AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE
R.G : 15/06173
SOCIETE SINERGI SPORTS CONSULTING MAISON DU SPORT INTERNATIONAL
C/
[S]
APPEL ET CONTREDIT D'UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON
du 25 Juin 2015
RG : F13/03878
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE A
ARRÊT DU 10 OCTOBRE 2016
APPELANTE :
SOCIETE SINERGI SPORTS CONSULTING MAISON DU SPORT INTERNATIONAL
[Adresse 1]
[Localité 1]
SUISSE
représentée par Me Sandrine VARA, avocat au barreau de LYON
INTIMÉ :
[D] [S]
né le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 2] (69)
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté par Me Paul TURCHET, avocat au barreau d'AIN
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 03 Mai 2016
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Michel BUSSIERE, Président
Agnès THAUNAT, Conseiller
Didier PODEVIN, Conseiller
Assistés pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 10 octobre 2016, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Didier PODEVIN, Conseiller, Michel BUSSIERE, Président, étant empêché et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*************
Attendu que les parties sont liées par un contrat signé le 1er novembre 2010 à Lausanne (confédération helvétique) par lequel la société Sinergi Sports Consulting mandataient M. [S] pour agir en temps que directeur commercial de la société et aider [B] [R], Managing partner, dans le développement de l'unité de business développement et des autres activités commerciales au sein de Sinergi nécessitant des taches de commercialisation ; que M. [S] s'engageait à travailler à temps plein pour la société Sinergi Sports Consulting et n'était pas autorisé à accepter d'autres mandats pendant la durée de cet accord qui n'était pas limité dans sa durée ; qu'il était prévu que M. [S] serait basé en France avec une activité commerciale internationale
Attendu que le dernier article du contrat dispose que : 'tout litige concerne la conclusion, l'exécution, l'interprétation ou la violation de ce contrat sera de la compétence de la cour d'arbitrage du sport (TAS) de Lausanne et qu'en cas de litige, la loi fédérale suisse sera appliquée
Attendu que ce contrat a été rompu par courrier électronique du 11 avril 2012 avec effet au 30 mai 2012 et que M. [S] a saisi le 30 juillet 2012 la formation de référé du conseil de prud'hommes de Lyon pour faire reconnaître l'existence d'un contrat de travail, qu'après partage des voix, la formation présidée par le juge départiteur a donné gain de cause à M. [S] et condamner la société Sinergi Sports Consulting à titre provisionnel ; que par requête datée du 26 juillet 2013, M. [S] a saisi le conseil de prud'hommes sur le fond de l'affaire
Attendu que par jugement n° RG F 13/03878 daté du 25 juin 2015, le conseil de prud'hommes de Lyon, section encadrement, a statué ainsi :
- DIT ET JUGE que le contrat conclu entre M. [D] [S] et la société Sinergi Sports Consulting est un contrat de travail
- SE DÉCLARE compétent pour juger du présent litige
- DIT ET JUGE que le présent litige doit se voir appliquer la loi française
- CONSTATE que la société n'a pas conclu au regard de la loi française
- DIT qu'a défaut de contredit dans le délai de quinze jours le dossier sera plaidé sur le fond à l'audience de jugement du jeudi 10 Décembre 2015 à 11h00 devant le Conseil de Prud'hommes de Lyon
- DIT qu'en cas de contredit l'instance sera suspendue en attente de la décision de la Cour d'appel en application de l'article 81 du code de procédure civile
- ORDONNE aux parties de se communiquer leur argumentation et leurs pièces avant ladite audience
- RÉSERVE les dépens
Attendu que par lettre remise contre récépissé le 28 juillet 2015 au greffe du conseil de prud'hommes de Lyon, la société de droit suisse Sinergi Sports Consulting informaient contredit de compétence à l'encontre du jugement précité
Attendu que par déclaration du 27 juillet 2015 enregistrée au greffe de la cour d'appel le 28 juillet 2015, la société de droit suisse Sinergi Sports Consulting (l'appelante) a déclaré interjeter appel du jugement précité à l'encontre de M. [S] (l'intimé)
sur le contredit
Attendu que par conclusions déposées au soutien de ses observations orales à l'audience, la société de droit suisse Sinergi Sports Consulting, demande de :
- Vu le Règlement Rome 1 du 17 juin 2008 applicable aux obligations contractuelles, les articles R. 1412-1 et suivants du Code du travail, les articles 76 et suivants du Code de procédure civile, le Code des obligations Suisse, les pièces, et notamment le contrat liant les parties, la Jurisprudence,
* A titre liminaire,
- Dire et juger recevable le contredit de compétence formé par elle
* a titre principal,
- reformer le jugement entrepris en ce qu'il s'est déclaré compétent pour connaitre du litige,
- DIRE ET JUGER que le contrat signé entre M. [S] et la société Sinergi Sports Consulting est un contrat de mandat,
- REFORMER le Jugement en ce qu'il a ordonné aux parties d'échanger leur argumentaire et pièces au regard du droit français,
- CONSTATER que le contrat de M. [S] prévoit une clause attributive de compétence au profit du Tribunal Arbitral du Sport situé à Lausanne, en conséquence,
- DIRE ET JUGER M. [S] irrecevable à saisir le Conseil de Prud'hommes de LYON,
- A défaut, si la clause attributive de juridiction devait être écartée,
- DIRE ET JUGER que le Conseil de prud'hommes était matériellement incompétent,
- DIRE ET JUGER qu'en matière de contrat de mandat, seul le Tribunal de grande instance de LYON peut être compétent,
- RENVOYER M. [S] à mieux se pourvoir devant le Tribunal de grande instance de LYON,
* à titre subsidiaire, si la Cour devait qualifier le contrat conclu entre M. [S] et la société Sinergi Sports Consulting de contrat de travail,
- CONSTATER que le contrat de M. [S] prévoit une clause attributive de compétence au profit du Tribunal Arbitral du Sport situé à Lausanne,
- DIRE ET JUGER irrecevable l'action de M. [S] au regard de la clause d'arbitrage prévue au contrat,
- A défaut, RENVOYER l'affaire devant le Conseil du Prud'hommes afin qu'il soit fait application du droit suisse,
* à toutes fins,
- DIRE ET JUGER que le contrat conclu entre M. [S] et la société Sinergi Sports Consulting est soumis à la loi suisse,
* à titre infiniment subsidiaire, si la Cour devait confirmer le Jugement en toutes ses dispositions, renvoyer les parties devant le Conseil de Prud'hommes de LYON,
* En tout état de cause,
- DEBOUTER M. [S] de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,
- CONDAMNER M. [S] à lui payer la somme de 4.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamner le même aux entiers dépens de l'instance
Attendu que par conclusions déposées au soutien de ses observations orales à l'audience, M. [S] demande de :
- VU les articles 14 du Code civil, L 1225- 5 du code du travail, la Convention de Lugano, les articles 77, 80, 88 du code de procédure civile
- Dire et juger non fondé le contredit élevé par la société Sinergi Sports Consulting
- Confirmer le jugement déféré.
- Vu l'article 89 du code de procédure civile,
- Evoquer le litige en invitant les parties d'avoir à conclure sur le fond.
- Condamner la Société Sinergi Sports Consulting à payer à M. [S] à titre de dommages-intérêts la somme de 5 000 euros, ainsi que la somme de 3 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, sous réserve de lui infliger également une amende civile
- la condamner aux dépens
Sur l'appel
Attendu que par conclusions déposées au soutien de ses observations orales à l'audience, la société de droit suisse Sinergi Sports Consulting, appelante , demande de :
- Vu le Règlement Rome 1 du 17 juin 2008 applicable aux obligations contractuelles, les articles R. 1412-1 et suivants du Code du travail, 76 et suivants du Code de procédure civile, le Code des obligations Suisse, les pièces et notamment le contrat liant les parties, la Jurisprudence,
* à titre liminaire,
- dire et juger recevable son appel
* à titre principal,
- CONSTATER que les parties se trouvent dans la cadre d'une situation de droit international privé,
- DIRE ET JUGER que le conflit de lois doit être résolu au regard du Règlement 593/2008 du 17 juin 2008 dit Rome 1,
- CONSTATER que la loi choisie par les parties dans le contrat est la loi suisse,
- CONSTATER que même dans l'hypothèse où le contrat litigieux serait qualifié de contrat de travail, ce choix n'a pas pour effet de priver le travailleur des dispositions impératives de droit français qui se seraient appliquées à défaut de choix, par conséquent,
- REFORMER le Jugement en ce qu'il a retenu l'application de la loi française au litige opposant M. [S] et la société Sinergi Sports Consulting,
- REFORMER le Jugement en ce qu'il a ordonné aux parties d'échanger leur argumentaire et pièces au regard du droit français, en conséquence,
- DIRE ET JUGER que le litige est soumis à la loi suisse quelle que soit la qualification du contrat,
* à toutes fins,
- DIRE ET JUGER que le contrat conclu entre M. [S] et la société Sinergi Sports Consulting est un contrat de mandat,en conséquence,
- REFORMER le Jugement en ce qu'il a ordonné aux parties d'échanger leur argumentaire et pièces au regard du droit français,
- CONSTATER que le contrat de M. [S] prévoit une clause attributive de compétence au profit du Tribunal Arbitral du Sport situé à Lausanne,
- DIRE ET JUGER irrecevable l'action de M. [S] au regard de la clause d'arbitrage prévue au contrat,
- A défaut, RENVOYER M. [S] à saisir le Tribunal de grande instance de LYON,
* à titre subsidiaire, si la Cour devait qualifier le contrat conclu entre M. [S] et la société Sinergi Sports Consulting de contrat de travail,
- CONSTATER que le contrat de M. [S] prévoit une clause attributive de compétence au profit du Tribunal Arbitral du Sport situé à Lausanne,
- DIRE ET JUGER irrecevable l'action de M. [S] au regard de la clause d'arbitrage prévue au contrat,
- à défaut, RENVOYER l'affaire devant le Conseil du Prud'hommes afin qu'il soit fait application du droit suisse,
* à titre infiniment subsidiaire, si la Cour devait confirmer le Jugement en toutes ses dispositions
- renvoyer les parties devant le Conseil de Prud'hommes de LYON,
* en tout état de cause,
- débouter M. [S] de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions
- CONDAMNER M. [S] à lui payer la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure civile et condamner le même aux entiers dépens de l'instance
Attendu que par conclusions déposées au soutien de ses observations orales à l'audience, M. [S], intimé, demande de :
* à titre principal,
- Dire et juger irrecevable l'appel interjeté par la société Sinergi Sports Consulting
* à titre subsidiaire,
- Vu les articles 14 du Code civil, L 1225- 5 du code du travail, la Convention de Lugano
- Confirmer le jugement déféré.
- Condamner la Société Sinergi Sports Consulting à lui payer à titre de dommages-intérêts la somme de 5 000 € ainsi que la somme de 3 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.
- La condamner aux dépens
Attendu que l'affaire a été plaidée à l'audience du 3 mai 2016
Attendu qu'il est expressément référé aux écritures des parties pour plus ample exposé de leurs faits, moyens et prétentions
SUR CE
Attendu que la recevabilité de l'appel et du contredit n'est pas contestée
Attendu que les deux affaires présentent de tels liens entre elles qu'il est de l'intérêt d'une bonne administration de la justice de les juger ensemble après jonction
Attendu que dans la mesure où Monsieur [S] a saisi le conseil de prud'hommes de Lyon pour faire reconnaître l'existence d'un contrat de travail, la juridiction prud'homale est bien compétente, à charge de renvoyer l'affaire à une autre juridiction si elle ne qualifiait par le contrat liant les parties de contrat de travail
Attendu que le conseil de prud'hommes a également retenu à bon droit que la clause attributive de compétence au Tribunal arbitral du sport de Lausanne n'avait pas été signée postérieurement à la naissance du différend survenu à l'occasion de l'exécution du contrat et qu'elle ne pouvait donc pas s'appliquer ; qu'en conséquence la juridiction prud'homale de Lyon était encore compétente pour apprécier un contrat devant s'exécuter en France par un employé (désigné comme tel dans le contrat 'employee') résidant à [Localité 3], soit dans le département du Rhône
Attendu cependant que le contrat prévoit expressément en cas de litige, l'application de la loi fédérale suisse ainsi que cela résulte de la commune intention des parties formulée de manière claire et exempte d'ambiguïté à l'article 12 dudit contrat
et qu'il convient en conséquence de renvoyer les parties devant le conseil de prud'hommes de Lyon afin qu'il soit fait application du droit fédéral helvétique
Attendu que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens
PAR CES MOTIFS
Statuant après en avoir délibéré, publiquement, en matière sociale, en dernier ressort et contradictoirement
Ordonné la jonction entre les affaires portant les numéros de répertoire général 15/06584 et 15/06173
Déclare l'appel et le contredit recevables
Confirme le jugement entrepris en ce que le conseil des prud'hommes de Lyon s'est déclaré compétent pour statuer sur le fond du litige
L'infirme en ses autres dispositions et statuant à nouveau
Dit que la loi fédérale suisse doit être appliquée au litige entre les parties et pour ce faire
Renvoie les parties devant le conseil de prud'hommes de Lyon
Dit que chacune des parties conservera la charge des dépens par elle exposés.
Le greffierPour MR BUSSIERE, Président empêché
Sophie MascrierDidier PODEVIN
Conseiller