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16/12/2016 | FRANCE | N°14/08859

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 16 décembre 2016, 14/08859


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 14/08859





[N]

[G]



C/

SOCIETE DISTRIBUTION CASINO FRANCE







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-ETIENNE

du 28 Octobre 2014

RG : F 12/00203











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 16 DECEMBRE 2016













APPELANTS :



[V] [N]

né le

[Date naissance 1] 1953 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



représenté par Me Flavien JORQUERA de la SCP FESSLER JORQUERA CAVAILLES, avocat au barreau de GRENOBLE substitué par Me Adrien RENAUD, avocat au barreau de GRENOBLE



[R] [G] épouse [N]

née le [D...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 14/08859

[N]

[G]

C/

SOCIETE DISTRIBUTION CASINO FRANCE

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-ETIENNE

du 28 Octobre 2014

RG : F 12/00203

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 16 DECEMBRE 2016

APPELANTS :

[V] [N]

né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Flavien JORQUERA de la SCP FESSLER JORQUERA CAVAILLES, avocat au barreau de GRENOBLE substitué par Me Adrien RENAUD, avocat au barreau de GRENOBLE

[R] [G] épouse [N]

née le [Date naissance 2] 1956 à [Localité 2]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Flavien JORQUERA de la SCP FESSLER JORQUERA CAVAILLES, avocat au barreau de GRENOBLE substitué par Me Adrien RENAUD, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMÉE :

SOCIETE DISTRIBUTION CASINO FRANCE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Yann BOISADAM de la SCP JOSEPH AGUERA & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 14 Octobre 2016

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président

Chantal THEUREY-PARISOT, Conseiller

Marie-Christine DE LA SALLE, Conseiller

Assistés pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 16 Décembre 2016 (initialement fixé au 02 décembre 2016), par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président, et par Christine SENTIS, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

FAITS PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES.

Les époux [V] et [R] [N] ont régularisé le 22 février 2001 avec la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE (ci-après DCF) un contrat de cogérance par lequel ils acceptaient conjointement et solidairement le mandat d'assurer à titre tout à fait précaire la gestion et l'exploitation notamment de magasins de vente au détail pendant la période de congés des cogérants titulaires dont le programme leur sera communiqué en début d'année ou d'un de ses magasins de vente au détail dans l'attente ou l'acceptation dudit magasin par un couple de cogérants.

Ils étaient antérieurement et depuis 1992 gérants d'une supérette sous l'enseigne DOCKS DE FRANCE sise à [Localité 3], laquelle a été rachetée par DCF en 2000.

Le 31 août 2011, les époux [N] ont saisi le conseil de prud'hommes de LYON d'une demande en requalification du contrat de gérant mandataire non-salarié en contrat de travail de droit commun à durée indéterminée et en paiement de rappel d'heures supplémentaires.

Postérieurement, Monsieur [N] a fait valoir ses droits à retraite, de sorte que le contrat de co gérance a été rompu au 28 février 2013, puis la société DCF a signifié à Mme [N] la rupture du contrat de cogérance au motif que Monsieur [N] avait fait valoir ses droits à retraite.

Les époux [N] ont donc saisi le conseil de prud'hommes outre des demandes de rappels d'heures supplémentaires, de demandes de dommages et intérêts pour la préjudice subi du fait de la violation du statut de gérant non salarié, pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de rappels de salaires, outre pour privation d'un logement de fonction, pour main d''uvre illicite liée à l'activité C DISCOUNT, enfin au titre du préjudice subi.

Par jugement de départage du 28 octobre 2014 le conseil de prud'hommes de LYON a débouté les époux [N] de l'ensemble de leurs demandes, en considérant que la preuve d'un lien de subordination n'était pas rapportée.

Les époux [N] ont relevé appel de cette décision par lettre recommandée avec avis de réception du 12 novembre 2014 reçue le 13 novembre 2014.

Vu les conclusions soutenues à l'audience du 14 octobre 2016 par les époux [N] qui demandent à la cour, par voie de réformation du jugement déféré de prononcer la requalification du contrat de cogérance en contrat de travail salarié et de condamner la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à payer :

À Monsieur [V] [N] les sommes de :

30 000 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait de la violation du statut de gérant non salarié, outre intérêts de droits à compter de la demande ;

49 325,27 euros au titre des rappels de salaires calculés sur la base du SMIC outre 4932,52 euros au titre des congés payés afférents, outre intérêts de droits à compter de la demande,

76 487,99 € au titre des rappels d'heures supplémentaires, et 7648,80 euros au titre des congés payés afférents outre intérêts de droits à compter de la demande,

2397,70 € bruts au titre des rappels de rémunération sur les heures de délégation exceptionnelles, outre intérêts de droits à compter de la demande,

30 000 € à titre de dommages et intérêts pour la privation de leur droit au bénéfice d'un logement de fonction outre intérêts de droits à compter de la demande,

10.000 € à titre de dommages et intérêts pour le prêt de main d''uvre illicite lié à l'activité COLIS C DISCOUNT,

dire qu'à ce titre la société DCF sera tenue de rémunérer les époux [N] à hauteur d'un taux contractuel de 6 % prévu au contrat de gérance, le commissionnement devant se calculer sur la valeur du colis,

15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi,

2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

À Madame [R] [N] les sommes de :

30 000 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait de la violation du statut de gérant non salarié, outre intérêts de droits à compter de la demande ;

30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

45 495,53 euros au titre des rappels de salaires calculés sur la base du SMIC outre 4549,55 euros au titre des congés payés afférents, outre intérêts de droits à compter de la demande

76 487,99 € au titre des rappels d'heures supplémentaires, et 7648,80 euros au titre des congés payés afférents outre intérêts de droits à compter de la demande ;

30 000 € à titre de dommages et intérêts pour la privation de leur droit au bénéfice d'un logement de fonction outre intérêts de droits à compter de la demande

10.000 € à titre de dommages et intérêts pour le prêt de main d''uvre illicite lié à l'activité COLIS C DISCOUNT,

dire qu'à ce titre la société DCF sera tenue de rémunérer les époux [N] à hauteur d'un taux contractuel de 6 % prévu au contrat de gérance, le commissionnement devant se calculer sur la valeur du colis,

15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi,

2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur la requalification du contrat de gérant mandataire non-salarié les époux [N] font notamment valoir :

-qu'ils ne disposent d'aucune indépendance dans l'exercice de leur activité et que leurs conditions de travail sont déterminées par la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE , qui définit les règles en matière de commandes et de livraison, qui détermine les horaires d'ouverture et de fermeture du magasin, qui impose les périodes de congés, qui organise des contrôles réguliers, qui intervient directement dans la gestion informatique et qui impose des partenariats commerciaux,

-que leur rémunération n'est pas proportionnelle au montant des ventes, alors qu'à l'exception de la période estivale ils ont toujours été rémunérés sur la base d'un minimum conventionnel,

-qu'ils sont dans l'impossibilité matérielle d'embaucher des salariés ou de se faire remplacer,

-qu'ils ont été contraints de servir le point relais CDISCOUNT sans rémunération correspondante,

-que du point de vue administratif, ils sont considérés comme des salariés,

-que le statut de gérant non salarié intérimaire n'a aucune existence juridique;

Sur l'application de la rémunération minimale prévue par l'accord collectif national du 18 juillet 1963

-que la rémunération minimale conventionnelle est applicable à chacun des cogérants, puisqu'il est de principe constant que le gérant non salarié ne peut être privé d'une rémunération équivalente au SMIC,

-qu'ils ont effectué de nombreuses heures supplémentaires dont ils demandent paiement

La société DISTRIBUTION CASINO FRANCE s'oppose à l'ensemble des demandes formées par les époux [N] et demande à la cour de confirmer la décision déférée et de condamner les appelants au paiement de la somme de 2000 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient en effet :

-que pour l'application du statut de gérant non salarié de succursale de commerce de détail défini par l'article L. 7321 '2 du code du travail il faut et il suffit que le gérant exploite une succursale moyennant des remises proportionnelles sur les ventes, que toute latitude lui soit laissée contractuellement pour embaucher du personnel, se substituer des remplaçants et pour organiser au quotidien son propre travail,

-que l'existence d'une dépendance économique n'implique pas l'existence d'un lien de subordination juridique, le contrat s'analysant en un mandat d'intérêt commun,

-que l'existence d'une relation de travail salarié dépend des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité professionnelle, la qualification ou la dénomination adoptée par les parties étant indifférente,

-qu'il appartient au gérant qui revendique le statut de salarié de démontrer qu'il a été soumis à une relation de subordination dans l'organisation de l'exercice personnel de son activité, c'est-à-dire aux ordres, aux directives et au contrôle de la société mandante dans l'organisation de son propre travail,

-que dans le cadre de l'aide qu'elle est tenue d'apporter aux gérants elle a mis en place un réseau de gérants mandataires intérimaires qui ont pour mission de remplacer les gérants titulaires partant en congé, ce dispositif ne présentant toutefois aucun caractère contraignant, les gérants mandataires titulaires demeurant libres d'organiser eux-mêmes leur remplacement,

-que le gérant mandataire intérimaire, comme le titulaire, ne peut revendiquer l'existence d'un contrat de travail qu'en démontrant l'existence d'une subordination dans l'exercice personnel de son activité,

-que ni les modalités commerciales d'exploitation de la succursale, ni la fourniture exclusive des marchandises à prix imposés, ni les conditions de gestion des commandes et des livraisons, ni l'obligation de participer à des actions commerciales, ni le suivi commercial de l'activité du gérant mandataire, qui s'inscrivent dans le cadre contractuel inhérent aux relations entre la maison-mère et les gérants, ne permettent de caractériser un lien de subordination effectif,

-que les conditions d'application du statut de gérant non salarié n'ont pas été méconnues en l'espèce, alors que les époux [N] ont été rémunérés proportionnellement aux ventes du magasin, qu'ils avaient contractuellement toute latitude pour embaucher du personnel, le fait qu'ils n'aient pas utilisé cette prérogative en raison de revenus insuffisants étant inopérant, que les contrats intervenus ne fixent pas les conditions de travail des cogérants qui déterminaient les horaires d'ouverture et de fermeture ainsi que le nombre d'heures travaillées et qui étaient libres de déterminer leurs périodes de congés,

-que la rupture du contrat de cogérance de Madame [N] est régulière comme résultant de l'application de la clause d'indivisibilité qui est stipulée,

-que les époux ne peuvent prétendre chacun à une rémunération minimum égale au SMIC, alors que le forfait de commissions est attribué au couple et que les époux décident librement de la répartition entre eux de cette rémunération,

-que les époux [N] ne peuvent prétendre au paiement d'heures supplémentaires, alors que les spécificités du statut de gérant non salarié font obstacle à l'application des règles relatives au décompte du temps de travail et qu'il n'est pas démontré en l'espèce qu'elle leur aurait imposé individuellement des durées de travail,

-que les époux [N] ont renoncé au bénéfice d'un logement de fonction en contrepartie d'un dédommagement pour leurs frais de déplacement et de séjour,

-que l'activité «'colis Cdiscount'», qui a été exercée sur la base du volontariat, ne saurait constituer un prêt de main-d''uvre illicite, ni ouvrir droit à un commissionnement de 6 % alors qu'une rémunération a été perçue à ce titre,

-qu'en application de l'article 36 de l'accord collectif national du 18 juillet 1963 Monsieur [N] a été rémunéré forfaitairement de ses heures de délégation.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont soutenues oralement lors de l'audience.

MOTIVATION.

Sur le statut de gérant non salarié.

Il apparaît d'abord que la société DCF soutient que depuis le 1er mai 2008, l'article L 782-7 du code du travail a été abrogé, de sorte que les époux [N] ne peuvent se prévaloir de tous les avantages accordés aux salariés par la législation sociale, la nouvelle codification des articles L 7322-1 à L 7322-6 du code du travail concernant le statut légal des gérants non salariés n'étant pas intervenue à droit constant.

Il apparaît toutefois sur ce point que la modification rédactionnelle apportée à l'article L 7322-1 du code du travail, tel qu'il résultait de l'ordonnance du 12 mars 2007, avait été uniquement motivée par le souci d'apporter une clarification de rédaction, de sorte que la recodification s'est effectuée à droit constant et qu'en conséquence, l'abrogation d'une loi à la suite de sa codification à droit constant, ne modifie ni la teneur ni la portée des dispositions transférées.

Dans ces conditions, il apparaît que, contrairement à ce qu'affirme la société DCF, les gérants non salariés bénéficient de tous les avantages accordés aux salariés par la législation sociale.

C'est dans ces conditions qu'ils sont inscrits au régime général de sécurité sociale , bénéficient d'une adhésion à une mutuelle et des prestations sociales au même titre que les salariés et bénéficie d'un régime d'épargne salariale.

L'article L 7322-2 du code du travail, applicable à l'espèce, dispose en son alinéa 1er : «' Est gérant non salarié toute personne qui exploite, moyennant des remises proportionnelles au montant des ventes, les succursales des commerces de détail alimentaire ou des coopératives de consommation, lorsque le contrat intervenu ne fixe pas les conditions de son travail et lui laisse toute latitude d'embaucher des salariés ou de se faire remplacer à ses frais et sous son entière responsabilité.'»

Dans son préambule, l'accord collectif national du 18 juillet 1963 mis à jour le 1er mars 2008, rappelle que ce statut spécifique de gérant mandataire résulte du fait que vis-à-vis de la clientèle, il se comporte comme un commerçant, ce qui implique indépendance du gérant dans la gestion de l'exploitation du fonds, c'est-à-dire autonomie dans l'organisation de son travail et intéressement direct à l'activité du magasin par des commissions calculées sur le montant des ventes, tout en bénéficiant, dans le cadre de ce mandat d'intérêt commun liant le propriétaire du fonds au gérant qui jouit d'une indépendance, partage les risques de l'exploitation mais bénéficie d'un statut social légal et conventionnel.

Le contrat de travail est constitué dès lors que se trouvent réunies trois conditions cumulatives: l'état de subordination juridique vis-à-vis de l'employeur, le versement d'une rémunération et la fourniture d'une prestation de travail; le lien de subordination juridique se caractérise par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

Cette subordination juridique ne se confond ni avec la subordination économique ni avec l'intégration dans un service organisé.

La qualification d'une relation de travail ne dépend ni de la dénomination donnée par les parties à leur convention ni de la volonté qu'elles ont pu exprimer, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité.

En l'espèce, le contrat de cogérance conclu par les époux [N] régularisé le 22 février 2001 prévoyait que ceux-ci acceptaient conjointement et solidairement le mandat d'assurer à titre tout à fait précaire la gestion et l'exploitation notamment des magasins de vente au détail, pendant la période de congés des cogérants titulaires dont le programme leur sera communiqué chaque début d'année sous réserve de modifications ultérieures dont ils seront informés avec un délai de prévenance d'au moins 10 jours, ou d'un de ses magasins de vente au détail dans l'attente ou l'acceptation dudit magasin par un couple de cogérants.

Selon avenant de même date, la rémunération à la commission est fixée avec rappel du minimum mensuel garanti.

Le contrat liant les parties précisait également que les époux [N] étaient libres d'organiser la gestion du magasin dans lequel ils assuraient le remplacement, sous réserve de se conformer à la réglementation et aux usages locaux, sans recevoir toutefois de directives de la société DCF quant à l'organisation de leur travail et pouvant procéder comme ils l'entendaient pour parvenir à une chiffre d'affaires optimal sur lequel leur rémunération était calculée.

Il incombe donc aux appelants de démontrer, que contrairement aux clauses prévues au contrat de gérance, ils ont été soumis à des ordres, directives et au contrôle de la société CASINO dans l'organisation de l'exercice de leur propre travail, démontrant ainsi l'existence d'un lien de subordination juridique, différent de la subordination économique et de l'organisation d'un service organisé et permettant de requalifier ledit contrat en contrat de travail.

Les époux [N] soutiennent d'abord que le statut de cogérance non salariée intérimaire auquel ils étaient soumis n'a aucune existence légale et porte en lui-même la démonstration du lien de subordination dont ils invoquent l'existence; ainsi cette création par la société CDF lui permet d'affecter des gérants où bon lui semble, sur des périodes qu'elle détermine et selon une «'chaîne d'intérims'» sur laquelle ces derniers n'ont aucun pouvoir de modification.

Sur ce point, il convient de rappeler que préalablement à la conclusion de ce contrat, les époux [N] ont déposé une candidature motivée, ont suivi une formation spécifique et ont demandé à exercer leur métier en qualité de gérants non salariés intérimaires, ce qu'ils ont fait ainsi pendant de nombreuses années.

Il est par ailleurs démontré par la société DCF que , pour la bonne gestion des magasins CASINO, elle a mis en place une organisation de chaîne d'intérims, sans caractère contraignant pour les gérants mandataires non salariés titulaires dans des magasins et libres de se faire remplacer pendant leurs congés, ce système n'ayant pour but que d'apporter à ces gérants une aide dans la gestion de leur remplacement, sans qu'ils aient à s'en préoccuper, en recherchant eux-mêmes leur remplaçants.

Les époux [N] ne peuvent ainsi s'emparer de cette création de chaîne d'intérims , qui répond manifestement dans les termes du contrat au statut défini à l'article L 7322-1 du code du travail et qu'ils ont librement acceptée d'intégrer, pour venir prétendre démontrés le défaut d'autonomie et le lien de subordination qu'ils allèguent.

La requalification qu'ils demandent ne peut donc être prononcée sur ce seul motif .

Par ailleurs, les époux [N] produisent aux débats des décisions de juridictions du fond et de la Cour de Cassation, ayant procédé à la requalification en contrat de travail de contrats de cogérance non salariés.

Ces décisions démontrent toutefois uniquement qu'il appartient à la cour de céans de rechercher concrètement l'existence du lien de subordination allégué, c'est-à-dire de définir si, dans l'exercice de la relation mandant-mandataire, il existe des contraintes telles qu'elle seraient précisément incompatibles avec le statut défini à l'article L 7322-1 du code du travail.

Concernant les clauses du contrat de cogérance, il apparaît d'abord que, conformément à l'article 9 de leurs contrats de cogérance et à l'article 6 de l'accord collectif du 18 juillet 1963, les époux [N] ont été rémunérés par le biais de commissions correspondant à 6 % du montant des ventes qu'ils ont réalisées et réparties entre eux à hauteur de 70/30, dans le dernier état des relations contractuelles.

Il n'est par ailleurs pas contesté que les époux [N] avaient, conformément au statut, toute latitude pour embaucher des salariés ou se faire remplacer à leurs frais et sous leur propre responsabilité.

Ensuite, il convient d'examiner si, comme le soutiennent les époux [N], les diverses clauses contenues dans leur contrat les privaient de toute indépendance en les soumettant à de nombreuses sujétions qui les plaçaient de fait dans une situation de subordination.

Sur l'obligation de servir de point de retrait de colis Cdiscount et de service postal, ils estiment qu'il s'agissait de tâches imposées supplémentaires, très contraignantes et non prévues au contrat, lesquelles étaient en outre rémunérées de manière très dérisoire.

Toutefois, ces obligations étaient attachées aux magasins dans lesquels les époux [N] assuraient le remplacement des gérants absents ou non encore arrivés, il s'agissait au surplus de tâches annexes, dont les appelants ne démontrent pas qu'elles auraient été aussi prenantes qu'ils l'allèguent, de sorte que leur accomplissement ne peut en soi démontrer l'absence d'indépendance alléguée.

Sur les commandes, les époux [N] allèguent qu'elles devaient être passées aux dates fixées par la société DCF et non en fonction des besoins du magasin, ils visent également les règles imposées concernant l'entretien du magasin, l'obligation de commander des toners d'encre et des ramettes de papier auprès de l'économat de la société DCF, celle d'acquérir auprès d'elle les sacs, celle de porter la tenue de travail CASINO mais également de participer aux opérations commerciales, d'installer les présentoirs.

Il apparaît toutefois d'abord que ces éléments tels que fixés au contrat de cogérance, sont conformes à l'article L 7322-2 du code du travail et à l'article 34 de l'accord collectif national en ce qu'il s'agit de modalités commerciales, sans incidence sur la nature du contrat et visant essentiellement à harmoniser les pratiques sur l'ensemble des points de vente et apporter aux gérants les informations utiles sur la réglementation applicable.

Ensuite, le contrôle sur les marchandises mises à disposition des cogérants pour les vendre et le respect des prix imposés sont justifiés par le fait que le mandant reste propriétaire des fonds faisant partie du réseau ainsi que des marchandises mises à la disposition des gérants pour être vendues.

Il est par ailleurs établi que les gérants étaient libres de procéder aux commandes des marchandises et que rien ne leur interdisait de modifier la fréquence des livraisons ou de solliciter des livraisons supplémentaires.

Concernant les commandes de toners, de papier et de sacs, il apparaît au surplus que la société DCF démontre que les gérants recevaient, en contrepartie de la prise en charge de certains frais d'entretien, une indemnité pour l'électricité, le chauffage et l'entretien de leurs blouses, de sorte que les frais allégués ne pesaient pas sur leur rémunération.

Concernant les horaires et les vacances, les époux [N] soutiennent que les horaires des magasins dans lesquels ils assuraient des remplacements leur étaient imposés ainsi que les jours de fermeture , que de même, qu'ils ne pouvaient poser leurs congés à leur convenance et se sont vus ainsi modifier unilatéralement des congés qu'ils avaient posés.

Les époux [N] ne démontrent pas toutefois, au moyen des plannings qu'ils versent aux débats qu'ils auraient été contraints à des modifications des plannings imposées par la société DCF ainsi qu'aux horaires d'ouverture des magasins des gérants titulaires, pas plus qu'ils ne démontrent ne pas avoir été libres de prendre leurs congés à leur guise.

En effet, les plannings et fiches de congés produits démontrent au contraire que, manifestement, les époux [N] bénéficiaient d'une autonomie dans l'organisation des horaires d'ouverture, sous réserve des coutumes locales et des habitudes de la clientèle ( article 1er du contrat de gérance) et pouvaient prendre leurs congés à leur convenance, le simple exemple d'une modification de congés de fin d'année 2011 ne suffisant pas à justifier du défaut d'autonomie alléguée.

Du reste, en ce qui concerne le respect des horaires d'ouverture, force est de constater que la société DCF n'a jamais fait des remarques aux époux [N] concernant des manquements au respect de cette clause et le courrier qu'ils produisent aux débats démontre simplement, concernant un autre gérant, que la société DCF peut être amené à tirer les conséquences de tels manquements contraires tant au contrat qu'à l'impératif commercial de rentabilité du commerce dont les gérants non salariés ont la gestion.

L'attestation de Monsieur [N] [L] sur ces différents points n'apporte pas d'éléments contraires, en ce qu'elle est rédigée en termes généraux et bien que le témoin soit également gérant non salarié, ne permet pas de retenir sa pertinence dans le cadre du litige ici soutenu.

Il convient également d'ajouter que les époux [N] pouvaient en tout état de cause, selon délai de prévenance prévu au contrat, refuser la gestion de succursales, ce qu'ils ont du reste fait à deux reprises, comme le démontre la société DCF.

Sur le contrôle qu'exercerait la société DCF, via les remontées de caisse quotidiennes sur un système informatisé centralisé et les visites périodiques des managers commerciaux, il apparaît d'abord que c'est par les seules déclarations des gérants que la société DCF établit en fin de mois le stock théorique et la rémunération proportionnelle au chiffre d'affaires réalisé, ensuite, qu'il n'est démontré ni contrôle ni pression lors des passages des managers commerciaux, excédant le simple suivi des modalités commerciales d'exploitation, qui, comme cela a été dit ci-dessus, procède de l'essence même du contrat de gérance mandat et permet au mandant de s'assurer de l'harmonisation entre les différents magasins faisant partie de son réseau .

Dans ces conditions, il n'apparaît pas que les époux [N] démontrent à l'appui de leur demande de requalification, que le contrat de cogérance non salarié, faisait peser sur eux des sujétions incompatibles avec le statut ci-dessus rappelé et les plaçaient dans une situation de subordination juridique vis-à-vis de la société DCF, de sorte que la décision déférée sera confirmée de ce chef.

Sur la rupture du contrat de Mme [N].

Mme [N] estime que la rupture qui lui été notifiée est abusive en ce que le départ en retraite d'un cogérant ne constitue pas un motif juridiquement admissible pour motiver la rupture d'un contrat de travail. Elle demande donc des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, cette demande étant la conséquence de la requalification en contrat de travail sollicitée.

Toutefois, cette demande ne peut être accueillie dès lors que le contrat de gérance n'a pas été requalifié en contrat de travail.

Sur le logement de fonction.

Les époux [N] demandent des dommages et intérêts pour privation du logement de fonction, or, le bénéfice de ce logement de fonction n'était pas applicable au gérant non salarié intérimaire, lequel recevait toutefois en contrepartie, des frais de déplacements et de séjours engagés lors des différentes gestions.

Dans ces conditions, les époux [N] ne viennent pas démontrer le préjudice qu'ils allèguent dans le fait de ne pas avoir pu bénéficier du logement de fonction.

Sur le prêt de main d''uvre illicite.

Les époux [N] sollicitent le versement de dommages et intérêts pour prêt de main d''uvre illicite lié aux activités Colis CDISCOUNT et service postal outre le versement d'une rémunération pour cette activité à hauteur du taux contractuel de 6 % prévu au contrat de gérance, il convient de rappeler d'abord que ces services n'ont pas été imposés mais proposés aux gérants par la société DCF, étant précisé en outre que ces activités ne constituaient pas une charge de travail supplémentaire, un commissionnement par colis ayant en outre été mis en place et enfin, les époux [N] ayant été informés, en acceptant la gestion de telle ou telle supérette, à titre intérimaire, qu'ils auraient également à prendre en compte ces activités .

Sur la clause de non-concurrence.

Il est de principe que pour être valable, une clause de non-concurrence doit respecter des conditions cumulatives suivantes :

'être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise,

'être limitée dans le temps et dans l'espace,

'tenir dompte des spécificités de l'emploi du salarié,

'constater l'obligation pour l'employeur de verser une contrepartie financière.

En l'espèce, la clause de non-concurrence telle que rédigée ne comporte aucune contrepartie financière, de sorte qu'elle encourt nullité.

Les époux [N] estiment par ailleurs que compte-tenu de l'absence de contrepartie financière, ils ont subi une préjudice, de sorte que la somme de 15 000 euros doit leur être allouée à chacun à titre de dommages et intérêts, l'existence d'une clause de non-concurrence nulle leur ayant causé nécessairement préjudice.

Il apparaît toutefois que l'existence d'une clause de non-concurrence nulle ne dispense pas les appelants de démontrer le préjudice subi. En l'espèce, il n'apparaît pas que les époux [N] viennent démontrer l'existence d'un quelconque préjudice indemnisable de ce chef, alors que Monsieur [N] a fait valoir ses droits à retraite et que Mme [N], si elle a subi la rupture de son contrat, ne démontre pas avoir été empêchée de retrouver un emploi du fait de l'application de la clause, de sorte qu'ils seront déboutés de leur demande de dommages et intérêts, par confirmation de la décision déférée.

Sur les rappels de rémunérations.

Les époux [N] se fondant sur l'article L 7322-1 du code du travail qui précise que l'entreprise propriétaire de la succursale est responsable de l'application au profit des gérants non salariés des dispositions du livre Ier le la troisième partie relative à la durée du travail, au repos et aux congés, ainsi que de celles de la quatrième partie relatives à la santé et à la sécurité du travail, lorsque les conditions de travail, de santé et de sécurité au travail dans l'établissement, ont été fixées par elle et soumises à son accord et sur l'article L 7322-3 du même code qui insiste sur le caractère individuel du contrat de gérant non salarié, estiment qu'il est anormal que leur rémunération ait été inférieure au SMIC et que dans ces conditions, l'écart entre la rémunération qu'ils ont perçu et celle qui aurait dû leur être versée sur la base du SMIC doit être mise à la charge de la société DCF soit pour Mme [N] la somme de 45 495,53 euros outre congés payés afférents et pour Monsieur [N] la somme de 49 325,27 euros outre congés payés afférents.

Les dispositions du code du travail applicables aux salariés doivent en effet trouver application en ce qui concerne la rémunération revenant individuellement à chacun des cogérants, de sorte qu'il convient de dire que la rémunération devant être garantie à chacun est, comme ils le demandent la rémunération calculée sur la base du SMIC..

Dès lors, conformément à ce qui est établi, il convient d'allouer à chacun des époux, l'écart entre la rémunération qu'ils ont perçu et celles résultant de l'application du SMIC, de sorte que par réformation de la décision déférée, il convient de faire droit à leur demande de ce chef.

Sur les heures accomplies.

Les époux [N] affirment que, conformément à l'article L 3121-10 qui devait leur bénéficier, leur durée légale de travail était fixée à 35 heures par semaine civile.

Conformément à l'article L 7322-1 alinéa 2 du code du travail : l'entreprise propriétaire de la succursale est responsable de l'application au profit des gérants non salariés des dispositions du livre Ier le la troisième partie relative à la durée du travail, au repos et aux congés, ainsi que de celles de la quatrième partie relatives à la santé et à la sécurité du travail, lorsque les conditions de travail, de santé et de sécurité au travail dans l'établissement, ont été fixées par elle et soumises à son accord.

Il apparaît que la société DCF soutient que depuis le 1er mai 2008, l'article L 782-7 du code du travail a été abrogé, de sorte que les époux [N] ne peuvent se prévaloir de tous les avantages accordés aux salariés par la législation sociale, la nouvelle codification des articles L 7322-1 à L 7322-6 du code du travail concernant le statut légal des gérants non salariés n'étant pas intervenue à droit constant.

Il apparaît toutefois sur ce point que la modification rédactionnelle apportée à l'article L 7322-1 du code du travail, tel qu'il résultait de l'ordonnance du 12 mars 2007, avait été uniquement motivée par le souci d'apporter une clarification de rédaction, de sorte que la recodification s'est effectuée à droit constant et qu'en conséquence, l'abrogation d'une loi à la suite de sa codification à droit constant, ne modifie ni la teneur ni la portée des dispositions transférées.

Dans ces conditions, il apparaît que, contrairement à ce qu'affirme la société DCF, les gérants non salariés bénéficient de tous les avantages accordés aux salariés par la législation sociale.

C'est ainsi qu'ils sont inscrits au régime général de sécurité sociale , bénéficient d'une adhésion à une mutuelle et des prestations sociales au même titre que les salariés et bénéficie d'un régime d'épargne salariale.

La société DCF affirme également qu'elle n'a jamais imposé les horaires d'ouverture et que l'exercice d'un contrôle ou d'un décompte de la durée du travail est en effet incompatible avec la statut de gérant non-salarié et la libre détermination de leurs conditions de travail, de sorte que la charge de la preuve des heures supplémentaires incomberait exclusivement aux gérants non salariés.

Par ailleurs, elle estime qu'il n'est pas démontré que l'amplitude horaire d'ouverture du magasin se confonde avec le temps de travail effectif réalisé par chacun d'eux.

Il apparaît, toutefois, d'abord que la société DCF, si elle n'impose pas les conditions de travail, de sorte que le lien de subordination juridique caractérisant l'existence d'un contrat de travail n'a pas été ici retenu, demande aux gérants non salariés, concernant les horaires d'ouverture et de fermeture des succursales, de se conformer aux habitudes de la clientèle et aux coutumes locales et fait connaître les horaires d'ouverture sur son site internet, de sorte qu'elle exerce bien une vérification du respect de l'amplitude horaire dans le cadre du service organisé de succursales qu'elle dirige.

Dans ces conditions, il apparaît que le respect de l'amplitude horaire était soumis à son accord.

Il apparaît ensuite que, contrairement à ce qu'affirme la société DCF, la charge de la preuve des heures accomplies dans le cadre de cette amplitude horaire ne saurait peser sur les seuls appelants mais également sur l'intimé .

Les époux [N] établissent par les pièces qu'ils produisent , que dans les différentes succursales dans lesquelles ils ont travaillé pour la période allant de 2007 à 2011, ils ont dû respecter des horaires d'ouverture du magasin 6 jours par semaine, du mardi au jeudi de 8 heures30 à 13 heures et de 15 heures30 à 20 heures, 21h00 le vendredi et le samedi et dimanche matin de 9h30 à 13h00 et de 13h30 à 20h00 soit 53 heures d'ouverture, auxquelles ils démontrent que s'ajoutaient 14 heures en moyenne sur deux jours de travail supplémentaire du fait des livraisons matinales quotidiennes , de la tenue d'un rayon presse, du rangement, du nettoyage, des opérations de caisse et comptables et des commandes, de sorte qu'ils effectuaient en moyenne chacun 65 heures de travail par semaine.

Il est en effet établi que, au regard des tâches multiples incombant aux gérants, il n'existait pas pour eux de possibilité de fonctionner en alternance.

La société DCF ne verse du reste aucun élément objectif de contestation sur les éléments produits par les époux [N], si ce n'est en indiquant que l'amplitude horaire ne se confond pas avec le temps de travail effectif des époux [N], ceux-ci ne prenant pas en compte les périodes d'inactivité qu'ils ont nécessairement alternativement rencontrées dans le cadre des horaires d'ouverture du magasin, thèse qui ne peut être retenue, au regard de la multiplicité des tâches devant être effectuées et que les cogérants devaient ainsi réaliser de manière concomitante.

Dans ces conditions, par réformation du jugement déféré, il convient d'accorder aux époux [N] des rappels d'heures accomplies sur la base de 35 heures par semaine, en tenant compte des majorations de 25 % pour les 8 premières heures supplémentaires et de 50 % pour les suivantes, de sorte qu'il convient d'allouer à Monsieur et Madame [N] pour chacun la somme de 76 487,99 euros bruts outre 7648,80 euros au titre des congés payés afférents .

Sur les heures de délégation.

Monsieur [N], qui était représentant du personnel, soutient que ses heures de délégation ont été indemnisées par une indemnisation forfaitaire prévue à l'article 36 de l'accord collectif national du 18 juillet 1963, correspondant à 5,40 euros .

Il soutient que cette indemnisation, inférieure au SMIC est contraire aux dispositions des articles L 2325-6, 2315-1, 2143-17, 2315-3 et 2325-7 du code du travail, aux termes desquelles, les heures de délégation sont de plein droit considérées comme du travail effectif, d'où il résulte que les représentants syndicaux ne sauraient subir une perte de salaire.

Dans ces conditions, il soutient que les dispositions conventionnelles ne sauraient permettre à DCF de verser au gérant au titre de ses heures de délégation, un montant qui soit inférieur au SMIC.

Il apparaît en l'espèce que Monsieur [N] était titulaire de mandats de membre du comité gérant non-salarié.

Il bénéficiait donc à ce titre d'heures de délégation et pouvait donc s'absenter pour exercer son mandat électif.

Par ailleurs, il est établi que Monsieur [N] a perçu au titre de ses heures de délégation une somme de 110 euros et ce conformément aux dispositions d'aménagement prévus par l'article 36 de l'accord collectif national du 18 juillet 1963, s'agissant d'heures de délégation indemnisées forfaitairement.

Il apparaît en effet que les dispositions conventionnelles contredisent ici celles légales dont la société DCF ne peut priver les gérants non salariés, alors même que ceux-ci bénéficient des protections accordées aux salariés en matière de protection sociale.

Dans ces conditions, il convient de dire que l'indemnité devant être versée pour les heures de délégation ne saurait être inférieure au SMIC et en conséquence condamner la société DCF à payer à Monsieur [N] la somme de 2397,70 euros correspondant à la différence entre ce qu'il a perçu ( 3553 euros) et ce qu'il aurait dû percevoir ( 5950,70 euros) .

Il serait inéquitable de laisser à la charge des époux [N] leurs frais non recouvrables.

PAR CES MOTIFS.

LA COUR,

Statuant publiquement par décision contradictoire, après en avoir délibéré,

CONFIRME la décision déférée en ce qu'elle a débouté Monsieur et Madame [N] :

- de leur demande de requalification du contrat de gérant non salarié en contrat de travail de droit commun à temps complet,

- de leur demande de dommages et intérêts pour préjudice subi du fait de la violation du statut,

- de leur demande de dommages et intérêts pour privation du logement de fonction,

- de leur demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé et rémunération de l'activité C DISCOUNT,

- de leur demande de dommages et intérêts au titre de la clause de non-concurrence sans contrepartie financière,

- de la demande tendant à dire la rupture du contrat de Mme [N] sans cause réelle et sérieuse et lui allouer des dommages et intérêts de ce chef,

LA REFORME sur le surplus,

Statuant à nouveau :

CONDAMNE la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à payer à Monsieur [V] [N] :

la somme de 2397,70 euros au titre des heures de délégation, avec intérêts de droit à compter de la demande,

la somme de 49 325,17 euros au titre des rappels de rémunération outre 4932,52 euros au titre des congés payés afférents,avec intérêts de droit à compter de la demande,

la somme de 76 487,99 euros au titre des rappels d'heures accomplies outre 7648,80 euros au titre des congés payés afférents,avec intérêts de droit à compter de la demande,

CONDAMNE la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à payer à Mme [R] [N] :

la somme de 49 495,53 euros au titre des rappels de rémunération outre 4932,52 euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts de droit à compter de la demande,

la somme de 76 487,99 euros au titre des rappels d'heures accomplies outre 7648,80 euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts de droit à compter de la demande,

CONDAMNE la société DCF à payer à Monsieur et Madame [N] pour chacun d'eux la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

LA CONDAMNE aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRELa PRESIDENTE

Christine SENTISElizabeth POLLE-SENANEUCH


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 14/08859
Date de la décision : 16/12/2016

Références :

Cour d'appel de Lyon SC, arrêt n°14/08859 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-12-16;14.08859 ?
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