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12/01/2017 | FRANCE | N°15/00868

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 12 janvier 2017, 15/00868


R.G : 15/00868









Décision du tribunal de commerce de Lyon

Au fond du 19 janvier 2015



RG : 2013J1828

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRET DU 12 Janvier 2017







APPELANTES :



SA Compagnie INDUSTRIELLE D'APPLICATIONS THERMIQUES (CIAT)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET,

avocat au barreau de LYON

assistée de la SAS DE GAULLE FLEURANCE & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS





SA EASYTHERM

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]



représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUV...

R.G : 15/00868

Décision du tribunal de commerce de Lyon

Au fond du 19 janvier 2015

RG : 2013J1828

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 12 Janvier 2017

APPELANTES :

SA Compagnie INDUSTRIELLE D'APPLICATIONS THERMIQUES (CIAT)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON

assistée de la SAS DE GAULLE FLEURANCE & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

SA EASYTHERM

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON

assistée de la SAS DE GAULLE FLEURANCE & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

Société civile MATHIAS & Co

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par la SELARL LEVY ROCHE SARDA, avocat au barreau de LYON

assistée de la SELARL S.E.F.J., avocat au barreau de PARIS

INTERVENANT :

[F] [Q]

né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 1]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représenté par la SELARL LEVY ROCHE SARDA, avocat au barreau de LYON

assisté de la SELARL S.E.F.J., avocat au barreau de PARIS

******

Date de clôture de l'instruction : 09 février 2016

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 19 octobre 2016

Date de mise à disposition : 8 décembre 2016, prorogée au 15 décembre 2016, puis au 12 janvier 2017, les avocats dûment avisés conformément à l'article 450 dernier alinéa du code de procédure

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Jean-Louis BERNAUD, président

- Françoise CLEMENT, conseiller

- Vincent NICOLAS, conseiller

assistés pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier

A l'audience, Vincent NICOLAS a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Signé par Jean-Louis BERNAUD, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

La société anonyme EASYTHERM a pour activité la conception et la commercialisation de pompes à chaleur.

Elle a été créée en 2002 par [F] [Q]. Au début de l'année 2010, la société CIAT a pris le contrôle de la société EASYTHERM, en détenant environ 70 % de son capital social, le reste des actions étant détenu par la famille [Q] (environ 20 %)et d'autres actionnaires.

Par acte sous seing privé du 12 janvier 2010, un pacte d'actionnaire a été conclu pour une durée de 7 années renouvelable ,en présence de la société EASYTHERM, entre d'une part la société CIAT et la société SOFIMO (dont le capital social est détenu à 100 % par la société CIAT), désignés dans l'acte comme les actionnaires majoritaires, et d'autre part [F] [Q], son frère [L] [Q], désignés actionnaires minoritaires 1 et [M] [Q], désigné actionnaire minoritaire 2.

L'article 5 du pacte stipule que les actionnaires s'engagent irrévocablement pendant une durée prenant effet à la date de la signature du pacte et expirant le 30 juin 2013, à conserver en pleine propriété l'intégralité des valeurs mobilières de la société civile qu'ils détiennent à cette même date et/ou qu'ils viendraient à détenir.

L'article 8.1 du pacte stipule que par dérogation expresse aux dispositions de l'article 5, en cas de cessation du mandat social d'un actionnaire minoritaire 1, pour quelque cause que ce soit, et à quelque moment que ce soit pendant la durée du pacte, l'actionnaire minoritaire concerné s'engage irrévocablement à vendre la totalité des valeurs mobilières qu'il détient à cette date de départ, au profit de la société CIAT, qui, sous la même condition, s'engage irrévocablement à les acquérir.

L'article 8.2.1 fixe les modalités de fixation du prix des valeurs mobilières, en distinguant deux situation : la première, intitulée 'bad leaver' correspond à a celle de l'actionnaire minoritaire cessant ses fonctions avant le 30 juin 2013, à la suite notamment de sa révocation, ou de sa démission. Le prix dans ce cas était fixé selon la formule suivante : P= 72,5% x(EBITDA x 6 - dette financière nette) x participation.

La seconde situation, intitulée 'good lever', envisagée par l'article 8.2.2, correspond au départ d'un actionnaire minoritaire 1 pour un autre motif que ceux prévu par l'article 8.2.1, la formule de calcul du prix étant alors la suivante : P = (EBITDA x 6 - dette financière nette) x participation.

L'article 8.2.4 stipule qu'en cas de désaccord entre les parties sur le prix, celui-ci sera déterminé en application de l'article 14.3.

Cet article est rédigé comme suit : 'toute contestation, quel qu'en soit le contexte, portant sur le prix par valeurs mobilière ... devra être notifiée à tous les actionnaires, au cessionnaire désigné comme tel dans un projet de transfert, et à la société EASYTHERM, au plus tard dans les 8 jours (...) de la réalisation de la condition prévue à l'article 8 (...). Les parties concernées, à défaut d'accord amiable dans un délai de 8 jours à compter de la notification de la contestation, devront soumettre leur différend à un expert (...) désigné d'un commun accord, ou à défaut d'accord sur le choix de l'expert, à un cabinet d'expertise comptable (...) désigné par le président du tribunal de commerce de Lyon statuant en référé.'

La société civile MATHIAS & CO (qui a pour gérant [F] [Q]) est venue aux droits de celui-ci dans les actions qu'il détenait dans le capital de la société EASYTHERM, suite à un apport en nature effectué le 28 juillet 2010.

[F] [Q] était membre et président du directoire de la société EASYTHERM, son mandat devant expirer le 29 avril 2013.

Par lettre du 26 avril 2013, et suite à un différend l'opposant au président de la société CIAT sur les orientations stratégiques de la société EASYTHERM, [F] [Q] lui a fait savoir qu'il ne demanderait pas le renouvellement de son mandat de membre et président du directoire, et qu'il quitterait en conséquence ses fonctions à la date du 29 avril 2013.

Il a effectivement quitté ses fonctions à cette date.

Puis par lettre du 7 mai 2013, et application de l'article 8.1.1 du pacte, la société MATHIAS & CO a demandé à la société CIAT, en contrepartie de la cession de ses actions à cette dernière, de lui verser la somme de 359.390 € correspondant à leur prix, calculé selon la formule correspondant à la situation 'good lever'.

Face au refus de la société CIAT, et après une mise en demeure restée infructueuse, la société MATHIAS & CO a fait assigner devant le tribunal de commerce de Lyon la société CIAT et la société EASYTHERM en lui demandant de constater que la vente de ses titres à la société CIAT est parfaite depuis le 29 avril 2013, et de condamner en conséquence cette dernière à lui payer la somme de 359.390 €.

Par acte d'huissier du 13 novembre 2013, les sociétés CIAT et EASYTHERM ont fait assigner [F] [Q] en intervention forcée devant le tribunal de commerce en demandant qu'il soit condamné à leur payer des dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par son départ. En réplique à cette demande, [F] [Q] a soulevé l'exception d'incompétence du tribunal de commerce de Lyon au profit du tribunal de commerce d'Avignon.

Le tribunal de commerce de Lyon a rendu un premier jugement en date du 19 janvier 2015, par lequel il a fait droit à l'exception d'incompétence de [F] [Q], en se déclarant incompétent au profit du tribunal de grande instance d'Avignon, jugement confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Lyon en date du 25 juin 2015.

Par un autre jugement du même jour, statuant sur les demandes de la société MATHIAS & CO dans le litige qui l'oppose aux sociétés CIAT et EASYTHERM, il a, avec exécution provisoire :

- déclaré irrecevable les demandes formées contre [F] [Q] ;

- condamné la société CIAT à payer à la société MATHIAS & CO la somme de 359.390 € au titre du prix de vente des titres, outre les intérêts au taux légal à compter du 30 mai 2013 ;

- condamné aussi la société EASYTHERM à inscrire le transfert des titres ainsi cédés au compte titre de l'acheteur la société CIAT, sans délai, à compter de la signification du jugement, sous peine d'une astreinte de 100 € par jour de retard ;

- condamné in solidum la société CIAT et la société EASYTHERM à payer à la société MATHIAS & CO la somme de 10.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration transmise au greffe le 30 janvier 2015, la société CIAT et la société EASYTHERM ont interjeté appel de cette décision, appel dirigé contre la société MATHIAS & CO.

Elles ont également demandé au premier président de la dite cour l'arrêt de l'exécution provisoire attaché au jugement frappé d'appel, et par ordonnance du 2 mars 2015, le premier président a ordonné l'arrêt de l'exécution forcée du seul chef de la cession forcée et des transcription ordonnées, et autorisé la société CIAT à consigner la somme de 359.390 € entre les mains de la caisse des dépôts et consignations.

Par conclusions déposées et notifiées le 1er juillet 2015, [F] [Q] est intervenu volontairement à l'instance d'appel.

Par ordonnance du 1er décembre 2015, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions d'intimée de la société MATHIAS & CO pour cause de tardiveté. Il a aussi déclaré irrecevable la demande des sociétés CIAT et EASYTHERM tendant au prononcé de l'irrecevabilité des conclusions d'intervention volontaire de [F] [Q].

Vu les conclusions du 6 janvier 2016 de la société CIAT et de la société EASYTHERM, déposées et notifiées, par lesquelles elles demandent à la cour de :

- déclarer irrecevables les conclusions d'intervention volontaire de [F] [Q] ;

- en tout état de cause, le débouter de ses demandes ;

- infirmer le jugement du tribunal de commerce ;

- dire que la société CIAT ne doit aucune somme à la société [F] [Q], dès lors qu'aucun prix de cession n'a été fixé et qu'au surplus, cette société a effectué ses calculs sur des bases contraires au pacte d'actionnaire et aux comptes réels de la société EASYTHERM ;

-ordonner le versement au profit de la société CIAT des sommes consignées à la caisse des dépôts ;

- condamner la société MATHIAS & CO à leur payer, à chacune, la somme de 30.000 €.

Vu les conclusions du 7 janvier 2016 de [F] [Q], déposées et notifiées, par lesquelles il demande à la cour de :

- déclarer recevable son intervention volontaire ;

- dire qu'il n'a pas démissionné de son mandant de membre du directoire, lequel est arrivé à son terme ;

- rejeter les moyens et prétentions des sociétés CIAT et EASYTHERM ;

- confirmer le jugement du 19 mars 2015 en toutes ses dispositions ;

- condamner in solidum la société CIAT et la société EASYTHERM à lui payer 50.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 9 février 2016.

SUR QUOI, LA COUR :

Sur la recevabilité de l'intervention en cause d'appel de [F] [Q] :

Attendu que ce dernier soutient, en invoquant les dispositions des articles 328, 329 et 554 du code de procédure civile, que son intervention est recevable, motifs pris de ce qu'il est associé et gérant de la société MATHIAS & CO et qu'il n'a commis aucune fraude à la loi, les conclusions d'intervention volontaire n'étant pas régies par l'article 909 du code de procédure civile ;

Attendu que pour conclure à l'irrecevabilité de cette intervention, la société CIAT fait valoir que :

1. aux termes de son arrêt du 25 juin 2015, la cour d'appel de Lyon a confirmé le jugement du tribunal de commerce de Lyon en date du 19 janvier 2015 qui a rejeté sa demande tendant à son intervention forcée ; il est donc étranger à la cause et n'a pas qualité à agir en l'espèce ;

2. son intervention volontaire en cause d'appel a pour seul objet de contourner l'irrecevabilité des conclusions de la société MATHIAS & CO, prononcée par le conseiller de la mise en état ; ce stratagème, dont le but est d'échapper à l'application des dispositions de l'article 909 du code de procédure civile, est constitutif d'une fraude à la loi ;

Attendu cependant que si [F] [Q], du fait de l'apport en nature de ses titres à la société MATHIAS & CO, n'est plus actionnaire de la société EASYTHERM, ni partie au pacte d'actionnaires, il a intérêt, en sa qualité d'associé de la société MATHIAS & CO, à ce que le prix de cession des titres soit déterminé comme celle-ci l'a fixé dans sa lettre du 7 mai 2013 et conformément aux dispositions de l'article 8.2.2 du pacte ; que son intérêt est distinct de celui de cette société et se rattache à ses prétentions par un lien suffisant ; qu'aucune fraude à la loi ne peut être retenue, nonobstant l'irrecevabilité des conclusions de la société MATHIAS & CO, dès lors que [F] [Q] poursuit un intérêt qui lui est propre ; qu'il y a lieu dans ces conditions de déclarer son intervention recevable ;

Sur les demandes de la société CIAT et EASYTHERM tendant à la réformation du jugement du tribunal de commerce pour non-respect du principe du contradictoire :

Attendu que les sociétés CIAT et EASYTHERM, en invoquant les dispositions de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, et l'article 16 du code de procédure civile, soutiennent que le tribunal de commerce a statué sur le fond de l'affaire sans entendre préalablement les parties, et sans qu'elles aient pu produire leurs arguments et pièces ;

Attendu cependant que le tribunal énonce dans son jugement qu'il a délibéré 'après que les parties en aient débattu dans les conditions prévues au calendrier de procédure convenu entre elles' ; que ces constatations font foi jusqu'à inscription de faux ; qu'il y a lieu d'en déduire que les sociétés CIAT et EASYTHERM ont été mises en mesure à l'audience du tribunal de commerce de reprendre oralement leurs conclusions écrites et que par suite le jugement, dont la nullité au demeurant n'est pas demandée, ne peut être réformé pour un motif tiré du non-respect du principe du contradictoire ;

Sur la détermination du prix de cession des actions de la société MATHIAS & CO :

a) sur la possibilité pour la société CIAT de contester le prix de cession :

Attendu que pour justifier de son droit de contester un tel prix, la société CIAT soutient qu'il ne peut lui être fait grief de ne pas avoir respecté les dispositions de l'article 14.3 du pacte d'actionnaires et qu'en tout état de cause, ce pacte ne prévoit aucune déchéance en cas de non contestation du prix dans le délai de 8 jours ;

Attendu que [F] [Q] prétend que la société CIAT est irrecevable à contester ce prix, motifs pris de ce que :

1. l'article 14.3 du pacte d'actionnaires dispose qu'une telle contestation doit être, quel qu'en soit le contexte, notifiée au plus tard dans les huit jours ; le délai de contestation du prix étant ainsi enfermé contractuellement, le cessionnaire est irrecevable à contester tardivement le prix qui lui est dénoncé ; le délai de 8 jours a couru à compter du 29 avril 2013, date du non-renouvellement de son mandat ; le prix demandé était connu par la société CIAT depuis au moins le 7 mai 2013 et elle a contesté ce prix seulement le 28 juin suivant ; que cette contestation est donc irrecevable dès lors qu'elle est postérieure de plus de 8 jours à la demande de paiement du prix, et qu'elle pas été notifiée dans le même délai à tous les destinataires visés par l'article 14-3 ;

2. par une note du 5 mars 2013, la société CIAT a proposé, sur la base de ses propres chiffres, de déterminer le prix des titres de la société MATHIAS & CO en vue de leur cession; lorsque la société MATHIAS & CO, lui a demandé, sur les mêmes bases chiffrées, le paiement des titres qui lui avait été cédés en raison de la survenance de la condition prévue par l'article 8.1.1 du pacte, elle a contesté le prix de cession en invoquant pour la première fois le 28 juin 2013 une correction des comptes par la nouvelle direction ; qu'ainsi, les moyens de la société CIAT qui contredisent la fixation du prix, telle qu'effectuée par elle dans sa note du 5 mars 2013, sont irrecevables, par application du principe interdisant la contradiction au détriment d'autrui ;

Attendu cependant qu'il s'évince de l'article 14.3 du pacte d'actionnaire que l'obligation de notifier toute contestation, dans les huit jours de la réalisation de la condition prévue à l'article 8 (cessation du mandat social d'un actionnaire minoritaire 1 pendant la durée du pacte) ne pesait pas spécialement sur la société CIAT en sa qualité de cessionnaire, mais sur toute partie concernée par le transfert de titres ; que cette notification n'ayant pas été faite, les délais imposés par l'article 14.3 pour la désignation d'un expert n'ont pu courir ; qu'en outre, la société MATHIAS & CO ayant fait connaître à la société CIAT le montant du prix de cession de ses titres seulement par lettre du 7 mai 2013, alors que le délai de huit jours pour notifier les contestations avait expiré la veille, elle est mal fondée à lui reprocher d'avoir tardé à contester ce prix ; que les conditions d'application de l'article 14-3 n'étant donc pas réunies, la société MATHIAS & CO ne peut invoquer une fin de non recevoir tirée du non-respect de la procédure prévue par cet article ;

Attendu ensuite que la société CIAT n'a pas, dans de précédentes conclusions, soutenu que le prix de cession devait être calculé sur la base des chiffres figurant dans sa note du 5 mars 2013 ; qu'ainsi est recevable son moyen tiré de la détermination du prix de cession sur la base des comptes 2012 approuvés le 28 juin 2013 par l'assemblée générale des actionnaires, et certifiés par les commissaires aux comptes, dès lors qu'il n'est pas incompatible avec sa position adoptée devant les premiers juges ;

b) sur l'application des articles 8.2.1 ou 8.2.2 du pacte d'actionnaires pour la détermination du prix de cession :

Attendu que la société CIAT soutient que

- si le tribunal ne reçoit pas des parties le pouvoir de nommer l'expert, il n'en dispose pas et peut seulement constater la nullité de la cession ;

- la société MATHIAS & CO n'ayant pas sollicité la désignation d'un expert par le président du tribunal de commerce, au mépris des dispositions de l'article 14.3, le tribunal de commerce ne pouvait pas déterminer le prix de cession et la société EASYTHERM doit être déboutée de sa demande de paiement du prix de cession ;

Attendu cependant qu'il n'est pas contestable que les mandats de [F] [Q] de membre et de président du directoire de la société EASYTHERM ont cessé le 29 avril 2013, et qu'en conséquence s'est réalisée la condition prévue par l'article 8.1.1, en sorte que la société MATHIAS & CO est tenue de vendre ses titres à la société CIAT et que celle-ci est tenue de les lui acheter ; que par ailleurs, le prix de cession au regard du pacte est déterminable, dans la mesure où il est chiffrable en fonction d'éléments objectifs qui ne dépendent pas de la volonté de l'une ou de l'autre des parties ou d'un nouvel accorde de volonté ; qu'en conséquence, la société CIAT est débitrice d'un prix de cession tel que prévu par les articles 8.2.1 à 8.2.2 du pacte ;

Attendu que pour soutenir qu'il ne s'inscrit pas dans les cas de détermination du prix prévus par l'article 8.2.1 du pacte, mais dans ceux de l'article 8.2.2, [F] [Q] soutient qu' il n'a pas été révoqué, qu'il n'a pas démissionné, son mandat étant arrivé à terme et n'ayant pas été renouvelé ;

Attendu que la société CIAT prétend au contraire que :

- [F] [Q], président du directoire de la société EASYTHERM, a brutalement annoncé son départ le 26 avril 2012 avec effet au 29 avril suivant ;

- cet abandon brutal de son mandat avant le 30 juin 2013 doit s'analyser en une démission au sens du pacte d'actionnaires, démission qui n'a pas été anticipée ;

- il s'est donc placé dans une situation de bad lever ;

Attendu cependant que l'article 8.2.1 du pacte, intitulé 'bad leaver', stipule qu'en cas de cessation de fonctions d'un actionnaire minoritaire 1 avant le 30 juin 2013 résultant d'une révocation de mandat à l'occasion d'un événement assimilable à une faute grave ou à une faute lourde apprécié au regard des critères applicables au sens du droit du travail français, ou résultant d'une démission, le prix des valeurs mobilières transférées doit être déterminé selon la formule suivante :

P= 72,5 % x (EBITDA x 6 - dettes financières nette) x participation ;

Attendu ensuite que le terme des mandats de [F] [Q] de président et de membre du directoire de la société EASYTHERM ayant été fixé au 29 avril 2013, sa décision de ne pas solliciter à cette date leur renouvellement ne peut s'analyser en une démission au sens de l'article 8.2.1; qu'en outre, cette décision de non-renouvellement a été portée à la connaissance de la société CIAT bien avant le 26 avril 2013, ainsi que le relève à juste titre le premier juge ;

Attendu en conséquence que le prix de cession des titres doit être déterminé en application des dispositions de l'article 8.2.2 du pacte, intitulé 'good leaver' ;

Attendu que la société CIAT fait valoir que [F] [Q] ne peut, pour la fixation du prix de cession, se prévaloir de simples négociations intervenues entre actionnaires au mois de février 2013, sans rapport avec les faits de l'espèce, sauf à méconnaître les dispositions du pacte d'actionnaires ; que le calcul du prix de cession ne peut être effectué que sur la base des comptes 2012 tels qu'ils ont été arrêtés, approuvés par l'assemblée générale des actionnaires le 28 juin 2013 et certifiés par les commissaires aux comptes le 16 septembre suivant ;

Attendu que [F] [Q] soutient au contraire que le prix de cession doit être déterminé sur la base des chiffres annoncés par la société CIAT dans sa note du 5 mars 2013, soit la formule suivante :

6 x EBITDA 2012 - 6 x 231 K€1.386 K€

- dettes financières nettes1.360 K€

prix de cession pacte actionnaires2.746 K€

P = 2.746.000 x 212.676 actions/1.625.000 = 359.390 € ;

Attendu que le différend entre les parties relatif au prix porte sur les éléments de celui-ci entrant dans la formule de calcul prévue par l'article 8.2.2 du pacte ; qu'il résulte de l'article 14-3 que lorsque les parties ne s'entendent pas sur le prix des valeurs mobilières, ni sur le choix d'un expert pour le déterminer en application du pacte, elles doivent faire désigner un cabinet d'expertise comptable indépendant de premier rang familier avec l'activité de la société EASYTHERM, par le président du tribunal de commerce de Lyon statuant en la forme des référés statuant à la requête de la partie la plus diligente ; qu'il y a donc lieu de surseoir à statuer sur la demande de [F] [Q] tendant à la confirmation du jugement en ce qu'il condamne la société CIAT à payer à la société MATHIAS & CO au paiement de la somme de 359.390 €, jusqu'au dépôt du rapport d'un expert comptable désigné à la requête de la partie la plus diligente par le président du tribunal de commerce statuant dans la forme des référés ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Déclare recevable l'intervention volontaire de [F] [Q] ;

Déboute la société CIAT de sa demande de réformation du jugement pour non-respect du principe du contradictoire ;

Dit que la société CIAT est recevable à contester le prix de cession des valeurs mobilières ;

Dit que le prix de cession de ces valeurs doit être fixé en application de l'article 8.2.2 du pacte d'actionnaires, intitulé 'Good Leaver' ;

Sursoit à statuer sur la demande de [F] [Q] tendant à la confirmation du jugement en ce qu'il condamne la société CIAT à payer à la société MATHIAS & CO la somme de 359.390 €, et ce jusqu'au dépôt du rapport d'un expert-comptable désigné à la requête de la partie la plus diligente par le président du tribunal de commerce de Lyon statuant dans la forme des référés ;

Sursoit à statuer sur les autres demandes jusqu'à la survenance du même événement ;

Réserve les dépens ;

Ordonne la radiation de l'affaire inscrite au rôle sous le numéro 15/00868 ;

LE GREFFIERLE PRESIDENT

Joëlle POITOUXJean-Louis BERNAUD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 15/00868
Date de la décision : 12/01/2017

Références :

Cour d'appel de Lyon 01, arrêt n°15/00868 : Radie l'affaire pour défaut de diligence des parties


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-01-12;15.00868 ?
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