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04/10/2016 | FRANCE | N°15/01451

France | France, Cour d'appel de Lyon, Sécurité sociale, 04 octobre 2016, 15/01451


AFFAIRE DE SÉCURITÉ SOCIALE



COLLÉGIALE



RG : 15/01451





U.R.S.S.A.F DU RHÔNE



C/

SOCIETE SAUR







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LYON

du 19 Janvier 2015

RG : 20120601











COUR D'APPEL DE LYON



Sécurité sociale



ARRÊT DU 04 OCTOBRE 2016



















APPELANTE :



U.R.S.S.A.F RHÔNE

ALPES

[Adresse 2]

[Adresse 3]



représenté par Mme [Y] en vertu d'un pouvoir spécial







INTIMÉE :



SAS SAUR

[Adresse 1]

[Adresse 4]



représentée par Me Jérôme MARGULICI de la SELARL CAPSTAN AVOCATS, avocat au barreau de PARIS









DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 30 Août 20...

AFFAIRE DE SÉCURITÉ SOCIALE

COLLÉGIALE

RG : 15/01451

U.R.S.S.A.F DU RHÔNE

C/

SOCIETE SAUR

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LYON

du 19 Janvier 2015

RG : 20120601

COUR D'APPEL DE LYON

Sécurité sociale

ARRÊT DU 04 OCTOBRE 2016

APPELANTE :

U.R.S.S.A.F RHÔNE ALPES

[Adresse 2]

[Adresse 3]

représenté par Mme [Y] en vertu d'un pouvoir spécial

INTIMÉE :

SAS SAUR

[Adresse 1]

[Adresse 4]

représentée par Me Jérôme MARGULICI de la SELARL CAPSTAN AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 30 Août 2016

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président

Chantal THEUREY-PARISOT, Conseiller

Marie-Christine DE LA SALLE, Conseiller

Assistés pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 04 Octobre 2016 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

FAIT, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

le 7 novembre 2011, l'URSSAF a établi une lettre d'observations à la suite d'un contrôle de la société SAUR portant sur la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010 mentionnant 15 chefs de redressement.

Par lettre du 2 décembre 2011, la société SAUR a sollicité l'examen complémentaire et l'abandon de deux chefs de redressement concernant :

- sur le point numéro 1 : l'abandon de la réintégration dans l'assiette des cotisations de l'indemnité de 400'650 € versée à M. [O] dans le cadre d'une sentence arbitrale rendue le 4 septembre 2009 et revêtue de l'exequatur par le président du TGI de Paris en date du 17 décembre 2009, soit 30 mois de salaire en réparation de son licenciement ne respectant pas son statut de salarié protégé lié à son mandat de conseiller prud'homme employeur et en l'absence d'autorisation préalable de l'inspection du travail,

- sur le point numéro 6 de la lettre d'observation: l'abandon de la réintégration dans l'assiette des cotisations de l'indemnité de 90'000 € versée à M. [N] à titre d'indemnité transactionnelle, forfaitaire, globale et définitive suite à un procès-verbal de conciliation dressé par le conseil de prud'hommes de Lyon le 23 octobre 2008, résultant d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail le 31 juillet 2008 modifiée en prise d'acte de la rupture de son contrat de travail le 1er octobre 2008,

Par jugement du 19 janvier 2015, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lyon a :

- annulé les redressements visés au point un et six de la lettre d'observation de l'URSSAF du 7 novembre 2011

- dit que l'indemnité pour violation du statut protecteur versé à mosnieur [O] doit être pris en compte pour l'appréciation des seuils d'exonération prévue par les dispositions combinées des articles L 242-1 du CSS et 80 duodecies du CGI

- dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du CPC

Le tribunal a estimé

- que l'indemnité pour violation du statut protecteur versée à Monsieur [O] devait être pris en compte pour l'appréciation des seuils d'exonérations prévues par les dispositions combinées des articles L242-1 du code de la sécurité sociale et 80 duodecies du CGI,

- que l'indemnité litigieuse allouée à M. [N] présentait un caractère indemnitaire destiné à compenser le préjudice né de la perte de l'emploi et des mauvaises conditions d'exécution du contrat de travail à l'origine de la rupture et ne saurait être un substitut de salaire soumis à cotisation.

L'URSSAF a interjeté appel de la décision.

Dans ses dernières conclusions, l'URSSAF demande l'infirmation du jugement et la validation du redressement du 7.11.11 concernant les points 1 et 6.

En ce qui concerne les sommes versées à M. [X] [O], elle s'appuie sur une décision de la Cour de Cassation du 12 février 2015 confirmée par un autre arrêt du 11 février 2016 qui retient que l'indemnité pour violation du statut protecteur, qui n'est pas au nombre des indemnités non imposables au titre de l'impôt sur le revenu des personnes physiques limitativement énumérées par l'article 80 duodecies du CGI, est soumise aux cotisations sociales et d'assurance-chômage en application des articles L 242-1 et L 5422-20 du code du travail relatif à l'assurance-chômage.

Oralement à l'audience, elle demande subsidiairement au vu des dernières conclusions de la société SAUR qui sollicite la confirmation de la décision du conseil de prud'hommes sur le point 1 du redressement, que la Cour tire les conséquences des dispositions combinées des articles L 242-1 du CSS et 80 duodecies du CGI sur les sommes allouées à monsieur [O] et que l'indemnité versée pour violation du statut protecteur soit prise en compte dans la détermination du montant total des indemnités de rupture pour apprécier les seuils d'exonération.

En ce qui concerne les sommes versées à M. [S] [N], l'URSSAF fait valoir qu'en l'absence de qualification de la rupture par le juge, démission ou licenciement, celle-ci a été recherchée au regard des éléments du dossier et qu'il en est résulté qu'elle était à l'initiative du salarié.

Elle rappelle que la prise d'acte par le salarié entraîne la rupture du contrat de travail et produit soit les effets :

-d'une démission si les faits reprochés à l'employeur ne sont pas établis,

-d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les manquements reprochés à l'employeur sont justifiés.

Elle rappelle que la société SAUR a qualifié de démission la nature du départ de M. [N] sur le document « déclaration automatisé des données sociales des formalités obligatoires'dont les données sont alimentées par le logiciel de paie,

-que la durée du préavis d'un mois défini dans le procès-verbal de conciliation ne correspond pas, compte tenu de l'ancienneté de M. [N], à la durée minimale fixée en cas de licenciement par l'article L234-1 du code du travail,

-qu'aucune attestation ASSEDIC n'est identifiée.

Elle estime dès lors que les parties se sont accordées sur une prise de la rupture du contrat de travail produisant les effets d'une démission du salarié et que l'indemnité allouée à M. [N] ne peut bénéficier d'aucune exonération et doit être soumise à cotisation.

Subsidiairement, elle demande que si la cour considère que la prise d'acte de la rupture du contrat devait produire les effets d'un licenciement, elle en déduise que l'indemnité transactionnelle ne reste soumise à cotisations sociales que pour la partie correspondant à des éléments de salaire et qu'en l'espèce il est établi que M. [N] avait lors de sa saisine du conseil des prud'hommes formulé des revendications salariales concernant un rappel sur cinq ans du salaire Étam à cadre à hauteur de 50 000 €.

Dans ses dernières conclusions, la société SAUR s'agissant du point de redressement numéro un, concernant les sommes versées à M. [O] compte tenu de la position exprimée par la Cour de Cassation postérieurement au jugement rendu par le TASS de Lyon, souhaite ne pas poursuivre davantage la contestation de ce chef de redressement dans la présente procédure d'appel et sollicite la confirmation du jugement du TASS de LYON sur ce point.

Elle demande à la cour d'appel de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a annulé le chef de redressement numéro six, concernant l'indemnité allouée à M. [N].

Elle réclame en outre la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du CPC.

La société SAUR fait valoir que la rupture du contrat de travail lui est imputable et affirme que la prise d'acte de M. [N] fait suite notamment à son refus d'accepter un passage à temps partiel et à des divergences sur l'évolution de sa rémunération et que son souhait de mettre un terme au litige dans le cadre de la procédure de conciliation atteste qu'elle considérait les griefs invoqués par M. [N] justifiés et que la mention erronée de démission apposée par elle sur le document 'déclaration automatisé des données sociales des formalités obligatoires' dans la perspective d'un contentieux prud'homal ne suffit pas à disqualifier la nature de la rupture du contrat de travail qui demeure une prise d'acte, mode de rupture distinct de la démission.

Elle rappelle que dans sa saisine du conseil de prud'hommes, monsieur [N] avait chiffré l'ensemble de ses demandes indemnitaires à hauteur de 115 000 € mais n'avait pas chiffré sa demande de rappel de salaires et que par voie de conséquence l'URSSAF est irrecevable à procéder à un redressement sur la base des éléments de salaire que le conseil de prud'hommes n'a pas apprécié dans son quantum.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens des parties, aux conclusions écrites qui ont été soutenues oralement lors de l'audience de plaidoiries.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le point 1 du redressement concernant les sommes versées à monsieur [O]

En application de l'article L 242-1 du CSS, tout avantage en argent ou en nature versé en contrepartie ou à l'occasion du travail doit être soumis à cotisations... sont aussi prises en compte les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur .... à hauteur de la fraction de ces indemnités qui est assujettie à l'impôt sur le revenu en application de l'article 80 duodécies du CGI.

Ainsi l'indemnité pour violation du statut protecteur, versée à l'occasion de la rupture du contrat de travail et qui n'est pas au nombre des indemnités non imposables au titre de l'impôt sur le revenu des personnes physiques limitativement énumérées par l'article 80 duodécies du CGI, est soumise aux cotisations sociales en application de l'article L 242-1 du CSS à hauteur de la fraction de ces indemnités qui est assujettie à l'impôt sur le revenu en application de l'article 80 duodecies du CGI.

En l'espèce, la somme de 400'650 € représentant 30 mois de salaire pour réparer l'atteinte au statut protecteur de monsieur [O] a bien été versée à l'occasion de la rupture du travail à l'initiative de l'employeur et ne figure pas dans la liste de l'article 80 duodecies comme ne constituant pas une rémunération imposable.

Il en résulte que cette indemnité doit être prise en compte pour l'appréciation des seuils d'exonération.

Il convient donc de confirmer la décision du tribunal des affaires de sécurité sociale sur ce point et d'annuler le redressement au point 1 de la lettre d'observations de l'URSSAF et de dire que l'indemnité de 400 650 € pour violation du statut protecteur versée à monsieur [O] doit être prise en compte pour l'appréciation des seuils d'exonération prévue par les dispositions combinées des articles L 242-1 du CSS et 80 duodecies du CGI ;

Sur le point 6 du redressement concernant les sommes versées à monsieur [N]

Conformément aux dispositions de l'alinéa 10 de L 242-1 du CSS dans sa rédaction applicable à l'époque des faits, sont exonérées de cotisations les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur.

Or, l'URSSAF soutient que seules les indemnités versées dans le cadre d'un licenciement

stricto sensu peuvent bénéficier d'une exonération à hauteur de la fraction non assujettie à l'impôt sur le revenu, de sorte que les indemnités versées en conséquence d'une prise d'acte, correspondant à une démission, doivent être assujetties à cotisations

En l'espèce monsieur [N] a saisi le conseil de prud'hommes le 31.07.08 d'une demande de résiliation de son contrat de travail aux torts de son employeur et ce n'est que lors de la conciliation que monsieur [N] a pris acte de la rupture.

Par ailleurs le fait que l'employeur ait souhaité mettre un terme à ce litige atteste de ce qu'il considérait que les manquements invoqués par son salarié étaient de nature à justifier que la prise d'acte puisse emporter les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Un procès-verbal de conciliation totale est donc intervenu le 23 octobre 2008 précisant que :

«'

-M. [S] [N] prend acte de la rupture de son contrat de travail en date du 1er octobre 2008 avec un préavis jusqu'au 31 octobre 2008.

-M. [S] [N] renonce à se prévaloir de son statut de salarié protégé,

-la société SAUR s'engage à payer à M. [S] [N] qui l'accepte la somme de 90'000€ ( somme nette de CSG /RD S) à titre d'indemnité transactionnelle forfaitaire globale et définitive. »

Ainsi la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié pour des fautes qu'il impute à l'employeur produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par ailleurs, les mentions figurant sur le document DADSU ou le délai du préavis n'ont aucune incidence sur la qualification de la rupture du contrat de travail ou son imputabilité.

Enfin M. [N] fait figurer sur sa demande devant le conseil des prud'hommes un rappel de salaire sur cinq ans pour mémoire et aucun élément ne permet de rattacher l'indemnité allouée dans le cadre de la conciliation à des éléments de salaire soumis à cotisations alors que M. [N] n'a pas chiffré sa demande à ce titre et qu'il a sollicité 115'000 € pour l'exécution déloyale du contrat de travail et discrimination syndicale.

En conséquence, au vu de ces éléments, il convient de confirmer la décision du tribunal des affaires de sécurité sociale sur ce point et de dire que l'indemnité litigieuse présentant un caractère indemnitaire destiné à compenser le préjudice né de la perte de l'emploi et des mauvaises conditions d'exécution du contrat de travail à l'origine de la rupture, ne saurait être un substitut de salaire soumis à cotisation de sorte que le redressement de L'URSSAF sur le point six doit être annulé.

Aucune considération d'équité ne commande d'allouer à la société SAUR une indemnité au titre de l'article 700 du CPC.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

statuant contradictoirement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant

Déboute la SAS SAUR de sa demande au titre de l'article 700 du CPC;

Rappelle que la procédure est sans frais ni dépens,

Dispense l'appelant du paiement du droit institué par l'article R.144-10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale.

LA GREFFIÈRELE PRESIDENT

Malika CHINOUNE Elisabeth POLLE-SENANEUCH


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 15/01451
Date de la décision : 04/10/2016

Références :

Cour d'appel de Lyon 51, arrêt n°15/01451 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-10-04;15.01451 ?
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