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27/04/2016 | FRANCE | N°15/05388

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 27 avril 2016, 15/05388


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





R.G : 15/05388





société COFELY INEO RHONE-ALPES AUVERGNE



C/

[B]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 21 Janvier 2014

RG : F 12/04551











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 27 AVRIL 2016







APPELANTE :



société COFELY INEO RHONE-ALPES AUVERGNE

Mr [

O], directeur des ressources humaines

[Adresse 1]

[Localité 1]



comparante en personne, assistée de Me David LACHASSAGNE, de la SELARL LEXCASE, avocat au barreau de LYON







INTIMÉ :



[S] [B]

né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 2] (PORTUGAL)

[Adr...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : 15/05388

société COFELY INEO RHONE-ALPES AUVERGNE

C/

[B]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 21 Janvier 2014

RG : F 12/04551

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 27 AVRIL 2016

APPELANTE :

société COFELY INEO RHONE-ALPES AUVERGNE

Mr [O], directeur des ressources humaines

[Adresse 1]

[Localité 1]

comparante en personne, assistée de Me David LACHASSAGNE, de la SELARL LEXCASE, avocat au barreau de LYON

INTIMÉ :

[S] [B]

né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 2] (PORTUGAL)

[Adresse 2]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de Me François DUMOULIN de la SCP ANTIGONE AVOCATS, avocat au barreau de LYON substitué par Me ANOR

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 08 Février 2016

Présidée par Michel BUSSIERE, Président magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Michel BUSSIERE, président

- Agnès THAUNAT, conseiller

- Didier PODEVIN, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 27 Avril 2016 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Michel BUSSIERE, Président et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

Monsieur [S] [B] a été embauché à compter du 17 juillet 1989 pour une durée déterminée, puis en contrat à durée indéterminée, en qualité de monteur-électricien par la société L'ENTREPRISE INDUSTRIELLE, devenue ensuite la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne, filiale française du groupe GDF SUEZ spécialisée dans le génie électrique .

Au dernier état des relations contractuelles, il exerçait les fonctions de Maître-Chef d'équipe, niveau 4, coefficient 180, selon classification de la convention collective des travaux publics, et percevait une rémunération mensuelle brute de 2.438,85 € pour 151,67 heures de travail, outre une prime d'ancienneté de 10,06 €, soit un salaire brut moyen de 2.448,91 € .

Il a adhéré au syndicat CGT et s'est vu confier divers mandats de représentation du personnel à compter de l'année 1997. Il exerçait ainsi depuis le 11 mars 2010 un mandat de membre titulaire au comité d'établissement de la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne.

Convoqué le 3 septembre 2012 à un entretien préalable fixé au 14 septembre suivant en vue d'une sanction disciplinaire, il a été sanctionné d'un avertissement par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 3 octobre 2012 pour le motif ainsi énoncé :

« Le mardi 28 août 2012, aux alentours de 7h30, sur le chantier Europe 2, en présence ce jour de M. [Q] [R], vous vous êtes violemment emporté et avez menacé votre chef de chantier M. [L] [M], en ces termes : un jour ça ira mal pour toi, on va t'attraper et tu moucheras rouge.

Il est clair que chacun a le droit de s'exprimer, d'échanger et d'être en désaccord mais pas de cette façon.

M. [Q] [R], habitué des chantiers et de ses us et coutumes depuis plusieurs années, a constaté et confirmé que ce jour-là, vous étiez plus qu'emporté, que vous vous êtes exprimé avec beaucoup de violence et que vous étiez menaçant envers M. [M]. Il vous a même demandé sur le champ de vous ressaisir en ces termes : calme toi [S].

Vous avez reconnu aisément lors de l'entretien que vous vous étiez emporté.

Votre comportement excessif et votre niveau d'agressivité constituent des manquements graves à vos obligations d'ordre comportemental et relationnel.

Il est inadmissible que vous lanciez de telles menaces à votre supérieur hiérarchique.

Votre agressivité est d'autant plus intolérable qu'elle ne peut pas être justifiée par vos récriminations.

Votre réaction abusive et choquante nous indigne' »

Après avoir estimé cet avertissement injustifié et contesté par lettre du 23 octobre 2012 le bien-fondé des griefs invoqués à l'appui de cette sanction disciplinaire, et après que la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne lui en ait confirmé les termes par lettre en réponse du 6 novembre suivant, Monsieur [B] a saisi le 29 novembre 2012 le conseil de prud'hommes de Lyon afin de voir prononcer l'annulation de l'avertissement et obtenir la condamnation de son employeur à lui payer les sommes de 2.500,00 € à titre de dommages-intérêts et de 1.500,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne s'est opposée à ses demandes et a sollicité l'octroi de la somme de 1.500,00 € en application de l'article 700 du code de procédure civile .

Par jugement rendu le 21 janvier 2014, le conseil de prud'hommes de Lyon, section industrie, a :

' Dit que la sanction infligée à Monsieur [B] n'est pas justifiée ;

' Prononcé l'annulation de l'avertissement du 14 septembre 2011 prononcé par la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne à l'encontre de Monsieur [B];

' Dit la demande de dommages-intérêts sans objet ;

' Condamné la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne à régler à Monsieur [B] la somme de 500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

' Dit qu'il n'y a pas lieu de retenir la demande reconventionnelle formée par la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne ;

' Débouté la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne de sa demande, à la barre, de dommages et intérêts ;

' Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

' Laissé à la charge de la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne, qui succombe, les entiers dépens de l'instance.

Par lettre recommandée en date du 6 février 2014 enregistrée le lendemain au greffe de la cour, la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne a régulièrement interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 31 janvier 2014.

L'affaire n'ayant pas été en état d'être plaidée à l'audience du 10 décembre 2014, la radiation du rôle a été ordonnée par ordonnance de ce jour du magistrat chargé d'instruire l'affaire.

Elle a été rétablie au rôle de la cour le 2 juin 2015 par le conseil de Monsieur [B].

La société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne demande l'infirmation du jugement rendu, en reprenant oralement à l'audience du 8 février 2016 par l'intermédiaire de son conseil les conclusions qu'elle transmises le 4 février 2016 et auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé de ses prétentions et moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, et tendant à :

Infirmer le jugement rendu le 21 janvier 2014 par le conseil de prud'hommes de Lyon en ce qu'il a annulé l'avertissement prononcé à l'encontre de Monsieur [B] ;

Débouter Monsieur [B] de l'ensemble de ses demandes ;

Condamner Monsieur [B] au paiement de la somme de 2.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner Monsieur [B] aux entiers dépens de l'instance .

Monsieur [B] a pour sa part fait reprendre à cette audience par l'intermédiaire de son conseil les conclusions n° 3 qu'il a fait déposer à l'ouverture des débats et auxquelles il est pareillement référé pour l'exposé de ses prétentions et moyens, aux fins de voir :

Confirmer le jugement entrepris du 21 janvier 2014 en ce qu'il a annulé l'avertissement notifié à Monsieur [B] en date du 3 octobre 2012 ;

Porter le montant des dommages-intérêts octroyés à Monsieur [B], en réparation du préjudice subi du fait du prononcé d'une sanction disciplinaire injustifiée, à hauteur de 2.500,00 € nets de CSG et de CRDS, outre intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir ;

Statuant à nouveau,

Condamner la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne à verser à Monsieur [B] les sommes suivantes :

outre intérêts au taux légal à compter de la demande :

- 140,99 € à titre de rappel de frais au titre de l'indemnité forfaitaire de grand déplacement,

- 41,29 € à titre de rappel de frais au titre des voyages inter-chantiers,

- 24,12 € à titre de rappel de salaire au titre de l'indemnité prévue par les dispositions de l'article 8.13 de la convention collective applicable outre les congés payés afférents,

- 40,60 € à titre de remboursement des frais de péage engagé au titre des trajets effectués par Monsieur [B] pour se rendre sur le chantier de GROISSIAT,

- 60,30 € à titre de rappel de salaire au titre de l'amplitude outre les congés payés afférents (6,03 €),

- 42,56 € à titre de rappel de frais au titre des indemnités kilométriques parcourus chaque jour par Monsieur [B] entre l'hôtel et le chantier de GROISSIAT pour prendre sa pause déjeuner,

- 14,29 € à titre de rappel de frais au titre des indemnités kilométriques parcourus par Monsieur [B] au titre de la journée du 29 juin 2014,

- 16,08 € à titre de rappel de salaire correspondant au temps passé par Monsieur [B] sur la route et pour le rangement de son matériel d'outillage sur le chantier à la date du 26 juin 2014 outre les congés payés afférents (1,61 €),

- 25,61 € à titre de rappel de frais au titre des indemnités kilométriques parcourus par Monsieur [B] pour le chantier SOLVAY situé à ROUSSILLON,

- 5,87 € à titre de rappel de frais au titre du voyage inter-chantiers lié à l'entretien annuel du salarié du 19 novembre 2014;

A titre subsidiaire,

Condamner la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne à verser à Monsieur [B] les sommes suivantes :

outre intérêts au taux légal à compter de la demande :

- 22,11 € à titre de rappel de salaire au titre de l'indemnité prévue par les dispositions de l'article 8.13 de la convention collective applicable outre les congés payés afférents (2,21 €),

En toutes hypothèses,

Condamner la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne à verser à Monsieur [B] la somme de 10.000,00 € nets de CSG et de CRDS à titre de dommages-intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail, outre intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir ;

Condamner la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne à verser à Monsieur [B] la somme de 3.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE,

La Cour,

1°) Sur l'avertissement délivré le 3 octobre 2012 :

Attendu qu'il est reproché à Monsieur [B] de s'être violemment emporté le mardi 28 août 2012 et d'avoir menacé Monsieur [L] [M], son chef de chantier en ces termes : « un jour ça ira mal pour toi, on va t'attraper et tu moucheras rouge», selon les propos rapportés par Monsieur [Q] [Q] [R], directeur d'activité de la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne ;

que si l'invective ainsi adressée au chef de chantier ne désigne pas expressément l'auteur des violences futures, il s'agit de toute évidence de la prédiction d'un événement particulièrement menaçant par son caractère sanglant, dont le terme n'est certes pas précisé, mais qui a incontestablement été prononcée par le salarié dans le but d'impressionner, voire de déstabiliser, le chef de chantier à l'encontre duquel elle est dirigée ;

Attendu que Monsieur [B] ne conteste pas avoir lui-même tenu ces propos qu'il a confirmés dans sa lettre recommandée avec accusé de réception adressée à son employeur le 23 octobre 2012, en atténuant toutefois la portée de la menace de violences, présentées seulement comme une éventualité :

« Le ton est un peu monté et j'ai rappelé à M. [M] qu'il fallait qu'il mesure ses propos envers le personnel'

Je l'ai prévenu aussi qu'avec son désagréable comportement il pourrait, un jour, tomber sur un nerveux qui pourrait le faire moucher rouge » ;

que Messieurs [U] [D], [Q] [T] [U], [E] [T] tous témoins des faits, dont les attestations sont produites par Monsieur [B] lui-même, ont confirmé les termes menaçants employés par ce dernier, et plus précisément qu'un jour il se trouverait en face de quelqu'un qui le ferait moucher rouge ;

Attendu que pour tenter de justifier son comportement, Monsieur [B] invoque l'attitude irrespectueuse puis injurieuse de Monsieur [M] à l'égard de l'équipe se trouvant dans le vestiaire du chantier, en ce qu'il avait reproché à Monsieur [U] [W] de ne pas être en bleu de travail vers 7h20, n'avait pas apprécié son intervention pour avoir pris la défense de cet ouvrier, et avait dit à toute l'équipe « vous n'êtes qu'une bande de cons » selon les attestations de Monsieur [J] [D], [X] [U], [E] [T] et [I] [F] qu'il verse aux débats ;

Mais attendu que si le ton est monté dans le vestiaire à la suite d'un banal incident relatif à une tenue de travail, ainsi que l'a relevé le conseil de prud'hommes, il appartenait précisément à Monsieur [B], du fait de l'autorité dont il disposait auprès de ses collègues de travail en raison de ses mandats de représentant du personnel depuis 1997, de ne pas céder à la surenchère en menaçant le chef de chantier de violences sanglantes devant les membres de l'équipe ;

Attendu que le comportement virulent et agressif de Monsieur [B] est en outre confirmé par l'attestation de Monsieur [I] [C] relative à un incident survenu dans son bureau le 27 septembre 2012, soit postérieurement à l'entretien préalable mais antérieurement au prononcé de la sanction disciplinaire ;

Attendu dans ces conditions que la notification d'un simple avertissement le 3 octobre 2012 correspond à la juste sanction du comportement inacceptable du salarié, tout en tenant compte de son ancienneté de plus de 23 années dans l'entreprise en l'absence de toute sanction disciplinaire ;

qu'il importe dès lors d'infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Lyon et de dire fondé et justifié l'avertissement prononcé ;

Attendu dans ces conditions que Monsieur [B], qui ne subit aucun préjudice du fait de la délivrance d'un avertissement justifié, doit être débouté de sa demande en paiement de dommages-intérêts ;

2°) Sur les rappels de salaire :

Sur le rappel de salaire au titre des travaux en « zone classée insalubre»;

Attendu que Monsieur [B] sollicite pour la première fois devant la cour de nombreux rappels de salaire ;

qu'il demande tout d'abord dans ses conclusions développées oralement à l'audience, mais non dans leur dispositif, le paiement d'un rappel de prime d'insalubrité de 24,12 €, outre 2,41 € au titre des congés payés afférents, conformément aux dispositions de l'article 1.2 de la convention collective nationale des travaux publics prévoyant le paiement de primes horaires pour les travaux occasionnels présentant des conditions d'insalubrité, ainsi qu'en application de l'accord paritaire du 20 mars 1969 modifié par avenant du 19 juin 1969 précisant en son article 5 que les primes horaires concernées sont égales à 25 % du salaire horaire de base dans la limite de 5 heures par jour, la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne ayant toutefois, à ses dires, étendu à 6 heures le paiement majoré des heures effectuées en insalubrité ;

qu'il prétend avoir été affecté au cours de l'année 2013 à la réalisation de travaux insalubres sur le chantier VALORLY et avoir ainsi réalisé 43 heures d'insalubrité en octobre 2013 ainsi qu'il apparaît des rapports de pointage qu'il verse aux débats, alors que son bulletin de paie du mois considéré ne mentionne que 37 heures de travail en « zone classée insalubre » ;

Mais attendu que si la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne n'a pas indemnisé intégralement le salarié pour toutes les heures pendant lesquelles il a travaillé en zone insalubre, elle n'a fait qu'appliquer une note du 5 décembre 2001 reprenant les termes de l'accord paritaire précité ne prévoyant le paiement d'une prime bonifiée que pour 5 heures de travail, de sorte que pour une journée de 8 heures passées en zone insalubre, elle en a retenu seulement 5 pour le calcul de la prime, qui s'élevait alors à 1h25 de salaire en plus pour la journée ;

que Monsieur [B] doit en conséquence être débouté de ce chef de demande ;

Sur les rappels de salaires et de frais afférents au chantier EHPAD de [Localité 4] :

- Sur le rappel d'indemnités journalières de grand déplacement :

Attendu que Monsieur [B] sollicite ensuite la somme de 140,99 € à titre de rappel d'indemnités de grand déplacement en faisant observer que, s'il a été affecté sur le chantier de [Localité 4] pendant la période du 18 au 26 juin 2014, éloigné de 133 km de son domicile situé à Meyssie, et qu'il a perçu, conformément aux dispositions de l'article 8.11 de la convention collective précitée, une indemnité forfaitaire de grand déplacement de 56,00 € par jour et de 27,50 € les jours de retour selon les grilles salariales alors applicables dans l'entreprise et versées aux débats, il était cependant d'usage de verser aux salariés en situation de grand déplacement une indemnité forfaitaire supérieure à ces montants et égale à la moyenne arithmétique des trois pensions les plus proches du chantier, cet usage s'inspirant manifestement de la charte du 9 septembre 1994 mise en place par la société L'ENTREPRISE INDUSTRIELLE aujourd'hui devenue COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne qu'il produit encore aux débats ;

Mais attendu que Monsieur [B] ne justifie pas de l'usage qu'il invoque pour la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne de verser au salarié en situation de grand déplacement une indemnité forfaitaire égale à la moyenne arithmétique des trois pensions les plus proches du chantier, produisant lui-même aux débats une ordonnance de référé rendue le 16 juillet 2014 par le conseil de prud'hommes de Lyon faisant droit à titre provisionnel à une requête présentée par Monsieur [R] [Y] en paiement d'un rappel d'indemnité de grand déplacement calculée précisément sur la base journalière de 56,00 € par jour et de 27,50 € le jour du retour ;

Attendu que le salarié conteste ensuite la nature des jours de retour des chantiers retenus par l'employeur en considérant que les jeudi 19 juin et mercredi 25 juin 2014 ne constitueraient pas des jours de retour et ouvriraient droit à une indemnité de grand déplacement complète, soit 56,00 €, alors qu'il ne travaillait pas effectivement sur le chantier le lendemain et se trouvait soit en délégation du fait de sa qualité de représentant du personnel le vendredi 22 juin, soit en repos puis en délégation les jeudi 26 et vendredi 27 juin 2014, un tel raisonnement aboutissant à violer le principe fondamental d'égalité de traitement et de rémunération posé par le code du travail et la jurisprudence de la cour de cassation, en vertu duquel les salariés bénéficiant d'un mandat ne doivent subir aucune perte de salaire du fait de l'exercice de leurs missions représentatives ;

Attendu cependant que Monsieur [B] est mal fondé à reprocher à la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne d'avoir en toute logique appliqué les règles régissant la matière, alors qu'il n'est pas contesté qu'il ne travaillait pas sur le chantier le lendemain ;

qu'il ne peut en conséquence qu'être encore débouté de ce chef de demande ;

- Sur le rappel de frais au titre des voyages inter-chantiers :

Attendu que Monsieur [B] soutient encore que son employeur ne l'a indemnisé que pour un seul voyage inter-chantier réalisé dans le cadre du chantier de [Localité 4], alors qu'il aurait dû être indemnisé à hauteur de deux voyages, soit au titre du mercredi 18 juin 2014, jour d'arrivée, mais également du jeudi 26 juin 2014, jour de retour, restant ainsi lui devoir un montant de 41,29 € ;

Mais attendu que les dispositions de l'article 8.13 de la convention collective des ouvriers des travaux publics énoncent que l'indemnité est due à « l'ouvrier envoyé en grand déplacement par son entreprise, soit du siège social dans un chantier ou inversement, soit d'un chantier dans un autre » ;

que le salarié n'ayant été envoyé qu'une seule fois en grand déplacement sur le chantier de [Localité 4], une seule indemnité est due ;

que celle-ci lui ayant été versée sur son bulletin de paie du mois de juillet 2014 pour un montant de 41,17 €, Monsieur [B] doit être encore débouté de sa demande en paiement d'une indemnité au titre d'un voyage inter-chantier supplémentaire ;

Attendu que Monsieur [B] demande en outre la condamnation de la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne à lui verser la somme de 24,12 € à titre de rappel de frais au titre de l'indemnité prévue par les dispositions de l'article 8.13 de la convention collective applicable et correspondant à 50 % de son salaire horaire de travail pendant les temps de trajet pour se rendre et quitter le chantier ;

Mais attendu qu'il résulte des développements qui précèdent qu'aucune indemnité n'est due pour quitter le chantier, et qu'en tout état de cause le salarié ne rapporte pas la preuve qu'il aurait effectué des heures de trajet en dehors de l'horaire collectif de travail ;

que sa demande ne peut dès lors prospérer ;

- Sur la demande de rappel de salaire au titre de l'amplitude :

Attendu que Monsieur [B] sollicite en outre un rappel de salaire au titre de l'amplitude, celle-ci correspondant, lorsqu'il n'utilisait pas un véhicule de l'entreprise, à la distance qui sépare l'hôtel où il résidait pendant la durée de son affectation sur le chantier et le lieu du chantier concerné ;

Attendu que la prime d'amplitude, qui est due forfaitairement pour chaque jour de découché, est fixée par la note du 9 septembre 1994 émise par L'ENTREPRISE INDUSTRIELLE, que le salarié produit lui-même aux débats, pour une distance séparant la pension du chantier de 3 à 7 km, à un temps forfaitaire d'un quart d'heure correspondant à une indemnité journalière d'un quart du salaire horaire qui a été régulièrement versé ;

que Monsieur [B], qui logeait à l'Hôtel [Établissement 1] à [Localité 5] (Ain) situé à 3,88 km du chantier, selon les annotations qu'il a lui-même portées sur la liste des hôtels qu'il verse aux débats, est en conséquence mal fondé à prétendre que celui-ci se situait à 8 km du chantier et nécessitait plus de 15 minutes de trajet en voiture, et à présenter ensuite une demande en paiement d'un rappel de salaire de 60,30 €, subsidiairement de 22,11 €, outre congés payés afférents, au titre d'une amplitude réclamée de 4,75 heures correspondant à 4 trajets par jour et pendant les 4 jours du déplacement pour tenir compte du fait qu'il se rendait tous les jours, avec son véhicule personnel, à son hôtel, pour aller déjeuner, alors que le temps d'un quart d'heure retenu par la note précitée n'est que forfaitaire pour permettre le calcul du montant de l'indemnité journalière d'amplitude qui lui est due, et que celle-ci lui a été régulièrement payée sur la base forfaitaire d'un quart d'heure par jour, soit 1 heure pour l'ensemble du grand déplacement de 4 jours ;

Attendu qu'il sollicite également la somme de 42,56 € au titre des indemnités kilométriques pour la distance de 8 km prétendument parcourue chaque jour avec son véhicule personnel entre l'hôtel et le chantier pour prendre sa pause déjeuner, calculée sur la base de 0,28 € par kilomètres ;

que la distance entre l'hôtel et le chantier étant de 3,88 km et non de 8 km, il a régulièrement perçu une indemnité de transport d'un montant de 104,4 € au mois de juin 2014 incluant les frais de déplacement engagés pour ses déplacements entre la pension et le chantier pour 19,24 € (3,88 km x 4 x 4 x 0,31 €) ;

que cette indemnité de transport incluait encore les frais de péage qu'il avait déboursés pour se rendre sur le chantier de [Localité 4] ;

qu'ayant ainsi été intégralement rempli de ses droits, il doit encore être débouté de ses demandes présentées au titre de l'amplitude, des indemnités kilométriques correspondant à la distance parcourue avec son véhicule pour aller déjeuner, et des frais de péage pour se rendre sur le chantier de [Localité 4] ;

- Sur le rappel de frais au titre de la journée du 26 juin 2014 :

Attendu que Monsieur [B] demande encore la condamnation de son employeur à lui verser la somme de 14,29 € à titre de rappel d'indemnité kilométrique pour la distance de 46 km supplémentaires qu'il a dû effectuer le 26 juin 2014, alors qu'il avait posé un jour de RTT pour cette journée afin de se rendre le lendemain sur le lieu de sa délégation, en raison de l'information qui lui a été communiquée tardivement de sa nouvelle affectation sur un autre chantier ;

Attendu cependant que Monsieur [B] n'a fait connaître que le 25 juin à 21h48 à son chef de chantier qu'il serait en RTT le lendemain jeudi 26 juin puis en délégation le vendredi 27 juin 2014, ainsi qu'il en ressort du courrier électronique qu'il lui a envoyé et qu'il verse lui-même aux débats ;

que pour avoir ainsi prévenu tardivement son supérieur hiérarchique de son absence les jours suivants, sans s'informer lui-même en quittant le chantier de [Localité 4] de son affectation la semaine suivante, Monsieur [B] s'est vu contraint de parcourir la distance supplémentaire de 46 km pour venir rechercher ses outils qu'il avait laissés sur place ;

qu'il ne saurait en imputer la responsabilité à la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne ;

qu'en outre, il a perçu une indemnité de « voyages inter-chantier » sur le chantier suivant, régularisant ainsi son découvert de caisse aux dires de l'employeur ;

qu'il est en conséquence encore mal fondé à solliciter le bénéfice d'une indemnisation supplémentaire à ce titre ;

Sur le rappel de frais afférents au chantier de [Localité 6] :

Attendu que Monsieur [B] réclame encore la somme de 25,61 € en remboursement des frais qu'il a engagés pour se rendre de son domicile à l'agence de [Localité 7] le lundi 30 juin 2014 afin d'obtenir sa feuille de route mentionnant son affectation au chantier SOLVAY situé à [Localité 6], puis de se rendre sur ce dernier, alors la feuille de route lui avait été transmise tardivement le vendredi 27 juin 2014 de sorte qu'il n'avait pu la recevoir avant le lundi suivant ;

Attendu cependant que la feuille de route litigieuse n'avait pu être remise plus tôt directement à Monsieur [B] du fait de son absence en RTT le jeudi 26 juin puis en délégation le vendredi 27 juin 2014, de sorte qu'elle lui a effectivement été envoyée tardivement ce dernier jour ;

qu'à l'instar de tous les salariés de l'entreprise qui ne sont pas précisément affectés sur un chantier, Monsieur [B] s'est en conséquence tout naturellement rendu à l'agence située à Saint Priest où il a appris sa nouvelle affectation à [Localité 6] ;

qu'il est mal fondé dans ces conditions à solliciter l'indemnisation de son déplacement de son domicile jusqu'au siège de l'agence de [Localité 7] où il est rattaché, la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne n'indemnisant jamais les salariés pour les trajets entre leur domicile et l'agence ;

qu'en revanche, il a perçu au mois de juin 2014 une indemnité de transport de 104,40 € couvrant ses frais de transport d'un montant de 8,99 € (29 km x 0,31 €) pour se rendre de l'agence de [Localité 7] au chantier SOLVAY à [Localité 6] ;

qu'il ne peut dès lors qu'être encore débouté de ce chef de demande ;

Sur le rappel de frais relatifs au voyage inter-chantier afférent à l'entretien annuel professionnel de Monsieur [B] du 19 novembre 2014

:

Attendu que Monsieur [B] demande enfin le paiement de la somme de 5,87 € correspondant à un reliquat de frais de déplacement pour lequel il n'a pas été indemnisé au mois de novembre 2014 au titre du voyage inter-chantier qu'il a dû effectuer le 19 novembre 2014 après avoir été convoqué à son entretien annuel professionnel alors qu'il se trouvait sur le chantier ADISSEO situé au Péage de [Localité 6] (Isère), soit à 107 km du lieu de l'entretien ;

Mais attendu que le salarié a perçu à ce titre la somme de 27,30 €, avec une erreur de 0,20 € , correspondant à l'indemnité de grand déplacement versée par la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne au titre des voyages inter-chantier, le salarié étant ensuite rentré à son domicile et non revenu à [Localité 6] ;

qu'il doit encore être débouté de ce chef de demande ;

3°) Sur l'exécution prétendument fautive et déloyale du contrat de travail par l'employeur :

Attendu que Monsieur [B] fait encore observer, qu'outre le non paiement de l'intégralité des frais afférents aux grands déplacements qu'il a réalisés dans le cadre de ses dernières missions, son employeur n'a pas hésité à l'affecter à des tâches sous qualifiées, très éloignées de celles habituellement exercées et de sa classification professionnelle ;

Attendu qu'il ne justifie toutefois que par l'ordre de mission qui lui a été adressé le 12 juin 2014 pour se rendre sur le chantier de l'EHPAD GROISSIAT, de la tâche manuelle de « saignées avec rainureuse » qui lui a été demandée, celle-ci n'étant pas de nature à justifier qu'il était constamment cantonné à de tels travaux dépourvus de toute responsabilité ;

qu'en outre si les relevés de pointage de l'entreprise pour les mois d'octobre et de novembre 2014 qu'il verse aux débats font apparaître qu'il lui est arrivé d'être sans affectation particulière, cette situation d'attente d'affectation sur un prochain chantier ne lui était pas spécifique mais concernait tous les salariés de l'entreprise ;

Attendu qu'il prétend encore que les attributions qui l'ont été confiées sur le chantier de [Localité 4] étaient incompatibles avec l'asthme dont il souffrait et que connaissait parfaitement son employeur pour être mentionné sur la fiche d'accueil et de formation à la sécurité remplie par le responsable du chantier ;

que la fiche d'aptitude médicale précédemment établie par le médecin du travail à l'occasion de la visite périodique du 15 mai 2014 ne mentionne cependant l'existence d'aucune restriction à son activité professionnelle ;

Attendu que Monsieur [B] se plaint également du retrait du téléphone portable et du véhicule dont il disposait précédemment en raison de sa qualité de responsable de chantier, ainsi qu'en ont attesté différents salariés de l'entreprise ;

qu'aucun document n'octroie cependant à Monsieur [B] le droit à un véhicule de fonctions de manière permanente, ainsi qu'à un téléphone portable, les salariés pouvant s'en voir confier pour les utiliser ponctuellement à l'occasion de certains chantiers, et Monsieur [B] ayant ainsi pu en disposer de manière non permanente, ce que n'ont pas démenti les salariés ayant attesté en sa faveur ;

Attendu que l'intimé fait encore état de la diminution des primes exceptionnelles qui lui ont été versées en fin d'année depuis l'introduction de la présente procédure prud'homale, pour avoir ainsi perçu une prime de 200 € au titre de l'année 2013 en lieu et place des 380 € qu'il avait perçus en moyenne depuis 2006 ;

que la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne justifie cependant de la baisse des gratifications versées à l'ensemble des salariés de l'entreprise en 2013 ;

qu'il a en outre perçu une prime d'un montant de 191 € au mois de novembre 2015 qu'il s'abstient de mentionner ;

qu'il ne saurait encore valablement reprocher à son employeur d'avoir mis en place un système d'information des absences pour les heures de délégation indispensable au bon fonctionnement de l'entreprise ;

qu'enfin, il résulte des développements qui précèdent qu'aucun manquement ne peut être imputé à son employeur au titre du paiement des frais afférents aux grands déplacements qu'il a réalisés ;

Attendu dans ces conditions que Monsieur [B] ne rapporte pas la preuve que son employeur aurait gravement manqué à ses obligations à son égard et procédé à une exécution fautive et déloyale de son contrat de travail ;

qu'il convient dès lors de le débouter de sa demande en paiement de dommages-intérêts présentée à ce titre ;

Attendu par ailleurs que, pour faire valoir ses droits devant la cour, la société appelante a été contrainte d'exposer des frais non inclus dans les dépens qu'il paraît équitable de laisser, au moins pour partie, à la charge de l'intimé ;

Qu'il importe en conséquence de condamner Monsieur [B] à verser à la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne la somme de 750,00 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu enfin que Monsieur [B], qui ne voit aucune de ses demandes aboutir devant la cour, ne peut obtenir l'indemnité qu'il sollicite sur le fondement du même article tant en première instance que devant la cour, et supporte la charge des entiers dépens :

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant contradictoirement par arrêt rendu public par mise à disposition des parties, après que ces dernières aient été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,

INFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 21 janvier 2014 par le conseil de prud'hommes de Lyon ,

et statuant à nouveau,

DIT que l'avertissement prononcé à l'encontre de Monsieur [S] [B] le 3 octobre 2012 est fondé et justifié;

DEBOUTE Monsieur [S] [B] de l'ensemble de ses demandes ;

LE CONDAMNE en outre à payer à la société COFELY INEO Rhône Alpes Auvergne la somme de 750,00 € (SEPT CENT CINQUANTE EUROS) en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

LE CONDAMNE enfin aux entiers dépens de première instance et d'appel .

Le greffierLe président

Sophie MascrierMichel Bussière


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 15/05388
Date de la décision : 27/04/2016

Références :

Cour d'appel de Lyon SA, arrêt n°15/05388 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-04-27;15.05388 ?
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