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29/02/2016 | FRANCE | N°14/07969

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 29 février 2016, 14/07969


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 14/07969





SA AST GROUPE



C/

[M]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 08 Septembre 2014

RG : F 11/03662











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 29 FEVRIER 2016













APPELANTE :



SA AST GROUPE

[Adresse 1]

[Localité 1]



représentée par Me Florence DRAPIER-FAURE de la SELARL LEXCASE SOCIETE D'AVOCATS, avocat au barreau de LYON substituée par Me Marina CHASSANY de la SELARL LEXCASE SOCIETE D'AVOCATS, avocat au barreau de LYON







INTIMÉ :



[H] [M]

né le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 2] (M...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 14/07969

SA AST GROUPE

C/

[M]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 08 Septembre 2014

RG : F 11/03662

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 29 FEVRIER 2016

APPELANTE :

SA AST GROUPE

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Florence DRAPIER-FAURE de la SELARL LEXCASE SOCIETE D'AVOCATS, avocat au barreau de LYON substituée par Me Marina CHASSANY de la SELARL LEXCASE SOCIETE D'AVOCATS, avocat au barreau de LYON

INTIMÉ :

[H] [M]

né le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 2] (MAROC)

[Adresse 2]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de Me François DUMOULIN de la SCP ANTIGONE AVOCATS, avocat au barreau de LYON substituée par Me Ariane LOUDE, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 13 Octobre 2015

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Michel BUSSIERE, Président

Agnès THAUNAT, Conseiller

Vincent NICOLAS, Conseiller

Assistés pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 29 Février 2016, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Michel BUSSIERE, Président, et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

Attendu que les faits constants du litige sont les suivants :

- LES PARTIES

Employeur : SA AST Groupe

Salarié : [H] [M]

- LE CONTRAT

contrat de travail à durée indéterminée

date de signature du contrat : 4 septembre 2007 à effet du même jour

- L'EMPLOI

Emploi et qualification : technicien BE (bureau d'études)

coefficient : 163

niveau : 2

échelon :3

salaire brut de départ : 21'600 € soit un salaire mensuel brut de 1800 €

horaire : 162,50 heures mensuelles

Convention collective de la promotion construction

- LE LICENCIEMENT

date de l'entretien : 26 avril 2011

date de la lettre de licenciement : 29 avril 2011

cause du licenciement :absence de rigueur et insuffisance professionnelle

Attendu que la lettre de licenciement a été rédigée en ces termes :

«Depuis le 4 septembre 2007, vous exercez au sein de notre société la fonction de technicien bureau d'études.

A ce titre, vous avez notamment en charge la réalisation et la validation des métrés tout corps d'état constituant un programme.

Vous n'êtes pas sans ignorer l'importance de l'exactitude des métrés que vous réalisez, de la cohérence de ceux-ci avec les plans correspondants, eu égard aux coûts en découlant.

Or, nous constatons après 3 ans et demi à ce poste dont 10 mois en formation métreur dans le cadre d'un CIF et, malgré un avertissement dont vous avez fait l'objet au mois d'août 2009, que de nombreuses erreurs de quantités et oublis de prestations sont encore à déplorer. Erreurs ayant des conséquences financières certaines pour la société, générant un retard dans la réalisation des métrés et une perte de temps dans le fonctionnement du service, dû à la nécessaire vérification quotidienne de vos métrés par votre responsable.

En effet, nous déplorons sur l'opération de la Verpillère, notamment sur les modèles 5Al, E et G, d'importantes inexactitudes dans les métrés de nombreux corps d'état (quantités calculées fausses) ainsi que l'oubli de certaines prestations et également des erreurs d'articles. Vous avez omis, sur le modèle Al, de chiffrer le coût du terrassement, de la benne, de la fourniture trappe du VS de la grille de ventilation ainsi que la pose du retour de l'habillage de la baignoire. De même, sur le modèle Al un certain nombre de quantités chiffrées sont fausses, pour exemple, la quantité de béton, 17 m3 au lieu de 14 nécessaires, la quantité de façon de seuil, d'arase de pignons, de sacs de ciment (37 au lieu de 23 nécessaires), de cloisons placostil.

Vous avez également chiffré de mauvaises références d'articles, pour exemple les menuiseries chiffrées sont blanches au lieu de grise, les portes fenêtres sont en PVC et non en alu.

Pour le modèle E, vous avez omis de chiffrer notamment le terrassement, la benne, la fourniture et pose de l'escalier, la pose d'habillage trémie, la trappe du VS, la poutre préfa/poteau, la pose de la porte de service et de sa mise en peinture mais aussi la fourniture et pose du lave mains. Sur ce même modèle E vous avez commis un certain nombre d'erreurs sur les quantités - chiffrées notamment pour les appuis de fenêtre, les arases de pignons, les accessoires de couverture, la robinetterie de radiateur, les accessoires de radiateurs, les radiateurs, les mitigeurs.

Pour le modèle G, là encore de nombreuses erreurs dans les métrés (oubli de chiffrage), des erreurs de quantités et d'articles. N'ont pas été chiffré sur ce modèle : le terrassement, la benne, l'escalier, l'habillage de trémie, la fourniture et pose de la marquise, la fourniture et pose du lave mains, la pose te la mise en peinture de la porte de service. Les quantités chiffrées sont fausses pour le béton, les accessoires de couverture, l'isolation au sol, les radiateurs, les mitigeurs et la fibre synthétique. Là encore, erreurs sur des articles comme les menuiseries, les portes fenêtres et l'enduit de façade.

L'ensemble de ces erreurs sur ces 3 modèles est susceptible de générer un surcoût de 23 360 euros et implique la reprise de vos métrés en intégralité par votre responsable.

En outre, il vous a été demandé de chiffrer de nouveaux modèles dits V1, V2 et V3. Or pour ces 3 modèles là encore nous constatons des oublis de chiffrage de prestations, des erreurs quant aux quantités chiffrées et le chiffrage de mauvais articles. Sur chaque modèle, n'ont pas été chiffré le terrassement, un pumi, la fourniture et pose de l'escalier, la fourniture de trappe VS, la fourniture des appuis de fenêtre, la fourniture de seuil, la fourniture de faîtage des entrées d'air sur les menuiseries, de la vasque, le fourniture et pose de parafoudre, le forfait étage en plomberie/sanitaire, le kit thermostatisable, la pose de plinthes, le raccordement intérieur/extérieur. De plus, vous avez là encore commis de nombreuses erreurs dans les quantités, pour exemple le béton (17m3 au lieu de 15), le ciment (98 sacs au lieu de 83), les poignées, les laves mains, les mitigeurs, les modénatures en façade, le carrelage (51m2 au lieu de 58). Un certain nombre d'erreurs d'articles sont à déplorer, les robinets de laves mains, le pose vasque sur le plan de travail, le télereport et la tablette de baignoire.

De plus, vous avez intégré des articles qui ne sont destinés qu'aux maisons en bois, or ils'agit là de construction traditionnelle. Ceci démontre clairement l'absence, de rigueur et de contrôle dans l'exercice des missions qui vous incombent.

Le total de vos erreurs tant au niveau des quantités que du chiffrage des prestations nous conduit à avoir un estimatif du coût au m2 pour ces 3 modèles complètement faux (pour le modèle V1 erreur d'environ 33 e du m2, pour le modèle V2 34, 5 É. du m2 et pour le modèle 3 31, 5 € du m2).

Cet estimatif en l'état ne peut être communiqué au service foncier pour calculer la faisabilité d'un programme, générant par la même un retard au niveau du choix de la mise en oeuvre ou non de l'opération,

Votre absence de rigueur et vos insuffisances professionnelles entraînent des retards dans la réalisation des métrés et ce du fait que vous n'êtes pas capable à ce jour de réaliser un métré correct sans le recommencer maintes fois, retards qui se répercutent sur la suite du déroulement des opérations et sont susceptibles d'engendrer une augmentation du coût de celles-ci.

Ces erreurs démontrent une absence totale de vérification de votre part dans al réalisation des missions qui incombent à votre fonction et nuisent d l'image de la société.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, nous sommes contraints de vous notifier par la présente la rupture de votre contrat de travail »

Attendu que le salarié licencié a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que par jugement n° RG F 11/03662 daté du 8 septembre 2014, le conseil de prud'hommes de Lyon, section commerce, a statué ainsi :

- dit et juge que la rupture du contrat de travail de M. [M] est dépourvue de cause réelle et sérieuse, en conséquence,

- CONDAMNE la SA AST Groupe à verser à M. [M] les sommes suivantes :

* 13 000 € nets au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 900 € nets au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- RAPPELLE que les intérêts courent de plein droit aux taux légal à compter de la mise en demeure de la partie défenderesse devant le bureau de conciliation en ce qui concerne les créances de nature salariale et à compter du prononcé de la présente décision pour les autres sommes allouées.

- RAPPELLE qu'aux termes des dispositions de R 1454-28 du Code du travail, sont exécutoires de droit à titre provisoire, les jugements ordonnant la délivrance de toutes pièces que l'employeur est tenu de remettre (bulletins de paie, certificat de travail....) ainsi que les jugements ordonnant le paiement des sommes au titre des rémunérations et indemnités visées à l'article R 1454-14 du Code du travail dans la limite de neuf mensualités, étant précisé que la moyenne brute des salaires des trois derniers mois doit être fixée à la somme de 1 800, 00 €,

- Déboute M. [M] du surplus de ses demandes

- Déboute la SA AST Groupe de l'ensemble de ses demandes,

- dit et juge qu'en application de l'article L 1235-4 du Code du travail, il y a lieu d'ordonner d'office le remboursement par l'employeur aux organismes concernés des indemnités de chômage perçues par le salarié licencié dans la limite de 3 mois.

- Condamne la SA AST Groupe aux entiers dépens de l'instance,

- DIT qu'a défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la présente décision, et qu'en cas d'exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l'huissier instrumentaire en application de l'article 10 du décret du 8 mars 2001, portant Modification du décret du 12 décembre 1996, devront être supportées par la société défenderesse en sus de l'indemnité mise à sa charge sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Attendu que par lettre recommandée expédiée le 8 octobre 2014 et reçue au greffe de la cour le 9 octobre 2014, la SA AST Groupe, (l'appelante) a déclaré interjeter appel du jugement précité à l'encontre de M. [H] [M] (l'intimé) ;

Attendu que par conclusions déposées au soutien de ses observations orales à l'audience, l'appelante demande de :

- Constater que le licenciement de M. [M] est parfaitement fondé et justifié, en conséquence,

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré que le licenciement de M. [M] était dépourvu de cause réelle et sérieuse et en ce qu'il lui a octroyé la somme de 13 000 €

- Débouter M. [M] de l'ensemble de ses demandes

- Condamner M. [M] au paiement de la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l'instance

Attendu que par conclusions déposées au soutien de ses observations orales à l'audience, l'intimé demande de :

- Dire et juger que l'appel formé par la société AST Groupe est recevable mais mal fondé

- Confirmer le jugement entrepris qui a dit et jugé que la rupture du contrat de travail le 29 avril 2011 est dépourvue de cause réelle et sérieuse et a condamné en conséquence la société AST Groupe à lui payer les sommes de 13.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de 900 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- Y ajoutant, porter le montant des dommages-intérêts à la somme de 32.400 € nets

- Condamner enfin la société AST Groupe à lui régler une somme de 1.500,00 €, en cause d'appel, au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les éventuels dépens

Attendu que l'affaire a été plaidée à l'audience du 13 octobre 2015 ;

Attendu qu'il est expressément référé aux écritures des parties pour plus ample exposé de leurs faits, moyens et prétentions.

SUR CE

Attendu que la recevabilité de l'appel n'est pas contestée ;

Attendu que pour déclarer le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, le conseil de prud'hommes a retenu uniquement l'absence de formation professionnelle donnée au salarié par l'employeur ainsi que l'absence de justification, par la société AST Groupe, du préjudice qui résulterait des erreurs imputables au salarié ;

Attendu cependant que M. [M] a été engagé en qualité de technicien de bureau d'études par contrat de travail et non pas selon un contrat d'apprentissage ; que dans ces conditions M. [M] devait avoir la qualification professionnelle et la compétence technique suffisantes pour assurer les fonctions qui lui étaient confiées mais que l'on ne saurait reprocher à l'employeur de ne pas avoir offert à son salarié la formation professionnelle nécessaire à l'exécution du métier pour lequel il était engagé ;

Attendu que le conseil de prud'hommes a visé l'article L 6321-1 du code du travail qui concerne l'adaptation des salariés à leur poste de travail et la possibilité de proposer des formations qui participent au développement des compétences mais qu'il ne s'agit que d'une possibilité et non pas d'une obligation ; qu'en l'espèce le conseil de prud'hommes a reproché à l'employeur de ne pas avoir organisé la formation initiale au métier de technicien du bureau d'études, ce qui ne lui incombait pas dès lors que dès son embauche le salarié est censé avoir la capacité d'exercer d'emblée l'emploi obtenu ;

Attendu en outre que le reproche de défaut de formation n'est pas justifié puisque M. [M] a bénéficié d'un congé individuel à la formation afin de suivre un enseignement de métreur technicien de maîtrise d''uvre dispensé au cours de l'année 2009-2010 en alternance avec le travail en entreprise ; qu'en conséquence l'employeur a parfaitement assuré son obligation d'adaptation du salarié à son poste de travail ;

Attendu que l'action en licenciement n'est pas une action en responsabilité civile et que l'employeur doit seulement justifier des griefs formulés à l'encontre de l'employeur et non pas d'un préjudice qui résulterait de la faute ou de l'insuffisance professionnelle ; qu'en conséquence le jugement doit être réformé sur la motivation retenue par les premiers juges ;

Attendu que la lettre de licenciement renferme un exposé très complet, précis et circonstancié des griefs formulés par l'employeur au titre du manque de rigueur et de l'insuffisance professionnelle ;

Attendu que la carrière de M. [M] a donné lieu à diverses observations de la part de l'employeur puisque dès l'évaluation de 2008, il est indiqué qu'il devrait être régulier sur la précision du métré et que des réserves ont été formulées pour les rubriques 'expertise de son métier' et 'rigueur-fiabilité-contrôle' ; que par lettre du 3 août 2009, il faisait l'objet d'un avertissement en rappelant que de nombreuses observations verbales avaient été formulées sans effet et qu'il commettait de façon régulière des erreurs et des incohérences dans les métrés ; que lors de l'entretien de l'année 2010, il était indiqué qu'il serait préférable que M. [M] puisse intégrer l'équipe de terrain et que ses compétences de métreur avaient régressé puisqu'il était noté une insuffisance à la rubrique 'rigueur- fiabilité- contrôle' ; que n'ayant pas pu s'adapter à la fonction du surveillant de travaux, il a dû reprendre le poste de technicien bureau d'études pour lequel il n'a pas davantage donné satisfaction ;

Attendu que les motifs repris dans la lettre de licenciement confirment et explicitent l'insuffisance professionnelle relevée tout au long de la relation de travail avec la société AST Groupe et constituent bien une cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'il convient en conséquence de réformer intégralement le jugement entrepris et de débouter M. [M] de toutes ses demandes ;

Attendu que l'intimé qui succombe supportera les entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant après en avoir délibéré, publiquement, en matière sociale, en dernier ressort et contradictoirement

Déclare l'appel recevable ;

Infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau ;

Constate que le licenciement de M. [M] est parfaitement fondé et justifié ;

Déboute M. [M] de toutes ses demandes ;

Y ajoutant

Dit qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de quiconque ;

Condamne M. [M] aux entiers dépens.

Le greffierLe président

Sophie MascrierMichel Bussière


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 14/07969
Date de la décision : 29/02/2016

Références :

Cour d'appel de Lyon SA, arrêt n°14/07969 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-02-29;14.07969 ?
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