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29/02/2016 | FRANCE | N°14/08542

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 29 février 2016, 14/08542


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 14/08542





[B]



C/

SAS ALTARES - D & B







Arrêt sur renvoi de la cour de cassation



Jugement du conseil de prud'hommes de [Localité 1] du 31 mai 2012

RG : F 10/02961



arrêt de la cour d'appel de [Localité 1] du 8 mars 2013

RG : 12/04721



arrêt de la cour de Cassation de PARIS

du 17 Septembre 2014

RG : A1317279











COUR D'APPEL DE [Locali

té 1]



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 29 FEVRIER 2016













APPELANTE :



[B] [B] épouse [E]

née le [Date naissance 1] 1976 à [Localité 1] (69)

[Adresse 1]

[Adresse 1]



représentée par Me Valérie MALLARD de la SELARL MA...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 14/08542

[B]

C/

SAS ALTARES - D & B

Arrêt sur renvoi de la cour de cassation

Jugement du conseil de prud'hommes de [Localité 1] du 31 mai 2012

RG : F 10/02961

arrêt de la cour d'appel de [Localité 1] du 8 mars 2013

RG : 12/04721

arrêt de la cour de Cassation de PARIS

du 17 Septembre 2014

RG : A1317279

COUR D'APPEL DE [Localité 1]

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 29 FEVRIER 2016

APPELANTE :

[B] [B] épouse [E]

née le [Date naissance 1] 1976 à [Localité 1] (69)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Valérie MALLARD de la SELARL MALLARD AVOCATS, avocat au barreau de [Localité 1]

INTIMÉE :

SAS ALTARES - D & B

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Thierry MEILLAT de la SCP HOGAN ET HARTSON, avocat au barreau de PARIS substituée par Me COHEN, avocat au barreau de PARIS

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 20 Octobre 2015

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Michel BUSSIERE, Président

Agnès THAUNAT, Conseiller

Vincent NICOLAS, Conseiller

Assistés pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 29 Février 2016, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Michel BUSSIERE, Président, et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

Attendu que les faits constants du litige sont les suivants :

- LES PARTIES

Employeur : SAS Altares D & B

Salarié : [B] [E]

- LE CONTRAT

contrat de travail à durée indéterminée à compter du27 août 2007

date de signature du contrat :5 juillet 2007

- L'EMPLOI

Emploi et qualification à l'embauche : consultante comptes clés

coefficient : 300

catégorie : cadre

salaire brut de départ : 2339,63 € outre rémunération complémentaire, prime de vacances et commission sur ventes et objectifs

dernier salaire moyen : 3306,77 € bruts moyens

Durée de travail : forfait annuel de 213 jours travaillés

dernières fonctions exercées : ingénieur commercial conquête

Convention collective nationale du personnel des prestataires de services dans le domaine du secteur tertiaire

- LE LICENCIEMENT

date de la convocation à l'entretien préalable : 16 mai 2010

date de l'entretien préalable : 8 juin 2010

date de la lettre de licenciement : 16 juin 2010

motif du licenciement : faute grave

Attendu que la lettre de licenciement est ainsi motivée :

«Suite à notre entretien du 8 juin dernier, en présence de votre Directeur Régional M. [M] [M], et au cours duquel vous n'avez pas souhaité vous faire assister, nous sommes au regret de vous notifier votre licenciement pour motif réel et sérieux à caractère fautif qualifié de grave, évoqué ci-après :

* insubordination caractérisée par :

* Le non respect des directives formulées par votre supérieur hiérarchique, L'absence de mise à jour régulière de FNX

* Un usage abusif du véhicule de fonction mis à votre disposition

Vous êtes ingénieur commerciale conquête depuis le 27 aout 2007, soit depuis bientôt trois ans. Malgré votre aisance dans la prise de rendez-vous, vous accusez le plus fort taux d'annulation de rendez-vous de votre équipe. Ainsi, un nombre significatif de rendez-vous que vous avez positionnés, sont finalement annulés avant d'avoir lieu par vos contacts. A maintes reprises, en vue d'endiguer ce phénomène, votre manager, vous a invité à mieux qualifier ceux-ci.

Comme l'ensemble de notre force de vente commerciale, vous avez été formée à la méthode de technique de ventes (PSS), à la méthode d'investigation de compte (dite de l'échiquier) ainsi qu'à l'utilisation d'un outil de gestion commercial (FNX).

A cela s'ajoutent les diverses formations produits que vous avez pu suivre.

Or malgré cela, nous ne pouvons que constater votre persistance à privilégier la quantité plutôt que la qualité des contacts. Les difficultés que vous rencontrez de façon récurrente sur certains de vos dossiers sont directement liées à votre manque de rigueur en la matière.

Ainsi dans le dossier Nexity, votre absence de qualification du contact vous a conduit à solliciter de façon insistante le mauvais interlocuteur, jusqu'à l'indisposer vis-à-vis d'Altares. Pendant l'une de vos absences, votre manager a repris ce dossier et a pu faire aboutir celui-ci par deux actions de base : la qualification du contact et l'écoute de son discours. Ainsi a-t-il pu être orienté sur la personne à même de traiter le dossier et de le faire aboutir.

Par ailleurs, malgré les moyens à votre disposition et le soutien de votre hiérarchie, vous affichez une difficulté certaine à maîtriser les argumentaires de ventes métiers et plus particulièrement tout ce qui concerne 'la finance'.

Une absence de mise en oeuvre de la technique d'investigation de compte, une absence de maîtrise de vos argumentaires de ventes métiers sont autant d'éléments qui concourent à votre manque de rigueur dans la mise à jour de vos actions commerciales dans FNX.

Pour rappel, FNX est l'outil de pilotage commercial. Vous avez été formée à son utilisation avec comme consignes de le renseigner de façon régulière, celui-ci servant à mesurer votre activité, de même que la tenue de votre agenda dans Outiook. Or à ce jour, force nous est de constater que vous vous ingéniez et vous trouvez toutes les bonnes raisons ne pas tenir à jour FNX, nous privant par la même de la possibilité de vous accompagner dans votre démarche commerciale.

Vous tergiversez sur les demandes de reporting et de suivi clairement formulées par votre hiérarchie, trouvant sans cesse moyens et argumentations pour ne pas faire ce qui vous est demandé et donc ne pas agir comme attendu.

Vos prévisions de ventes mensuelles (ou « forecast » ) sont imprécises et accusent régulièrement un écart significatif par rapport aux ventes réellement réalisées.

Une bonne connaissance faisant suite à l'investigation des comptes clients permet à tout ingénieur commercial de faire une estimation réaliste de ses résultats pour un mois donné.

A tout cela s'ajoutent l'usage abusif de votre véhicule de fonction lors de votre dernier arrêt maladie et les conséquences pour Altares de l'accident survenu à votre conjoint, suite à un endormissement au volant de celui-ci.

Aussi, les éléments que vous nous avez apportés lors de l'entretien ne sont pas de nature à nous rassurer sur votre réelle volonté à vous départir de l'attitude que nous qualifions à ce jour d'insubordination qui est la votre.

C'est pourquoi, compte tenu de l'ensemble des éléments ci-dessus évoqués, nous avons décidé de rompre votre contrat de travail pour cause réelle et sérieuse au motif qualifié de grave, sans indemnité de licenciement, ni préavis.«

Attendu que par jugement n° RG F 10/02961 daté du 31 mai 2012 le conseil de prud'hommes de [Localité 1], section encadrement, a statué ainsi :

- dit que le licenciement de Mme [E] repose sur une cause réelle et sérieuse

- condamne la SAS Altares D & B à payer à Mme [E] le somme de :

* indemnité de préavis : 7821 €

* congés payés afférents : 782,10 €

* indemnité conventionnelle de licenciement : 1595 €

- condamner la SAS Altares D & B à verser à Mme [E] la somme de 500 €

au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- déboute Mme [E] du surplus de ses demandes

- déboute la SAS Altares D & B de l'ensemble de ses demandes

- condamne la SAS Altares D & B aux entiers dépens

Attendu que sur appel de Mme [E], la cour d'appel de [Localité 1], chambre sociale, section C à statuer comme suit par arrêt du 8 mars 2013 :

- confirme le jugement entrepris en ce qu'il a jugé le licenciement de Mme [E] fondé sur une cause réelle et sérieuse, en ses dispositions relatives à l'application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'instance

- l'infirme sur le surplus et statuant à nouveau

- condamner la SAS Altares D & B à verser à Mme [E] les sommes suivantes :

* 8591,64 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 859,16 € au titre des congés payés afférents

* 1752,69 € à titre d'indemnité légale de licenciement

* 515,40 € de rappel de commissions outre 51,54 € de congés payés afférents

- y ajoutant, condamne la SAS Altares D & B à payer à Mme [E] une somme complémentaire de 1000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens d'appel

Attendu que par arrêt numéro 1470 F-D en date du 17 septembre 2014, la chambre sociale de la Cour de Cassation a :

- cassé partiellement l'arrêt mais seulement en ce qu'il a dit le licenciement de la salariée fondée sur une cause réelle et sérieuse et rejeté sa demande de dommages-intérêts pour licenciement abusif précité

- remis en conséquence sur ces points la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et pour être fait droit, les a renvoyées devant la cour d'appel de [Localité 1] autrement composée

- rejeté le pourvoi incident de l'employeur

- condamné la SAS Altares D & B aux dépens

- vu l'article 700 du code de procédure civile, rejeté la demande de la SAS Altares D & B et condamner celle-ci à payer à Mme [E] la somme de 3000 €

Attendu que par conclusions déposées au soutien de ses observations orales à l'audience, Mme [E], appelante, demande de :

- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de [Localité 1] en ce qu'il a jugé que son licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et statuant à nouveau

- dire et juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et en conséquence

- condamner la SAS Altares D & B à lui payer la somme de 50'000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- condamner la SAS Altares D & B à lui payer la somme de 1600 sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens

Attendu que par conclusions déposées au soutien de ses observations orales à l'audience, la SAS Altares D & B, intimée, demande de :

- dire et juger que le licenciement de Mme [E] repose sur une faute grave

- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de [Localité 1] en ce qu'il a jugé le licenciement de Mme [E] dépourvu de faute grave et statuant de nouveau

- débouter Mme [E] de l'ensemble de ses demandes

- condamner Mme [E] au remboursement de la somme de 8433,53 € qui lui a été versée en application du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de [Localité 1]

- condamner Mme [E] à lui verser la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens ;

Attendu que l'affaire a été plaidée à l'audience du 20 octobre 2015 ;

Attendu qu'il est expressément référé aux écritures des parties pour plus ample exposé de leurs faits, moyens et prétentions ;

SUR CE

Attendu que la recevabilité de l'appel n'est pas contestée ;

Attendu que la Cour de Cassation a estimé qu'en retenant le grief d'usage abusif de la carte de paiement attachée au véhicule de fonction, fait non visé par la lettre de licenciement et alors que ce document ne visait que des effets d'usage abusif de véhicule de fonction durant le dernier arrêt de travail, la cour d'appel avait violé les articles L 1232-6 & L 1135-1 du code du travail ;

Attendu qu'il convient de reprendre strictement les griefs mentionnés dans la lettre de licenciement

1° & 2° ) non respect des directives formulées par le supérieur hiérarchique et absence de mise à jour régulière du système FNX

Attendu que l'employeur, expose avoir constaté que :

- Mme [E], ingénieur commercial depuis le 27 août 2007, accusait le plus fort taux d'annulation de rendez-vous de toute l'équipe

- le phénomène s'était poursuivi malgré les instructions du manager,

- elle avait persisté à privilégier la quantité plutôt que la qualité des contrats en raison d'un manque de rigueur

- l'un des dossiers avait dû être repris par le manager pour qu'il puisse aboutir

- en outre elle ne renseignait jamais l'outil de pilotage commercial FNX servant à mesurer son activité et ne tenait pas son agenda dans le logiciel outlook ;

Attendu que Mme [E] conteste les griefs en répliquant qu'aucune pièce justificative n'est produite à l'appui par l'employeur ; que cependant, dans ses conclusions elle admet qu'elle utilisait plutôt l'outil Forecast ;

Attendu cependant que Mme [E] ayant eu dès son embauche le statut de cadre et ayant atteint le niveau d'ingénieur commercial, se devait de prendre connaissance et de mettre en pratique les méthodes de travail en vigueur au sein de l'entreprise et que la fonction d'ingénieur suppose que le salarié appréhende et mette en pratique les méthodes de travail en usage dans la société conformément à son statut de cadre ; qu'en outre elle renseignait mal l'outil Forecast ;

Attendu que dans la mesure où Mme [E] reconnaît ne pas avoir utilisé les outils de travail et de contrôle de son activité mis à sa disposition, le double grief est caractérisé ;

3°) usage abusif du véhicule de fonction

Attendu que la lettre de licenciement fait état d'un fait précis, l'usage du véhicule de fonction par le mari de la salariée alors qu'il n'était pas en état de conduire puisqu'il s'est endormi au volant et que le véhicule a été endommagé après avoir heurté la barrière de sécurité ;

Attendu que Mme [E] réplique que dans ses conclusions, la SAS Altares D & B fait état de faits qui n'ont pas été repris dans la lettre de licenciement mais que cependant elle-même confirme que son mari a bien eu un accident de la circulation le 20 mai 2010 alors qu'aucun autre véhicule n'était impliqué ;

Attendu que le règlement de la SAS Altares D & B concernant l'usage du véhicule de fonction précise que :

- le véhicule est utilisable pour les déplacements professionnels et privés

- il doit être conduit de façon responsable

- l'utilisation par le conjoint se fera sous l'entière responsabilité du collaborateur

Attendu qu'il résulte des pièces versées aux débats par la SAS Altares D & B, que le mari de Mme [E] a utilisé le véhicule pour ses besoins personnels mais qu'il s'est endormi au volant et que la voiture a heurté la rambarde de l'autoroute ; qu'il en résulte que le véhicule n'a pas été conduit de façon responsable puisque le conducteur n'était pas physiquement en état de prendre le volant, ce que Mme [E] aurait dû vérifier préalablement ; qu'il en résulte que les faits qui sont délimités par la lettre de licenciement sont bien établis et ne sont pas contestés par la salariée ;

Attendu que l'ensemble des trois griefs repris dans la lettre de licenciement sont établis à l'égard de Mme [E] ; qu'en l'espèce l'employeur, d'une part établit l'exactitude des faits imputés à celle-ci dans la lettre de licenciement, d'autre part démontre que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rendait impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis ; qu'il est ainsi établi que le licenciement de Mme [E] pour faute grave est justifié ;

Attendu qu'il convient en conséquence de réformer le jugement entrepris et de débouter Mme [E] de l'ensemble de ses demandes ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de remboursement des sommes versées en application du jugement réformé car l'arrêt infirmatif constitue le titre permettant d'obtenir la répétition des sommes indûment versées ;

Attendu que Mme [E] qui succombe supportera les entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant après en avoir délibéré, publiquement, en matière sociale, en dernier ressort et contradictoirement

Déclare l'appel recevable ;

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions et statuant à nouveau ;

Déboute Mme [E] de l'ensemble de ses demandes ;

Y ajoutant

Dit qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de quiconque ;

Condamne Mme [E] aux entiers dépens.

Le greffierLe président

Sophie MascrierMichel Bussière


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 14/08542
Date de la décision : 29/02/2016

Références :

Cour d'appel de Lyon SA, arrêt n°14/08542 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-02-29;14.08542 ?
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