérieuse.

En vertu de la convention collective applicable, Mme [F] doit donc se voir payer une indemnité compensatrice de préavis de 2 mois soit 3318,18 euros outre 331,81 euros au titre des congés payés afférents.

En effet, si le salarié ne peut en principe prétendre au paiement d'une indemnité pour un préavis qu'il est dans l'impossibilité physique d'exécuter en raison d'une inaptitude à son emploi, cette indemnité est due au salarié dont le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement.

Aux termes de l'article L.1235-3 du code du travail, si un licenciement intervient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse et qu'il n'y a pas réintégration du salarié dans l'entreprise, il est octroyé au salarié à la charge de l'employeur une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à Mme [F] ( 1650 euros) de son âge (62 ans) de son ancienneté (25 ans) de sa capacité réduite à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu de lui allouer, en application de l'article L.1235-3 du code du travail, une somme de 40 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la demande reconventionnelle de la société AD SPORTS ET LOISIRS pour procédure abusive .

La société soutient à ce titre que l'abus réside dans l'invention de faits de nature à nuire à l'employeur.

Il n'apparaît toutefois pas établi que la présentation des faits par Mme [F], au regard de l'intensité du conflit entre les parties, ait été faite abusivement en justice et dans l'intention de nuire à la société AD LOISIRS ET TRANSPORTS, de sorte que celle-ci sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser aux parties la charge de leurs frais non recouvrables.

Il convient par ailleurs, par réformation de la décision entreprise et y ajoutant, de dire que chacune des parties conservera la charge de ses dépens.

PAR CES MOTIFS.

LA COUR,

Statuant publiquement par décision contradictoire, après en avoir délibéré,

CONFIRME la décision déférée en toutes ses dispositions, à l'exception de celle sur les dépens,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

DIT que le licenciement notifié à Mme [V] [M] épouse [F] pour inaptitude médicalement constatée est sans cause réelle et sérieuse pour manquement à l'obligation de reclassement,

CONDAMNE la société AD SPORTS ET LOISIRS à payer à Mme [V] [M] épouse [F] les sommes suivantes, avec intérêts légaux à compter de l'arrêt :

3318,18 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 331,81 euros au titre des congés payés afférents,

40 000 euros à titre de dommages et intérêts,

LAISSE à chacune des parties la charge de leurs dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRELa PRESIDENTE

Carole NOIRARDElizabeth POLLE-SENANEUCH


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 16/00206
Date de la décision : 30/03/2017

Références :

Cour d'appel de Lyon SC, arrêt n°16/00206 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-03-30;16.00206 ?
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