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16/12/2016 | FRANCE | N°15/06289

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 16 décembre 2016, 15/06289


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





R.G : 15/06289





[J]



C/

Me [V] [G] - Mandataire liquidateur de SAS COMAREG

Association AGS CGEA [Localité 1]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de prud'hommes - Formation de départage de LYON

du 02 Juillet 2015

RG : F 11/04171

COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 16 DECEMBRE 2016



APPELANT :



[M] [J]

né le [Date naissance 1] 1970 à [Locali

té 2]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Comparant en personne, assisté de Me Thomas NOVALIC de la SELARL TN AVOCATS, avocat au barreau de LYON substitué par Me Yann BARRIER, avocat au barreau de LYON



INTIMÉS :



Me [V] [G] (SELAR...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : 15/06289

[J]

C/

Me [V] [G] - Mandataire liquidateur de SAS COMAREG

Association AGS CGEA [Localité 1]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de prud'hommes - Formation de départage de LYON

du 02 Juillet 2015

RG : F 11/04171

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 16 DECEMBRE 2016

APPELANT :

[M] [J]

né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 2]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Comparant en personne, assisté de Me Thomas NOVALIC de la SELARL TN AVOCATS, avocat au barreau de LYON substitué par Me Yann BARRIER, avocat au barreau de LYON

INTIMÉS :

Me [V] [G] (SELARL MJ SYNERGIE) ès qualité de mandataire liquidateur de la SAS COMAREG

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Non comparant, représenté par Me Arlette BAILLOT-HABERMANN, avocat au barreau de LYON substituée par Me Marc LAMONICA, avocat au barreau de LYON

Association AGS CGEA [Localité 1]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Céline MISSLIN, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 19 Octobre 2016

Présidée par Chantal THEUREY-PARISOT, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Gaétan PILLIE, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Didier JOLY, conseiller faisant fonction de président

- Natacha LAVILLE, conseiller

- Chantal THEUREY-PARISOT, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 16 Décembre 2016 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Didier JOLY, conseiller faisant fonction de président et par Gaétan PILLIE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Monsieur [M] [J] a été embauché pour une durée indéterminée le 1er janvier 2000, mais avec une reprise d'ancienneté au 11 février 1993 , en qualité de télévendeur par la société COMAREG qui faisait partie du Groupe Hersant Média (GHM) et intervenait notamment dans divers secteurs de la presse quotidienne régionale d'annonces gratuites.

Il assurait la préparation, la négociation, le suivi de tous les dossiers pris en charge (clients et prospects) dans le cadre de l'objectif de production et de développement du chiffre d'affaires.

En contrepartie d'un horaire moyen hebdomadaire de 35 heures, il percevait une rémunération mensuelle brute de 7.500 Francs, soit 1.430,89 €, à laquelle s'ajoutaient une prime de vacances et une prime de fin d'année égales chacune à 50 % du salaire fixe mensuel brut.

L'article 5 de son contrat de travail disposait qu'il bénéficiait en outre de primes variables dont les modalités d'attribution et de calcul étaient définies chaque année, mais sans pouvoir prétendre au maintien des conditions antérieures.

L'article 8 stipulait enfin une clause de non-concurrence dépourvue de contrepartie financière.

La convention collective applicable était celle des entreprises de publicité et assimilées.

Monsieur [J] a été désigné délégué syndical d'entreprise par le syndicat FO à compter du 26 janvier 2006. Ultérieurement, il est également devenu représentant syndical au comité d'entreprise.

En début d'année 2007, il a fait part de son désaccord sur les modalités de calcul et de versement de sa prime d'objectifs 2007 après avoir constaté que les primes sur objectifs qui lui étaient versées ne tenaient pas compte de ses absences liées à l'exercice de ses mandats syndicaux. Aussi le 27 avril 2007, lorsqu'il a régularisé l'« annexe - primes, objectifs 2007 » transmise par son employeur, a-t-il formulé des réserves en faisant observer que la proratisation de la prime mensuelle sur toutes ses absences, même celles liées à son mandat, n'était pas conforme lorsque l'objectif mensuel était atteint.

Le 9 juillet 2007, la société COMAREG lui a fait connaître en réponse qu'elle ne prendrait pas en compte les modifications souhaitées mais qu'elle prenait acte de ce qu'il ne remettait pas en cause les objectifs 2007 de son secteur en termes de chiffre d'affaires et de nombre de clients facturés.

Monsieur [J] a encore dénoncé à plusieurs reprises au cours des années suivantes la perte de revenus liée à l'exercice de ses mandats en proposant la proratisation de ses objectifs, mais celle-ci n'a jamais été retenue par son employeur.

Par jugement en date du 30 novembre 2010, le tribunal de commerce de Lyon a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société COMAREG et nommé Maître [E] et Maître [U] en qualité d'administrateurs judiciaires. Dans le cadre de ce redressement, le juge-commissaire a, par ordonnance du 17 mars 2010, autorisé la société COMAREG et les administrateurs judiciaires à procéder à la suppression de 718 postes de travail ainsi qu'à des propositions de modifications pour motif économique des contrats de travail de 174 salariés qui, en cas de refus de leur part, pourraient conduire à envisager leur licenciement pour motif économique.

Après avoir vainement proposé à Monsieur [J] par lettre recommandées avec avis de réception du 7 avril 2011 sa mutation géographique sur le site de [Localité 6], puis le 30 mai et le 13 juillet 2011 plusieurs postes de reclassement basés à [Localité 7] et [Localité 6], les administrateurs judiciaires de la société COMAREG ont sollicité le 20 juillet 2011 l'autorisation de l'Inspecteur du Travail pour procéder au licenciement pour motif économique de Monsieur [J], salarié protégé, en raison d'une forte chute du chiffre d'affaires de la société, divisé par deux en deux ans, et de l'existence de résultats déficitaires constants pour 2009.

L'autorisation ayant été accordée le 26 octobre 2011, la société COMAREG a notifié à Monsieur [J] par lettre recommandée avec accusé de réception du 3 novembre 2011 la rupture de son contrat travail à la suite de son adhésion à la convention de reclassement personnalisé.

Par jugement du tribunal de commerce de Lyon rendu le même jour, la liquidation judiciaire de la société COMAREG a été prononcée et Maître [V] [G] désigné en qualité de mandataire liquidateur.

Monsieur [J] a pour sa part saisi dès le 30 septembre 2011 la juridiction prud'homale de demandes tendant en leur dernier état à voir fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société COMAREG pour les sommes suivantes :

- 17.000,00 € à titre de contrepartie financière de la clause de non-concurrence,

- 15.000,00 € à titre de dommages-intérêts pour discrimination syndicale,

- 17.510,00 € à titre de rappel de salaire d'octobre 2006 à octobre 2011,

- 1.751,00 € au titre des congés payés afférents,

- 5.269,00 € au titre de la prime annuelle 2009,

- 526,90 € au titre des congés payés afférents,

- 33.600,00 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1.200,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La procédure collective de la société COMAREG et le CGEA [Localité 1] se sont opposés à ses demandes, reconnaissant toutefois que lors de la rupture de son contrat de travail, le salarié n'avait pas été délié de ses obligations résultant de la clause de non-concurrence, mais que son indemnisation ne pouvait qu'être symbolique du fait de sa nullité tenant à l'absence de contrepartie financière.

Par jugement rendu le 2 juillet 2015, le conseil de prud'hommes de Lyon , section industrie, dans sa formation de départage, a :

' Dit et jugé nulle, faute de contrepartie pécuniaire, la clause de non-concurrence ;

' Dit et jugé que la rupture du contrat de travail de Monsieur [J] reposait bien sur une cause réelle et sérieuse ;

' Fixé la créance de Monsieur [J] au passif de la liquidation judiciaire de la société COMAREG comme suit :

- 1.000,00 € au titre de la clause de non-concurrence ;

- 500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

' Débouté Monsieur [J] du surplus de ses demandes ;

' Déclaré la présente décision opposable au CGEA [Localité 1] dans les conditions et limites légales (plafond 6 et créance de l'article 700 non garantie) ;

' Laissé les dépens de la présente instance à la charge de la procédure collective de la société COMAREG .

Par lettre recommandée en date du 29 juillet 2015 enregistrée le lendemain au greffe, Monsieur [J] a régulièrement interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 4 juillet 2015. Il en demande l'infirmation par la cour en reprenant oralement à l'audience du 19 octobre 2016 par l'intermédiaire de son conseil les conclusions régulièrement communiquées qu'il a fait déposer le 4 août 2016 et auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé de ses prétentions et moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, et tendant à :

Constater l'absence de recherches loyales et sérieuses de reclassement ;

Constater la consultation tardive et inefficace de la Commission paritaire de la formation continue et de l'emploi institué par la Convention collective nationale de la publicité française ;

En conséquence,

Dire et juger le licenciement de Monsieur [J] dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Fixer la créance de Monsieur [J] au passif de la société COMAREG à la somme de 33.600,00 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;

Constater l'absence de contrepartie financière à la clause de non-concurrence stipulée dans le contrat de travail de Monsieur [J] ;

Constater le respect par Monsieur [J] de la clause de non-concurrence à la suite de la rupture de son contrat de travail à durée indéterminée ;

En conséquence,

Dire et juger la clause de non-concurrence stipulée dans le contrat de travail de Monsieur [J] nulle ;

Fixer la créance de Monsieur [J] au passif de la société COMAREG à la somme de 17.000,00 € à titre de dommages-intérêts en raison de l'absence de contrepartie à la clause de non-concurrence ;

Constater l'absence de proratisation des objectifs de Monsieur [J] par rapport à ses absences liées à l'exercice de ses mandats ;

Constater l'absence d'évolution de Monsieur [J] ;

Constater l'absence d'entretien annuel professionnel à l'issue de sa désignation en qualité de délégué syndical ;

En conséquence,

Dire et juger que Monsieur [J] a été victime d'une discrimination syndicale ;

Fixer la créance de Monsieur [J] au passif de la société COMAREG à la somme de 15.000,00 € à titre de dommages-intérêts pour discrimination syndicale ;

Constater la perte de rémunération en raison de l'absence de proratisation des objectifs de Monsieur [J] par rapport à ses absences liées à l'exercice de ses mandats ;

En conséquence,

Fixer la créance de Monsieur [J] au passif de la société COMAREG à la somme de 16.977,50 € à titre de rappel de salaire en raison de l'absence de proratisation des objectifs, outre 1.687,75 € au titre des congés payés afférents;

Constater l'absence de paiement de la prime annuelle « chiffre d'affaires » de 2009 ;

En conséquence,

Fixer la créance de Monsieur [J] au passif de la société COMAREG à la somme de 5.269 € à titre de rappel de salaire pour la prime annuelle de 2009, outre 526,90 € au titre des congés payés afférents ;

Dire et juger que le CENTRE DE GESTION ET D'ÉTUDE AGS (CGEA) [Localité 1] garantira la créance en vertu des dispositions des articles L. 3253-6 et L. 3253-8 du code du travail ;

Fixer la créance de Monsieur [J] sur le reliquat de la liquidation judiciaire de la société COMAREG à la somme de 2.500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Laisser à la charge de la procédure collective de la société COMAREG les entiers dépens.

La Selarl MJ SYNERGIE, représentée par Maître [V] [G] agissant ès qualités de mandataire judiciaire de la société COMAREG, a pour sa part fait reprendre à cette audience par l'intermédiaire de son conseil les conclusions régulièrement communiquées qu'elle a transmises le 17 octobre 2016 et auxquelles il est pareillement référé pour l'exposé de ses prétentions et moyens, aux fins de voir :

Confirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il a fixé au passif de la liquidation judiciaire de la somme de 1.000,00 € à titre de préjudice nécessairement subi pour illicéité de la clause de non-concurrence ;

Dire et juger que les demandes formulées par Monsieur [J] sont injustifiées et non fondées ;

En conséquence,

Débouter Monsieur [J] de l'ensemble de ses demandes ;

Subsidiairement,

Minorer le montant des dommages-intérêts qui pourraient lui être alloué sur le fondement du préjudice nécessairement subi du fait de l'illicéité de la clause de non-concurrence.

Le CENTRE DE GESTION ET D'ÉTUDE AGS (CGEA) [Localité 1] a pour sa part fait développer à cette audience ses conclusions déposées le 17 octobre 2016 aux fins de voir :

Principalement,

Se déclarer incompétent pour se prononcer sur le bien-fondé du licenciement économique ;

Confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

Débouter Monsieur [J] de l'ensemble de ses demandes ;

En tout état de cause,

Dire et juger que l'AGS ne garantit pas les sommes allouées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dire et juger que la garantie de l'AGS n'intervient qu'à titre subsidiaire en l'absence de fonds disponibles ;

Dire et juger que l'AGS ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-8 du code du travail que dans les termes et conditions résultant des articles L. 3253-20 et L. 3253-17 du code du travail ;

Dire et juger que la garantie de l'AGS est plafonnée, toutes créances avancées, pour le compte du salarié, à un des trois plafonds définis à l'article D. 3253-5 du code du travail;

Dire et juger que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évaluée le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement;

Mettre l'AGS et le CGEA hors dépens.

SUR CE,

La Cour,

1°) Sur la discrimination syndicale :

a - sur l'absence de proratisation des objectifs :

Attendu que Monsieur [J] soutient que les primes sur objectifs qui lui ont été versées ne tenaient pas compte de ses absences liées à l'exercice de ses mandats de délégué syndical et de représentant syndical au comité d'entreprise représentant chacun 20 heures de délégation par mois, hors temps de réunion ;

que ses objectifs auraient du être proratisés sur la base du temps réel passé à son poste de travail, après déduction du temps passé à ses mandats, mais que la société COMAREG n'a jamais daigné appliquer ce mode de calcul de la prime variable aux représentants du personnel bien qu'il l'ait demandé à plusieurs reprises, et notamment le 27 avril 2007 lorsque, pour la régularisation de l'annexe « prime des objectifs » au titre de l'année 2007, il avait mentionné expressément conditionner son acceptation à l'absence de discrimination liée à l'exercice de ses mandats ;

Attendu qu'aux termes de l'article L. 1132-1 du code du travail, aucun salarié ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire en matière de rémunération en raison de ses activités syndicales ;

Attendu que, pour soumettre à la cour des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination, Monsieur [J] verse aux débats ses tableaux de suivi des objectifs de 2006 à 2010 ainsi que des tableaux de calcul des rappels de salaire qui lui seraient dus si les objectifs avaient été proratisés en fonction de ses heures d'absence pour l'exercice de ses mandats ;

Mais attendu que la société COMAREG a nécessairement tenu compte de l'existence de ses heures d'absence pour exercer ses mandats syndicaux pour lui avoir régulièrement fixé depuis 2006 des objectifs très nettement inférieurs à ceux de ses collègues qui n'exerçaient pas une telle activité, le conseil de prud'hommes ayant justement constaté que ses objectifs avaient été individualisés pour tenir compte de l'exercice de ses mandats, et qu'ils étaient parmi les plus faibles des différents membres de l'équipe à laquelle il appartenait ;

Attendu que Monsieur [J], qui ne conteste pas cette situation objective mais refuse de reconnaître qu'il s'agit de la prise en compte par son employeur du temps passé en délégation dans le cadre de ses mandats pour la détermination de ses objectifs, ne fournit aucune explication sur la raison de leur réduction par rapport à ceux des autres membres de son équipe;

que l'attestation de Madame [R] [A] qu'il verse également aux débats, indiquant que « son mandat de délégué syndical ainsi que son mandat de représentant au CE n'ont pas été pris en compte dans le calcul du montant de ses objectifs à atteindre », ne peut dès lors être retenue au vu des tableaux ainsi produits de ses objectifs minorés par rapport à ceux de ses collègues;

qu'il produit en outre lui-même un courrier électronique de Madame [T] [X] daté du 31 mars 2010 précisant que « des accords ont été pris pour proratiser l'objectif nouveaux clients pour les personnes qui sont en délégation » ;

qu'enfin les objectifs assignés à Monsieur [J] en termes de chiffre d'affaires étaient parfaitement réalisables par ce dernier nonobstant l'exercice de ses mandats, pour avoir été fréquemment dépassés, son taux de réussite se situant au demeurant dans la moyenne de celui de ses collègues au vu des tableaux précités ;

Attendu dans ces conditions que la demande de rappel de salaire présentée par l'appelant pour défaut de proratisation de ses objectifs et celle de dommages et intérêts pour discrimination syndicale doivent être rejetées et le jugement rendu par le conseil de prud'hommes ainsi confirmé en ce qu'il a débouté le salarié de ces chefs de demande ;

b - sur l'absence d'évolution :

Attendu que l'appelant prétend ensuite avoir dû attendre 11 ans avant d'accéder au niveau 2 de la catégorie des téléconseillers, alors que l'ancienneté moyenne correspondant à ce niveau serait de 6 ans ;

qu'en outre son évolution tardive ne serait due qu'à l'élévation de sa rémunération qui a atteint celle du niveau 2 du seul fait des augmentations générales successives de salaire et non du choix de la société COMAREG ;

que même après 18 ans d'ancienneté, il n'a jamais bénéficié du niveau 3, alors que l'ancienneté moyenne des salariés de ce niveau est de 8 ans ;

que cette absence d'évolution serait directement liée à une discrimination syndicale et lui occasionnerait un préjudice moral mais également financier, dans la mesure où chaque changement de niveau entraîne une augmentation mensuelle de 60 € sur la partie fixe du salaire ;

Mais attendu que l'élévation des téléconseillers à un niveau supérieur n'est pas liée à l'ancienneté dans l'entreprise mais à la possession des qualités requises pour y accéder ;

que si Monsieur [J] prétend avoir toujours été bien noté par sa hiérarchie ainsi qu'il ressort de ses comptes-rendus d'entretiens annuels professionnels 2005 et 2006 qu'il verse aux débats, et qu'il a bénéficié le 1er avril 2005 d'une augmentation individuelle de son salaire récompensant son investissement et la qualité de son travail, en sus de l'augmentation générale, le mandataire judiciaire représentant la société COMAREG produit également une correspondance datée du 17 avril 2009 constatant un certain nombre de manquements de sa part aux consignes d'activité au sein du service de la télé vente, chaque téléconseiller devant passer au minimum 20,3 % de son temps de travail en conversation et réaliser au moins 7,02 appels de l'heure, alors que son activité était bien inférieure lorsqu'il n'exerçait pas ses mandats syndicaux ;

que cette constatation objective de son insuffisance d'activité téléphonique est de nature à justifier l'évolution limitée de sa progression professionnelle :

que Monsieur [J] ne peut dès lors évoquer l'existence d'une discrimination syndicale de ce fait ;

c - sur l'absence d'entretien annuel professionnel :

Attendu que Monsieur [J] fait encore observer qu'il a été privé d'entretien d'évaluation sans raison valable à compter de 2006, correspondant précisément à l'année de sa désignation en qualité de délégué syndical, de sorte que ce fait caractériserait encore l'existence d'une discrimination syndicale à son égard ;

Attendu cependant qu'il ne produit aucun élément qui viendrait établir l'existence d'un traitement différent entre lui-même et ses collègues, et plus encore du fait de l'exercice de mandats syndicaux ;

qu'en effet, s'il verse aux débats les comptes-rendus d'entretiens annuels du 14 février 2005 et du 3 avril 2006, alors qu'il était titulaire d'un mandat de délégué syndical depuis le 26 janvier 2006, et que le mandataire judiciaire de la société COMAREG ne conteste pas pour sa part l'absence d'entretien annuel les années suivantes, cette circonstance ne permet pas d'affirmer qu'il aurait été le seul à ne pas bénéficier d'entretien ;

qu'en outre il ne justifie pas ni même ne prétend que l'organisation syndicale à laquelle il appartenait aurait écrit à son employeur pour faire état d'une difficulté tenant à l'existence d'une discrimination dont il aurait été victime ;

Attendu en conséquence qu'à défaut de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination en raison de l'absence d'entretien annuel d'évaluation après 2007, Monsieur [J] doit être considéré défaillant dans la charge de la preuve qui lui incombe et le jugement rendu par le conseil de prud'hommes encore confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa créance à titre de dommages-intérêts sollicitée à ce titre ;

2°) Sur le reliquat de la prime 2009 :

Attendu que Monsieur [J] justifie par le tableau de suivi des objectifs qu'il verse aux débats avoir réalisé au cours de l'année 2009 un chiffre d'affaires correspondant à 108,48 % de l'objectif qui lui avait été fixé ;

qu'il prétend que la grille de calcul des primes pour l'année 2009 prévoyait qu'en cas d'atteinte de 108 % des objectifs assignés, le salarié percevait une prime annuelle d'un montant total de 8.615 €; qu'il ajoute qu'en application de l'annexe prime pour l'année 2009, si l'addition des primes perçues pendant l'année était inférieure au total annuel, le reliquat devait être versé avec le salaire du mois de février de l'année suivante ;

que la société COMAREG lui devait un reliquat d'un montant de 5.269,00 € qui n'apparaît pas sur son bulletin de salaire du mois de février 2010 ; qu'en dépit de plusieurs réclamations de sa part, son employeur n'a jamais régularisé le paiement de cette prime, justifiant sa demande de voir fixer à ce titre sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société COMAREG pour la somme de 5.269,00 €, outre celle de 526,90 € au titre des congés payés afférents ;

Mais attendu que Monsieur [J] a été débouté de ce chef de demande par le conseil de prud'hommes pour absence de justification des modalités de calcul du montant de la prime annuelle 2009 dont son employeur lui aurait été redevable suite à ses résultats obtenus ;

que si l'article 5 de son contrat travail stipulait qu'il bénéficiait de primes variables dont les modalités d'attribution et de calcul étaient définies chaque année par annexe séparée, sans qu'il puisse prétendre au maintien des conditions antérieures, le salarié ne produit pas davantage dans le cadre de la procédure d'appel l'annexe prime pour l'année 2009 ni la grille de rémunération prévoyant qu'une régularisation devait être effectuée en cas de dépassement de l'objectif annuel; qu'enfin il ne justifie pas plus du report de paiement au mois de février de l'année suivante du reliquat de prime qui n'aurait pas été versé en fin d'année ;

qu'il ne peut dans ces conditions qu'être débouté de ce chef de demande et le jugement attaqué encore confirmé ;

3°) Sur la clause de non-concurrence :

Attendu que Monsieur [J] prétend avoir respecté la clause de non-concurrence insérée à l'article 8 de son contrat de travail prévoyant qu'à l'expiration de son contrat, il s'interdira d'entrer au service d'une entreprise ayant une activité identique à celle de la société COMAREG, à savoir l'édition et la commercialisation de périodiques gratuits, pendant une durée de 12 mois sur le territoire limité aux départements de la zone Rhône Alpes, alors même que cette clause ne comportait aucune contrepartie financière, dans la mesure où son employeur ne l'avait pas levée lors de la rupture de son contrat de travail ;

que les faits ne sont pas contestés par le mandataire judiciaire de la société COMAREG qui reconnaît qu'en présence des éléments contractuels invoqués, il apparaît qu'aucun avenant n'est intervenu pour ajouter une contrepartie pécuniaire à ladite clause de non-concurrence ou la supprimer, et que ne figure pas dans la lettre de rupture une levée de l'engagement de non-concurrence ;

que c'est en conséquence à bon droit que le conseil de prud'hommes a considéré qu'à défaut d'avoir été levée au moment de la rupture, la clause de non-concurrence est nulle en l'absence de contrepartie financière et ouvre droit au paiement de dommages-intérêts en faveur du salarié auquel elle a occasionné un préjudice ;

Attendu que pour prétendre à l'infirmation du montant de 1.000,00 € qui lui a été alloué au titre de l'indemnisation de son préjudice et à l'élévation de ce montant à la somme de 17.000,00 € à titre de dommages-intérêts, Monsieur [J] fait état de l'interdiction qui lui a ainsi été faite de postuler après la rupture de son contrat de travail dans les entreprises ayant une activité similaire à celle de la société COMAREG, et ajoute qu'en application d'une clause illicite, il aurait du bénéficier d'un versement proportionnel à son salaire brut et à la durée de l'interdiction de non-concurrence ;

Mais attendu que l'engagement de non-concurrence figurant dans le contrat de travail de Monsieur [J] était limité dans l'espace et dans le temps pour ne couvrir que la seule région Rhône-Alpes pendant une durée de 12 mois ;

qu'en outre le salarié ne pouvait ignorer qu'en raison de la liquidation judiciaire de la société COMAREG prononcée le 3 novembre 2011, soit le jour même de la rupture de son contrat travail, il n'était plus débiteur de cet engagement du fait de la disparition de son employeur qui seul aurait pu le lui opposer ;

que dans ses conditions son préjudice ne peut être que particulièrement limité ;

qu'il importe dès lors de confirmer encore le jugement entrepris en ce qu'il a fixé sa créance à la somme de 1.000,00 € au titre de la clause de non-concurrence ;

3°) Sur le licenciement :

Attendu que Monsieur [J] conteste enfin le bien-fondé de son licenciement en faisant valoir que son employeur ne lui a pas proposé tous les postes disponibles correspondant à l'emploi qu'il occupait et à sa formation initiale au sein du Groupe Hersant Média auquel la société COMAREG appartenait ;

qu'en outre il n'a procédé que tardivement et inefficacement à la consultation obligatoire de la Commission Paritaire Nationale de la Formation Continue et de l'Emploi prévue par la convention collective ;

que dans son contexte son licenciement serait dénué de toute cause réelle et sérieuse;

Mais attendu qu'avant de procéder au licenciement pour motif économique de Monsieur [J], salarié protégé du fait de sa qualité de représentant syndical titulaire au comité d'entreprise et de délégué syndical d'entreprise, la société COMAREG a sollicité le 20 juillet 2011 l'autorisation de l'Inspectrice du Travail ;

qu'après enquête sur la situation de l'entreprise et examen de la procédure suivie, avec saisine de la commission paritaire qui s'est réunie le 20 avril 2011, et des offres de reclassement, toutes refusées par le salarié en raison de leur éloignement géographique considéré incompatible avec sa vie familiale, l'Inspectrice du Travail a, par décision en date du 26 octobre 2011, accordé à la société COMAREG l'autorisation administrative de licencier Monsieur [J] sans que le salarié ait formé un quelconque recours à l'encontre de cette décision devant le Ministre du Travail, de sorte qu'elle est devenue définitive ;

que le juge judiciaire ne peut dès lors se prononcer sur la cause du licenciement au regard du respect par l'employeur de son obligation de reclassement et de consultation de la Commission Paritaire Nationale de la Formation Continue et de l'Emploi, et plus encore d'apprécier le caractère réel et sérieux du licenciement litigieux, sans violer le principe de séparation des pouvoirs;

que la cour ne peut en conséquence que se déclarer incompétente pour se prononcer sur le bien-fondé du licenciement pour motif économique de Monsieur [J] ;

Attendu par ailleurs que l'appelant, qui ne voit pas davantage aboutir ses prétentions devant la cour, ne peut obtenir l'indemnité qu'il sollicite sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et supporte la charge des dépens engagés par les parties dans le cadre de la procédure d'appel ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant contradictoirement par arrêt rendu public par mise à disposition des parties, après que ces dernières aient été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement rendu le 2 juillet 2015 par le conseil de prud'hommes de Lyon en ses dispositions disant et jugeant nulle, faute de contrepartie pécuniaire, la clause de non-concurrence et fixant la créance de Monsieur [M] [J] au passif de la liquidation judiciaire de la société COMAREG pour les sommes de 1000,00 € au titre de la clause de non-concurrence et de 500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et déboutant Monsieur [M] [J] du surplus de ses demandes ;

L'INFIRME en ses dispositions disant et jugeant que la rupture du contrat de travail de Monsieur [M] [J] reposait bien sur une cause réelle et sérieuse, après avoir considéré que l'employeur avait satisfait à son obligation de reclassement et de saisine de la Commission Paritaire de la Formation Continue et de l'Emploi ,

et statuant à nouveau ,

SE DECLARE incompétent pour se prononcer sur le bien-fondé du licenciement pour motif économique de Monsieur [M] [J] ;

DEBOUTE les parties de toutes leurs autres demandes ;

DIT n'y avoir lieu en cause d'appel à application en faveur de Monsieur [M] [J] des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

DECLARE les dispositions qui précèdent communes et opposables au CENTRE DE GESTION ET D'ÉTUDE AGS (CGEA) [Localité 1] dans la limite de ses obligations légales et réglementaires ;

CONDAMNE Monsieur [M] [J] aux entiers dépens d'appel

Le GreffierLe Président

Gaétan PILLIEDidier JOLY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 15/06289
Date de la décision : 16/12/2016

Références :

Cour d'appel de Lyon SB, arrêt n°15/06289 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-12-16;15.06289 ?
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