La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/07/2016 | FRANCE | N°15/03205

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 01 juillet 2016, 15/03205


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





R.G : 15/03205





[S]



C/

SA SANOFI PASTEUR







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 26 Mars 2015

RG : F 13/03868

COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 1er JUILLET 2016





APPELANT :



[S] [S]

né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]



Comparant en

personne, assisté de Me Véronique LAVALLART de la SELARL LAVALLART - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS





INTIMÉE :



SA SANOFI PASTEUR

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représentée par Me Joseph AGUERA de la SCP JOSEPH AGUERA & ASSOCIES, a...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : 15/03205

[S]

C/

SA SANOFI PASTEUR

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 26 Mars 2015

RG : F 13/03868

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 1er JUILLET 2016

APPELANT :

[S] [S]

né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Comparant en personne, assisté de Me Véronique LAVALLART de la SELARL LAVALLART - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

SA SANOFI PASTEUR

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Joseph AGUERA de la SCP JOSEPH AGUERA & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 20 Mai 2016

Présidée par Natacha LAVILLE, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Gaétan PILLIE, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Michel SORNAY, président

- Didier JOLY, conseiller

- Natacha LAVILLE, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 1er Juillet 2016 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Michel SORNAY, Président et par Gaétan PILLIE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

[S] [S] a été engagé à compter du 21 décembre 1983 par la société RHONE-POULENC en qualité de technicien de production. Il a été successivement promu à diverses fonctions au sein de la société RHONE-POULENC aux droits de laquelle est venue la société AVENTIS aux droits de laquelle est venue la société SANOFI PASTEUR, et en dernier lieu celles de responsable de la formation de l'organisation du travail au sein de l'établissement de [Localité 4] (94)

Suivant contrat à durée indéterminée en date du 20 décembre 2010, la société SANOFI PASTEUR a engagé [S] [S] en qualité de directeur adjoint responsable de l'unité opérationnelle HEPATITE A- ROUGEOLE-RUBEOLE- DENGUE à compter du 1er avril 2011 affecté sur le site de [Localité 5] (69) sur la base d'un forfait annuel de 201 jours par année civile conformément à l'accord d'aménagement et de réduction du temps de travail en vigueur dans l'entreprise, et moyennant une rémunération annuelle brute de 106 000 versée en 13 mensualités dont une à titre de gratification

La relation de travail était régie par la convention collective de l'industrie pharmaceutique.

Au dernier état de la relation de travail, la rémunération mensuelle brute s'établissait à la somme de 8 483.27 euros.

La société SANOFI PASTEUR a élaboré un projet de plan de mesures d'accompagnement à la mobilité interne et aux départs volontaires dans le cadre d'un projet de réorganisation pour les années 2012 à 2015.

Le 22 mai 2013, [S] [S] s'est déclaré volontaire pour un départ immédiat de la société SANOFI PASTEUR dans le cadre d'une mobilité externe pour un projet de contrat à durée indéterminée au sein de l'entreprise NOVARTIS, qui exerce une activité dans le secteur de la pharmacie en Suisse allemande.

Par courriel du 3 juin 2013, la société SANOFI PASTEUR a informé [S] [S] que son dossier de mobilité externe n'avait pas été accepté par le comité de validation aux motifs que son poste n'était pas supprimé, que son départ ne permettait pas le repositionnement d'un collaborateur sur le poste responsable d'unité opérationnelle compte tenu de son niveau de responsabilités et de compétences, et que le projet de contrat à durée indéterminée était lié à une entreprise concurrente.

Par courrier du 12 juin 2013, [S] [S] a pris acte de la rupture de son contrat de travail au 14 juin 2013 au soir en reprochant à son employeur d'avoir refusé son dossier de mobilité externe alors qu'il remplissait les conditions d'éligibilité prévues au plan élaboré par l'entreprise et ne se trouvait visé par aucun des cas d'exclusion.

Le 29 juillet 2013, [S] [S] a saisi le conseil de prud'hommes de LYON aux fins:

- de voir juger que sa prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- de condamnation de la société SANOFI PASTEUR au paiement d'une indemnité au titre de l'aide à la mobilité géographique, d'une prime de réalisation rapide, d'une indemnité de rupture, d'une indemnité spécifique de départ volontaire, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'un rappel de salaires au titre du bonus 2013 et les congés payés afférents, d'une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents, d'un rappel de salaires à titre d'heures supplémentaires et les congés payés afférents, et d'une indemnité de procédure,

- de remise des documents de fin de contrat conformes sous astreinte.

Par jugement rendu le 26 mars 2015, le conseil de prud'hommes a:

- dit que la prise d'acte s'analyse en une démission,

- débouté [S] [S] de l'intégralité de ses demandes,

- débouté la société SANOFI PASTEUR de sa demande au titre du préavis non effectué,

- laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens.

La cour est saisie de l'appel interjeté le 13 avril 2015 par [S] [S].

Par conclusions régulièrement communiquées, visées par le greffier et développées oralement à l'audience du 20 mai 2015, auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, [S] [S] demande à la cour:

- de juger que sa prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- de juger que la convention de forfait est nulle ou à tout le moins inopposable au salarié,

- de condamner la société SANOFI PASTEUR au paiement des sommes suivantes avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil avec capitalisation:

* 8 000 euros à titre d'indemnité pour aide à la mobilité géographique,

* 35 778 euros au titre de la prime de réalisation rapide,

* 127 727.46 euros au titre d'une indemnité de rupture,

* 286 224 euros à titre d'indemnité spécifique de départ volontaire,

* 71 556 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 15 161.55 euros à titre de rappel de salaires pour le bonus 2013 et 1 561 euros au titre des congés payés afférents,

* 35 778 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, et 3 577 euros au titre des congés payés afférents,

* 208 067.90 euros à titre de rappel de salaires pour des heures supplémentaires, et 20 804 euros au titre des congés payés afférents,

* 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- d'ordonner la remise des documents de fin de contrat conformes à la décision à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard et par document à compter des 8 jours suivant le prononcé de la décision.

Par conclusions régulièrement communiquées, visées par le greffier et développées oralement à l'audience du 20 mai 2016, auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, la société SANOFI PASTEUR demande à la cour:

- de débouter [S] [S] de ses demandes,

- de condamner [S] [S] au paiement des sommes suivantes:

* 35 778 euros au titre du préavis non effectué,

* 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

1 - sur la prise d'acte de la rupture du contrat de travail:

Attendu qu'il résulte de la combinaison des articles L 1231-1, L 1237-2 et L 1235-1 du code du travail que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail; qu'il incombe au salarié d'établir la réalité des faits invoqués à l'encontre de l'employeur.

Attendu qu'il appartient au juge d'analyser tous les manquements invoqués par le salarié, y compris ceux qui ne figurent pas dans l'écrit de prise d'acte, lequel ne fixe pas les limites du litige.

Attendu que si les faits justifient la prise d'acte par le salarié, la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse; que dans le cas contraire, la prise d'acte produit les effets d'une démission.

Attendu qu'en l'espèce, il est constant que la société SANOFI PASTEUR a élaboré un projet de plan de mesures d'accompagnement à la mobilité interne et aux départs volontaires dans le cadre d'un projet de réorganisation pour les années 2012 à 2015 visant à pérenniser les activités de l'entreprise en FRANCE en restaurant sa compétitivité économique;

que l'article 4.1.1. inséré au titre IV intitulé 'LA MOBILITE EXTERNE' de ce document est rédigé comme suit:

' 4.1.1. Conditions d'éligibilité

Les dispositions relatives à la mobilité externe sont exclusivement basées sur le volontariat. Elles sont ouvertes à tout collaborateur répondant aux conditions suivantes:

* disposer d'un projet conduisant immédiatement ou à terme à une solution professionnelle stable telle que définie à l'article 4.4.8.;

* compter une ancienneté effective minimum de 5 ans dans le Groupe au 31 décembre 2012;

* déclarer par écrit sa volonté de bénéficier du dispositif et obtenir l'acceptation de sa candidature au départ par la Direction après validation de son projet professionnel;

* ne pas être en situation de faire valoir ses droits à la liquidation de retraite à taux plein dans les 6 mois suivant le terme du contrat de travail (en cas de concrétisation immédiate du projet professionnel) ou dans les 6 mois suivant l'adhésion au congé de transition professionnelle;

* ne pas être éligible au dispositif de valorisation d'expérience et de transfert de compétences senior et au dispositif de transition de fin de carrière.';

Que l'article 4.2.2. dudit plan prévoit en outre que:

'(...) A réception de sa candidature, la Direction des Ressources Humaines de SANOFI PASTEUR disposera d'un délai de 15 jours calendaires pour accepter ou refuser la candidature. Tout refus devra être motivé (...)';

Que l'article 4.1.2. stipule que les salariés occupant des postes limitativement énumérés dans le secteur des assurances, de la fiscalité et des systèmes d'information sont exclus du bénéfice des mesures de départ volontaire aux motifs que ces postes ont un caractère essentiel au fonctionnement des organisations ou de l'activité, ont un niveau d'expertise ou de technicité élevé et que leur remplacement s'avérerait particulièrement difficile ;

Qu'il était en outre prévu des mesures financières assortissant le dispositif de la mobilité externe détaillées à l'article 4.5.4. et qui bénéficient au salarié qui a la possibilité de les activer au plus tard un mois avant la fin de son contrat de travail.

Attendu que dans le cadre de ce projet, [S] [S] a présenté le 22 mai 2013 une demande de mobilité externe en se prévalant d'un projet de contrat à durée indéterminée au sein de l'entreprise NOVARTIS, qui exerce une activité dans le secteur de la pharmacie en SUISSE ALLEMANDE;

Que la demande de [S] [S] a été refusée aux motifs que son poste n'était pas supprimé, que son départ ne permettait pas le repositionnement d'un collaborateur sur le poste responsable d'unité opérationnelle compte tenu de son niveau de responsabilités et de compétences et que le projet de contrat à durée indéterminée était lié à une entreprise concurrente;

Que [S] [S] a pris alors acte de la rupture de son contrat de travail par courrier du 12 juin 2013 avec effet au 14 juin 2013 au soir.

Attendu que [S] [S] soutient que sa prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle en ce qu'elle est justifiée par le refus de son employeur qui présente un caractère abusif; que l'appelant conteste ainsi d'une part la faculté de l'employeur de rendre une décision de refus et d'autre part la légitimité des motifs.

Attendu qu'il ressort des énonciations du plan pour sa partie concernant la mobilité externe et rappelées ci-dessus que le dispositif doit bénéficier aux salariés de la société SANOFI PASTEUR qui ont obtenu préalablement l'acceptation de leur candidature au départ volontaire par l'employeur; qu'en cas de refus d'une candidature, la société SANOFI PASTEUR est tenu de motiver sa décision ;

Que la circonstance que la décision de refus à l'égard de [S] [S] émane d'un comité de validation non prévu par les dispositions du plan de mobilité interne et de départs volontaires ne rend pas la décision litigieuse inopposable à [S] [S] dès lors qu'elle lui a été notifiée suivant courriel de [X] [U] en qualité de directrice des ressources humaines du site de [Localité 5];

Qu'ainsi, la société SANOFI PASTEUR avait la faculté de refuser la candidature de [S] [S] à la mobilité externe.

Attendu ensuite que s'agissant de la légitimité des motifs du refus litigieux, il convient de relever qu'en ce qui concerne le motif tiré du haut niveau de compétence de [S] [S], la société SANOFI PASTEUR n'est pas fondée à l'invoquer; qu'en effet, le poste de [S] [S] n'entre pas dans la liste limitative de postes dont les salariés sont exclus du bénéfice des mesures de départ volontaire en raison d'une part de leur niveau d'expertise ou de technicité élevé et d'autre part du fait que leur remplacement s'avérerait particulièrement difficile, et qui relèvent des secteurs des assurances, de la fiscalité et des systèmes d'information ; que [S] [S] ne peut donc être exclu de ce chef.

Attendu que s'agissant du surplus des motifs (maintien du poste de [S] [S]; départ à la concurrence), la cour relève:

- qu'il n'est prévu par aucune disposition du plan que les motifs d'un refus de candidature reposeraient uniquement sur le respect des conditions d'exigibilité et des cas d'exclusion du dispositif de mobilité externe, que l'employeur est ainsi autorisé à invoquer des motifs de nature différente ;

- qu'aucune pièce du dossier n'établit que le poste occupé par [S] [S] devait être supprimé; que d'ailleurs, la société SANOFI PASTEUR justifie qu'elle a diffusé en interne une proposition visant à pourvoir le poste laissé vacant du fait de la prise d'acte de [S] [S] ;

- qu'il est indiscutable que le contrat de travail de [S] [S] ne stipule aucune clause de non-concurrence et que le départ à la concurrence n'est pas mentionné dans les cas d'exclusion prévus pour déposer une candidature à un départ volontaire;

Que pour autant, ces circonstances ne font pas obstacle à ce que la société SANOFI PASTEUR, qui a élaboré un plan de réorganisation visant à pérenniser ses activités en FRANCE en restaurant sa compétitivité économique à l'horizon 2015, puisse se prévaloir du passage à la concurrence inscrit dans le projet de [S] [S] pour refuser sa candidature au départ;

Qu'en effet d'une part, le projet de [S] [S] consiste à sa mettre uniquement au service d'une société suisse concurrente de son employeur alors qu'au titre des mesures financières assortissant ce projet, il n'est pas contesté que [S] [S] était susceptible de percevoir la somme de 465 635.60 euros ainsi que cela ressort du courrier de la société SANOFI PASTEUR en réponse à la lettre de prise d'acte;

Que l'allocation d'un tel montant au bénéfice de [S] [S] n'aurait pas répondu à son objectif d'assistance financière du salarié;

Que [S] [S] devait subir un préjudice nécessairement limité à l'occasion de son départ de la société SANOFI PASTEUR puisqu'il devait être embauché dès la fin du mois de mai 2013 en SUISSE pour des fonctions de même nature;

Que d'autre part, il ressort des procès-verbaux des séances du comité central d'entreprise qui ont eu lieu durant la procédure d'information-consultation et qui sont produits aux débats qu'il a été souhaité que le dispositif de mobilité externe ne vise pas à permettre, le cas échéant par un accompagnement financier, la défection des dirigeants de la société SANOFI PASTEUR;

- que [S] [S] ne justifie pas qu'il se trouve dans une situation identique à celle de [M] [E], lequel a été autorisé à quitter la société SANOFI PASTEUR pour une société concurrente; qu'il ressort en effet du courrier de candidature à une mobilité externe de [M] [E] versé au dossier que ce dernier avait le projet d'intégrer la société FAB'ENTECH afin de renforcer le partenariat de cette société avec la société SANOFI PASTEUR; que [M] [E] disposait donc d'un projet cohérent qui justifiait l'acceptation de sa candidature au départ volontaire;

- que le document intitulé 'fiche validation de projet emploi ou formation - espace mobilité emploi' produit en pièce n°3 par l'appelant et qui mentionne un avis favorable au projet de [S] [S] a été établi par une société de consultant et n'engage à aucun titre la société SANOFI PASTEUR.

Qu'il s'ensuit que la société SANOFI PASTEUR est fondée à invoquer l'absence de suppression du poste de [S] [S] ainsi que le départ à la concurrence inscrit dans son projet pour refuser sa candidature à la mobilité externe ;

Attendu qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que le refus n'est pas abusif et ne peut fonder la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par [S] [S], laquelle produit en conséquence les effets d'une démission ;

Que le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a dit que la prise d'acte s'analyse en une démission et débouté [S] [S] de l'intégralité de ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail.

2 - sur la convention de forfait

Attendu que selon les article L 3121-38 du code du travail et suivants, la durée du travail d'un salarié peut être fixée par une convention individuelle de forfait en jours sur l'année prévue par un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou à défaut par une convention ou un accord de branche; que la conclusion d'une convention de forfait requiert l'accord du salarié et doit être établie par écrit.

Attendu que l'article L 3121-46 du code du travail dispose que:

' Un entretien annuel individuel est organisé par l'employeur, avec chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours sur l'année. Il porte sur la charge de travail du salarié, l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre l'activité professionnelle et la vie personnelle et familiale, ainsi que sur la rémunération du salarié.'

Attendu que la méconnaissance par l'employeur des dispositions précitées rend la convention de forfait en jours inopposable au salarié.

Attendu qu'en l'espèce, la cour relève que la réalité de la convention de forfait de [S] [S] ressort du contrat de travail souscrit entre les parties le 20 décembre 2010 prévoyant que le salarié était soumis à un forfait annuel de 201 jours par année civile conformément à l'accord d'aménagement et de réduction du temps de travail en vigueur dans l'entreprise;

Que toutefois, l'employeur ne justifie pas avoir respecté l'obligation d'entretien annuel prévue ci-dessus, si bien que la convention de forfait est inopposable à [S] [S];

Que le jugement déféré sera donc infirmé sur ce point.

3 - sur les heures supplémentaires

Attendu que le salarié auquel la convention de forfait est inopposable se trouve assujetti à la durée légale hebdomadaire du travail; qu'il est dès lors en droit de réclamer le paiement d'un rappel de salaires à titre d'heures supplémentaires.

Aux termes de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, et le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Attendu que si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

Attendu qu'en l'espèce, il résulte de ce qui précède que [S] [S] s'est trouvé soumis au régime de la durée légale du travail fixé à 35 heures hebdomadaires.

Attendu que [S] [S] sollicite le paiement d'un rappel de salaires au titre d'heures supplémentaires qu'il aurait effectuées à partir de l'année 2008 jusqu'au 22 premières semaines de l'année 2013.

Attendu que force est de constater qu'aucun élément de nature à étayer la demande n'est fourni préalablement par [S] [S]; que ce dernier affirme en effet péremptoirement dans ses conclusions reprises à l'audience que: 'Il est patent que Monsieur [S] travaillait de 7h30 à 18h30 soit dix heures par jour (si l'on compte une pause déjeuner d'une heure) soit 50 heures de travail effectif par semaine, ce qui équivaut à quinze heures supplémentaires par semaine';

Qu'il présente sa demande détaillée année par année mais ne verse aucune pièce pour étayer sa demande;

Que faute de production d'un quelconque élément de preuve laissant présumer la réalisation des heures supplémentaires alléguée, [S] [S] se trouve mal fondé en sa demande de ce chef;

Que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté [S] [S] de sa demande au titre des heures supplémentaires.

4 - sur le bonus 2013

Attendu que l'article 9 du code de procédure civile dispose qu'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Attendu qu'en l'espèce, [S] [S] sollicite le paiement de l'intégralité d'une prime d'objectifs pour l'année 2013; que cette demande s'analyse donc en une demande au titre d'un rappel de salaires;

Que l'appelant fait valoir que le montant de cette prime doit être calculé sur la base d'un pourcentage de sa rémunération annuelle qu'il fixe à 15%, ce taux ayant été retenu pour l'année 2012; que les documents mentionnant les objectifs fixés par son employeur ne lui étaient pas opposables pour avoir été rédigés en langue anglaise.

Mais attendu qu'il n'est pas discutable que le paiement de la prime d'objectifs constitue la contrepartie de la réalisation par le salarié des objectifs fixés par l'employeur; que force est de constater que [S] [S] ne démontre par aucune pièce qu'il a réalisé les objectifs que lui avait fixés la société SANOFI PASTEUR et qui lui ouvriraient droit au paiement d'une prime;

Que cette carence ne saurait être palliée par le moyen tiré de la rédaction de documents en langue anglaise pour fonder la demande de rappel de salaires, un cadre dirigeant de ce niveau au sein d'une entreprise internationale telle que SANOFI PASTEUR ayant nécessairement une connaissance suffisante de la langue anglaise pour comprendre les objectifs annuels qui lui étaient fixés, ce que confirme en l'espèce, s'il en était besoin, l'absence de contestation de ses objectifs ou de demande d'explication de l'intéressé au sujet de ces objectifs ainsi fixés en anglais ;

Que [S] [S] doit donc être débouté de cette demande et le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

5 - sur la demande de la société SANOFI PASTEUR

Attendu que [S] [S], dont la prise d'acte produit les effets d'une démission, n'a pas exécuté le préavis auquel il était tenu durant une durée de trois mois en vertu de l'article 32 de la convention collective de l'industrie pharmaceutique applicable à la relation de travail;

Que [S] [S] se trouve donc redevable envers la société SANOFI PASTEUR d'une indemnité pour non-respect du préavis de démission d'un montant égal à la rémunération brute qu'il aurait perçue s'il avait travaillé;

Qu'il n'est pas discuté que le montant de ce préavis s'établit à la somme de 35 778 euros;

Que le jugement déféré sera infirmé sur ce point et [S] [S] sera condamné à payer à ce titre à la société SANOFI PASTEUR la somme de 35 778 euros avec, par application de l'article 1315-1 du code civil, intérêts au taux légal à compter du 27 novembre 2014, date de l'audience du bureau de jugement du conseil de prud'hommes lors de laquelle l'employeur a présenté cette demande pour la première fois, puisqu'aucun jeu de conclusions antérieures ne figure au dossier transmis à la Cour d'appel ;

6 - sur les demandes accessoires

Attendu qu'il y a lieu de confirmer le jugement entrepris statuant sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.

Attendu qu'il convient de laisser à chaque partie la charge de ses propres dépens.

Attendu que l'équité et les situations économiques respectives des parties justifient qu'il ne soit pas fait application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions SAUF en ce qu'il a:

- débouté [S] [S] de sa demande au titre de la convention de forfait,

- débouté la société SANOFI PASTEUR de sa demande au titre du préavis,

STATUANT de nouveau sur les chefs infirmés et Y AJOUTANT,

DIT que la convention individuelle de forfait est inopposable à [S] [S],

CONDAMNE [S] [S] à payer à la société SANOFI PASTEUR la somme de 35 778 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 novembre 2014, à titre d'indemnité pour non-respect du préavis de démission,

LAISSE à chaque partie la charge de ses propres dépens d'appel,

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais en cause d'appel.

Le GreffierLe Président

Gaétan PILLIEMichel SORNAY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 15/03205
Date de la décision : 01/07/2016

Références :

Cour d'appel de Lyon SB, arrêt n°15/03205 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-07-01;15.03205 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award