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11/03/2016 | FRANCE | N°15/01356

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 11 mars 2016, 15/01356


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





R.G : 15/01356





SAS PRODIMECA

C/

[V]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE

du 26 Janvier 2015

RG : F 14/00122

COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 11 MARS 2016







APPELANTE :



SAS PRODIMECA

[Adresse 1]

[Adresse 1]



représentée par Me Luc CHAUPLANNAZ de la SELARL

CABINET CHAUPLANNAZ AVOCATS ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON substituée par Me Raoudha BOUGHANMI, avocat au barreau de LYON





INTIMÉ :



[Y] [V]

né le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 1]

[Adresse 2]

[Adresse 2]



comparant en...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : 15/01356

SAS PRODIMECA

C/

[V]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE

du 26 Janvier 2015

RG : F 14/00122

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 11 MARS 2016

APPELANTE :

SAS PRODIMECA

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Luc CHAUPLANNAZ de la SELARL CABINET CHAUPLANNAZ AVOCATS ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON substituée par Me Raoudha BOUGHANMI, avocat au barreau de LYON

INTIMÉ :

[Y] [V]

né le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 1]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

comparant en personne, assisté de Me Arnaud CUCHE, avocat au barreau de LYON

Parties convoquées le : 11 juin 2015

Débats en audience publique du : 28 janvier 2016

Présidée par Natacha LAVILLE, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Lindsey CHAUVY, Greffier placé.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Michel SORNAY, président

- Didier JOLY, conseiller

- Natacha LAVILLE, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 11 mars 2016 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Michel SORNAY, Président et par Gaétan PILLIE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société PRODIMECA, qui exerce une activité de mécanique industrielle, a engagé [Y] [V] en qualité de soudeur suivant contrat à durée déterminée du 3 janvier 2008 au 31 mars 2008, puis contrat à durée indéterminée à compter du 1er avril 2008.

La relation de travail était régie par la convention collective des industries métallurgiques du Rhône.

Au dernier état de la relation de travail, la rémunération mensuelle brute s'établissait à la somme de 1 765.53 euros comprenant un salaire de base (1 735.45 euros) et une prime d'ancienneté (30.08 euros).

Le 28 mars 2012, [Y] [V] a bénéficié d'un arrêt de travail consécutif à un accident du travail qui a été prolongé jusqu'au 13 juin 2012.

Le 14 juin 2012, [Y] [V] a été examiné dans le cadre de la première visite de reprise de son poste dans l'entreprise par le médecin du travail qui a conclu comme suit :

' Inapte au poste - apte à un autre - apte sur un poste de reclassement sans port de charges ni position accroupie, debout ou assise prolongée. Apte sur un poste d'encadrement ou de formateur '.

Le 15 juin 2012, un arrêt de travail de rechute a été établi au nom de [Y] [V].

Le 29 juin 2012, [Y] [V] a été examiné lors de la seconde visite de reprise de son poste dans l'entreprise dans le cadre de son arrêt de travail initial, par le médecin du travail qui a conclu comme suit :

' Inapte au poste - apte à un autre - 2ème avis d'inaptitude. Apte sur un poste de reclassement (encadrement/formateur)'.

L'arrêt de travail de rechute a fait l'objet de deux prolongations jusqu'à un certificat médical final établi le 29 juillet 2012 qui a constaté la consolidation de l'état de santé de [Y] [V] avec des séquelles.

Par lettre du 15 septembre 2012 ; [Y] [V] a demandé à la société PRODIMECA, en se fondant sur l'avis d'inaptitude rendu le 29 juin 2012, de lui régler l'intégralité de ses salaires à compter du 29 juillet 2012 soit à l'expiration du délai d'un mois imparti à l'employeur pour le reclasser ou le licencier.

Le 20 septembre 2012, [Y] [V], qui n'avait pas repris son poste, a été examiné à la demande de l'employeur par le médecin du travail qui a conclu comme suit :

'Pas de fiche d'aptitude délivrée - 2 avis d'inaptitude lors de visites de reprise ont été déjà prononcées'.

Par courrier du 16 octobre 2012, la société PRODIMECA a indiqué à [Y] [V] que son contrat de travail était suspendu et a demandé au salarié de lui indiquer la date de sa reprise.

Par lettre du 20 octobre 2012, [Y] [V] a répondu à la société PRODIMECA que son arrêt de travail pour maladie avait pris fin le 29 juillet 2012, date de son certificat final.

Le 26 novembre 2012, [Y] [V] a été examiné dans le cadre d'une visite de reprise de son poste dans l'entreprise par le médecin du travail qui a conclu comme suit :

' Inapte au poste - apte à un autre - apte sur un poste de reclassement sans port de charges ni position accroupie, debout ou assise prolongée. Apte sur un poste d'encadrement ou de formateur. A revoir '.

Le 13 décembre 2012, [Y] [V] a été examiné dans le cadre de la seconde visite par le médecin du travail qui a conclu comme suit :

' Inapte au poste - apte à un autre - apte sur un poste de reclassement sans port de charges ni position accroupie, debout ou assise prolongée. Apte sur un poste d'encadrement ou de formateur'.

Le 5 décembre 2012, [Y] [V] a saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE pour le paiement de rappel de salaires de septembre 2012 à novembre 2012 et le paiement de dommages et intérêts.

Par courrier du 20 décembre 2012, la société PRODIMECA a informé [Y] [V] qu'aucun reclassement conforme à l'avis d'inaptitude rendu par le médecin du travail ne pouvait être mis en oeuvre au sein de l'entreprise aux motifs que tous les postes d'atelier nécessitaient des ports de charge fréquents, que les postes d'encadrement ou de formateur nécessitaient des qualifications qui faisaient défaut chez [Y] [V], et qu'aucun poste n'était disponible, même après aménagement, sur le site de CHAMPAGNE en ARDÈCHE.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 21 décembre 2012, la société PRODIMECA a convoqué [Y] [V] le 3 janvier 2013 en vue d'un entretien préalable à son licenciement.

Par ordonnance rendue le 8 janvier 2013, la formation de référé du conseil de prud'hommes a :

- ordonné à la société PRODIMECA de payer à [Y] [V] la somme de 6 709.01 euros à titre de rappel de salaires de septembre à novembre 2012 et du 1er au 26 décembre 2012 sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 3ème jour suivant la notification de l'ordonnance et pour une période de 30 jours,

- ordonné à la société PRODIMECA de remettre à [Y] [V] les bulletins de paies rectifiés sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la notification de l'ordonnance et pour une période de 30 jours,

- condamné la société PRODIMECA à payer à [Y] [V] les sommes suivantes :

* 1 500 euros à titre de dommages et intérêts,

* 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté [Y] [V] de sa demande au titre du certificat de travail,

- mis les dépens à la charge de la société PRODIMECA.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 8 janvier 2013, la société PRODIMECA a notifié à [Y] [V] son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement dans les termes suivants :

'Monsieur,

Le médecin du travail vous a déclaré inapte suite aux visites du 26.11.12 et 13.12.12 au poste de soudeur que vous occupiez dans l'entreprise.

Le médecin du travail a conclu dans son avis :

Inapte au poste - apte à un autre -

apte sur un poste de reclassement sans port de charges ni position accroupie, debout ou assise prolongée.

Apte sur un poste d'encadrement ou de formateur.

Dès que nous avons eu connaissance de ses conclusions, nous avons effectué diverses recherches dans l'entreprise et dans le groupe.

Malheureusement nous n'avons pas trouvé un poste compatible avec votre incapacité et il apparaît qu'un aménagement de poste ne soit pas non plus réalisable.

Après une étude approfondie de l'ensemble des postes il s'avère qu'il n'existe pas d'autres possibilités de reclassement puisque tous nos postes d'atelier nécessitent des contraintes posturales incompatibles avec les indications du médecin du travail.

Nos postes administratifs ou Bureau d'études nécessitent des qualifications que vous ne possédez pas.

Suite à l'entretien du 3 janvier 2013, Monsieur [J] vous a confirmé l'impossibilité de trouver une solution d'aménagement de poste pour vous offrir un emploi de reclassement.

Nous sommes donc au regret de vous notifier par la présente lettre, votre licenciement qui prendra effet dès la date de présentation de cette lettre. (...)'

Le 19 mars 2013, [Y] [V] a saisi le conseil de prud'hommes de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE en lui demandant, avec l'exécution provisoire :

- de condamner la société PRODIMECA à lui payer un rappel de salaires du 1er septembre au 26 décembre 2012 et les congés payés afférents, des dommages et intérêts pour retard de paiement des salaires, à titre subsidiaire des dommages et intérêts pour organisation tardive de la visite de reprise, un complément de salaires du 28 mars 2012 au 12 juin 2012 et les congés payés afférents,

-de déclarer son licenciement abusif pour manquement à l'obligation de reclassement et de condamner en conséquence la société PRODIMECA à lui payer des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, une indemnité de préavis et les congés payés afférents,

- d'ordonner la délivrance sous astreinte d'une attestation Pôle Emploi,

- de fixer le salaire moyen mensuel de [Y] [V] à la somme de 1 765.53 euros,

- de condamner la société PRODIMECA au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement rendu le 26 janvier 2015, le conseil de prud'hommes :

- a dit que le licenciement de [Y] [V] emporte les mêmes conséquences qu'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- a condamné la société PRODIMECA au paiement des sommes suivantes :

* 1 500 euros au titre du retard dans le paiement des salaires en confirmation du versement de la provision ordonnée par l'ordonnance de référé du 8 janvier 2013,

* 10 193.18 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 3 531.06 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 353.06 euros au titre des congés payés afférents,

* 1 442.15 euros bruts à titre de rappel de salaires du 1er septembre au 26 décembre 2012 et 752.15 euros à titre de congés payés, déduction faite des sommes versées en exécution de l'ordonnance de référé,

* 1 350.37 euros nets correspondant au manque à gagner lors de la période du 28 mars au 12 juin 2012,

* 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- a condamné l'employeur à remettre à [Y] [V] les documents de fin de contrat actualisés sous huit jours à compter de la notification du jugement sous astreinte de 10 euros par jour de retard et par document pendant une période de 45 jours,

- a fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme brute de 1 765.53 euros,

- a débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- a condamné la société PRODIMECA aux dépens.

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La cour est saisie de l'appel interjeté le 12 février 2015 par la société PRODIMECA.

Par conclusions régulièrement communiquées, visées par le greffier et développées oralement à l'audience du 28 janvier 2016, auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions, la société PRODIMECA demande à la cour de réformer le jugement déféré, de débouter [Y] [V] de ses demandes, d'ordonner le remboursement des sommes versées en exécution de l'ordonnance de référé et du jugement, et de condamner [Y] [V] au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions régulièrement communiquées, visées par le greffier et développées oralement à l'audience du 28 janvier 2016, auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé, [Y] [V] demande à la cour :

- de confirmer le jugement déféré sauf à condamner la société PRODIMECA au paiement des sommes suivantes :

* à titre principal 6 079.01 euros en deniers et quittances au titre du rappel de salaires du 1er septembre au 26 décembre 2012 et 607.90 euros au titre des congés payés afférents, outre 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour retard dans le paiement des salaires,

* à titre subsidiaire 9 773.26 euros à titre de dommages et intérêts pour retard dans l'organisation de la visite de reprise,

- de condamner la société PRODIMECA au paiement de la somme de 1 696.15 euros nets à titre de complément de salaires du 28 mars au 12 juin 2012 et 169.61 euros au titre des congés payés afférents,

- de dire que le licenciement pour inaptitude est un licenciement abusif pour manquement à l'obligation de reclassement,

- de condamner la société PRODIMECA aux dépens et au paiement des sommes suivantes:

* 21 186.36 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 3 531.06 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et de 353.10 euros au titre des congés payés afférents,

* 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- d'ordonner la délivrance sous astreinte d'une attestation Pôle Emploi.

MOTIFS

- sur les rappels de salaires

1. du 28 mars au 12 juin 2012

Attendu que les dispositions de l'article 40 de la convention collective des industries métallurgiques du Rhône prévoient qu'après un an d'ancienneté dans l'entreprise, en cas d'absence au travail justifiée par une incapacité résultant de maladie ou d'accident dûment justifiée, le salarié bénéficiera :

- pendant 45 jours de la rémunération qu'il aurait perçue s'il avait continué à travailler,

- pendant les 30 jours suivants des 3/4 de cette même rémunération.

Attendu qu'en l'espèce, [Y] [V] soutient que du 28 mars au 12 juin 2012, il a perçu des indemnités journalières pour un montant de 1 761.65 euros ; qu'il aurait du percevoir en application des dispositions conventionnelles précitées la somme de 3 457.80 euros calculée sur la base d'un salaire net de 1 383.12 euros (en référence à la paie de novembre 2012) et se décomposant comme suit :

* 2 074.68 euros (1 383.12 x 1.5 mois) soit 100 % du salaire brut pour les 45 premiers jours (du 28 mars au 12 mai 2012),

* 1 383.12 euros (1 383.12 x 1 mois x 75%) soit 75 % du salaire brut pour les 30 jours suivants (du 13 mai 2012 au 12 juin 2012) ;

qu'il réclame donc le paiement de la somme de 1 696.15 euros nets (3 457.80 - 1 761.65) au titre de la garantie de salaires conventionnelle et celle de 169.61 euros nets au titre des congés payés afférents.

Attendu que pour contester la demande et dire qu'aucune somme n'est due au titre du complément de salaire du 28 mars 2012 au 12 juin 2012, la société PRODIMECA fait valoir que le salarié a perçu des salaires d'un montant supérieur au complément de salaire conventionnel ; que la garantie de salaire conventionnelle s'établit du 28 mars 2012 au 12 juin 2012 à la somme de 3 115.98 euros calculée sur la base d'un taux horaire journalier de 46.104 euros, soit la somme de 2 077.32 euros (45 jours à 100% du 28 mars au 13 mai 2012) outre celle de 1 038.66 euros (30 jours à 75% du 13 mai au 13 juin 2012); que des salaires ont été versés à [Y] [V] pour les mois de mars, mai et juin 2012 pour un montant de 3 127.95 euros.

Attendu qu'il n'est pas contesté que les garanties de salaires conventionnelles s'effectuent sous déduction des indemnités journalières.

Attendu ensuite que la cour relève que pour le calcul de la garantie conventionnelle de salaires revenant à [Y] [V] pour la période du 28 mars 2012 au 12 juin 2013, le taux horaire journalier de 46.104 euros utilisé par la société PRODIMECA n'est pas justifié ;

qu'il y a donc lieu de procéder au calcul de la garantie de salaires conventionnelle sur la base du salaire mensuel net perçu par [Y] [V] qui sera fixé à la somme de 1 269.44 euros (moyenne des paies de décembre 2011, janvier 2012 et février 2012) ; que le complément de salaire s'établit donc comme suit :

1 904.16 euros (1 269.44 euros x 1.5 mois) + 952.08 euros (1 269.44 euros x 1 mois x 75%)

soit une garantie conventionnelle de salaires revenant à [Y] [V] pour la période du 28 mars 2012 au 12 juin 2013 d'un montant total de 2 856.24 euros ;

qu'il ressort des bulletins de paie que [Y] [V] n'a pas été rémunéré de ses absences pour la période du 28 mars au 12 juin 2012, étant précisé que [Y] [V] a bénéficié d'un acompte sur sa paie du mois de mai 2012 ;

qu'il est en outre justifié que pour cette période, des indemnités journalières lui ont été versées pour un montant de 1 761.65 euros ;

que [Y] [V] a donc droit à la somme de 1 094.59 euros (2 856.24 - 1 761.65) au titre de la garantie conventionnelle de salaire du 28 mars au 12 juin 2012, et à celle de 109.45 euros au titre des congés payés afférents ; que le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a condamné la société PRODIMECA à payer à [Y] [V] la somme de 1 350.37 euros nets correspondant au manque à gagner lors de la période du 28 mars au 12 juin 2012 ; que la société PRODIMECA sera condamnée à payer à [Y] [V] la somme de 1 094.59 euros à titre de rappel de salaire du 28 mars au 12 juin 2012 outre celle de 109.45 euros au titre des congés payés afférents.

2. du 1er septembre 2012 au 26 décembre 2012

Attendu que selon l'article R 4624-31 du code du travail, sauf dans le cas où le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour sa santé ou sa sécurité ou

celles des tiers, le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude d'un salarié qu'après

avoir réalisé :

1° une étude de son poste ;

2° une étude des conditions de travail dans l'entreprise ;

3° deux examens médicaux de l'intéressé espacés de deux semaines, accompagnés, le

cas échéant, des examens complémentaires.

Attendu que seule la visite de reprise réalisée par le médecin du travail à l'issue des deux examens médicaux précités met fin à la période de suspension du contrat de travail.

Attendu que selon l'article L 1226-4 du code du travail, lorsqu'à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse dès l'expiration de ce délai le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail.

Attendu qu'en l'espèce, [Y] [V] sollicite dans le dispositif de ses conclusions un rappel de salaires du 1er septembre 2012 au 26 décembre 2012 ; qu'il soutient que son contrat de travail n'était plus suspendu à partir du 29 juin 2012 ; qu'à cette date, il a fait l'objet d'une visite de reprise qui a fait donné lieu à une déclaration d'inaptitude et la société PRODIMECA était donc tenue, faute de le reclasser ou de le licencier, de reprendre le paiement de ses salaires un mois plus tard, soit à compter du 29 juillet 2012 ; qu'il a perçu des indemnités journalières jusqu'au 29 juillet 2012 et son salaire au mois d'août 2012 ;

qu'il sollicite en outre le paiement de la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par l'absence de paiement des salaires du 1er septembre 2012 au 26 décembre 2012.

Mais attendu que la cour relève que [Y] [V] ayant été placé en arrêt de travail pour maladie du 28 mars 2012 au 13 juin 2014, le premier examen de la visite médicale de reprise a été organisé le 14 juin 2012 ; que le lendemain, soit le 15 juin 2012, un arrêt de travail de rechute a été établi ; que la seconde visite de reprise a été effectuée le 29 juin 2012 et le salarié a été déclaré inapte à son poste ; que l'arrêt de travail pour rechute a été prolongé jusqu'au 29 juillet 2012 ; que le premier examen de la visite de reprise dans le cadre de la rechute a eu lieu le 26 novembre 2012 ; qu'à l'issue du second examen pratiqué le 13 décembre 2012, un avis d'inaptitude a été rendu.

Attendu qu'il ressort de cette chronologie des faits qu'en l'état d'une rechute de son état de santé le 15 juin 2012, une nouvelle période de protection de [Y] [V] s'est ouverte ; que l'avis d'inaptitude du 29 juin 2012 n'a pas pu mettre fin à la période de suspension du contrat de travail puisque celui-ci était suspendu du fait de l'arrêt de travail de rechute établi le 15 juin 2012 ; que [Y] [V] n'était donc pas en situation d'être licencié ou reclassé le 29 juin 2012, que la visite médicale du salarié et sa déclaration d'inaptitude au poste étant intervenues le 13 décembre 2012, l'employeur était tenu, à défaut de reclasser le salarié déclaré inapte, de reprendre le paiement des salaires dans un délai d'un mois à compter du 13 décembre 2013 ;

que la société PRODIMECA était donc tenue de reprendre le paiement des salaires à compter du 13 janvier 2013 ; que le contrat de travail ayant expiré le 8 janvier 2013, date du licenciement pour inaptitude du salarié, la société PRODIMECA ne se trouve redevable d'aucun salaire envers [Y] [V] qui ne se trouve donc pas fondé en ses demandes de rappel de salaires, ni en conséquence en sa demande de dommages et intérêts pour retard dans le paiement des salaires ;

que le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a condamné la société PRODIMECA à payer à [Y] [V] la somme de 1 442.15 euros bruts à titre de rappel de salaires du 1er septembre au 26 décembre 2012 et 752.15 euros à titre de congés payés, et la somme de 1 500 euros au titre du retard dans le paiement des salaires ; que [Y] [V] sera débouté de ses demandes au titre du rappel de salaires du 1er septembre 2012 au 26 décembre 2012 et de sa demande à titre de dommages et intérêts pour retard dans le paiement des salaires du 1er septembre 2012 au 26 décembre 2012.

- sur les dommages et intérêts au titre de la visite de reprise tardive

Attendu que selon l'article R 4624-23 du code du travail, dès que l'employeur a connaissance de la date de la fin de l'arrêt de travail, il saisit le service de santé au travail qui organise l'examen de reprise dans un délai de huit jours à compter de la reprise du travail par le salarié.

Attendu qu'en l'espèce, [Y] [V] sollicite à titre subsidiaire en cas de rejet de ses demandes au titre du paiement de ses salaires du 1er septembre 2012 au 26 décembre 2012, le paiement de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait de l'organisation tardive de la visite de reprise au 26 novembre 2012 par la société PRODIMECA en méconnaissance de son obligation prévue par l'article R 4624-23 du code du travail précité.

Attendu qu'il n'est pas contesté que la société PRODIMECA est fermée durant tout le mois d'août de sorte que la reprise du travail par [Y] [V], qui constitue le point de départ du délai imposé à l'employeur pour organiser l'examen de reprise, était impossible jusqu'à la rentrée du mois de septembre 2012 ;

que la société PRODIMECA justifie de ce qu'elle a transmis un courriel le 11 septembre 2012 à la médecine du travail pour l'organisation d'une visite de reprise consécutive à la consolidation de l'état de santé de [Y] [V], le contrat de travail étant toujours suspendu ; qu'un premier examen a été réalisé le 20 septembre 2012 par le médecin du travail qui a refusé de délivrer un avis compte tenu des deux avis d'inaptitude rendus lors des deux examens des 14 et 29 juin 2012 de la visite de reprise ; que le premier examen de la visite de reprise après l'arrêt de travail de rechute a cependant pu avoir lieu le 26 novembre 2012 à l'issue d'échange de correspondances entre la société PRODIMECA, [Y] [V] et la médecine du travail qui ont mis en lumière la situation particulière du salarié.

Attendu qu'il s'ensuit d'une part que la société PRODIMECA n'a commis aucun manquement à son obligation de saisir le service de santé au travail pour l'organisation de l'examen de reprise de [Y] [V] (suite à la consolidation de son état de santé du salarié le 29 juillet 2012) qui serait à l'origine du préjudice subi par [Y] [V] à l'occasion de la réalisation de cette visite le 26 novembre 2012 ;

que d'autre part le retard d'organisation de cette visite de reprise, intervenue en effet le 26 novembre 2012, trouve en réalité son origine dans la réalisation du second examen le 29 juin 2012 qui n'a cependant pas pu mettre fin à la suspension du contrat de travail puisque celui-ci était suspendu du fait de l'arrêt de travail pour rechute du 15 juin 2012 ;

que [Y] [V] ne justifie donc pas de la réalité d'un manquement de la société PRODIMECA à son obligation prévue par l'article R 4624-23 du code du travail qui serait à l'origine de son préjudice lié au retard de la visite de reprise ;

que [Y] [V] n'est donc pas fondé en sa demande indemnitaire présentée à l'encontre de son employeur ; que [Y] [V] sera débouté de sa demande à titre de dommages et intérêts au titre de la visite de reprise tardive.

- sur le licenciement

Attendu qu'il résulte des articles L.1232-1 et L 1232-6 du code du travail que le licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse et résulte d'une lettre de licenciement qui en énonce les motifs ;

qu'en vertu de l'article 1235-1 du code du travail, le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure de licenciement suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; que si un doute subsiste, il profite au salarié ;

que la lettre de licenciement fixe les limites du litige.

Attendu que lorsqu'à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail, le salarié est déclaré inapte par le médecin de travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités ; que cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise; que l'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail.

Attendu qu'au titre de son obligation de reclassement, l'employeur doit faire des propositions loyales et sérieuses, et doit assurer l'adaptation du salarié à son emploi par une formation complémentaire ; que l'obligation de reclassement s'impose à l'employeur ; qu'à défaut, le licenciement est privé de cause réelle et sérieuse.

Attendu que ces principes sont applicables qu'il s'agisse ou non d'une inaptitude d'origine professionnelle.

Attendu qu'en l'espèce, [Y] [V] conteste le bien-fondé de son licenciement en invoquant deux moyens, l'un tiré de l'absence de mentions dans la lettre de licenciement et l'autre de l'absence de recherche sérieuse de reclassement.

1. sur les mentions dans la lettre de licenciement

Attendu qu'au soutien de sa demande au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, [Y] [V] fait valoir que l'employeur n'a pas précisé dans la lettre de licenciement si l'inaptitude à l'origine du licenciement était physique ou professionnelle ; que la société PRODIMECA n'a en outre pas mentionné la visite de reprise du 29 juin 2012.

Mais attendu qu'il ressort de la lettre de licenciement dont les termes ont été rappelés ci-dessus que la société PRODIMECA a reproduit les termes de l'avis d'inaptitude rendu par le médecin du travail ; que cet avis constitue un motif précis du licenciement de [Y] [V] sans que l'employeur soit tenu à d'autres indications sur l'inaptitude à l'origine du licenciement.

Et attendu qu'il résulte de ce qui précède que la visite du 13 décembre 2013 a seule mis fin à la suspension du contrat de travail de [Y] [V] de sorte que la visite du 29 juin 2012 n'avait pas à faire l'objet d'une mention dans la lettre de licenciement.

Attendu que le moyen tiré de l'absence de mentions dans la lettre de licenciement n'est donc pas fondé.

2. sur la recherche de reclassement

Attendu que [Y] [V] soutient que la société PRODIMECA n'a pas procédé à une recherche sérieuse de reclassement et n'a pas mis en oeuvre tous les moyens dont elle disposait pour reclasser le salarié déclaré inapte à son poste en ce que la société PRODIMECA ne lui a pas proposé le poste de peintre qui s'était libéré à la suite du départ d'un salarié prénommé [C], qu'elle ne lui a pas proposé une formation pour la soudure des balancelles et qu'elle ne lui a proposé aucun aménagement des horaires et des fonctions sur son poste de travail.

Mais attendu que la cour relève :

- que le registre du personnel de la société PRODIMECA versé aux débats révèle que le poste de peintre invoqué correspond à un emploi laissé vacant par [C] [Q] le 8 mars 2013 ; que ce poste n'était donc pas disponible lorsque l'avis d'inaptitude a été rendu le 13 décembre 2012 ;

- que l'avis d'inaptitude rendu le 13 décembre 2013 est rédigé comme suit : ' Inapte au poste - apte à un autre - apte sur un poste de reclassement sans port de charges ni position accroupie, debout ou assise prolongée. Apte sur un poste d'encadrement ou de formateur'; que cette déclaration fait indiscutablement obstacle au maintien de [Y] [V] à un poste de soudeur, quand bien même il s'agirait de soudure de balancelles; qu'en outre, les restrictions d'inaptitude empêchent de reclasser [Y] [V] à un poste de soudeur aménagé au niveau des horaires ou de la fonction.

Attendu qu'il s'ensuit que le manquement de la société PRODIMECA à son obligation de reclassement n'est pas justifié ; que [Y] [V] n'est donc pas fondé en son moyen tiré d'une absence sérieuse de reclassement.

Attendu qu'en définitive, [Y] [V] est mal fondé en l'ensemble de ses moyens; que le licenciement procède donc d'une cause réelle et sérieuse ; que le jugement déféré sera réformé en ce qu'il a dit que le licenciement de [Y] [V] emporte les mêmes conséquences qu'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a condamné la société PRODIMECA à payer à [Y] [V] les sommes de 10 193.18 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 3 531.06 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 353.06 euros au titre des congés payés afférents ; que [Y] [V] sera débouté de l'intégralité de ses demandes au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Attendu au surplus que la cour relève à la lecture d'un courrier adressé le 19 novembre 2012 à la société PRODIMECA par l'Union Locale CNT qui soutenait [Y] [V] dans ses démarches que le salarié n'était pas opposé alors à un licenciement pour inaptitude ; qu'il résulte en effet de ce courrier que le salarié souhaitait obtenir d'une part le règlement d'un complément sur son salaire du mois de juin 2012 et de rappel de salaires à compter du mois de septembre, et d'autre part son licenciement et les documents de fin de contrat 'pour faciliter sa reconversion professionnelle'.

- sur les demandes accessoires

Attendu que le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a condamné la société PRODIMECA aux dépens et au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Attendu que l'équité et les situations économiques respectives des parties justifient qu'il ne soit pas fait application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais de première instance et pour les frais en cause d'appel.

Attendu qu'il convient de laisser à chaque partie la charge de ses propres dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

REFORME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

STATUANT à nouveau,

CONDAMNE la société PRODIMECA à payer à [Y] [V] la somme de 1 094.59 euros à titre de rappel de salaire du 28 mars au 12 juin 2012 et la somme de 109.45 euros au titre des congés payés afférents,

DEBOUTE [Y] [V] de ses demandes à titre de rappel de salaires du 1er septembre 2012 au 26 décembre 2012 et de sa demande à titre de dommages et intérêts au titre du retard dans le paiement des salaires du 1er septembre 2012 au 26 décembre 2012,

DIT que le licenciement de [Y] [V] repose sur une cause réelle et sérieuse,

DEBOUTE en conséquence [Y] [V] de ses demandes indemnitaires pour licenciement abusif ;

Y ajoutant,

DEBOUTE [Y] [V] de sa demande à titre de dommages et intérêts au titre de la visite de reprise tardive,

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais de première instance et en cause d'appel,

LAISSE à chaque partie la charge de ses propres dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Gaëtan PILLIEMichel SORNAY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 15/01356
Date de la décision : 11/03/2016

Références :

Cour d'appel de Lyon SB, arrêt n°15/01356 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-03-11;15.01356 ?
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