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21/01/2016 | FRANCE | N°14/05022

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 21 janvier 2016, 14/05022


R.G : 14/05022









Décisions :



- du tribunal de grande instance de Vienne en date du 04 mars 2010



RG : 97/01881





- de la cour d'appel de Grenoble (2ème chambre civile)

en date du 04 décembre 2012



RG :10/02346



- de la Cour de Cassation (3ème chambre civile) en date du 11 mars 2014



N° 342 F-D

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRET DU 21 Janvier 2016





APPELANTE :



SA AXA FRANCE IARD

[Adresse 2]

[Localité 8]



représentée par la SELARL LAFFLY & ASSOCIES-LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON

assistée de la SCP DENIAU ROBERT LOCATELLI, a...

R.G : 14/05022

Décisions :

- du tribunal de grande instance de Vienne en date du 04 mars 2010

RG : 97/01881

- de la cour d'appel de Grenoble (2ème chambre civile)

en date du 04 décembre 2012

RG :10/02346

- de la Cour de Cassation (3ème chambre civile) en date du 11 mars 2014

N° 342 F-D

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 21 Janvier 2016

APPELANTE :

SA AXA FRANCE IARD

[Adresse 2]

[Localité 8]

représentée par la SELARL LAFFLY & ASSOCIES-LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON

assistée de la SCP DENIAU ROBERT LOCATELLI, avocat au barreau de GRENOBLE, substituée par Maître Benoît GERIN, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMEES :

MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (M.A.F)

[Adresse 6]

[Localité 5]

représentée par Maître Laurent PRUDON, avocat au barreau de LYON

assistée de la SELARL BELLIN SABATIER VOLPATO AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE

[O] [H] exerçant sous l'enseigne ATELIER [O] [H]

né le [Date naissance 1] 1931 à [Localité 10] (ALGERIE)

C/o SARL TECTUM

[Adresse 1]

[Localité 7]

représenté par Maître Laurent PRUDON, avocat au barreau de LYON

assisté de la SELARL BELLIN SABATIER VOLPATO AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE

SA AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE

[Adresse 3]

[Localité 4]

citée à personne habilitée par actes en date des 29 septembre 2014 et 1er décembre 2014 de la SCP [G] ET [Q], huissiers de justice associés à PARIS

non constituée

MAAF, compagnie d'assurance

[Adresse 8]

[Localité 6]

représentée par la SELARL DANA ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

SAS DECOCERAM anciennement dénommée DEPOT SERVICE CARRELAGES

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée par Maître Cyril LAURENT, avocat au barreau de LYON

SAS NOVEMBAL

siège siocial :

[Adresse 4]

[Localité 2]

bureaux :

[Adresse 9]

[Adresse 7]

[Localité 1]

représentée par la SELARL DE FOURCROY AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

assistée de la SCP DEMOYEN & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, substituée par Maître Annick DE FOURCROY, avocat au barreau de LYON

******

Date de clôture de l'instruction : 12 Mai 2015

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 19 Novembre 2015

Date de mise à disposition : 21 Janvier 2016

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Michel GAGET, président

- Catherine ROSNEL, conseiller

- Françoise CLEMENT, conseiller

assistés pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier

A l'audience, Françoise CLEMENT a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt réputé contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Michel GAGET, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

Au cours des années 1984 à 1986, l'OPAC [Localité 9], assurée en dommages ouvrage auprès de la société Concorde devenue Generali, a, sous la maîtrise d'oeuvre de [O] [H], architecte assuré auprès de la société Mutuelle des Architectes Français (MAF), fait édifier un ensemble immobilier de 48 logements.

Le lot carrelages et parquet collé a été confié à la société [T], assurée auprès de la société MAAF ; la société [T] a posé des feutres isolants fabriqués par la société Novembal, assurée auprès de la société Axa France IARD, et fournis par la société Dépôt Service Carrelages.

Le lot gros oeuvre a été confié à la société Léon Grosse et une mission de contrôle technique a été confiée à la société Bureau Veritas.

La réception des travaux est intervenue sans réserve le 1er avril 1986 et en 1988 sont apparus divers désordres consistant en un décollement des parquets et une fissuration des carrelages.

Un expert a été désigné selon ordonnance de référé du 7 décembre 1995.

L'OPAC [Localité 9] a alors assigné selon exploit du 30 avril 1998 la société Services d'Assurances Construction et la société Generali France en indemnisation de ses préjudices ; la société Generali a appelé en garantie [O] [H] et son assureur MAF, la société Léon Grosse, la société [T], la compagnie d'assurances MAAF et le Bureau Veritas.

La société MAAF a appelé en cause la société Novembal et la société Dépôt Service Carrelages.

La société Novembal a attrait à la procédure les assureurs Axa France IARD et Axa Corporate Solutions.

Par jugement du 7 septembre 2000, le tribunal de grande instance de Vienne a mis la société Services d'Assurances Construction hors de cause, dit l'OPAC [Localité 9] recevable en son action à l'encontre de la société Generali France, condamné cette dernière à payer à l'OPAC [Localité 9] la somme de 1.786.193,80 Frs (272.303,49 €) au titre des désordres affectant les carrelages, outre celle de 81.000 Frs (12.348,37 €) au titre des troubles de jouissance, dit le tribunal incompétent pour connaître de l'action récursoire de la société Generali France à l'égard de [O] [H], des sociétés Léon Grosse, [T] et Bureau Veritas, mettant en cause des marchés publics, renvoyé la société Generali France à mieux se pourvoir et sursis à statuer jusqu'à la décision définitive de la juridiction administrative, sur les actions récursoires de la société Generali France à l'égard des autres parties.

Par jugement du 3 juin 2005, confirmé par arrêt du 9 juillet 2008, le tribunal administratif de Grenoble a notamment condamné solidairement [O] [H], la société [T] et le bureau Veritas à payer à la société Generali France la somme de 287.974,43 € et condamné la société [T] à garantir [O] [H] à hauteur de 70 % des condamnations prononcées à son encontre.

Par jugement du 4 mars 2010, le tribunal de grande instance de Vienne saisi à l'initiative de la compagnie d'assurances MAAF, a :

- déclarée non prescrite l'action dirigée par la société MAAF contre la société Dépôt Service Carrelages et la société Novembal ainsi que l'assureur Axa de la société Novembal,

- dit que les sociétés Dépôt Service Carrelages et la société Novembal sont responsables, en qualité de vendeur et de fabricant, du vice caché affectant l'isolant Tercept, et tenues de garantir leur client, la société [T], dans les droits de laquelle est subrogée la MAAF, des dommages occasionnés par ce vice caché, et spécialement des condamnations prononcées contre elle par le jugement du tribunal administratif de Grenoble en date du 3 juin 2005,

- déclaré recevable l'action en garantie dirigée par la société Novembal à l'encontre de ses assureurs, Axa France lARD (anciennement Axa Courtage et auparavant UAP), ainsi qu'Axa Corporate Solutions (anciennement Axa Global Risks, auparavant UAP),

- en conséquence,

- condamné solidairement la société Dépôt Service Carrelages et la société Novembal ainsi que les assureurs de la société Novembal, Axa France lARD et Axa Corporate Solutions à payer à la MAAF les sommes de 227.657,71 € en principal et 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire de cette condamnation,

- condamné solidairement les mêmes aux entiers dépens de la procédure exposés depuis la reprise d'instance effectuée le 21 novembre 2005 par la MAAF Assurances,

- condamné Axa France lARD ainsi qu'Axa Corporate Solutions à garantir la société Novembal des condamnations qui précèdent, dans les limites des contrats et notamment sous déduction des franchises,

- condamné ces dernières aux dépens des appels en garantie dirigés contre elles et à payer ensemble la somme de 1.500 € à leur assuré Novembal au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté l'Atelier [O] [H] et son assureur MAF de leur action en garantie dirigée contre la société Dépôt Service Carrelages et la société Novembal, au-delà des condamnations déjà prononcées par le tribunal administratif de Grenoble le 3 juin 2005,

- débouté l'Atelier [O] [H] et son assureur MAF de leur demande en remboursement du trop-versé par eux à Generali, en l'absence à la présente procédure de Generali et du Bureau Veritas, les renvoyant à mieux se pourvoir,

- dit que l'Atelier [O] [H] et son assureur MAF conserveront la charge des dépens exposés par eux,

- rejeté le surplus des demandes.

Par arrêt du 4 décembre 2012, la cour d'appel de Grenoble a infirmé le jugement du 4 mars 2010 et statuant à nouveau, déclaré irrecevable comme prescrite l'action de la MAAF, rejeté les demandes des parties sur les responsabilités encourues et sur les demandes en garantie, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et condamné la MAAF aux dépens.

Par arrêt du 11 mars 2014, la Cour de Cassation a cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé, renvoyant l'affaire et les parties devant la cour d'appel de Lyon.

Vu les dernières conclusions déposées le 30 octobre 2014 et notifiées par la SA Axa France IARD, qui demande à la cour de :

- à titre principal :

- confirmer le jugement du 4 mars 2010 en ce qu'il a rejeté les demandes de garantie formulées par [O] [H] et la MAF,

- infirmer le jugement en ce qui concerne les responsabilités et les demandes de garantie et statuant à nouveau,

- constater que le contrat d'assurance dont est titulaire la société Novembal a été résilié le 31 décembre 1987,

- constater que conformément aux dispositions de l'article 10.31 des conditions générales de la police, les garanties cessent à la date de dénonciation de résiliation du contrat,

- constater que conformément aux dispositions de la loi du 1er août 2003 dite 'sécurité financière', les clauses de base réclamation insérées dans les contrats d'assurance responsabilité civile sont parfaitement licites,

- en conséquence, dire et juger que les garanties issues du contrat souscrit par la société Novembal ne sont pas susceptibles de s'appliquer en l'espèce,

- par conséquent, mettre purement et simplement hors de cause la compagnie Axa France IARD venant aux droits de la compagnie Axa Courtage,

- à titre subsidiaire :

- constater qu'aucune demande n'est formulée contre la société Novembal en ce qui concerne les désordres affectant les parquets,

- constater les carences de l'expertise de l'expert [Y],

- dire et juger qu'en l'état aucune preuve n'est rapportée de ce que les fissurations ont pour origine une inadaptation du produit Tercept à l'usage auquel il a été destiné,

- dire et juger que la société [T], [O] [H] et le Bureau Veritas ont commis des fautes à l'origine du sinistre et qu'ils doivent en conserver l'entière responsabilité,

- en conséquence :

- réformer le jugement en ce qu'il a reçu l'appel en garantie formé par la compagnie MAAF à l'encontre de la société Novembal et de ses assureurs,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté [O] [H] et la MAF de leurs prétentions,

- en toute hypothèse :

- infirmer le jugement et statuant à nouveau,

- dire et juger que le montant dû à la compagnie MAAF ne saurait excéder la somme de 187.640,05 € correspondant à la part définitive de responsabilité de son assuré (société [T]),

- dire et juger que le montant du à la compagnie MAF et [O] [H] ne saurait excéder la somme de 33.113,03 € correspondant la part définitive de responsabilité de [O] [H],

- dire et juger que la compagnie Axa France IARD ne saurait avoir à rembourser à la MAF les montants qu'elle a versés en trop à la société Generali dans le cadre de l'exécution du jugement du tribunal administratif, montant allant au-delà de la part de responsabilité définitive de son assuré,

- dire et juger que la compagnie Axa France IARD ne saurait être tenue au-delà des limites de sa police, notamment en termes de franchise et de plafond de garantie,

- condamner [O] [H] et la MAF ou qui mieux le devra aux dépens et à payer à la compagnie Axa France IARD la somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu les dernières conclusions déposées le 28 novembre 2014 et notifiées par [O] [H] exerçant sous l'enseigne Atelier [O] [H] et la MAF, lesquels demandent à la cour de :

- confirmer le jugement du 4 mars 2010 en ce qu'il a déclaré non écrite la clause 10-1 de la police d'assurance et dit que l'assureur Axa France IARD devait prendre en charge le sinistre dont l'origine est la fourniture de l'isolant Tercept en 1986, époque où le contrat était en vigueur,

- infirmer le jugement pour le surplus et statuant à nouveau,

- constater que le matériau isolant Tercept est à l'origine des désordres de carrelages apparus au sein de l'immeuble, en ce qu'il est inadapté à l'usage prescrit,

- dire et juger la société Novembal, fabricant du produit et la société Dépôt Service Carrelages, venderesse du produit litigieux, totalement responsables des dommages occasionnés par le produit,

- condamner in solidum la société Novembal, la compagnie Axa France IARD, Axa Corporate et la société Dépôt Service Carrelages à payer à [O] [H] exerçant sous l'enseigne L'atelier [H], la somme de 1.257,66 € et à la compagnie MAF la somme de 48.508,66 €, outre intérêts au taux légal à compter des règlements respectifs soit du 19 décembre 2005 pour [O] [H] et du 24 octobre 2005 pour la compagnie MAF,

- rejeter toute argumentation contraire et toute demande formée à leur encontre,

- condamner in solidum la société Novembal, la société Dépôt Service Carrelages ainsi que la compagnie Axa France IARD, ou qui mieux le devra, aux dépens et à payer à la compagnie MAF et à [O] [H] une somme de 3.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu les dernières conclusions déposées par la SAS Novembal le 29 janvier 2015, qui demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a d'une part, dit non écrit l'article 10. 31 des conditions générales de la police d'assurance souscrite par la société Novembal auprès de la compagnie d'assurance UAP devenue AXA France IARD et en ce qu'il a d'autre part, condamné solidairement cette dernière ainsi que la compagnie AXA Corporate Solutions au titre de la police d'assurance responsabilité civile générale souscrite par la société Novembal à garantir dans les limites de ces contrats, notamment sous déduction des franchises, et de ce fait a relevé indemne leur assurée, la société Novembal, de toutes condamnations prononcées à son encontre en raison de l'isolant phonique Tercept utilisé par la société [T] dans le cadre du marché de travaux,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté [O] [H] et son assureur MAF de leur action en garantie et demande en remboursement dirigées contre la société Novembal et la société Dépôt Service Carrelages,

- Sur l'appel incident de la société Novembal à l'encontre du jugement du 4 mars 2010 :

- ne pas homologuer le rapport d'expertise d'[C] [Y] en ce qu'il a retenu la responsabilité exclusive de la société Novembal en sa qualité de fabricant du produit d'isolation phonique Tercept,

- dire qu'il ne s'agit pas en l'espèce d'un vice caché, ni d'une inadaptation du produit à l'usage auquel il était destiné, mais d'un problème portant sur la compatibilité du matériau choisi avec les exigences du marché,

- dire que le professionnel qu'est la société [T] n'a pas posé dans le respect des règles de l'art le produit Tercept d'isolation phonique des sols,

- dire que la société [T] et par conséquent son subrogé MAAF, devra conserver à sa charge les condamnations dont elle a fait l'objet aux termes du jugement du 3 juin 2005 rendu par le tribunal administratif de Grenoble, confirmé par la cour d'appel administrative le 6 juillet 2008,

- en conséquence débouter la compagnie MAAF et le cas échéant son assuré la société [T] de tout appel en garantie et action récursoire dirigés à l'encontre de la société Novembal,

- condamner la compagnie MAAF à rembourser à la société Novembal les sommes que celle-ci lui a d'ores et déjà versées au titre de l'exécution provisoire,

- très subsidiairement, au cas où la responsabilité de la société Novembal serait maintenue en tout ou partie, limiter à 187.640,05 € le quantum des réclamations de la compagnie MAAF dans le cadre de son action récursoire,

- calculer sur ce quantum la quote-part, le cas échéant, devant être supportée par la société Novembal,

- ordonner la restitution à la société Novembal du surplus versé au titre de l'exécution provisoire,

- dire la société Dépôt Service Carrelages irrecevable en son action récursoire en cause d'appel dirigée à l'encontre de la société Novembal,

- condamner in solidum les parties succombant à l'instance aux dépens et à payer à la société Novembal la somme de 3.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu les dernières conclusions déposées le 27 mars 2015 et notifiées par la SAS Decoceram anciennement dénommée Dépôt Service Carrelages, qui demande à la cour de :

- déclarer la société MAAF irrecevable en son action comme prescrite et rejeter les demandes de condamnation présentée à l'encontre de la société Decoceram,

- à titre subsidiaire, dire et juger que la société Decoceram n'a manqué à aucune de ses obligations contractuelles et que sa responsabilité délictuelle ne peut être également recherchée,

- réformer en conséquence le jugement entrepris en ce qu'il a retenu la responsabilité de la société Decoceram et débouter en conséquence la compagnie MAAF, [O] [H] et son assureur MAF de leurs demandes présentées à son encontre,

- à titre infiniment subsidiaire, si la cour devait entrer en voie de condamnation à son encontre, condamner la société Novembal à la garantir en principal, intérêts, frais et dépens,

- condamner la compagnie MAAF à lui payer la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouter les autres parties de toutes demandes, fins et prétentions contraires.

Vu les dernières conclusions déposées le 7 avril 2015 et notifiées par la MAAF qui demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance de Vienne du 4 mars 2010,

- en conséquence,

- dire et juger non prescrite l'action dirigée par la MAAF à l'encontre des sociétés Novembal, son assureur Axa France IARD et la société Dépôt Service Carrelages,

- dire et juger que la société [T] n'a commis aucune faute ayant participé à la réalisation du dommage

- dire et juger responsables les sociétés Novembal et Dépôt Service Carrelages des dommages occasionnés par le vice caché affectant l'isolant Tercept,

- dire et juger en conséquence des dernières tenues de garantir la société [T], dans les droits de laquelle la MAAF est subrogée, des condamnations prononcées à son encontre par le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 3 juin 2005, confirmé par la cour administrative d'appel de Grenoble,

- condamner solidairement les sociétés Novembal, son assureur Axa France IARD et la société Dépôt Service Carrelages à payer à la MAAF la somme de 227.657,71 € outre une indemnité de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS ET DECISION

I. Sur la prescription :

La société Décoceram conclut à la prescription de l'action de la MAAF qui aurait dû agir à son encontre avant le 12 octobre 1995, date d'expiration du délai de prescription décennale ayant comme point de départ la date de la dernière livraison intervenue le 11 octobre 1985.

En matière d'action récursoire en garantie des vices cachés, l'entrepreneur ne peut agir contre le vendeur et le fabricant avant d'avoir été lui-même assigné par le maître de l'ouvrage, le point de départ du bref délai qui lui est imparti par l'article 1648 du code civil dans sa rédaction alors applicable, étant constitué par la date de sa propre assignation alors même que le délai décennal de l'article L110-4 du code de commerce est suspendu jusqu'à ce que sa responsabilité ait été recherchée par le maître de l'ouvrage.

La MAAF n'a pas été attraite aux opérations d'expertise ordonnées par décisions de référé des 17 octobre 1995 et 14 mars 1996 et elle n'a été appelée en la cause que par assignation du 30 juin 1998, n'ayant pu avoir pleinement connaissance de la nécessité d'agir pour la défense de ses intérêts à la date du dépôt du rapport d'expertise le 28 juillet 1997 qui ne lui était pas contradictoire.

Son action introduite le 17 décembre 1998 à l'encontre de la société Dépôt Carrelage Service, soit moins de six mois après son appel en cause, a manifestement été introduite à bref délai et dans le délai de 10 ans de l'article L 110-4 du code de commerce.

Le moyen tiré de la prescription doit donc être rejeté, confirmant en cela la décision du premier juge.

II. Sur le vice caché :

L'expert [Y] a conclu que les fissures et soulèvements affectant les carrelages étaient dûs à l'isolant Tercept posé en sous-couche, dont la compressibilité s'était révélée trop forte et avait provoqué des affaissements ponctuels ; que la responsabilité des désordres est à imputer au fabricant de l'isolant qui a mis sur le marché un produit inadapté à l'usage auquel il le destinait, et dont les prescriptions techniques relatives au raccordement de lès par recouvrement sont directement à l'origine des affaissements et fissurations ; que si comme l'affirme le fabricant, le mortier de pause devait être complété par une armature, il fallait, étant celui connaissant le mieux le matériau, qu'il en indique clairement la nécessité dans sa notice technique, en dérogation aux articles du DTU auquel il se réfère ; que les responsabilités du maître d'oeuvre, de l'entrepreneur et du bureau de contrôle qui ont respecté les règles de l'art connues et les prescriptions du fabricant ne semblent pas devoir être retenues.

Les critiques apportées tardivement aux conclusions claires et circonstanciées de l'expert et alors même que toute nouvelle vérification est désormais impossible, ne peuvent être retenues en l'espèce.

Par des motifs pertinents que la cour adopte, le premier juge a justement retenu que, comme l'avaient déjà fait le tribunal de grande instance de Vienne dans son jugement du 7 septembre 2000 et le tribunal administratif de Grenoble dans son jugement du 3 juin 2005 confirmé en appel, la cause des désordres affectant les carrelages résulte bien de l'impropriété à l'usage prévu de l'isolant Tercept mis en place par la société [T], vendu par la société Dépôt Service Carrelages et fabriqué par la société Novembal.

Conformément à l'article 1641 du code civil, tant le fabricant que le vendeur sont tenus du vice caché des produits dont il est fait commerce ; comme l'a très justement retenu le premier juge la société Décoceram venant aux droits de la société Dépôt Service Carrelages ne peut se retrancher derrière son seul rôle de négociant, en soutenant qu'elle n'aurait pas eu un rôle de prescripteur ou de conseil.

Il convient donc de condamner la société Décoceram venant aux droits de la société Dépôt Service Carrelages, vendeur et la société Novembal, fabricant et fournisseur, à garantir la MAAF, subrogée dans les droits de son assuré la société [T] contre laquelle aucune faute n'est caractérisée, des condamnations prononcées contre cette dernière par le tribunal administratif de Grenoble le 3 juin 1995.

Il convient en conséquence de condamner les sociétés Dépôt Service Carrelages et Novembal à payer à la MAAF la somme de 227.657,71 € réglée par cette dernière, ainsi décomposée :

- condamnation à titre principal après déduction du coût de la réfection des parquets (désordre non garanti) : 285.776,42 €,

- article L 761 du code de justice administrative : 1.500 €,

- part incombant à la société [T] après déduction de la franchise contractuelle : 199.264,10 €,

- Intérêts légaux : 28.393,61 €.

En cause d'appel, la société Décoceram venant aux droits de la société Dépôt Service Carrelages demande à la cour, à titre infiniment subsidiaire, si la juridiction devait entrer en voie de condamnation à son encontre, de condamner en tout état de cause la société Novembal à la garantir en principal, intérêts, frais et dépens.

Une telle demande, qui n'avait pas été présentée devant le premier juge, constitue une demande nouvelle au sens des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile et est en cela irrecevable.

III. Sur la garantie due à la société Novembal par son assureur AXA :

Ainsi que l'a justement relevé le premier juge, la société Novembal a souscrit deux polices d'assurance.

Une police d'assurance responsabilité professionnelle des fabricants et assimilés de matériaux de construction, convenue avec l'UAP devenu Axa Courtage aujourd'hui Axa France IARD, concernant spécialement l'isolant Tercept, prenant effet le 3 octobre 1984, a été résiliée le 31 décembre 1987.

La loi du 1er août 2003 dite «sécurité financière» ne peut-être qualifiée d'interprétative ; elle ne contient aucune disposition quant à son éventuelle rétroactivité ; elle ne saurait donc régir les effets des contrats conclus et résiliés antérieurement, tel le cas en l'espèce et il convient donc d'écarter son application invoquée par l'assureur Axa France IARD.

Comme l'a justement considéré le premier juge dans des termes pertinents que la cour adopte, il convient de déclarer non écrite la clause réclamation 10-1 de la police d'assurance et de dire que l'assureur Axa France IARD, successeur de la compagnie UAP, doit prendre en charge le sinistre dont l'origine est la fourniture de l'isolant Tercept en 1986, époque où le contrat était en vigueur.

L'action directe de la société MAAF contre l'assureur de la société Novembal, Axa France IARD, est donc recevable de même que l'action en garantie de l'assuré Novembal contre son assureur Axa France IARD, dans les limites du contrat (contrat de garantie 3 millions de francs en 1985) et sous déduction de la franchise contractuelle (10 % du sinistre avec un minimum de 2.000 francs et un maximum de 10.000 francs).

Une seconde police générale d'assurance responsabilité civile avait été contractée par la société Novembal auprès de la compagnie UAP devenue Axa Global Risks aujourd'hui Axa Corporate Solutions Assurances ; cette police prenait effet le 1er janvier 1988 et a été résiliée le 31 décembre 1996.

Aucune critique n'est formulée en cause d'appel à l'encontre des dispositions du jugement condamnant la compagnie AXA Corporate Solutions Assurances à garantir la société Novembal dans les limites du contrat (en 1988 20 millions de francs par sinistre et par année d'assurance) et sous déduction de la franchise contractuelle (50.000 francs par sinistre) ; il convient en conséquence de confirmer le jugement de ces chefs.

IV. Sur les demandes de [O] [H] et de la MAF :

Le tribunal administratif, confirmé en appel, a retenu la responsabilité de plein droit des constructeurs intervenus à l'opération, à savoir le maître d'oeuvre [H], l'entrepreneur [T] et le contrôleur technique Veritas sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil.

La juridiction administrative a par ailleurs, dans les rapports des intervenants à la construction entre eux, estimé que la faute de la société [T] qui avait substitué à l'isolant type 'assour' prévu par le maître d'oeuvre, le feutre Tercept inadapté à l'usage pour lequel on le destinait, était prépondérante par rapport à celle de l'architecte qui avait commis un défaut de surveillance et un défaut de réserve sur l'emploi du matériau inadapté, fixant dans ces conditions la part de responsabilité de l'atelier [H] à 30 %.

La répartition de responsabilité ainsi opérée par la juridiction administrative entre les constructeurs ne peut préjudicier des propres recours en garantie initiés par ces derniers, contre le véritable responsable à l'origine du désordre.

En l'espèce il s'avère que le vice était totalement caché et inhérent au matériau vendu, dont la notice s'est avérée inappropriée et mensongère quant à l'utilisation du matériau.

L'isolantTercept s'est ainsi révélé inadapté à l'usage auquel il était destiné, alors même qu'il était mis en oeuvre par la société [T] aux lieu et place d'un isolant de type 'assour' que la maîtrise d'oeuvre avait initialement préconisé.

Cette substitution s'est néanmoins avérée possible aux termes du CCTP et a d'ailleurs été avalisée par le bureau Veritas, dans la mesure où, ainsi qu'il ressort des conclusions de l'expert, le matériau était présenté comme similaire à celui prescrit.

L'expert [Y] a pu constater que la conception et la réalisation du carrelage directement sur l'isolant était conforme aux règles de l'art en vigueur à l'époque de la construction, ainsi qu'aux prescriptions du fabricant de l'isolant.

La société Novembal ne peut donc sérieusement soutenir que les désordres proviendraient nécessairement d'un défaut de pose dans la mesure où aucune nécessité d'une armature n'était préconisée par la notice technique, en dérogation aux articles du DTU de référence d'octobre 1973.

Il s'ensuit qu'aucune faute n'est caractérisée à l'encontre du maître d'oeuvre au titre d'un défaut de surveillance ou absence de réserves quant au choix de l'isolant en application de l'article 1382 du code civil applicable dans les rapports de celui-ci avec les fournisseurs, fabricants et vendeurs du feutre isolant.

[O] [H] exerçant sous l'enseigne l'atelier [H] et son assureur la compagnie MAF sont donc bien-fondés à solliciter la condamnation solidaire de la société Novembal, de son assureur Axa France IARD et de la société Décoceram venant aux droits de la société Dépôt Service Carrelage, à rembourser à ces derniers la somme de 49.766,32 € versés en exécution du jugement rendu par le tribunal administratif de Grenoble le 3 juin 2005.

V. Sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile :

L'équité et la situation économique des parties commandent la condamnation in solidum des sociétés Novembal et son assureur Axa France IARD et Decoceram venant au droit de la société Dépôt Service Carrelages à payer à la société MAAF d'une part et à [O] [H] et la société MAF d'autre part, une indemnité de 3.000 € chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Réforme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Vienne le 4 mars 2010 en ce qu'il a débouté [O] [H] et son assureur MAF de leur action en garantie dirigée contre les sociétés Dépôt Service Carrelages et Novembal, au-delà des condamnations déjà prononcées par le tribunal administratif de Grenoble le 3 juin 2005 et dit que [O] [H] et son assureur MAF conserveront la charge des dépens exposés par eux,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne solidairement la société Novembal et son assureur Axa France IARD et la société Décoceram venant aux droits de la société Dépôt Service Carrelages, a rembourser à [O] [H] et son assureur MAF la somme de 49.766,32 € versée en exécution du jugement rendu par le tribunal administratif de Grenoble le 3 juin 2005,

Déclare irrecevable comme nouvelle la demande en garantie présentée en cause d'appel par la société Décoceram venant aux droits de la société Dépôt Service Carrelages à l'encontre de la société Novembal,

Condamne solidairement la société Novembal et son assureur Axa France IARD et la société Décoceram venant aux droits de la société Dépôt Service Carrelages, à payer à la MAAF d'une part et à [O] [H] et son assureur MAF d'autre part, une somme de 3.000 € chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les demandes contraires ou plus amples des parties,

Condamne solidairement la société Novembal et son assureur Axa France IARD et la société Décoceram venant aux droits de la société Dépôt Service Carrelages aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, par ceux des mandataires des parties qui en ont fait la demande.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

Joëlle POITOUXMichel GAGET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 14/05022
Date de la décision : 21/01/2016

Références :

Cour d'appel de Lyon 01, arrêt n°14/05022 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-01-21;14.05022 ?
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