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04/03/2016 | FRANCE | N°14/07671

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 04 mars 2016, 14/07671


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





R.G : 14/07671





[H]

C/

Société A.T.I







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 18 Septembre 2014

RG : 12/853

COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 04 MARS 2016







APPELANT :



[K] [H]

né le [Date naissance 1] 1963

[Adresse 1]

[Adresse 1]



comparant en personne, assisté de

Me Patrick PROTIERE de la SELARL CABINET JURIDIQUE ET FISCAL MOULINIER, avocat au barreau de LYON





INTIMÉE :



Société A.T.I

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Comparant par Monsieur [R] [I], Gérant, assisté de Me Alexandre FURNO de la SELARL LEXAVOCAT...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : 14/07671

[H]

C/

Société A.T.I

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 18 Septembre 2014

RG : 12/853

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 04 MARS 2016

APPELANT :

[K] [H]

né le [Date naissance 1] 1963

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparant en personne, assisté de Me Patrick PROTIERE de la SELARL CABINET JURIDIQUE ET FISCAL MOULINIER, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

Société A.T.I

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Comparant par Monsieur [R] [I], Gérant, assisté de Me Alexandre FURNO de la SELARL LEXAVOCATS, avocat au barreau de LYON

Parties convoquées le : 20 février 2015

Débats en audience publique du : 08 janvier 2016

Présidée par Michel SORNAY, Président magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Christine SENTIS, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Michel SORNAY, président

- Didier JOLY, conseiller

- Natacha LAVILLE, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 04 mars 2016 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Michel SORNAY, Président et par Lindsey CHAUVY, Greffier placé à la Cour d'Appel de LYON suivant ordonnance du Premier Président de la Cour d'Appel de LYON en date du 15 décembre 2015, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La sarl ATI (Assistance Technique Industrielle) a été constituée fin 2007 par [R] [I] et [K] [H], ce dernier étant associé minoritaire détenant 10 % des parts.

Cette société exerce une activité de maintenance industrielle et de fourniture de pièces techniques, aux besoins de laquelle elle emploie sept salariés qui bénéficient des dispositions de la convention collective nationale du commerce de gros.

Elle dispose de deux établissements, l'un relatif à l'activité initiale de maintenance industrielle, exploitée par [R] [I] à COUZON au MONT d'OR, l'autre concernant une activité de distribution de fournitures industrielles, exploitée par [K] [H] sur la commune de [Localité 1].

[K] [H] a été embauché par la sarl ATI à compter du 2 janvier 2010 en qualité de directeur commercial par contrat de travail à durée indéterminée, statut cadre, niveau VII échelon 1, pour une rémunération mensuelle d'un montant de 3.000 € bruts.

Le 10 octobre 2011, [K] [H] et son assistante chez ATI, [I] [T], ont constitué avec monsieur [C] une société [H].[T].[C] ([H]-[T]-[C]) exerçant des activités similaires à celles de l'établissement de [Localité 1] de la société A.T.I.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 14 octobre 2011, [K] [H] a adressé à la société ATI sa démission avec effet du 31 octobre 201, cette démission comportant en annexe un précédent courrier de [K] [H] à son employeur daté du 7 octobre 2011 présentant divers reproches à l'encontre de la société ATI et de son gérant [R] [I].

[K] [H] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Lyon le 29 février 2012 afin de voir requalifier ses courriers des 7 et 14 octobre 2011 en prise d'acte de rupture aux torts de la société A.T.I, et d'obtenir en conséquence le paiement de divers rappels de salaires (heures supplémentaires, congés payés non pris, commissions contractuelles de 6% pour les années 2010 et 2011, et de diverses indemnités d'une part pour travail dissimulé et d'autre part en suite de la rupture de son contrat de travail sans cause réelle et sérieuse (préavis outre les congés payés y afférents, indemnité légale de licenciement, dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse).

La société ATI s'est opposée à l'ensemble de ces demandes, contestant l'authenticité du contrat de travail écrit invoqué par le salarié, et estimant surtout que la lettre de [K] [H] du 14 octobre 2011 était bien constitutive d'une démission sans équivoque, rendant ainsi mal fondées toutes ses prétentions au titre d'une prétendue prise d'acte de la rupture aux torts de l'employeur.

À titre reconventionnel, elle a demandé au Conseil de prud'hommes de dire et juger que [K] [H] a violé son obligation de loyauté et commis des actes de concurrence déloyale, et sollicité en conséquence sa condamnation à lui payer la somme de 60.000 € à titre de dommages et intérêts, outre la somme de 3000,00 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 18 septembre 2014, le Conseil de prud'hommes de Lyon a :

* dit que le contrat de travail écrit produit par [K] [H] est un faux, la signature de monsieur [I] y étant grossièrement imitée ;

* Dit que la lettre de rupture de monsieur [K] [H] en date du 14 octobre 2011 doit être considérée comme une lettre de démission claire et non équivoque ;

* Débouté monsieur [K] [H] de l'ensemble de ses demandes ;

* Dit et jugé que [K] [H] a violé son obligation de loyauté et commis des actes de concurrence déloyale ;

* Condamné Monsieur [K] [H] à payer à la société A.T.I la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts pour concurrence déloyale et violation de l'obligation de loyauté ;

* Condamné [K] [H] à payer à la société A.T.I la somme de 1500,00 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

* Condamné [K] [H] aux entiers dépens.

[K] [H] a interjeté appel de cette décision le 26 septembre 2014.

Par ses dernières conclusions parvenues au greffe le 17 décembre 2015, [K] [H] :

- maintient que sa 1ère lettre de démission motivée en détail du 7 octobre 2011 a bien été portée à la connaissance de l'employeur

- en déduit que sa demande de prise d'acte ne saurait être interprétée comme une démission non équivoque mais comme une rupture aux torts de l'employeur, compte tenu des fautes graves et répétées commises par celui-ci à son encontre, fautes rendant impossible la poursuite de l'exécution de son contrat de travail, à savoir :

- l'absence de visite médicale d'embauche,

- l'absence de remise de bulletins de paie,

- l'absence de mentions régulières dans le contrat de travail et les bulletins de paie,

- la réalisation d'heures supplémentaires non rémunérées entraînant l'irrespect du repos hebdomadaire et journalier,

- l'absence de paiement de commissions contractuelles,

- l'impossibilité de prendre ses congés payés,

- l'impossibilité de s'arrêter pour maladie,

- l'existence de pressions récurrentes,

- l'emploi d'un langage peu respectueux et de menaces.

Il demande en conséquence à la Cour d'appel de :

* Dire et juger que par conséquent la prise d'acte aux torts de l'employeur s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

* Condamner la société A.T.I à payer à [K] [H] les sommes suivantes :

- 3.372,11 € à titre de rappel de congés payés pour l'année 2011,

- 1.097,06 € au titre de la commission contractuelle de 6 % pour l'année 2010 si la société A.T.I ne défère pas à la sommation de communiquer les éléments comptables permettant d'en déterminer le montant,

- 1.097,06 € au titre de la commission contractuelle de 6 % pour l'année 2011,

- 91,42 € à titre de rappel de salaire pour le treizième mois de l'année 2010 (représentative de la commission contractuelle de 6 % de 2010 non versée),

- 4.144,50 € à titre de rappel de salaire pour le treizième mois de l'année 2011 (prorata jusqu'au 14 octobre 2011),

- 2.000 € à titre de commission post-rupture,

- 17.150,28 € au titre du solde de l'indemnité compensatrice de préavis de 3 mois,

- 1.715,03 € au titre des congés payés y afférents,

- 2.648,09 € à titre d'indemnité de licenciement,

- 20.300,00 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* Dire et juger que monsieur [H] accomplissait un nombre important d'heures supplémentaires à la demande de son employeur, qui n'apparaissaient pas sur ses fiches de paie et ne lui étaient pas rémunérées,

En conséquence,

* Condamner la société A.T.I à verser la somme de 12.535,45 € au titre des heures supplémentaires effectuées sur l'année 2011, outre la somme de 1.253,55 € à titre de congés payés afférents,

* Condamner la société A.T.I au paiement de la somme de 2.746,92 € au titre de la contrepartie obligatoire en repos due pour toutes les heures supplémentaires effectuées au delà du contingent d'heures supplémentaires,

* Dire et juger qu'en ne remettant pas intentionnellement au salarié ses fiches de paie, en lui faisant accomplir un nombre important d'heures supplémentaires qui n'ont pas été portées sur les fiches de paie ni rémunérées, la société A.T.I s'est rendue coupable de travail dissimulé,

En conséquence,

* Condamner la société A.T.I au paiement de la somme de 31.525,00 € au titre de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L 8223-1 du Code du travail,

* Ordonner la communication de bulletins de paie et d'une attestation POLE EMPLOI rectifiés (faisant apparaître la commission contractuelle de 6%, le complément de salaire résultant du 13ème mois) les condamnations prononcées, le 13ème mois versé en janvier et février 2011, ce qui n'est pas le cas dans l'attestation remise, le tout sous astreinte de 150 € par jour de retard, le Conseil se réservant la liquidation de l'astreinte (sic),

* Dire et juger que [K] [H] ne s'est pas rendu coupable de concurrence déloyale et n'a pas violé son obligation de loyauté,

* dire et juger que la société ATI ne justifie pas du préjudice allégué au titre des actes de concurrence déloyale et de violation de l'obligation de loyauté invoqués,

* par conséquent, débouter la société ATI de toutes ses demandes, moyens, fins et conclusions plus amples ou contraires,

* Condamner la même à payer à [K] [H] la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

* Condamner la société ATI aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par ses dernières conclusions parvenues au greffe le 20 octobre 2015, la Sarl ATI demande à la Cour d'appel de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté [K] [H] de l'intégralité de ses demandes,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit et jugé que [K] [H] a violé son obligation de loyauté et commis des actes de concurrence déloyale à l'égard de la société ATI;

statuant à nouveau,

- condamner [K] [H] au paiement de la somme de 133 280 euros à titre de dommages intérêts pour concurrence déloyale et violation de l'obligation de loyauté,

- condamner [K] [H] au paiement de la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées, qu'elles ont à l'audience expressément maintenues et soutenues oralement en indiquant n'avoir rien à y ajouter ou retrancher.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1.- sur le contrat de travail écrit invoqué par [K] [H]et les demandes en paiement qui en découlent :

[K] [H] invoque au soutien de sa demande un contrat de travail à durée indéterminée datée du 30 novembre 2009.

La société ATI conteste l'authenticité de ce document, faisant valoir que la signature de son gérant [R] [I] est un faux.

En l'état de cette dénégation de signature émanant du gérant de la société ATI, la cour a procédé à la vérification d'écritures prévue par l'article 287 du code de procédure civile par la comparaison entre la signature critiquée et les signatures de [R] [I] figurant sur les documents suivants :

pièces du salarié n° 4, 5, 31, 34 (trois signatures), 44-1, 44-2 et 50

pièces de l'employeur n°1 et 12.

Il résulte de cette vérification que la signature attribuée à [R] [I] figurant sur le contrat de travail litigieux est un faux, les variations que l'on peut constater sur les différents spécimens non contestés de cette signature ne pouvant suffire à justifier (même au vu des spécimens de signatures figurant sur la pièce numéro 34 précitée) la divergence majeure affectant la signature litigieuse, en particulier dans la fin du paraphe.

Cette constatation recoupe de plus les termes mêmes de la lettre adressée par [K] [H] à son employeur le 14 octobre 2011 pour lui annoncer sa démission, lettre dans laquelle il lui précise « n'ayant pas de contrat de travail finalisé, je vous demande de me libérer de mes activités le plus tôt possible pour le bien des deux parties ». Il résulte en effet clairement de ce courrier au jour de sa démission, [K] [H] considérait ne pas avoir de contrat de travail écrit finalisé, ce qui est incompatible avec la production de bonne foi dans le cadre de la présente instance du document aujourd'hui litigieux

Le seul fait que ce document ne porte aucun cachet de la société ATI, comme a tenté de le soutenir le salarié lors de l'audience devant la Cour, ne pouvant justifier la formule précitée retenue par ce dernier dans sa lettre de démission.

[K] [H] se prévaut encore d'une attestation d'[I] [T] dans laquelle ce témoin affirme avoir personnellement assisté à la signature du contrat de travail par [R] [I] et [K] [H].

Toutefois compte tenu des liens professionnels et d'amitié qui lient ce témoin à [K] [H], puisque tous deux ont quitté la société ATI à quelques semaines d'intervalle et se retrouvent aujourd'hui associés dans leur nouvelle société ACP TRANSMISSIONS, la Cour estime que l'attestation de cette jeune femme doit être consultée avec une particulière précaution et ne saurait suffire à elle seule à démontrer l'authenticité de la signature litigieuse attribuée à [R] [I].

Ainsi, faute de preuve de l'authenticité de ce document, il y a lieu de rejeter des débats ce prétendu contrat de travail écrit de [K] [H].

Par voie de conséquence, [K] [H] sera débouté de ses prétentions directement nées de ce contrat de travail, à savoir ses demandes en paiement présentées au titre tant de la prime de 13e mois que les commissions contractuelles de 6 % réclamées pour les années 2010 et 2011, le salarié n'alléguant pas, pour ces demandes, d'autre fondement que le contrat de travail ici écarté des débats.

2.- sur la demande de rappel d'heures supplémentaires et le travail dissimulé :

Aux termes de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

En l'espèce, [K] [H] fonde essentiellement sa demande sur son agenda papier versé aux débats en pièce numéro 32, documents dont il a tiré les tableaux d'heures supplémentaires (pièce n°33) servant de base à son calcul.

La société ATI conteste la valeur probante de cet agenda, et donc des tableaux subséquents.

La simple lecture de cet agenda permet de constater qu'il n'a manifestement pas été rempli par [K] [H] au fil des jours et des mois mais de façon totalement artificielle pour les besoins de la présente procédure, ainsi qu'en attestent :

- le fait que l'auteur de ce document l'ait rempli avec un seul stylo noir pour la période du 17 janvier au 8 mars 2011, puis avec un unique stylo bleu pour celle du 9 mars au 29 septembre 2011;

- le fait que toutes les journées travaillées soient systématiquement occupées par des rendez-vous fixés avec une parfaite régularité toutes les heures alors que, selon les indications mêmes de [K] [H], ces rendez-vous se passaient chez les clients, ce qui ne manque pas de poser la question des temps de trajet de l'intéressé;

- le fait que cet agenda ne présente presque aucune rature attestant d'éventuelles annulations ou d'éventuels déplacement de rendez-vous, ce qui paraît invraisemblable vu la nature même de l'activité de [K] [H] au sein de l'entreprise

- enfin le fait que, comme l'un pertinemment relevé le conseil de prud'hommes, cette organisation fixe d'un rendez-vous toutes les heures ne correspond pas aux horaires résultants de demande de remboursement de frais émanant de [K] [H] et régulièrement produite par l'employeur pour certaines de ces journées.

Au vu de ces éléments, il y a lieu de dire que cet agenda rempli a posteriori et pour les besoins de la cause ne constitue pas un élément de preuve sérieux de l'emploi du temps de [K] [H], et ne peut donc être considéré comme laissant présumer les heures supplémentaires que ce salarié prétend avoir effectuées.

Il en va de même pour les diverses attestations produites aux débats par l'appelant, qui certes donnent des indications générales sur l'importante amplitude horaire du travail de [K] [H], mais ne sont pour autant pas suffisamment détaillées et circonstanciées pour pouvoir servir de base à sa réclamation au titre des heures supplémentaires.

En l'absence de tout autre élément de preuve invoqué ici par le salarié, celui-ci sera débouté de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires comme de sa demande d'indemnisation des heures de repos consécutives à ces heures supplémentaires.

Par voie de conséquence, [K] [H] sera également débouté de sa demande de dommages intérêts pour travail dissimulé, faute par lui de prouver qu'il accompli des heures de travail que la société ATI aurait omis de mentionner sur ses feuilles de paye.

3.- sur la rupture du contrat de travail de [K] [H] :

La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail.

Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire, d'une démission.

Il appartient au salarié d'établir les faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur.

En l'espèce, [K] [H] expose qu'il a le 7 octobre 2011 tenté de remettre en mains propres à [R] [I], gérant de la société ATI, une première lettre de démission précisant le détail des motifs de celles-ci et des reproches qu'il formulait à l'encontre de son employeur, mais que ce dernier a refusé de prendre cette lettre, raison pour laquelle lui adresser en recommandé le 14 octobre 2011 un second courrier de démission ainsi rédigé :

« Monsieur,

j'ai l'honneur de porter à votre connaissance que je suis démissionnaire de mes fonctions de directeur commercial que j'occupe depuis le 4/01/2010 au sein de votre société.

Il faut être motivé pour aller au travail le matin ce n'est plus le cas voir le courrier ci-joint.

N'ayant pas de contrat de travail finalisé, je vous demande de me libérer de mes activités le plus tôt possible pour le bien des deux parties.

Je reste à votre disposition afin de convenir d'un rendez-vous à votre convenance.

Je vous prie d'agréer, Monsieur, mes salutations distinguées.

[H] [K] »

[K] [H] affirme avoir joint à ce second courrier une copie de sa lettre du 7 octobre 2011 précitée, explicitant ainsi les reproches qu'il formulait à l'encontre de son employeur.

La société ATI conteste aujourd'hui le fait d'avoir reçu une quelconque annexe à ce courrier du 14 octobre 2011.

Cette contestation apparaît toutefois particulièrement mal fondée au vu des termes du courrier de la société ATI datée du 26 octobre 2011 par lequel employeur indiquait à [K] [H] accuser réception de sa lettre de démission reçue le mercredi 19 octobre 2011 et précisait par ailleurs : « dans votre lettre de démission, vous avez par ailleurs émis de nombreux griefs envers nous et d'autres personnes avec qui nous travaillons ; nous vous répondrons point par point afin de clarifier tout cela ».

Dans la mesure où la lettre de démission précitée du 14 octobre 2011 ne comportait aucun grief à l'encontre de la société ATI, la formule ici retenue par l'employeur dans sa réponse implique nécessairement que celui-ci avait bien reçu en pièce jointe à ce courrier une copie du courrier du 7 octobre détaillant les nombreux griefs du salarié à son encontre, qui peuvent être ainsi résumés :

- absence de visite médicale d'embauche,

- absence de remise de bulletins de paie,

- absence de mentions régulières dans le contrat de travail et les bulletins de paie,

- réalisation d'heures supplémentaires non rémunérées entraînant l'irrespect du repos hebdomadaire et journalier,

- absence de paiement de commissions contractuelles,

- impossibilité de prendre ses congés payés,

- impossibilité de s'arrêter pour maladie,

- existence de pressions récurrentes,

- emploi d'un langage peu respectueux et de menaces.

Compte tenu de la gravité de ces reproches formulés à l'encontre de l'employeur, il y a lieu de retenir cette démission de [K] [H] comme étant pour le moins équivoque, et de la considérer en conséquence comme une prise d'acte de la rupture par le salarié aux torts de l'employeur.

En effet, il résulte de la combinaison des articles L.1231-1, L.1237-2 et L.1235-1 du code du travail que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur qui empêche la poursuite du contrat de travail.

Il convient donc ici d'examiner chacun des griefs articulés par [K] [H] à l'encontre de l'employeur.

Sur l'absence de visite médicale d'embauche

La société ATI conteste plus ou moins son obligation de faire passer à [K] [H] une telle visite médicale d'embauche.

Quoi qu'il en soit, il n'apparaît pas que ce grief, à supposer même qu'il soit établi, revête une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail, sachant que cette visite médicale aurait dû intervenir dans les semaines qui ont suivi l'embauche de [K] [H] en janvier 2010 mais que la lettre de prise d'acte de la rupture date de près de deux ans plus tard.

Sur les heures supplémentaires non rémunérées et l'absence de paiement des commissions contractuellement prévues :

Il résulte des motifs qui précèdent que ces deux reproches de [K] [H] à l'encontre de l'employeur sont infondés. Ils ne sauraient donc être de nature à justifier une prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur.

Sur l'absence de remise de certaines fiches de paye

[K] [H] reproche à la société ATI de ne pas lui avoir fourni ses bulletins de paye des mois de juillet 2010, septembre décembre 2010 et mars et avril 2011 aux échéances mensuelles prévues par la réglementation.

L'employeur ne conteste pas la matérialité de ce fait mais précise avoir remédié à ce problème à la première demande du salarié lors de sa saisine du conseil de prud'hommes en conciliation.

Ce retard apporté à la remise de certains bulletins de paye ne peut, quoi qu'il en soit, être considéré comme un manquement de l'employeur suffisamment grave pour justifier la rupture du contrat de travail, d'autant que l'exécution de ce dernier s'est poursuivie jusqu'à la lettre de démission du salarié sans la moindre réclamation antérieure de [K] [H] à ce sujet .

Sur l'absence de mention régulière dans son contrat de travail et ses bulletins de paye

Le contrat de travail écrit versé aux débats par [K] [H] étant un faux, les mentions qui y figurent ne saurait avoir une quelconque incidence en l'espèce.

En ce qui concerne les bulletins de paye, il est exact que ceux-ci ne mentionnaient initialement ni la classification du salarié comme cadre, ni son niveau au regard de la convention collective ni même pour certains d'entre eux son numéro de sécurité sociale. La société ATI justifie toutefois avoir, au vu de la réclamation du salarié, édité de nouveaux bulletins de paye conformes à la réglementation.

Ce grief, même s'il s'avère fondé, n'était d'évidence pas d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

Sur les autres griefs :

congés payés

[K] [H] reproche à la société ATI et à son gérant de l'avoir empêché de prendre pour se reposer les jours de congés payés auxquels il avait droit.

Aux termes de l'article L 3141-1 du code du travail, 'tout salarié a droit chaque année un congé payé à la charge de l'employeur dans les conditions fixées au présent chapitre', mais il est aussi constant que l'employeur est soumis une obligation d'initiative en matière d'octroi des congés payés et qu'en accordant pas spontanément un travailleur le congé payé auxquels il a droit chaque année, l'employeur commet une faute et doit réparation du préjudice physique d'agrément qu'il a causé.

C'est donc sur l'employeur que pèse la charge de la preuve de la prise effective du droit repos par le salarié.

En l'espèce, les bulletins de paye établie par la société ATI pour la période du mois de janvier 2010 au mois de septembre 2011 inclusivement ne mentionnent qu'une seule prise de congés payés par [K] [H], pour une journée le 12 novembre 2010, si bien qu'à la fin septembre 2011 il était mentionné sur le bulletin de paye de ce salarié qu'il bénéficiait d'un crédit de congés payés restant à prendre de 38,32 journées, dont 30 au titre de l'année 2010.

La dernière fiche de paye établie par la société ATI pour le mois d'octobre 2011 porte la mention de la prise par [K] [H] de congés payés pour les périodes suivantes : du 16 au 27 août 2010, du 12 au 13 juillet 2010, le 3 juin 2011, le 15 juillet 2011, et du 16 au 24 août 2011, soit un total de 21 jours ici décomptés, le solde étant réglé au salarié lors de cette fin de contrat sous la forme d'une indemnité compensatrice des 20 jours de congés payés qui lui restaient à prendre au 31 octobre 2011.

[K] [H] conteste l'exactitude de ces décomptes de congés au payés, affirmant n'avoir en réalité pris en 2011 que cinq jours de congés payés les 15 juillet et 2 août 2011 et 12, 16, 17 et 18 août 2011, et estimant que c'est donc à tort que l'employeur prétend qu'il aurait été également en congés du 19 au 24 août 2011.

En ce sens, il verse aux débats en pièce 21 la facture mensuelle de la société ITAFRAN du mois d'août 2011, dont il résulte effectivement qu'il a travaillé les vendredi 19 août 2011, mardi 23 août et mercredi 24 août 2011, puisque figure sur cette facture la mention de bons de livraison ces jours là de matériels commandés au nom de ATI par ses soins ('Ref Cde: [K]').

En l'absence de toute réponse motivée de l'employeur sur ce point, [K] [H] rapporte bien la preuve de ce que la régularisation de ses congés payés ainsi faite en fin de contrat par son employeur était incomplète, puisque le décompte figurant sur sa dernière fiche de paye lui déduisait à tort 4 jours de congés payés pour cette période du 19 au 24 août 2011.

[K] [H] réclame aujourd'hui le paiement de la somme de 3372,11 euros à titre d'indemnité compensatrice de 25 jours de congés payés qu'il considère lui être encore dus au terme de son contrat.

Il apparaît toutefois, au vu des pièces versées aux débats et de la mention sur le bulletin de paye d'octobre d'un règlement de 3445,16 euros à titre d'indemnité compensatrice pour les 20 jours de congé non pris que l'employeur reconnaissait alors lui devoir, que seuls les 4 jours précités d'août 2011 ne lui ont pas été réglés lors de son solde de tout compte, tel qu'il apparaît sur sa feuille de paye du mois d'octobre 2011.

Sa demande de ce chef ne s'avère donc fondée qu'à concurrence de (3372,11 / 25) x 4 = 539,54 euros bruts, somme que la société ATI sera donc condamnée à lui payer, avec intérêts au taux légal à compter du 9 mars 2012, date de la signature par ATI de l'accusé de réception de sa convocation devant le bureau de conciliation du Conseil de prud'hommes.

Mais il y a lieu surtout de relever la pratique pour le moins surprenante de l'employeur qui n'a, au mépris de ses obligations réglementaires et conventionnelles, jamais fait figurer les congés payés pris par [K] [H] au cours de sa présence dans l'entreprise , sauf pour un jour de novembre 2010, et s'est contenté de faire croire à une régularisation de cette situation lors de l'établissement de la fiche de paye d'octobre 2011, qui contient au demeurant une erreur non négligeable en défaveur du salarié.

Cette opacité totale de l'entreprise quant aux congés payés au cours de l'exécution du contrat de travail vient conforter la thèse de [K] [H], qui indique avoir fait l'objet de pressions de la part de son employeur afin qu'il ne prenne pas de vacances, selon lui pour éviter une baisse du chiffre d'affaires de l'entreprise.

La société ATI conteste cette thèse, faisant valoir que [K] [H] ne produit aucune preuve de ce qu'il aurait présenté des demandes de congés qui lui auraient été refusées.

Toutefois il convient ici de rappeler l'obligation d'initiative qui incombait à cet employeur en matière d'octroi des congés payés, et de constater sa violation manifeste par ATI, qui devait encore 24 jours de congés payés à [K] [H] au jour de la rupture du contrat de travail.

En s'abstenant ainsi de veiller spontanément à ce que son directeur commercial prenne bien les congés payés auxquels il avait droit chaque année (ou à tout le moins leur majeure partie) cet employeur a incontestablement manqué à ses obligations contractuelles.

Arrêts de travail pour maladie

[K] [H] fait ici grief à [R] [I], gérant de la Sarl ATI, d'avoir refusé qu'il prenne en août 2011 l'arrêt maladie que commandait son état de santé du fait d'une pneumopathie.

La société ATI se borne à contester ce reproche en faisant valoir que le salarié ne produit pas de document écrit relatif à l'arrêt de travail qu'il n'aurait pu prendre.

Il apparaît toutefois que compte tenu du contexte particulier de cette entreprise, de son très petit nombre de salariés, des responsabilités de cadre-directeur commercial de [K] [H] en son sein, des relations d'amitié qui avaient lié initialement [K] [H] à [R] [I], il apparaît très plausible que ce refus ait été formulé oralement et que le salarié n'ait donc pas pris la peine de faire établir par son médecin un arrêt de travail qu'il savait ne pas pouvoir prendre.

Il résulte en effet des pièces versées aux débats par l'appelant, et en particulier des documents médicaux (pièce n°43) et des attestations concordantes et circonstanciées émanant non seulement d'[I] [T] (pièce 35), précitée, mais aussi et surtout de [F] [E] (pièce 37) que [K] [H] a bien présenté en août 2011 une pneumopathie avec fièvre - certes sans lien avec la relation de travail et d'une gravité assez relative -, qu'il aurait dû bénéficier d'un arrêt maladie pour quelques jours mais qu'il n'a pu le prendre par suite d'un refus de son employeur de le voir cesser temporairement son activité professionnelle.

Ces éléments concordants établissent bien l'existence en l'espèce un manquement de la société ATI à son obligation de résultat, née de l'article L4121-1 du code de travail, de prendre les mesures nécessaires pour veiller à la santé et à la sécurité de ce salarié.

pressions récurrentes et emploi par le dirigeant de l'entreprise d'un langage peu respectueux et de menaces.

Il résulte des éléments précités que [R] [I], gérant de la Sarl ATI, a effectivement pratiqué sur [K] [H] des pressions anormalement importantes pour qu'il maintienne son chiffre d'affaire, en l'occurrence au détriment de sa santé et de son droit à prendre ses congés payés.

Ces pressions ont par ailleurs eu des témoins, à savoir [X] [M] (pièce 40) et [J] [Z] (pièce n°41), ce dernier racontant en particulier la scène suivante :

'en juillet 2011, sur le parking de B2C [Localité 2], je me trouvais à côté d'un Nissan. J'ai entendu une personne masculine menacer le conducteur au téléphone (celui-ci était équipé d'un kit mains libre sur haut-parleur) « si tu parles aux impôts et autres et si tu me mets aux prud'hommes, je m'occuperai personnellement de ton cas et cela risque de te faire très mal » sur ces faits, j'ai laissé mes coordonnées à Monsieur [H] en cas de problème. Ce dernier m'a recontacté en novembre 2011 pour rapporter les faits que j'avais entendus ce jour-là».

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société ATI et son gérant [R] [I] ont ainsi commis au préjudice de [K] [H] des fautes, relatives à une pression de résultat excessive, aux difficultés de prise de congés payés d'arrêt maladie, qui, prises dans leur ensemble, constituent assurément un manquement grave de l'employeur à ses obligations contractuelles et rendait impossible le maintien de la relation de travail avec ce salarié.

Il en résulte que c'est à bon droit que [K] [H] a, par sa lettre du 14 octobre 2011, pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts exclusifs de son employeur. Cette rupture doit donc ici produire les conséquences d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

4.- sur les indemnités dues à [K] [H] ensuite de son licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Au vu des feuilles de paye rectifiées produites par l'employeur (pièce n°2 bis), il s'avère que la moyenne du salaire brut mensuel perçu par [K] [H] au cours des 3 derniers mois entiers durant lesquels il a réellement travaillé s'élève à la somme de 3817,49 euros (soit un montant supérieur à la moyenne de 3812,90 euros du salaire brut sur les 12 derniers mois).

La relation de travail litigieuse s'est interrompue par la prise d'acte par [K] [H] de la rupture de son contrat travail par son employeur, prise d'acte intervenu par une lettre recommandée à aire du 14 octobre 2011, la date du courrier du 7 octobre 2011 n'ayant pas ici à être pris en compte puisque l'employeur n'a eu connaissance de ce document qu'avec la lettre du 14 octobre.

C'est donc à compter de cette dernière date qu'a commencée à courir le délai de préavis trois mois auquel [K] [H] avait droit. Compte tenu du faite que ce salarié a continue à travailler pendant deux semaines et a été payé une somme de 1500 € bruts à ce titre, l'employeur lui reste redevable au titre de l'indemnité compensatrice de préavis de la somme de (3 x 3817,49) - 1500 = 9952,47 euros bruts, outre la somme de 995,25 euros au titre des congés payés y afférents.

La société ATI sera donc condamnée à payer ces sommes à [K] [H] avec intérêts au taux légal à compter du 9 mars 2012.

La prise d'acte de la rupture produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, il y a lieu, pour le calcul de l'indemnité de licenciement, de prendre en considération non seulement la période de travail effectif mais aussi le préavis auquel ce salarié avait droit. [K] [H] ayant été embauché début janvier 2010, il avait au terme de son préavis une ancienneté de 2 ans et 15 jours.

L'employeur lui est donc redevable d'une indemnité de licenciement de 2/5 x 3817,49 = 1527 euros, somme qu'il sera donc condamné à lui payer avec intérêts au taux légal à compter du 9 mars 2012.

Aux termes de l'article L.1235-3 du code du travail, si un licenciement intervient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse et qu'il n'y a pas réintégration du salarié dans l'entreprise, il est octroyé au salarié à la charge de l'employeur une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Aux termes de l'article L.1235-5 du code du travail, les dispositions de cet article L.1235-3 ne sont pas applicables au licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté ni au licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés.

Dans un tel cas, le salarié victime d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse peut néanmoins prétendre à l'indemnisation de l'intégralité du préjudice qu'il justifie avoir subi.

Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise ATI, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à [K] [H], de son âge, de son ancienneté, de sa formation, de son expérience professionnelle, du travail qu'il a immédiatement retrouvé dans l'entreprise qu'il a créée en octobre 2011, et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu de lui allouer, en application de l'article L.1235-5 du code du travail, une somme de 15 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il y a lieu en outre d'ordonner le remboursement par la société ATI à Pôle Emploi des indemnités de chômage éventuellement payées à [K] [H] à la suite de son licenciement, dans la limite de trois mois ;

5.- sur la demande en paiement d'une somme de 2000 € au titre de commissions post-rupture

[K] [H] verse aux débats en pièce numéro 31 un document manuscrit émanant de [R] [I] datant du 23 novembre 2011, jour de la remise à ce salarié de son solde de tout compte, ainsi rédigé :

« [R] [I], gérant de la société ATI, s'engage à verser à Monsieur [K] [H] ou à toute société qui se substituera une commission de 2000 € (deux mille euros) en échange du règlement des dossiers restant de l'activité de négoce réalisés sous sa responsabilité.

Les dossiers concernés sont les factures à régler à la société ATI établi en septembre et octobre, ainsi que les reliquats antérieurs »

[K] [H] expose avoir procédé au règlement de ces dossiers et sollicite en conséquence la condamnation de la société ATIà lui payer la somme convenue, soit 2000 €.

La société ATI n'a pas juge opportun de conclure précisément sur ce point, se contentant de solliciter de manière générale le débouté de [K] [H] de l'ensemble de ses demandes.

En l'état de ces éléments, et faute d'argumentation contraire sérieuse émanant de l'employeur, la société ATI sera condamnée à payer à [K] [H] cette somme de 2000 € avec intérêts à compter du 9 mars 2012.

6.- Sur la demande reconventionnelle de la société ATI en dommages intérêts pour déloyauté et concurrence déloyale :

Au soutien de sa demande en paiement d'une somme de 133'280 € à titre de dommages-intérêts pour concurrence déloyale et violation de l'obligation de loyauté, la société ATI fait valoir que [K] [H] a créé avec [I] [T] la société ACP TRANSMISSIONS le 10 octobre 2011, soit préalablement à la rupture du contrat de travail le liant à la société ATI.

Elle considère :

' que la société ainsi créée exerce une activité directement concurrente de la sienne et affirme que depuis le départ précipité et violent de [K] [H], la société ATI a perdu l'intégralité de sa clientèle exploitée au titre de l'activité de négoce de pièces industrielles, ainsi qu'en atteste son expert-comptable [O] [Q],

'que le chiffre d'affaires détourné par [K] [H] s'est instantanément retrouvé au sein de la société ACP TRANSMISSIONS, qui a ainsi réussi à réaliser un chiffre d'affaires d'un montant de 394'813 € au titre de ses huit premiers mois d'exploitation et de 567'637 € au titre de l'exercice 2013, ce qui démontrerait selon elle que [K] [H] se contente d'exploiter la clientèle détournée de la société ATI.

Il n'est pas véritablement contesté que [K] [H] a pris une participation de 10 % des parts dans la société ACP TRANSMISSIONS créée par la signature de ses statuts le 10 octobre 2010, et que cette société a effectivement une activité concurrente de celle qui était confiée à [K] [H] au sein de la société ATI.

Pour autant, il convient de relever :

- que ce salarié d'ATI a tenté de quitter cette société dès le 7 octobre 2011, date à laquelle il a essayé vainement de remettre en main propre sa lettre de démission ici requalifiée en prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur;

- que son nouveau contrat de travail avec ACP TRANSMISSIONS n'a pris effet quant à lui que le 1er novembre 2011, soit après le départ de [K] [H] de chez ATI,

- que ce salarié ne bénéficiant d'aucun contrat de travail écrit, aucune clause de non concurrence ne le liait à cette entreprise ;

- qu'ainsi tout au plus peut on lui reprocher, en l'état des pièces versées aux débats, d'avoir participé à la création d'une société concurrente à ATI et d'y avoir pris une participation très minoritaire, et ce alors même que son contrat de travail était alors encore en cours, sa prise d'acte ne pouvant prendre effet qu'à compter de l'envoi de sa lettre recommandée du 14 octobre 2011, suite au refus de [R] [I] de recevoir en main propre celle du 7 octobre.

Quoi qu'il en soit, la demande de dommages intérêts présentée par la Sarl ATI ne peut ici prospérer qu'à la condition qu'elle démontre que ce comportement de [K] [H] est en lien de causalité directe avec le préjudice qu'elle allègue.

Or, ATI se contente à ce sujet d'invoquer la baisse de son chiffre d'affaires ayant trait à son activité de négoce de fournitures, baisse effectivement confirmée par son expert comptable, mais ne démontre aucunement que cette baisse soit imputable à un détournement par [K] [H] de son fichiers clients pour cette activité, ce qui ne saurait se présumer et ni être prouvé par le seul fait que la société ACP TRANSMISSIONS, dirigée par un gérant expérimenté, ait réussi à développer rapidement son chiffre d'affaires.

Cette baisse d'activité chez ATI peut en effet tout aussi bien, comme le soutient [K] [H], être imputable à une décision d'ATI et de son gérant de mettre délibérément en sommeil, après le départ d'[I] [T] et de [K] [H], cette activité spécifique de négoce de pièces détachées qu'ils étaient jusqu'alors les seuls à prendre en charge au sein de l'entreprise.

La demande reconventionnelle en dommages intérêts présentée de ce chef par ATI sera donc rejetée comme particulièrement mal fondée.

7.- sur les demandes accessoires :

Les dépens de première instance et d'appel, suivant le principal, seront supportés par la société ATI.

[K] [H] a dû pour la présente instance exposer des frais de procédure et honoraires non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser intégralement à sa charge.

La Sarl ATI sera donc condamnée à lui payer la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

ÉCARTE des débats comme insuffisamment probant le prétendu contrat de travail écrit invoqué par [K] [H], et constate en conséquence que les parties étaient liées par un contrat de travail verbal ;

En conséquence, CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a débouté [K] [H] de ses demandes nées de ce contrat écrit concernant le paiement de ses primes annuelles et de 13ème mois, ainsi que de ses commissions contractuelles prévues par ce document ;

Le CONFIRME de même en ce qu'il a rejeté les demandes de [K] [H] relatives au paiement d'un rappel de salaires pour heures supplémentaires et d'une indemnité pour travail dissimulé ;

INFIRME le jugement déféré en toutes ses autres dispositions et, statuant à nouveau,

DIT que la lettre de démission adressée par [K] [H] à la Sarl ATI le 14 octobre 2011 s'analyse en une prise d'acte par ce salarié de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur ;

DIT que cette prise d'acte de la rupture par le salarié est fondée et doit donc produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

En conséquence, CONDAMNE la Sarl ATI à payer à [K] [H]:

- la somme de 9952,47 euros bruts lui restant due sur son indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 995,25 euros au titre des congés payés y afférents, le tout avec intérêts au taux légal à compter du 9 mars 2012 ;

- la somme de 1527 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, avec intérêts au taux légal à compter du 9 mars 2012,

- la somme de 15 000 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

CONDAMNE par ailleurs la Sarl ATI à payer à [K] [H]:

- la somme de 539,54 euros bruts au titre des quatre jours de congés payés lui restant dûs, avec intérêts au taux légal à compter du 9 mars 2012,

- la somme de 2000 € à titre de commissions post-rupture en exécution de la lettre du gérant de la société ATI du 23 novembre 2011, avec intérêts au taux légal à compter du 9 mars 2012 ;

ORDONNE le remboursement par la société ATI à Pôle Emploi des indemnités de chômage éventuellement payées à [K] [H] à la suite de son licenciement, dans la limite de trois mois ;

DÉBOUTE la société ATI de sa demande en paiement par [K] [H] de dommages-intérêts pour concurrence déloyale et violation de son obligation de loyauté envers l'employeur ;

CONDAMNE la société ATI aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

CONDAMNE la société ATI à payer à [K] [H] la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le Greffier,Le Président,

CHAUVY LINDSEYSORNAY Michel


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 14/07671
Date de la décision : 04/03/2016

Références :

Cour d'appel de Lyon SB, arrêt n°14/07671 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-03-04;14.07671 ?
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